L’importance d’un cérémonial pharaonique dans la fabrication de la peur

27/05/2022 (2022-05-27)

Par Lucien SA Oulahbib


Imaginez ces grandes cérémonies pharaoniques qu’organisent les empires théocratiques depuis les temps immémoriaux avec moult démonstrations de force, acclamations d’une énorme foule, le tout au sein d’une architecture monumentale qui fait office de fond solide, réaliste, aux propos pourtant démentiels énoncés. Eh bien, vous avez là les ingrédients magiques ensorcelants jusqu’à susciter, sécréter dans les esprits humains (pour une part animaux également) ces substances nécessaires pour la sidération, la fascination, l’admiration et une peur jouissive mêlées (l’adoration, la soumission) et par là l’abandon progressif ou soudain à ce désir démesuré de fusion jusqu’à ne faire qu’un avec tout ce cadre qui ainsi suscite tant de sensations enveloppantes, sécurisantes, jouissives jusqu’à même « combler » (confirme Docteur Strange).

Un tel cadre majestueux, prestigieux, fait ainsi office de référent suprême qui permet de donner un sens définitif au contenu de la cérémonie (signifié) ainsi qu’à sa forme (discours, danses, chants, défilés virils, ou signifiants) quand bien même tout ceci serait faux, vil, vulgairement viril en réalité. D’où, pour en accroître l’intimidation, la nécessité d’effacer les imperfections, de sanctifier un tel cérémonial, de l’élever au rang de ce sacré qu’il n’est plus possible de remettre en cause sans que tout s’effondre, car la saisie « colle » ou pas dans l’instant (d’où sa fragilité). Aussi, pas même une question ne peut être admise, surtout à grande écoute, sous peine de passer pour hérétique et donc capable de briser le sortilège : aujourd’hui elle sera classée de complotiste, conspirationniste par les nouveaux officiants — tels les Smith dans Matrix — qui auront pour mission de pourchasser les moindres résilients.

Ainsi, un tel cadre qui se veut aussi fort, une référence aussi sacralisée, se trouvera déployé en vue non seulement de légitimer le lien qui veut connecter un contenu (le message) à un contenant (les justifications formelles), mais aussi de faire en sorte que son déploiement, majestueux, fabuleux, ne s’adresse pas seulement à l’entendement, mais aussi aux sens (aux « tripes ») y compris ce sens intime, celui de la conviction, et ce de telle manière que la seule issue s’avère être soit l’adhésion passionnée, totale, fusionnelle, « servitude volontaire », soit le refus, la révulsion, la « haine » : cette mise à distance disait Marx dans sa thèse sur Démocrite et Épicure.

Cette adhésion et son contraire (la répulsion) ne sont donc pas liés à un « trauma » ou à un désir ourdi de comploter en soi. Il ne s’agit pas seulement d’un « choc » comme s’il s’agissait d’une agression à la suite d’un « coup d’État », d’une « occupation », d’un « viol », ou encore comme si nous restions passifs dans un « eux » et « nous » alors qu’il y a ici plutôt intrication (nous sommes censés être en démocratie et en État de droit, nous votons et nous obéissons aux lois), d’où la difficulté précisément de s’en soustraire, de haïr au sens de repousser, sous peine de sentir naître une culpabilité, une angoisse, un doute.

Ce dernier va d’ailleurs être combattu, balayé, parfois volontairement, préventivement, voire de manière ostentatoire (le port du « masque »), par un surcroît d’adhésion, comme l’y incitent aussi la communication sacralisée (« se vacciner est un devoir moral ») et la frénésie violente qui vise à écarter les opposants avec l’invective permanente des officiants agissant comme des tortionnaires moraux jusqu’à susciter chez le supplicié « volontaire » ce désir de plus en plus forcé, forcené, fanatisé de s’abandonner totalement à la fin, telle l’antilope qui s’abandonne aux pressions de la lionne ou comment accepter se rendre à l’attraction de l’objet désirant, ici l’État, puisque celui-ci fait désormais office de « moi » et non plus seulement de « surmoi »), jusqu’à même en mourir parfois, ou, de l’autre côté (du manche), jusqu’à emprisonner, tuer, harceler les récalcitrants lorsqu’il s’agit des cas extrêmes comme en Chine actuellement (ou sous les régimes totalitaires et les démocratures dont la France désormais de plus en plus mal classée) afin de sceller ainsi définitivement l’adhésion et d’en chasser la moindre humanité ou raison.

