22/04/2023 (2023-04-22)
[Source : tribunaldelinfaux.com]
[Image : L’heure du conte avec Carla Rossi. Celle-ci affirme que les enfants l’ont fait tomber par terre et lui ont monté dessus pour expliquer la photo controversée.]
Par Julie Levesque
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Pour ou contre L’heure du conte avec une drag queen ?
C’est la question de l’heure sans nuances qui divise, et la nouvelle normalité veut qu’aucun débat digne de ce nom n’ait lieu.
Les défenseurs de cette activité « familiale », qui ont la faveur des grands médias, vous diront que les intentions derrière ces prestations sont nobles et inoffensives : elles visent à initier les enfants à la diversité et à l’inclusion.
L’opposition à ces performances est très souvent présentée comme anti-drag et transphobe, mais rarement pour ce qu’elle est réellement : l’expression d’un gros malaise avec l’idée que des drag queens participent à l’éducation des enfants en leur enseignant de manière ludique la théorie du genre.
Ces opposants n’ont rien contre les drag queens, du moment qu’elles s’adressent à un public adulte.
[Voir aussi :
►Belgique — La propagande transgenre dès la maternelle : le cri d’alarme d’une pédopsychiatre
►WOKISME, THÉORIE du GENRE, toutes les dérives de cette Société LGBTQ+ qu’« ILS » veulent nous imposer par tous les moyens…
►La vérité sort de la bouche des enfants
►Transition de genre et chirurgie : un bien triste bilan
►Devenir « trans » mène trop souvent au suicide : informez familles et candidats pour leur sécurité
►Cerveaux d’enfants manipulés et théorie du genre : le pire de la « cancel culture » et la circulaire de septembre 2021
►Le Great Reset cible les enfants. La mode trans lancée
►Un marché d’un autre genre est né : celui du GENRE
►MAUVAIS GENRE chapitre 1 UNE ÉPIDÉMIE MONDIALE
►La théorie du genre a-t-elle transformé en profondeur nos sociétés occidentales ?
►Bastien Lejeune : « Ce n’est pas être homophobe de refuser l’idéologie LGBT du transsexualisme ou de l’indifférenciation sexuelle »
►« Une femme est une femme, un homme est un homme » : Poutine s’engage à protéger la Russie de « l’obscurantisme de genre » de l’Occident
►Un historien falsifie ses propres recherches sur la théorie du genre]
Même certaines drags ne comprennent pas pourquoi des parents souhaitent que leur enfant flirte avec ce milieu et s’opposent à L’heure du conte. Kitty Demure, par exemple, croit que L’heure du conte est non seulement néfaste pour les enfants, mais aussi pour la communauté gay :
Cette autre drag queen manifeste pour que les parents « gardent leurs foutus enfants » hors de sa vie et condamne les spectacles drags pour enfants, lesquels sont passés de la bibliothèque aux clubs de nuit, où l’on enseigne aux enfants à se trémousser pour de l’argent :
« Sortez vos foutus enfants de nos clubs gays […] Je ne comprends pas pourquoi moi, en tant qu’homosexuel, j’ai besoin de dire aux gens de garder leurs enfants hors de ma vie. »
Maxence Guay, un jeune trans bien de chez nous, avait pour sa part ceci à dire sur ce sujet brûlant d’actualité :
Les défenseurs de L’heure du conte ont ressorti Guilda des boules à mites pour nous rappeler qu’elle passait à la télé à heure de grande écoute, preuve qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil. La différence est que Guilda n’allait pas dans les garderies et s’adressait aux adultes.
Guilda était la « reine des cabarets », pas des Centres de la petite enfance :
Évidemment, ceux qui souhaitent normaliser la présence des drags auprès des enfants vous diront que ceux qui sont contre L’heure du conte sont non seulement « contre les drags », mais qu’ils en ont « peur », qu’ils sont intolérants, rétrogrades, liés à l’extrême droite religieuse et/ou, bien sûr, qu’ils sont issus de la « complosphère ».
Qui sont ces experts en radicalisation qui, sauf erreur, ne se sont jamais adressés à ceux qu’ils qualifient de radicaux? Les mêmes experts des mêmes organismes financés en février et mars 2020 par les deux paliers gouvernementaux pour discréditer les mouvements d’opposition au totalitarisme sanitaire : David Morin, cotitulaire de la Chaire UNESCO en prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violent (UNESCO-PREV) et Frédérick Nadeau du Centre d’expertise et de formation sur les intégrismes religieux et la radicalisation (CEFIR).
