22/03/2024 (2024-03-22)
[Illustration : Photo: Sergei Vedyashkin Agence de presse de Moscou via Associated Press]
Par Iurie Rosca — 22 mars 2024
L’horrible acte terroriste perpétré ce soir dans la capitale russe, Moscou, a ébranlé le monde entier. Seuls les fous de Kiev jubilent. Il fallait s’y attendre. Les assassinats des journalistes Daria Douguine et Vladlen Tatarsky, les bombardements incessants des régions limitrophes de l’Ukraine, qui font quotidiennement des victimes civiles, les attaques de drones sur un certain nombre d’usines stratégiques, d’aéroports, etc., mais aussi sur le Kremlin, n’ont cependant pas conduit à des mesures adaptées à un état de guerre. Selon les autorités russes, il n’y a pas d’Opération Militaire Spéciale [OMS] en Ukraine, qui est une opération de type policier de durée et de portée limitées.
Pour des raisons difficilement compréhensibles et justifiables, le Kremlin a préféré imposer deux réalités parallèles. L’une sur le front, avec toutes les horreurs de la guerre, et l’autre à l’intérieur de la Russie. Les gens ont continué à vivre comme en temps de paix, à aller au concert, en vacances, à faire du shopping, etc. Les bars et les boîtes de nuit sont remplis de jeunes gens passionnés par la culture de masse, les événements sportifs se déroulent en grande pompe et attirent les foules. Le spectacle doit continuer.
Il est difficile de ne pas remarquer la terrible dissonance cognitive qui marque la vie quotidienne en Russie d’une manière très étrange. Mais le comble du cynisme et de l’hypocrisie des dirigeants pendant les deux années de guerre était les spectacles politiques, accompagnés de musique, de feux d’artifice et de danses des partisans de l’inamovible et toujours jeune sauveur du pays, Poutine.
Souvenez-vous de certains spectacles très étranges dans le contexte de la Russie en pleine guerre. Par exemple, l’admission des quatre régions de Donetsk, Lougansk, Zaporozhye et Kherson dans l’État russe, alors que des affrontements militaires avaient lieu sur leur territoire et qu’aucune des quatre régions n’était entièrement sous contrôle russe. Quelle atmosphère festive à Moscou ! Rassemblement et concert sur la Place Rouge, stars du show-biz russe, discours enflammé de Poutine. N’oublions pas que toute cette histoire s’est accompagnée de l’organisation de référendums dans les régions bombardées en permanence par les troupes ukrainiennes.
Les occasions de se divertir et de s’amuser avec pour toile de fond les grandes réalisations des dirigeants de l’État ne manquent pas. Bien entendu, le point culminant de ce barrage ininterrompu de spectacles politiques a été la récente campagne électorale présidentielle elle-même. D’ailleurs, toutes les apparences légales ont été respectées. Le report d’une élection, quelle qu’elle soit, n’étant pas spécifique à la guerre, le Kremlin, fidèle défenseur des valeurs démocratiques et de l’État de droit, ne pouvait se permettre le luxe d’une gestion abusive ou antidémocratique du pays.
Mais la liesse généralisée, ou au moins simulée avec succès est immédiatement suivie d’une immense tragédie. Qui en est responsable ? Bien sûr, les terroristes, le régime de Kiev et l’OTAN. Mais où est la vision stratégique des dirigeants de ce pays ? Pourquoi, après tant d’actes terroristes ayant entraîné des pertes humaines, tous les rassemblements publics impliquant un grand nombre de personnes n’ont-ils pas été annulés ? Pourquoi n’a-t-on pas imposé d’autres mesures qui sont naturelles pour un pays en guerre ?
Ne nous demandons pas pourquoi il y a eu des pertes humaines colossales sur le front et des résultats discutables du point de vue des intérêts russes. Ne nous étonnons pas non plus que l’économie russe n’ait pas été entièrement mobilisée pour se subordonner aux intérêts de la victoire sur le front. Il en va de même pour la raison pour laquelle il n’y a pas de mobilisation générale pour mener l’OMS à une conclusion rapide et fructueuse. Est-ce dans la tradition militaire russe ? Non. Mais la civilisation de l’argent, la mammoncratie, a pénétré profondément la société russe, en particulier au niveau de l’élite dirigeante.
Poutine et son équipe, même s’ils se présentent comme des hommes d’État guidés par les intérêts nationaux suprêmes, sont plus susceptibles d’être en proie à une mentalité de marchands. Ils ont réussi à maintenir le pays à flot pendant deux décennies. Mais en période de crise majeure, de guerre avec l’Occident collectif, la pénurie de gestionnaires de crise est devenue frappante. Il en va de même pour la dépendance des dirigeants à l’égard des grands oligarques qui exercent une influence colossale sur le pouvoir politique.
Certains analystes plus suspicieux pourraient suggérer que l’acte terroriste du 22 mars à Moscou est en fait une opération sous faux drapeau. L’objectif d’une telle opération serait similaire à celui de l’Inside Job du 11 septembre, à savoir supprimer définitivement toutes les libertés civiles, mettre en place une surveillance généralisée et instaurer un État policier. Mais que cette action criminelle ait ou non un lien avec le pouvoir réel à Moscou, elle entraînera des changements majeurs.
La troisième guerre mondiale, qui, selon de nombreux analystes, a commencé il y a deux ans avec l’intervention militaire russe en Ukraine, entre dans une nouvelle phase. Beaucoup plus dangereuse, voire fatale pour l’Humanité. Les véritables maîtres du jeu international ont besoin de la guerre, du terrorisme, de la dévastation économique et du désastre social. Ce n’est qu’ainsi qu’un chaos généralisé à l’échelle de continents entiers pourra être atteint, aboutissant à l’instauration du Nouvel Ordre International.
Le spectacle macabre prend des dimensions de plus en plus effrayantes. Attachez vos ceintures et retirez vos lunettes roses. L’élection de Poutine pour un nouveau mandat à la tête de l’État pourrait être une victoire à la Pyrrhus, non seulement pour lui et son équipe, mais aussi pour l’ensemble de l’Humanité.
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