Jordan Bardella et le redressement de la France ou la quadrature du cercle…

06/11/2022 (2022-11-06)

Par Lucien SA Oulahbib

Sa jeunesse et sa verve sur un ton clair et un bel aloi propulsent certainement toute une dynamique de fraîcheur à un parti qui aurait pu être au pouvoir depuis longtemps s’il n’y avait pas (eu) tant d’atermoiements stratégiques et de nuits des longs couteaux (élimination de Mégret et de Marion) l’un voulant arrondir les angles rhétoriques tout en élargissant le spectre idéologique, mais ce sur des bases plus ethno-différentialistes que républicaines et bonapartistes (Le Pen père et Mégret se sont d’ailleurs rencontrés dernièrement, ou la paix des braves ?…), la seconde cherchant à maintenir, semble-t-il, l’idée d’État plutôt garant des libertés que formateur exclusif de celles-ci, tout en renouant avec les thèmes de la campagne de 2002 quant à la protection démographique par exemple…

Le premier, Mégret, défendant au fond le legs du De Gaulle maurassien refusant de faire à terme de Colombey la ville des « deux mosquées » d’où son malheureux « je vous ai compris » de 58 (car il n’est pas dit que les « masses » dites « algériennes » voulaient du joug FLN nassériste, relire Jacques Soustelle partisan d’un Empire fédéral, ici p. 136 et suivantes) la seconde, Marion désormais Maréchal, défendant plutôt celui d’Ordre Nouveau de Madelin, Longuet, Devedjian, ou cette intransigeance anticommuniste qui n’a rien à voir avec le fascisme et l’anarchisme antisémite (ni Drumont ni Proudhon exit La vieille Taupe) ni non plus avec le nazisme ou national-socialisme reprochant « seulement » au bolchevisme sa direction juive tout en s’inventant des racines « aryennes » puisque celles des anciens germains et des dieux vikings ne semblaient pas les satisfaire ; Jean-Marie Le Pen oscillait, semble-t-il, entre germanité franque et celtitude royaliste (Maurras étant anti-germain cependant d’où la présence de nombre de royalistes à Londres alors que les communistes faisaient allégeance au Reich jusqu’en 41) tant il semblait avoir été bercé par un germanisme culturel et sa musique militaire cherchant d’hypothétiques racines communes entre Celtes et Francs qui sont certes des germains, mais christianisés et romanisés depuis Clovis, et un anticommunisme anti-tiers-mondiste mondialisant (pointant à l’horizon) rompant cependant à la fois avec l’atlantisme et l’antisémitisme de la Vieille Taupe,… Le Pen acceptant cependant la greffe avec Ordre Nouveau plus anticommuniste et surtout anti-gauchiste qu’anti-atlantiste, Assas faisant (mal) contrepoids à Nanterre Jussieu et Censier….

Bardella, dans son discours d’intronisation, en a effleuré l’historique en ergotant rapidement sur les « éclaireurs » et les « bâtisseurs » semblant les opposer alors que les uns ne vont pas sans les autres, les corps d’armée en branle avançant sur la route éclairée précisément par l’avant-garde ; sans oublier cependant l’arrière-garde, c’est-à-dire autrefois Roland de Roncevaux (hélas trahi) et l’on entend encore le son de son cor (songeant à Angélique aussi sans doute, mais elle préféra le Sarrasin/Amazigh Médor…) tout autant que s’entendent, pour ceux qui ont la fibre, les sons de la voix revancharde de l’évêque Cauchon condamnant la Jeanne et qui, aujourd’hui, aurait condamné Raoult ou Perronne (ses clones pullulant partout en censeurs « anti-complotistes ») ; il n’empêche, et Bardella ne devrait pas l’oublier, que le premier « parti » de France restent sans coup férir les « abstentionnistes », la majorité en réalité, et les « bâtisseurs » auraient pourtant bien besoin d’elle….

Sauf que… l’on chercherait, en vain, et hors des généralités sur le « souverainisme », ce qui permettrait dans ce discours du trône de séduire ces déçus du suffrage dit « universel ». Le maire de Perpignan voulait d’ailleurs aller encore plus loin dans le gnangnan ronflant du « parti de gouvernement », il n’a pas été écouté, mais le contenu programmatique de son vainqueur n’est pas probant pour autant s’il s’agit de « rassembler » réellement « le peuple de France » (rien sur les soignants suspendus, si peu sur la destruction du nucléaire et de l’agriculture alors que la France était autrefois exportatrice d’électricité et de denrées…).