Leur discours néomaccarthyste mérite d’être cité, tout comme les commentaires de l’auteur de l’article radio-canadien, le décrypteur Nicholas De Rosa :
« On a vu la structuration dans les dernières années d’un écosystème de droite réactionnaire qui a réussi à capitaliser sur la période pandémique, sur les craintes des gens, sur des mesures parfois contestables de manière légitime et sur des contraintes instaurées par les gouvernements pour finalement être capables de faire passer leurs discours et d’avoir beaucoup d’écoute. Il y a ici une hybridation des idéologies. Il faut arrêter de les regarder en silo comme si on avait des mouvements clairs. Ce sont des gens qui vont basculer d’une idéologie à l’autre en fonction de l’actualité[…]
Le discours de façade [dumouvement contre les drag queens], c’est de dire : “Je ne veux pas rogner sur les droits et libertés d’une catégorie de citoyens. Je veux juste protéger les enfants.”
Mais quand on écoute bien le sous-discours, ça va souvent beaucoup plus loin que ça.On le voit vraiment aux États-Unis avec la
régression de la question du droit à l’avortement et la régression du droit des spectacles drag, même si pour l’instant, c’est juste le début. » (Soulignements ajoutés)
David Morin
Pour Frédérick Nadeau, écrit le décrypteur :
« cet écosystème regroupe entre autres la droite identitaire, l’extrême droite, des militants anti-vaccins et des conservateurs qui ne sont pas extrémistes ni nécessairement radicaux, mais qui ont des tendances un peu plus religieuses. »
Nicholas De Rosa ajoute :
« L’idée non fondée que les drag queens ou des membres de la communauté LGBTQ+ veulent groomer des enfants a pris énormément d’ampleur dans la droite ultraconservatrice aux États-Unis dans la dernière année […] »
Contrairement aux « experts » cités par Nicholas De Rosa, l’auteure de ces lignes connaît bien le mouvement contestataire né en 2020 puisqu’elle a été sur le terrain durant les trois dernières années. Et les progressistes, gauchistes, ou anciens gauchistes, sont très nombreux dans ce mouvement qui est loin d’être un mouvement de droite.
Le portrait que brossent ces experts n’est que ça, un portrait, ou plutôt un collage d’idées reçues et de sentiments de supériorité morale et intellectuelle, saupoudré d’articles pseudo-scientifiques sur la psychologie des « complotistes » et leur santé mentale défaillante, résultant en une orgie d’étiquettes ressassées.
Au diable la nuance et la réflexion, les étiquettes sauvent du temps, mais surtout évitent des débats et permettent paradoxalement d’exclure des citoyens indésirables aux yeux des fascistes intellectuels au nom de l’inclusion, de la tolérance et de la diversité.
Il suffit pourtant d’explorer les origines de L’heure du conte pour en comprendre le véritable objectif, et ce de la bouche même de ceux qui en font la promotion : « déstabiliser » et « transformer l’éducation » des enfants.
Pour ceux qui voudraient s’épargner l’histoire de la théorie queer, vous pouvez passer à la dernière partie de cet article en cliquant sur le lien suivant : « La naissance de L’heure du conte ».
La théorie queer
Dans l’article « The Real Story Behind Drag Queen Story Hour » (La véritable histoire der L’heure du conte avec une drag queen), publié à l’automne 2022 dans City Journal, Christopher F. Rufo retrace les origines de L’heure du conte en remontant jusqu’à la naissance de la théorie du genre.
Le portrait qu’il brosse est aussi choquant qu’éclairant et très loin de la vision Calinours promue par la députée de Québec solidaire Manon Massé, qui s’en est pris à Éric Duhaime pour sa pétition Drag Queen : Protégeons nos enfants :
« Monsieur Duhaime pousse en faisant entendre que c’est dangereux pour les enfants. Entre vous et moi, il n’y a rien de dangereux pour les enfants. Au contraire, au Québec, on est fier de notre diversité.»
Cette vision innocente et naïve de la drag queen est déconstruite par Rufo :
« La drag queen peut sembler être une figure comique, mais elle porte un message tout à fait sérieux, à savoir la déconstruction du sexe, la reconstruction de la sexualité des enfants et la subversion de la vie de famille de la classe moyenne.
