Le Tétralogue — Roman — Chapitre 31

25/01/2023 (2023-01-25)

[Voir :
Le Tétralogue — Roman — Prologue & Chapitre 1
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 2
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 3
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 4
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 5
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 6
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 7
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 8
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 9
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 10
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 11
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 12
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 13
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Le Tétralogue — Roman — Chapitre 18
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 19
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 20
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 21
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Le Tétralogue — Roman — Chapitre 29
Le Tétralogue — Roman — Chapitre 30]

Par Joseph Stroberg

31 — Partie de chasse

Tulvarn et Reevirn arrivaient maintenant en vue d’une légère éminence qui se démarquait de l’aspect généralement plat du paysage. La grimper leur demanda presque la totalité de l’énergie qu’il leur restait, mais ils pensaient que cela leur donnerait une chance de pouvoir mieux observer les environs. Bien leur en prit, car dès qu’ils purent observer l’autre côté, ils aperçurent en contrebas une large oasis bordée d’arbres et de plantes variées et de tailles diverses. Et comble de chance, un troupeau de buldorgs était occupé à boire sur le bord de l’étendue d’eau ! Sur un signe du chasseur, ils se séparèrent pour prendre celui-ci en tenailles afin de limiter ses possibilités de fuite lorsqu’ils se trouveraient à sa portée. Comme ils ne voulaient pas attirer l’attention, ils en approchèrent en alternant marche à quatre pattes et reptation, celle-ci dès qu’un des animaux tournait sa tête dans leur direction, ce qui arrivait assez souvent sur le nombre de ces herbivores présents — une bonne vingtaine. Par le Grand Satchan, ils arriveraient bien planter une flèche ou le sabre dans le flanc d’au moins l’un d’entre eux ! En tout cas, ils l’espéraient vivement. Un léger vent soufflait en direction du troupeau, et cela augmentait donc la probabilité de ne pas s’en faire détecter trop tôt.

Ce que n’avaient pas prévu les deux compagnons était la proximité d’un autre type de chasseurs, des animaux qu’ils ne connaissaient pas davantage que la plupart de ceux déjà rencontrés sur ce continent. Ceux-ci avaient une aptitude particulière à se fondre dans le paysage, avec un pelage qui prenait non seulement les nuances de couleur du sol, mais en plus avec des poils très nombreux et très fins qui pouvaient s’organiser pour imiter la texture de petites roches aussi bien que de courtes herbes, selon ce qui était le plus souvent rencontré dans le coin. Et ils chassaient en bande organisée. À peu près à la même vitesse de progression que les deux Véliens, ils arrivaient en trois groupes d’environ cinq d’entre eux : le premier en provenance de la gauche et qui tendait à longer le plan d’eau ; le second en provenance de la droite et qui procédait de même depuis l’opposé ; et le troisième qui se trouvait approximativement entre le moine et le chasseur. Pour l’instant, ces trois groupes d’animaux carnassiers se trouvaient encore trop éloignés pour que les deux compagnons puissent les percevoir, sauf peut-être celui du centre s’ils avaient eu l’idée de tourner leur regard dans cette direction presque perpendiculaire à leur progression. Et pour y parvenir, il leur aurait fallu démontrer une vigilance et une acuité d’observation que la fatigue actuelle leur interdisait.

Alors que Reevirn se trouvait maintenant à portée de flèche et qu’il levait lentement son arc pour ajuster le plus proche buldorg, il assista incrédule à la débandade du troupeau alors que celui-ci semblait être de manière incompréhensible attaqué par des morceaux du sol qui jaillissaient depuis trois directions différentes. Pas très loin sur sa droite, Tulvarn écarquilla lui aussi les yeux, incapable de comprendre ce qui se déroulait devant lui. Les deux chasseurs tournèrent alors leur regard interrogatif l’un vers l’autre, dans l’espoir que l’un d’eux puisse trouver une explication à ce spectacle. Mais voyant que leur gibier se dispersait et qu’ils risquaient de se retrouver bredouilles, Tulvarn sortit son sabre et se mit à courir en avant, épuisant rapidement le reste de ses faibles forces. Reevirn l’imita aussitôt, tenant l’arc de sa main gauche et la flèche dans sa droite. Alors qu’il se trouvait encore à plusieurs dizaines de pas du buldorg le plus retardataire, dans un geste de désespoir le moine lança avec force (du moins ce qu’il lui en restait) son sabre en direction de l’animal. Dans le même temps, le chasseur banda son arc et tira instinctivement en direction de la même cible. Celle-ci fut transpercée au niveau du thorax et le sabre lui trancha presque totalement le cou. Malheureusement, l’un des carnassiers présents aussi sur les lieux n’apprécia pas de risquer ainsi de perdre son repas et se retourna brusquement en direction de Tulvarn. Celui-ci ne dût sa vie sauve qu’à un incroyable réflexe de Reevirn qui eut tout juste le temps de tirer une seconde flèche avant de tomber épuisé à terre. L’animal caméléonien la reçut au milieu du front et tomba heureusement raide mort. Le moine, à peine plus valide que son compagnon, sentant le danger possible, se saisit rapidement de son arme tombée un peu plus loin, et la mania avec adresse alors qu’il se voyait soudainement assailli par une horde de créatures difficiles à distinguer du sol environnant peu herbeux. Comme dans un rêve, les yeux fermés, puisant une énergie d’il ne savait où, il ajusta ses coups d’une manière si incroyablement précise que pas une tête animale ne demeura en place. Si son ami avait pu observer la scène, il aurait assisté à une sorte de danse gracieuse, à la fois fluide et empreinte de puissance, mais impitoyablement mortelle. Les corps étaient tombés au sol les uns après les autres, et ce faisant avaient retrouvé leur apparence véritable : des masses poilues de couleur rouge sombre dont le sang finissait de couler sur la terre rocheuse parsemée de rares herbes courtes. Le troupeau survivant de buldorg avait lui disparu entre temps au loin. À la fin de cette magistrale prestation dont il fut à peine conscient, le moine s’effondra à son tour. Dans le flux du temps planétaire, le carnage n’avait duré qu’un bref instant. Mais le sommeil des deux compagnons risquait de s’éterniser jusqu’à devenir définitif, car s’ils avaient pu trouver de la nourriture, encore leur faudrait-il maintenant la manger.

(Suite : ​Le Tétralogue — Roman — Chapitre 32)

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