Samedi à l’aube, un groupe d’ouvriers érythréens posait du gazon le long d’un chemin à Ramat Aviv vers le parc Yarkon (au nord de Tel-Aviv) entre le centre Yitzhak Rabin, le siège de l’unité du porte-parole de Tsahal et le siège d’une grande agence militaire. À la fin de la journée, tout était vert. Pendant ce temps, d’autres demandeurs d’asile originaires d’Afrique, vêtus de sweats à capuche et armés de pinces à déchets, débarrassaient le parc de ses détritus, pour le plus grand plaisir de ses visiteurs. Ce sont eux qui portent le fardeau du nettoyage et de l’embellissement d’Israël.
Tôt le matin, au quatrième jour du ramadan, des dizaines de milliers de travailleurs palestiniens en plein jeûne étaient déjà sur les échafaudages des gratte-ciel et sur les routes et les ponts qu’ils construisent. Ils ont quitté leur domicile au milieu de la nuit, ont enduré le passage long, difficile et humiliant des points de contrôle, ont accompagné leurs patrons exploiteurs sur leurs chantiers, où ils ont risqué leur vie en travaillant dans des conditions dangereuses, et sont rentrés chez eux le soir, épuisés, affamés et n’ayant droit à aucun respect. Ils sont les bâtisseurs de ce pays, ils en portent le fardeau, peut-être même plus que tous ceux qui sont reconnus comme tels. Personne ne pense à les remercier pour quoi que ce soit.
Lorsque l’ancien chef du Shin Bet, Nadav Argaman, a déclaré à la journaliste Ilana Dayan que l’État « appartient à tous ceux qui en assument la charge* », il ne parlait pas d’eux. Ni des éboueurs érythréens ni des bâtisseurs palestiniens. Ses remarques s’adressaient principalement aux Haredim, comme d’habitude ici, les derniers à ne pas partager le fardeau.
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