L’idéologie qui anime ce mouvement est née dans les donjons sexuels de San Francisco et a été incubée dans les écoles. Elle est maintenant transmise, avec le soutien officiel de l’État, dans un certain nombre de bibliothèques publiques et d’écoles aux États-Unis. En fouillant les fondements de cette idéologie et en parcourant la littérature de ses militants, les parents et les citoyens peuvent enfin comprendre la nouvelle politique sexuelle et formuler une stratégie pour y résister. » (Soulignements ajoutés)
L’auteur commence par résumer l’histoire de la théorie queer, laquelle remonte au début des années 1980 ave la publication de « Thinking Sex: Notes for a Radical Theory of the Politics of Sexuality » (Penser le sexe : pour une théorie radicale de la politique de la sexualité, un texte tiré du livre Marché au sexe), de Gayle S. Rubin, une activiste lesbienne.
Après une immersion dans la culture sexuelle underground des orgies et du BDSM (bondage, domination, sado-masochisme), Rubin s’est inspirée de l’œuvre du philosophe Michel Foucault pour « exposer la dynamique du pouvoir ayant façonné et réprimé l’expérience sexuelle humaine ».
Selon elle, « les sociétés occidentales modernes évaluent les actes sexuels selon un système hiérarchique de valeur sexuelle ». Au sommet de la « pyramide érotique » de son époque, soit il y a 40 ans, on trouve les couples hétérosexuels mariés. Suivent les couples hétérosexuels non mariés et les autres hétéros, ensuite les couples gays dans des unions stables. Juste en haut des « castes sexuelles les plus méprisées » figurent les hommes et femmes homosexuelles aux « mœurs légères ». La base de cette « pyramide érotique » est composée de « transsexuels, de travestis, de fétichistes, de sadomasochistes, de travailleurs du sexe comme les prostitués et les mannequins de pornographie, et en bas de tous, ceux dont l’érotisme transgresse les frontières générationnelles. »
Un érotisme qui « transgresse les frontières générationnelles » n’est qu’un bel euphémisme pour « pédophilie ».
Selon l’auteur de l’article, Christopher F. Rufo, « le projet de Gayle S. Rubin et, par extension, celui de la théorie queer, consistait à questionner, déconstruire et subvertir cette hiérarchie sexuelle, et inaugurer un monde au-delà des limites ». (Soulignements ajoutés)
La thèse de la « construction sociale », affirme Rufo, constitue le « mécanisme clé » pour y parvenir.
Il écrit :
« La nouvelle érudition sur le comportement sexuel a donné au sexe une histoire et créé une alternative constructiviste à l’opinion selon laquelle le sexe est un phénomène naturel et pré-politique », écrit Rubin. « Cet ensemble de travaux repose sur l’hypothèse que la sexualité est constituée dans la société et dans l’histoire, et non pas ordonnée biologiquement. Cela ne signifie pas que les capacités biologiques ne sont pas des prérequis pour la sexualité humaine. Cela signifie que la sexualité n’est pas compréhensible en termes purement biologiques. » Autrement dit, les conceptions traditionnelles du sexe, qui considèrent ce comportement comme naturel et reflétant un ordre immuable, sont de la pure mythologie, conçue pour rationaliser et justifier les systèmes d’oppression. Pour Rubin et, plus tard, pour les théoriciens queer, le sexe et le genre étaient infiniment malléables. Il n’y avait rien de permanent au sujet de la sexualité humaine, qui était, en fait, « politique ». Grâce à une révolution des valeurs, ils croyaient que la hiérarchie sexuelle pouvait être démantelée et reconstruite à leur image. (Soulignements ajoutés)
Il cite Rubin :
« Une théorie radicale du sexe doit identifier, décrire, expliquer et dénoncer l’injustice érotique et l’oppression sexuelle. Une telle théorie a besoin d’outils conceptuels perfectionnés qui peuvent saisir le sujet et le garder en vue. Il doit construire de riches descriptions de la sexualité telle qu’elle existe dans la société et dans l’histoire. Il faut un langage critique convaincant qui puisse traduire la barbarie de la persécution sexuelle. » (Soulignements ajoutés)
Pour Rufo, la démystification des conventions sexuelles, sera suivie de la réhabilitation des groupes situés en bas de la hiérarchie, soit « les transsexuels, les travestis, les fétichistes, les sadomasochistes, les travailleurs du sexe ».
La conclusion logique de ce processus est, selon lui, « l’abolition des restrictions sur le comportement situé en bas de l’échelle morale – la pédophilie ».