D’où, à un moment donné de tension ultime, l’impossibilité même de dialoguer à un tel stade de fermeture frénétique des esprits. Ceci fait d’ailleurs qu’historiquement parlant seule la résistance, armée, hélas, s’est souvent avérée de mise pour haïr un tel sortilège, ou alors une mobilisation générale comme l’avait promulguée Gandhi.

Aujourd’hui par exemple un tel cadre fanatisant se déploiera lors d’une conférence de presse solennelle ou d’un 20 heures décisif avec comme démonstration de force la toute-puissance du média choisi, le prestige des interviewers, et aussi des intervenants venant par la suite valider sur un ton souvent badin la parole pourtant très violente ainsi sacralisée.

Comment mettre en doute alors ce qui va être dit ? En mettant d’abord en cause tout ce processus en le mettant à distance, le repoussant, le haïssant : cadre médiatique boursouflé et surtout incompétent pour valider une argumentation, officiants divers souvent guère recevables ou contestés par leurs pairs (ces derniers bien sûr écartés, alors qu’ils sont, eux, hautement compétents), venant alors justifier avec de faux ou piètres arguments la parole énoncée qui cherche à être sacralisée par le cadre ainsi renforcé.

Souvent, ils viennent la valider du seul fait de leur présence, peu importe la véracité du contenu. Par exemple une parole présidentielle, déjà par ailleurs légitimée par ce qu’elle incarne, s’en trouvera renforcée par toute cette pompe qui elle-même pourra être encore plus validée si des comités ad hoc intitulés « de défense » ou « scientifiques » viennent la renforcer alors que leurs propos seront insignifiants, disproportionnés, voire inexacts et même volontairement mensongers.

En fait, il s’avère que pour contrer ceci toute parole contestatrice, si elle ne critique pas d’emblée au préalable ce cadre, si elle ne remet pas en cause d’emblée tous les a priori, les justifications, les « preuves », se trouvera elle aussi d’emblée relativisée ou rejetée.
Comme il a été vu lors du débat entre E. Macron et M. Le Pen, cette dernière n’a jamais remis en cause en amont les justifications de la politique sanitaire, climatique, antirusse, mais seulement en aval les moyens (idem pour E. Zemmour et JP. Mélenchon). Ceci fait que ces « opposants » deviennent tous trois des éléments d’ambiance qui justifient a posteriori le cadre (réchauffement inédit, crise sanitaire exceptionnelle, agression soudaine et inédite de Poutine) même s’ils en critiquent quelques contenus (« il faudrait faire plus ceci, moins cela »).

Alors qu’il s’agirait de nier d’emblée, chiffres et observations à l’appui, l’importance démesurée donnée désormais à tout virus, à toute élévation de température, ou, au contraire, à relativiser d’emblée toute violation d’accords (Minsk 2), tout refus de revisiter l’historique, comme si ces termes de virus, température, violation, venaient d’être inventés et allaient sur le champ remettre en cause la survie même de toute l’Humanité, à l’instar de ce qui se trouve répété en long et en large comme mantra :

« la planète n’en a plus que pour quelques années si l’on ne fait rien, l’avenir de l’espèce humaine est en danger, Poutine nous amène vers la 3e guerre mondiale ».

Le « vu à la TV » marche donc et de mieux en mieux au vu des résultats électoraux qui ont scellé désormais en France par exemple une alliance non seulement objective, mais subjective entre les deux M (Macron et Mélenchon) à l’encontre de ce bien timide sursaut de souveraineté (« encore une minute monsieur le bourreau ») alors qu’il s’agit de faire exploser de plus en plus le cadre lui-même, puisqu’il ne s’agit même plus de validation des compétences, de manque de pondération, alors que des personnes hautement spécialisées, modérées, calmes, au langage toujours « sourcé », sont écartées d’office, menacées dans leur poste, harcelées en permanence lorsqu’elles n’acceptent pas de faire peur et d’en jouir.

Le roi pourtant est nu, de plus en plus, combien même tous ces artifices, hormis cette « pompe » actionnée en permanence pour nous faire croire le contraire.

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