Prenons un seul point qui pourrait faire bouger cette « majorité silencieuse » d’abstentionnistes, qui fut à l’origine du « gaucho-lepénisme » et qui aura précisément émergé dans sa lancinante acuité avec ce vrai-faux clash parlementaire du « qu’ils retournent en Afrique » d’il y a quelques jours, avidement lu évidemment (faute de mieux) par l’alliance anti-France (Nupes-Renaissance-LR) comme propos « raciste », confondant oral et écrit, le « il » de l’orateur (noir de la Nupes) et le « ils » du bateau ivre d’espoir voguant sur la mer de larmes d’abandonnés ballottés entre la mère patrie qui ne peut les nourrir et les aimer (tant l’argent est détourné par leur mafia au pouvoir) et une « communauté internationale » introuvable cachant son inexistence par la surenchère hyper-communiste de la lumpen-intelligentsia gauchiste devenue aujourd’hui dans le vide spirituel ambiant ce nouvel étendard de l’affairisme scientiste, hygiéniste, apatride. Or, ce point nodal, crucial, civilisationnel, etc., etc. est là et bien là depuis des lustres, mais personne ne veut vraiment s’y atteler dans toute sa cruelle réalité…

Cette faille fractale en effet au lieu d’être faussement colmatée par le « ni-ni » du surplace oscillant entre immobilisme et pourrissement à l’instar de ces points de fixation aux portes de Paris et sous les ponts bidonvilles des grandes villes devrait être élargie afin d’y enfoncer avec force le fer rouge de la colère en gilet jaune au lieu de la laisser errer dans les mains moites des révolutionnaires en peau de lapin, qu’ils s’appellent « insoumis », « black blocs » ou « ethno-identitaires » (soutenant, tous, « la » cause palestinienne contre le peuple « déicide » ou « cupide ») bondissant de démagogie en misérabilisme du « clochard » global alors qu’un Mélenchon soutient une UE ouverte à tous les vents trahissant de fait la trame ontologique de la nation française dépassant depuis son émergence la seule notion de « race » comme l’indiquait Bainville à la suite de Renan et aussi de Barrès (ayant vu dans les tranchées de 14 couler le sang juif — Hitler l’avait vu aussi, mais n’en eut cure se contentant cependant d’admettre quelques exceptions dans les dénaturalisations, du moins jusqu’en 38) ; d’où le fait, pour en revenir à la France, et dans une optique nationale républicaine (au sens grec) en prise avec les défis d’aujourd’hui de se demander s’il ne faudrait pas maintenir malgré tout le droit du sol, issu du XVIe siècle, et ce parce qu’il nous faut au vu, déjà, de l’implosion démographique une France de cent millions d’habitants.

Mais on peut aussi refuser ce chantage démographique à la Merkel (voir en infra le point 2). On peut en effet plaider que l’on n’a pas besoin d’une immigration pour retrouver une puissance de feu retrouvée au sein bien sûr d’une école d’une industrie une agriculture forte (nucléaire, agriculture, jeux vidéo…) pour contrebalancer une Allemagne faisant le pari contraire, car désireuse à nouveau de prendre le grand large avec ses pays satellites ; ce qui implique cependant pour elle un élagage sérieux de ce point empoisonnant (et connu depuis les Grecs entre Citoyens et Métèques) qui pourrait être possible entre une immigration désireuse réellement d’intégrer le giron allemand puis de s’y assimiler et ceux qui le refusent nécessitant alors leur départ, sauf qu’en Allemagne les forces écolo-défaitistes pro globaliste ne veulent pas trancher, tout comme en France.

Ce qui implique en fait deux possibilités à la fois contradictoires et dialectiques (au sens de pouvoir être dépassées au sens d’un aufhebung) qu’un Bardella devrait sérieusement étudier s’il veut devenir le leader d’un parti national de « gouvernement » et non plus seulement « d’opposition » (à sa majesté c’est-à-dire mollassonne).