Il semble que cette conclusion ne soit pas exagérée puisque Rubin emploie des termes euphémiques comme « boy-lover » (amoureux des garçons) et « hommes qui aiment les mineurs ». Elle critique violemment les lois contre la pornographie juvénile et promeut la légalisation et la normalisation de la pédophilie :
« Comme les communistes et les homosexuels dans les années 50, les amoureux des garçons sont tellement stigmatisés qu’il est difficile de trouver des défenseurs de leurs libertés civiles, encore moins de leur orientation érotique[…] Dans une vingtaine d’années, lorsqu’une partie de la fumée se sera dissipée, il sera beaucoup plus facile de montrer que ces hommes ont été victimes d’une chasse aux sorcières sauvage et injustifiée. » (Soulignements ajoutés)
La philosophie de Rubin repose sur celle de Michel Foucault, qui a fait partie d’un mouvement d’intellectuels français à l’époque de la libération sexuelle des années 1960-1970, lesquels souhaitaient légaliser les relations sexuelles entre les adultes et les mineurs.
Foucault a d’ailleurs été accusé de pédophilie par Guy Sorman dans Dictionnaire du Bullshit, paru en février 2021. D’autres affirment que « Michel Foucault n’était pas pédophile, mais il était séduit par les jeunes éphèbes ».
Le développement historique de l’art drag
L’histoire des drag queens aurait débuté à la fin du 19e siècle avec William Dorsey Swann, un esclave libéré qui s’habillait en femme et organisait des soirées olé olé dans sa résidence de Washington D.C. Jugé coupable d’avoir tenu une maison close en 1896, il a fait environ 10 mois de prison.
Rufo voit en celui qui s’était autoproclamé « queen of drag » l’archétype parfait de la gauche : Swann s’est libéré de l’esclavage et d’une « culture sexuelle répressive, malgré les efforts de ses oppresseurs ».
Difficile de ne pas admirer un tel personnage. Des adultes consentants devraient être libres de faire ce qu’ils veulent de leur corps et d’avoir osé incarner cette liberté à une telle époque est certes louable.
« La drag est devenue explicitement politique sept décennies plus tard durant les émeutes de Stonewall en 1969, lors desquelles les clients d’un bar gay de New York ont affronté la police, donnant l’aval à une vague d’activisme gay et lesbienne », poursuit Rufo.
Netflix a produit un documentaire sur l’une des figures drag ayant marqué cette époque, Marsha P. Johnson :
La révolution sexuelle a fait passer la performance drag de l’expérience sensuelle à une forme de résistance et de révolution, explique Rufo en citant un article de la revue de contre-culture Salmagundi.
Le drag est passé de la performance privée à la rue, devenant une « déclaration de rébellion publique ». Les performances qui, au départ, avaient pour but de se moquer des mœurs de la frange plus conservatrice de la société américaine ont évolué vers un besoin de choquer et de « repousser les limites » avec des costumes et des performances de plus en plus explicites et suggestives rappelant des « stars de la porno en chaleur ».
Vint la publication de Gender Trouble (Trouble dans le genre. Le féminisme et la subversion de l’identité) de Judith Butler en 1990, qui représente un autre moment critique de l’histoire des drags. Selon Rufo, Butler a élevé « le discours entourant la sexualité queer, le faisant passer de la rhétorique directe de Gayle Rubin au domaine de l’intellectualisme largement abstrait et parfois impénétrable ».
Butler a contribué de deux manières à cette théorie, écrit Rufo. D’abord, en « saturant la théorie queer de postmodernisme », ensuite en lui « fournissant une théorie du changement social basé sur le concept de la “performativité”, offrant un terrain conceptuel plus sophistiqué que la transgression charnelle ».
Rufo résume ainsi l’argument central de la théorie de Judith Butler :
« La société occidentale a créé un régime d’“hétérosexualité obligatoire et de phallogocentrisme”, qui a cherché à renforcer une notion singulière et unitaire du “sexe”, laquelle écrase et obscurcit la véritable complexité et la variation du sexe biologique, de l’identité de genre, de l’orientation sexuelle et du désir humain. Butler soutient que même le mot “femme”, bien qu’il se rapporte à une réalité biologique, est une construction sociale qui ne peut être définie avec un sens ou une catégorisation stable. Il n’y a rien d’essentiel dans “l’homme”, “la femme” ou “ le sexe”; ils sont tous créés et recréés par la culture humaine traditionnelle contingente ou, comme le dit Butler, ils sont tous définis par leur performance, qui peut changer, se transformer et s’adapter au fil du temps et de l’espace.
