Lutter contre l’empiétement sur nos libertés

16/03/2023 (2023-03-16)

[Source : winteroak.org.uk]

Par Paul Cudenec

J’appartiens à cette catégorie de personnes très décriées qui ont passé leur vie à protester contre diverses choses.

J’ai manifesté — avec enthousiasme ! — contre la construction de routes et la fracturation hydraulique, contre les caméras de surveillance et les lois « antiterroristes », contre les foires aux armes et les usines de drones, contre les privatisations et le renflouement des banques, contre la City de Londres et la classe dirigeante britannique, contre l’OTAN et ses guerres, contre le G8, le G20 et la conférence Bilderberg, contre les confinements, les masques et les passeports vaccinaux.

L’une des remarques hostiles souvent formulées à l’égard de personnes comme moi est que nous sommes incohérents. En sautant d’un sujet à l’autre à intervalles réguliers, nous nous révélons sans gouvernail, superficiels, une simple « foule à louer » qui proteste juste pour le plaisir de protester et qui ne comprend même pas vraiment pourquoi nous sommes là.

Une deuxième critique est que nous sommes négatifs. Nous sommes toujours contre quelque chose, plutôt que pour. Nous sommes les « anti », les anti-tout.

Un troisième reproche est que nous sommes une nuisance publique, une minorité irritante et imbue d’elle-même qui essaie d’imposer ses préférences aux autres et qui ne veut pas simplement laisser les gens ordinaires vivre leur vie ordinaire.

Naturellement, je considère que ces trois jugements sont erronés !

Tout d’abord, je suis de plus en plus conscient que tout ce contre quoi je proteste depuis des années fait partie d’un seul et même phénomène que beaucoup d’entre nous appellent, pour faire court, le Système.

Il est évident qu’il existe un lien entre le commerce des armes et l’OTAN, par exemple, ou entre la City de Londres et la privatisation, mais j’ai fini par comprendre que ces deux domaines sont eux-mêmes des facettes d’une même entité globale, comme à peu près tout ce qui est indésirable, de la mondialisation aux « vaccins ».

Lutter depuis des décennies contre toutes ces manifestations d’un même phénomène n’a donc rien d’incohérent…

Le second reproche, celui d’être « anti », n’est valable que si l’on croit que s’opposer à une mauvaise chose est négatif.

Bien que les bannières sous lesquelles nous menons nos diverses campagnes ne soient pas toujours formulées uniquement en termes d’opposition, il est certainement vrai qu’il y a un thème sous-jacent d’être contre quelque chose.

Mais c’est inévitable ! Si les gens se mobilisent, s’organisent et agissent, c’est parce qu’il se passe quelque chose d’indésirable qu’ils veulent arrêter.

Toutes ces campagnes et luttes différentes se résument donc à une tentative décentralisée et largement non coordonnée d’arrêter, ou du moins de ralentir, les activités néfastes du phénomène global qui nous menace.

J’utilise le mot « phénomène » parce qu’à ce stade, le terme « système » commence à me sembler inadéquat. Un système pourrait facilement être quelque chose de statique, quelque chose qui est déjà en place et qu’il est difficile de supprimer.

Mais le problème central du phénomène en question est qu’il n’est jamais statique ou immobile et qu’il est en constante expansion.

C’est ce qu’il est en fait : une expansion, une accumulation, une croissance maligne.

C’est pourquoi il est toujours perçu par des gens comme moi comme une menace, une chose à laquelle il faut résister. Elle ne cesse d’empiéter, de confisquer, de voler, de développer, de détruire.

Si j’étais né dans un monde rempli de caméras de surveillance, je ne pense pas que j’aurais jamais eu l’idée de protester contre elles.

Appeler à une manifestation contre une route en place depuis 50 ans n’entraînerait pas une grande participation, même de la part des « anti » les plus intransigeants.

C’est la menace du changement qui nous motive, un changement dont nous pouvons voir qu’il est mauvais ou dangereux.

Et, pour répondre à la troisième critique commune, ce n’est pas nous, mais le Système toujours plus envahissant qui ne veut pas laisser les gens ordinaires et décents continuer à vivre leur vie ordinaire et décente.

C’était le cas lorsque les Anglais ruraux ont été chassés de leurs terres par les enclosures et poussés vers les usines de la première révolution industrielle, et c’est le cas aujourd’hui lorsque les Africains ruraux sont chassés de leurs terres et poussés vers l’esclavage des villes intelligentes de la quatrième révolution industrielle.

C’est le cas de chaque mode de vie traditionnel qui est détruit au nom du développement et de la modernité, de chaque individu qui est socialement éloigné de sa famille et de sa communauté, de chaque nouveau poison qui est introduit dans notre eau potable, notre air, notre nourriture ou notre corps.

C’est le cas de chaque clou enfoncé dans notre liberté, de chaque vis resserrée sur le contrôle total du Système, de chaque opinion désormais déclarée « crime » par ceux qui veulent tout nous prendre.

Ils ne veulent tout simplement pas nous laisser en paix, vivre notre vie comme nous l’entendons. Notre horizon est en permanence assombri par la menace de leur prochain état d’urgence, de leur prochaine guerre totale, de leur prochaine avancée technologique, de leur prochaine fausse pandémie, de leur prochain Grand Bond en avant, de leur Plan quinquennal, de leur Reich millénaire ou de leur Grande Réinitialisation.

S’opposer à ce processus invasif, que nous pourrions appeler l’empiétement, ce n’est pas être un perturbateur antisocial, mais un défenseur de ce que nous avons déjà, de ce que nous avions et de ce que nous méritons d’avoir à nouveau.

J’imagine les sérial refuseniks[1] comme moi dispersés tout autour d’une grande masse d’hommes, de femmes et d’enfants, qui sont rassemblés, régulièrement, vers les portes d’un gigantesque moulin à viande où ils seront réduits en liquidité pour nourrir la gloutonnerie de leurs méchants maîtres.

Brandissant nos drapeaux en lambeaux, nos bannières et nos pancartes, nous menons un combat d’arrière-garde contre les matraques et les aiguillons électriques brandis par des stormtroopers[2] mercenaires qui ne font que leur travail, à savoir s’assurer que nous nous dirigeons de manière durable et inclusive vers notre destin mortel.

Parfois, lors d’une attaque particulièrement violente des stormtroopers, comme ce fut le cas en 2020, nous sommes désorientés et, à notre grande surprise, nous nous retrouvons soudain de l’autre côté de la grande foule, combattant le même ennemi aux côtés de personnes que nous n’avons jamais vues auparavant.

Les oppresseurs ne cessent d’empiéter sur le terrain, forçant le peuple à se rapprocher des portes sinistres, et malgré tous nos efforts, nous sommes contraints de battre en retraite.

Mais pendant ce temps, nous continuons à appeler, par-dessus nos épaules, les masses qui avancent docilement vers leur destin, leur expliquant ce qui les attend et les exhortant à se joindre à nous dans notre résistance.

Et nous sommes encouragés dans nos efforts apparemment vains par la certitude que si jamais une grande partie de la foule se réveille, fait demi-tour et repart dans la direction opposée, les stormtroopers seront foulés aux pieds tandis que nous nous élancerons joyeusement et triomphalement vers la liberté.


  1. [1] En URSS et dans les pays de l’Est, personne à qui certains droits ont été refusés, notamment celui d’émigrer. (Par extension) personne qui refuse de participer aux activités obligatoires, tel le service militaire (des objecteurs de conscience). Source[]
  2. [2] Les troupes d’élite de l’Empire dans la saga Star Wars[]
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