  • 1) dans le camp du « oui », du moins dans celui de l’immigration dite « choisie » et non pas sans-frontiéristes (ce qui exclue la Nupes et Renaissance), les obtentions de droits de séjour pourraient être même accélérées au lieu de traîner sur des années (sans attendre la démagogie d’un Darmanin) si et seulement si les demandeurs réguliers étaient en mesure de travailler sur le champ dans les métiers dits « en tension » (aides ménagères, nettoyage, agriculture saisonnière, logistique — routiers… —, restauration, gardiennage, mais aussi informatique enseignement et santé), ou dans ceux qu’ils maîtrisent déjà ; tout en sachant cependant que si au bout de cinq ans la nationalité française n’est pas demandée le retour aux frontières serait exigé. Car on ne peut plus se permettre de rester en France dans la mentalité du « bled » propulsant des « codes » antinomiques avec ceux forgés en France, en Europe ou acquis civilisationnels synthétisés en « art de vivre », par des décennies de luttes culturelles et d’affinements spirituels.

    Cela permettrait d’ailleurs de répondre à deux objections :
    • a) vu l’état actuel du marché du travail (inadéquation entre offre et demande non pourvues en permanence. Un exemple : l’Occitanie) et sa protection sociale très coûteuse (voir plus loin) autant permettre à ceux qui acceptent ce « compromis historique » d’avoir des papiers rapidement ;
    • b) aucune condamnation ne doit être cependant comptabilisée lors de ce laps de temps.
  • 2) À l’opposé, dans le camp du « non » qui envisage donc une immigration zéro, il lui faut dans ce cas penser à la manière de répondre aux demandes des métiers dits « sous tension », et ce déjà en sachant qu’ils devraient être bien mieux rémunérés afin d’éviter justement d’avoir recours à une telle immigration. Sauf que cela impliquerait au préalable que l’on revoit la question, non seulement des impôts de production, mais aussi — en particulier pour les artisans — du poids des cotisations sociales afin que la réduction des coûts d’un côté puisse permettre d’augmenter le salaire net de l’autre et donc de rendre plus attrayant le métier couplé à une formation afin que l’ascenseur social puisse permettre une élévation statutaire permanente au lieu de rester smicards à vie comme le désirent au fond la Nupes et Renaissance. Un fonds commun de solidarité des professions concernées pourrait par ailleurs voir le jour afin de prendre en charge le différentiel de cotisations sociales entre petites moyennes et grandes entreprises, mais ceci cependant ne peut être que partiel, car quand bien même il y aurait un tel « bouclier », ces cotisations devraient être assises de façon durable sur une assiette financière bien plus large que les seules cotisations par répartition ou sur l’impôt hyper progressif généralisé (une CSG en hausse permanente, même mieux répartie comme le propose Piketty de la Nupes) du moins si l’on veut comprimer le poids des cotisations pour augmenter le salaire net, sans pour autant augmenter les impôts ni le prix de vente ni diminuer la qualité des services sociaux….

Comment faire ?… Car penser taxer les « super profits » et ratiboiser les « riches » (ou les exterminer) ne serait qu’un fusil à deux coups comme on l’a vu naguère en Russie, aujourd’hui au Venezuela, Mozambique (avec l’explosion des mafias), et ce surtout si l’implosion de la structure économique liée à une globalisation affairiste, et la transformation bureaucratique des racines politiques et sociales (empilement des strates décisionnels, surplace étatique) ne permettent pas à la base de rendre les conditions préalables du redressement plus pérennes…

C’est d’ailleurs là le malheur de la Cotisation sociale à la française qui s’avère être bien plus chère que la moyenne, car entre payer par exemple trois cents à sept cents euros par mois selon la ventilation moyenne des salaires, ce qui est le système actuel, et allouer à l’opposé une somme bien moindre à la même couverture sociale, mais « nourrie » quotidiennement par des intérêts actionnariaux, et ce sans dégradation de la qualité de prestation, il y a bien là une nette différence effective. Et celle-ci, contrairement aux légendes urbaines, n’implique pas que l’on soit moins bien « couvert » en Suisse, voire aux USA, même si l’on travaille plus longtemps, car les fameuses « franchises » que l’on critique afin d’expliquer à l’opposé que cela ne coûte « rien » lorsque l’on va à l’hôpital en France, cette comparaison oublie que ce « rien » coûte des centaines d’euros par mois sans parler de l’impôt pris à la « source ». De plus ces « franchises » si décriées (hors mutuelles d’entreprise) sont en réalité bien plus soutenables lorsque l’on a moins de soixante ans puisque les passages à l’hôpital sont plus rares (sauf aujourd’hui avec l’augmentation de la mort subite de l’adulte).