La théorie de Butler sur le changement social veut qu’une fois qu’il est établi que le sexe est malléable et utilisé comme instrument de pouvoir, actuellement en faveur de la “normativité hétérosexuelle”, alors le travail social de la reconstruction peut commencer. La drag queen incarne la théorie de Butler sur la déconstruction du genre. » (Soulignements ajoutés)
La théoricienne voit dans la performance drag, « trois dimensions significatives de la corporalité : le sexe anatomique, l’identité de genre et la performance de genre. » Elle voit la réalité du genre comme étant « changeable et révisable ». Sans ce changement de notion de ce qui est « réel et possible », aucune révolution politique n’est possible, dit-elle.
Rufo écrit :
« Dans les années 2000, la performance drag avait absorbé tous ces éléments —l’origine de justice sociale de l’histoire de William Dorsey Swann, le choc-et-stupeur charnel de Gayle Rubin et le postmodernisme éthéré de Judith Butler — et les avait rassemblés sur la scène. »
Il cite ensuite la théoricienne queer Sarah Hankins, selon laquelle il y aurait trois genres de drag : standard, burlesque et genderfuck, que l’on pourrait traduire en foutoir de genres. Elle décrit l’univers des drag queens comme une « économie sociosexuelle » en parlant de son expérience dans l’auditoire de spectacles drag :
« En tant que membre de l’auditoire, j’ai toujours vu l’échange de pourboires comme un paiement pour la gratification sexuelle. Et je suis consciente qu’en brandissant des billets, je peux satisfaire mon excitation, du moins en partie : je peux rapprocher les corps des artistes et les amener à me toucher ou me laisser les toucher. »
Tant que les performances de drag ont lieu devant des adultes consentants, rares sont ceux qui s’y opposeront. Vous rappelez-vous d’une manifestation anti-drag devant le Cabaret Mado ou L’Entre-Peau dans le Village gai à Montréal? Pourquoi Mado Lamotte n’a-t-elle jamais provoqué autant d’animosité que Barbada?
Probablement parce que Mado, drôlement sympathique et championne des blagues à caractère sexuel ne s’est jamais imposée auprès des enfants.
En 35 ans de carrière, Mado n’a jamais provoqué de controverse et comme le soulignait l’année dernière Radio-Canada, Mado a, « par sa créativité et sa douce folie, été un agent qui a contribué à l’acceptation de l’existence des communautés LBGTQ2S+ au Québec et au Canada ».
L’objectif drag
Pour revenir à l’article de Rufo, il résume ainsi « l’objectif drag » : « oblitérer les conceptions stables du genre par la performance et réhabiliter le bas de la hiérarchie sexuelle par l’élévation du marginal ».
Ici, Rufo parle de la théorie et d’une certaine forme de militantisme drag, non pas de l’objectif de toutes les performances drag.
Si son affirmation a le défaut de manquer de clarté et de nuances, il est difficile de ne pas lui donner raison sur la question de l’élévation du marginal.
N’est-ce pas exactement ce à quoi nous assistons depuis quelques années, l’élévation du marginal dans tout ce qui a trait au genre et à la sexualité? Le gavage médiatique, politique et commercial des personnes à l’identité de genre marginale va bien au-delà de l’acceptation sociale, de la tolérance et de l’inclusivité, et laisse transpirer un effort concerté de normaliser la marginalité sexuelle.
Les « drag shows » pour enfants sont non seulement de plus en plus nombreux aux États-Unis, en Australie et au Canada, mais ils sont de plus en plus osés.
Aux États-Unis, il n’est pas rare de voir des événements de drag queens « pour la famille » où les enfants sont invités à donner des pourboires à des drags presque nues qui font des danses lascives.
Dans cette vidéo on peut voir un spectacle drag de Noël « pour la famille » au contenu très sexuel et l’événement Drag the Kids to Pride, dans un bar, où l’on peut lire sur le mur : « It’s not gonna lick itself » (Ça ne se léchera pas tout seul) :
Une des drags interviewée croit et « espère » que ce genre d’événement aura pour effet que plus d’enfants seront portés « à faire du drag », car ça donne un gros « boost » de confiance en soi.
Les personnes qui trouvent immoral d’exposer des enfants à ce genre de performances sont de tous les horizons politiques, de toutes les classes sociales et de toutes les orientations sexuelles, n’en déplaise aux « experts » radio-canadiens.
La théoricienne Sarah Hankins, citée par Rufo, écrit au sujet de ces performances salaces :
« L’acte de payer une femme dominante/dominatrice, un homme qui supplie, un esclave mal rémunéré ou un garçon permet au membre de l’auditoire d’incarner temporairement une ou plusieurs des positions sociales “mauvaises/contre nature”, par exemple le pédophile, le prédateur pédophile gay renfermé, la femme cougar prédatrice, le sugar daddy ou la mama, même le jeune ou l’enfant sexualisé lui-même».
La performance genderfuck se servirait selon elle « “des clichés du primitivisme et de la dégénérescence comme outils de protestation et de libération” dans le but de renverser les tabous contre “la pédophilie, la nécrophilie, le fétichisme des objets érotiques et le sexe humain-animal” ». (Soulignements ajoutés)
« Ces performances, écrit Rufo, constituent la finalité, l’aboutissement de plus d’un siècle de travail, des boules de soie et de satin en passant par la politique hypercérébrale de déconstruction, jusqu’à l’anéantissement des notions traditionnelles du sexe. »
Au début des années 2000, une autre frange drag, représentée par Ru Paul, a troqué l‘idéologie pour le « bon vieux fun glamour américain », rendant le phénomène mainstream en l’intégrant aux « médias de masse et à la culture de consommation », ajoute Rufo.
Certains y ont vu l’opportunité de « transformer les performances drag en événements familiaux pouvant transmettre une version simplifiée de la théorie queer aux enfants ».
Et c’est ici que nous entrons dans le vif du sujet de l’heure : L’heure du conte avec une drag queen.
La naissance de L’heure du conte
Drag Queen Story Hour (L’heure du conte avec une drag queen) est une organisation non gouvernementale fondée en 2015 par Michelle Tea « pour promouvoir des performances drag “pour la famille” » (family-friendly). Il existe aujourd’hui 40 branches à travers les États-Unis.
Harris Kornstein, nom de scène Lil Miss Hot Mess, a été l’une des premières drag queens à présenter L’heure du conte dans les bibliothèques publiques aux États-Unis. Il a publié deux livres pour enfants ainsi que co-écrit l’article, « Drag pedagogy: The playful practice of queer imagination in early childhood » (La pédagogie drag : la pratique ludique de l’imagination queer dans la petite enfance) avec Harper Keenan, un homme transgenre et théoricien queer.
Kornstein et Keenan écrivent dans ce manifeste que « l’école sert à redresser l’enfant pour qu’il corresponde en quelque sorte aux paramètres actuels de [la] vision [normative du citoyen idéal selon l’État] », ce qui n’est pas faux.
Rufo écrit :
« Pour perturber cette dynamique, les auteurs proposent une nouvelle méthode d’enseignement, la “pédagogie drag”, comme moyen de stimuler l’“imagination queer”, enseigner aux enfants “comment vivre de manière queer ” et “apporter des façons queer de savoir et d’être dans l’éducation des jeunes enfants”. Comme l’expliquent Kornstein et Keenan, il s’agit d’un projet intellectuel et politique exigeant des drag queens et des activistes qu’ils travaillent à saper les notions traditionnelles de la sexualité, en remplaçant la famille biologique par la famille idéologique, et en éveillant des désirs sexuels transgressifs chez les jeunes enfants. “En s’appuyant en partie sur la théorie queer et les études trans, les pédagogies queer et trans cherchent activement à déstabiliser la fonction normative de la scolarisation par l’éducation transformatrice”, écrivent-ils. “Il s’agit d’une orientation fondamentalement différente des mouvements vers l’inclusion ou l’assimilation des personnes LGBT dans les structures existantes de l’école et de la société”. » (Soulignements ajoutés)
Donc.
À ceux qui prétendent, comme Manon Massé, qu’il est uniquement question d’inclusion et d’acceptation, les principaux promoteurs de la pédagogie drag le disent eux-mêmes : les pédagogies queer et trans ont une « orientation fondamentalement différente des mouvements voués à l’inclusion » des communautés LGBTQIA2S+ et visent plutôt à « déstabiliser activement la fonction normative de la scolarisation par l’éducation transformatrice ».
Les parents ont-ils raison de s’inquiéter que des drag queens enseignent à leurs enfants « comment vivre de manière queer » ?
Certains n’y verront pas de problèmes, d’autres oui, car l’idéal recherché va bien au-delà de l’inclusion et de la tolérance.