En fait, et toujours dans le cadre de cette hypothèse qui suppose une immigration zéro impliquant que l’on paye bien mieux les métiers à « tension », mais que, dans ce cas, l’on ventilerait autrement les coûts de revient en matière de cotisations sociales, il s’avère que la réponse pauvrement comptable des faux libéraux au Pouvoir ne va même pas dans cette direction d’une « privatisation » participative en fait via des fonds de pension à la française (intégrant un fonds commun de garantie pour les soins lourds par exemple). En effet, l’équipe au Pouvoir ne fait que réduire les dépenses d’investissement de santé du quotidien, tout en dépensant dans des achats affairistes comme ceux liés à la vraie-fausse injection anti-Covid19, ou alors en privatisant, mais de façon restreinte au bénéfice de quelques groupes étrangers « amis » (puisque les fonds de pension français n’existent pas). On fait par exemple des gorges chaudes sur le méchant BlackRock tout en refusant d’asseoir les cotisations sociales sur une capitalisation à large échelle, alors que la gestion de fonds de pension à la française — qu’un Charles Gave et un Olivier Delamarche se feraient forts de faire fonctionner à merveille — permettrait d’élargir l’assiette et donc de réduire les coûts d’un côté tout en augmentant le salaire net de l’autre, du moins s’il n’y avait pas à gauche comme à droite (extrêmes compris) une incompréhension totale du rôle positif de la capitalisation pour l’actionnariat populaire comme d’ailleurs pour celui du salaire complet (avec un filet de sécurité pour les plus démunis).

Certes, s’il n’y avait pas autant de gabegie au sein d’une situation internationale de plus en plus délétère scandée par la stagflation et la guerre d’usure contre « l’autre monde » composé de tous ceux, aussi disparates et ennemis soient-ils, qui refusent le diktat de l’Empire du faux (universel dévoyé, science manipulée, solidarité confisquée), la France pourrait avoir plus de marge de manœuvre, quitte même à combiner les deux opposés au sens de promouvoir d’abord un moratoire sur l’immigration, validé par référendum, le temps de remettre les compteurs de la nation à zéro, de mettre à niveau tous les secteurs défaillants pour ensuite opérer à une immigration « choisie » s’il y a lieu…

En fait, si l’on n’opère ni l’un ni l’autre, ni complète ouverture, les sans papiers le restant des années sans être reconduits, ou l’immobilisme délétère, sans pour autant s’attaquer aux racines du mal, à savoir le coût trop important des cotisations sociales qui grève le salaire net, décourageant l’emploi (en particulier dans les métiers difficiles), cela veut dire qu’il existe en sourdine la volonté de faire rentrer massivement une immigration non contrôlée, mais proviendrait bien moins d’une demande économique que politique. Car l’on peut fort bien réformer l’assiette des cotisations, voire opérer une politique « gaullienne » de la chaise vide dans l’UE (au-delà de savoir s’il faut la quitter ou pas, un « Frexit » prendrait plusieurs années de toute façon), voire au sein de l’OMC (de l’OMS aussi, de l’ONU enfin…) afin de peser sur les dumpings sociaux, hors de l’UE, mais aussi en son sein (jeu inégal de l’Allemagne avec la Pologne et les pays baltes, refus des deux premiers pays d’acheter français en matière d’armements et de nucléaire, la Hongrie préférant s’équiper en Russie…)

Au fond, l’on voit bien que vis-à-vis de l’immigration s’opère plutôt une politique à la fois politicienne électoraliste et idéologique en se servant d’elle non plus comme armée de réserve économique, puisque la législation empêche d’employer des personnes sans papiers, mais plutôt force de frappe idéologique et culturelle pour pousser à la fragmentation accélérée des acquis civilisationnels, quitte à ce que cette armée de réserve soit elle-même plus tard démantelée à moins qu’elle ne se révolte, manipulée par d’autres forces hostiles à ce que désire la Secte au pouvoir…

En tout cas, si Bardella veut redresser le pays il faudra qu’il séduise ces abstentionnistes qui ne sont à l’évidence guère enthousiasmés par les solutions pour l’instant sur la table… Le débat sur l’immigration révéle l’état délétère de tout le système politique, économique, intellectuel, spirituel du pays plutôt qu’être sa cause première…

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