Dans leur article sur la pédagogie drag, Kornstein et Keenan citent à ce sujet un passage du livre du théoricien queer José Esteban Muñoz, Cruiser l’utopie :
« La queerness n’est pas encore là. La queerness est une idéalité. Autrement dit, nous ne sommes pas encore queer. Il se peut que nous n’atteignions jamais la queerness, mais nous la sentons comme la chaude lumière d’un horizon empreint de puissance. Nous n’avons jamais été queer, pourtant la queerness existe pour nous comme une idéalité que nous pouvons distiller à partir du passé et utiliser pour imaginer un futur. Le futur est le domaine de la queerness. » (Soulignements ajoutés)
Cette utopie, cet avenir queer, L’heure du conte participe à le construire en lisant aux enfants des livres qui, d’après Keenan et Hornstein, « comprennent souvent des personnages queer et/ou trans, des thèmes de transgression des genres ou des récits sur le fait de ne pas se sentir à sa place et de trouver sa voix ».
Il est même parfois question de tabous :
« Certains transposent le penchant drag pour les tabous dans les idées qu’ont les enfants sur des sujets bêtes, comme faire des dégâts ou apprendre à être propre ».
Les pédagogues drag l’écrivent noir sur blanc :
« Pour nous, la pédagogie drag consiste moins à imiter les comportements particuliers des drag queens qu’à s’interroger sur les façons d’être queer/trans qui vont au-delà du présent. »
Ils affirment ouvertement que ce qui se passe en surface est moins important que ce que l’on peut lire « entre les lignes ».
Comme dans cette publication du chapitre britannique Drag Queen Story Hour, « L’amour n’a pas d’âge? »
C’est justement entre les lignes que se trouvent les véritables objectifs de la pédagogie drag, incluant L’heure du conte.
Rufo l’explique dans le passage suivant :
« Pour les pédagogues drag, le parcours de vie traditionnel — grandir, se marier, travailler 40 heures par semaine et élever une famille — est une norme bourgeoise oppressive qu’il faut déconstruire et renverser. Alors que les drag queens prennent la parole dans leurs costumes sexuellement suggestifs, Kornstein et Keenan soutiennent que leur tâche consiste à perturber le “binaire entre la femme et la virilité”, à semer dans la salle des “thèmes transgressifs de genre” et à briser l’“avenir reproductif” de la “famille nucléaire” et du “mariage sexuellement monogame”, tous considérés comme des mécanismes d’oppression capitaliste et hétérosexuelle. Les livres sélectionnés dans de nombreuses représentations de L’heure du conte avec une drag queen — Cinderelliot, If You’re a Drag Queen et You Know It, The Gender Wheel, Bye Bye, Binaryet They, She, He, Easy as ABC — font la promotion de ce récit fondamental. Bien que les événements de L’heure du conte soient souvent considérés comme “pour la famille”, Kornstein et Keenan expliquent qu’il s’agit d’une forme de code: “Il se peut que L’heure du conte soit ‘pour la famille’, en ce sens qu’il est accessible et invitant pour les familles avec enfants, mais il s’agit moins d’une force d’assainissement que d’une introduction préparatoire à d’autres modes d’affiliation. Ici, L’heure du conte est ‘pour la famille’ au sens de ‘famille’ en tant que code queer de la vieille école pour identifier d’autres queers dans la rue et communiquer avec eux.” Autrement dit, le but n’est pas de renforcer la famille biologique, mais de faciliter la transition de l’enfant vers la famille idéologique. » (Soulignements ajoutés)
Le but de la pédagogie drag consiste, selon Rufo, à « reformuler la relation des enfants avec le sexe, la sexualité et l’érotisme ».
Il cite une autre pédagogue queer, Hannah Dyer, qui, selon lui, « expose le concept même d’“innocence de l’enfance” comme une illusion hétéropatriarcale oppressive ».
« Le but est donc, dit-elle, de renverser le système de l’hétéronormativité, qui comprend l’innocence de l’enfant, et de restructurer la sexualité de l’enfant à partir de ses fondements. Et les performances drag fournissent une méthode visuelle, symbolique et érotique pour y parvenir. »
Pour des raisons évidentes de mise en marché, L’heure du conte est présentée comme une façon ludique d’encourager l’inclusion et l’acceptation et non d’interroger l’enfant sur « les façons d’être queer/trans » et d’offrir « une relation queer avec les enfants, qui rompt avec l’avenir reproductif de la classe normative et de la famille nucléaire ».
Kornstein et Keenan révèlent eux-mêmes dans leur article que le double jeu est nécessaire pour atteindre les véritables objectifs recherchés par L’heure du conte :
« Bien que L’heure du conte avec une drag queen se positionne publiquement comme visant à “aider les enfants à développer l’empathie, à en apprendre davantage sur la diversité et la différence entre les sexes, et à exploiter leur créativité”, nous soutenons que ses contributions peuvent aller au-delà de la morale et des modèles[…] En tant qu’organisation, L’heure du conte avec une drag queen peut être incitée à réciter des formules portant sur l’harmonisation avec les normes des programmes d’études et l’apprentissage socioaffectif afin d’être lisible au sein des établissements publics d’enseignement et des organisations philanthropiques. Au bout du compte, le drag ne prend pas ces objectifs utilitaires trop au sérieux (mais il est très bon pour avoir le physique de l’emploi lorsque cela est nécessaire). » (Soulignements ajoutés)
Le but affiché, l’inclusion et l’apprentissage de la diversité, est donc une façade, un travestissement.
Rufo résume bien ce modus operandi :
« En d’autres termes, en tant que mouvement, L’heure du conte avec une drag queen a appris la danse de l’exploitation d’une organisation militante à flux de trésorerie positif, obtenant des contrats gouvernementaux et l’accès aux auditoires, tout en fournissant une défense rhétorique plausible contre les parents qui pourraient remettre en question la sagesse des hommes adultes qui créent “des sites de plaisir queer ” avec leurs enfants. »
Si le mouvement a opté pour les bibliothèques publiques, c’est que ces dernières sont « légalement tenues de fournir un accès égal aux organisations, sans égards à l’affiliation politique ou à l’idéologie ».
Alors, à quand L’heure du conte avec un « complotiste » dans les bibliothèques du Québec? Peut-être qu’un titre travesti du genre « Le conte plotiste » serait plus attrayant pour notre société à la dérive?
Parlant de dérive, Christian Rufo termine son article en montrant des exemples du phénomène « drag pour la famille » en affirmant que « les idéologies contiennent toujours leurs propres germes de destruction ».
Des activistes de L’heure du conte et des spectacles drags ont par ailleurs été arrêtés récemment pour possession de pornographie juvénile et relations avec des mineurs, alors que d’autres sont des délinquants pédosexuels avec des casiers criminels.
À ceux qui crieront à l’exception et aux pommes pourries, Rufo rétorque :
« Le projet philosophique et politique de cette théorie a toujours été de détrôner la culture hétérosexuelle traditionnelle et d’élever ce que Rubin appelait la “caste sexuelle” au bas de la hiérarchie, c’est-à-dire les transsexuels, les travestis, les fétichistes, les sadomasochistes, les prostituées, les vedettes de la pornographie et les pédophiles. L’heure du conte avec une drag queen peut tenter d’assainir les habitudes et de vérifier les antécédents criminels de ses artistes, la sous-culture de la théorie queer attirera toujours des hommes qui veulent suivre l’idéologie jusqu’à sa finalité.
Lorsque les parents, les électeurs et les dirigeants politiques comprendront la véritable nature de L’heure du conte et l’idéologie sous-jacente, ils travailleront rapidement pour rétablir les limites qui ont été temporairement — et de façon irresponsable — abandonnées. Ils traceront une ligne de démarcation claire entre la sexualité des adultes et l’innocence des enfants, et renverront les perversions du “genderfuck”, du “primitivisme” et de la “dégénérescence” à leur place, soit dans la marginalité. »
Il ne s’agit pas ici de rejeter les drags et les trans, mais plutôt de reconnaître que l’on ne peut pas forcer la normalisation des phénomènes marginaux, surtout pas auprès des enfants.
Si l’opposition à L’heure du conte avec une drag queen traduisait réellement le rejet des communautés LGBTQIA2S+, il y aurait eu de nombreuses manifestations contre la parade gay qui se tient chaque année. Or, cette parade laisse généralement indifférents ceux qui ressentent un profond malaise avec L’heure du conte ou s’y opposent.
Dans son entrevue à Tout le monde en parle, la drag Barbada prônait l’écoute et la compréhension de l’autre.
Malheureusement, au Québec, il y a des groupes que l’élite politico-médiatique ne veut pas entendre ni comprendre. Ceux-ci sont exclus du débat public, ne sont pas tolérés et sont stigmatisés.
Tout cela au nom de la tolérance et de l’inclusivité.
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