02/06/2021 (2021-06-02)
[Source : mediapart.fr]
De façon assez manifeste, durant cette crise du Covid-19, un mécanisme brille par son absence : le partage d’expérience.
On aurait pu imaginer qu’un organisme international (OMS ou autre), une ONG ou un site Internet recueille les diverses mesures prise par chaque pays (les confinements, les ports de masque, mais aussi les traitements mis en œuvre, les surcroîts de ventes observés pour divers médicaments etc.), et que ces informations soient accessibles.
On aurait aussi pu s’attendre à ce que les médias s’intéressent à l’évolution de divers pays ayant adopté des mesures différentes.
Et pourtant, c’est le contraire qui se passe : il est extrêmement difficile de savoir ce qui se passe ailleurs, et plus encore ce que se fait ailleurs.
Inde
Parfois, cette absence d’information prend des proportions étranges. Ainsi, comme on l’a signalé, voilà plus d’un mois que l’Inde, en pleine flambée épidémique, a inclus deux médicaments (l’ivermectine et la budesonide) dans ses recommandations de traitement précoce, c’est-à-dire pour les patients atteints de formes légères de Covid-19 (Fig.1).
(Ces recommandations, initialement publiées le 23 avril 2021, ont été mises à jour le 19 mai, sans changement sur l’ivermectine et la budesonide.)
En Inde déjà, plusieurs états avaient officiellement adopté l’ivermectine comme traitement précoce depuis le mois d’août 2020, en remplacement de l’hydroxychloroquine. C’est notamment le cas de l’état le plus densément peuplé de l’Inde, l’Uttar Pradesh, dont le bilan durant la vague épidémique qui a frappé l’Inde à partir de mars a été modéré : 18516 décès enregistrés entre le 1er mars et le 29 mai 2021, pour 237 millions d’habitants. (En comparaison, sur la même période, le bilan de l’état du Maharashtra est de 41846 décès, pour 123 millions d’habitants ; et la France a déclaré 22563 « décès Covid », pour 67 millions d’habitants.)
Médias aveugles ou muets
On ne peut pas reprocher aux médias français d’avoir trop parlé de cette politique de traitements précoces récemment adoptée en Inde.
On peut par exemple faire l’expérience de taper « Inde » et « ivermectine » sur un moteur de recherche…
On n’y trouvera pas cet article de France Info, qui signale le reflux spectaculaire de l’épidémie à New Delhi, sans mentionner le récent changement de position de l’Inde sur les traitements précoces.
Quant à l’OMS, elle réussit un exploit. Elle publie le 7 mai 2021 un article sur l’Uttar Pradesh, titré « l’Uttar Pradesh sur la dernière ligne droite pour arrêter le Covid-19 », décrivant la politique sanitaire mise en œuvre dans l’état avec l’aide de l’OMS : à partir du 5 mai 2021, 141.610 équipes mobiles devaient faire du porte à porte dans les villages de l’Uttar Pradesh pour dépister les habitats, donner un « kit de médicaments » aux personnes testées positives, et presser les autres de se faire vacciner. Et cet article parvient à ne pas mentionner les mots « ivermectine » ou « budesonide »…
Selon TrialSiteNews, la presse indienne elle-même semble ne pas connaître le nom des molécules recommandées par le Ministère indien de la Santé depuis avril, et chercher ailleurs des explications du spectaculaire retournement de situation en Inde.
Parce que l’Inde va mieux, indéniablement. Le nombre de cas détectés chute depuis le 8 mai (Fig.2), et le nombre de décès a commencé à suivre, depuis le 23 mai (Fig.3).
Il est intéressant d’examiner en détail la situation des différents états indiens, notamment pour ceux dont on connaît la politique spécifique en matière de lutte contre le Covid-19. Car les états indiens ont des politiques, des bilans et des évolutions contrastés (Fig.4). Bien qu’il manque un outil de partage des expérience, on peut trouver quelques informations. On sait par exemple que :
– l’état de Goa a décidé*, le 13 mai 2021, d’aller au-delà des préconisations du gouvernement central indien, et de distribuer de l’ivermectine non pas seulement en traitement précoce (aux personnes atteintes du Covid-19) mais en traitement préventif à tous les adultes. Quinze jours après, la Haute-Cour a validé le principe du traitement à l’ivermectine. (Autres sources.) Par ailleurs, l’état — qui a été l’un des plus touchés d’Inde lors de la reprise épidémique — vient de prolonger le couvre-feu jusqu’au 7 juin.
– l’état d’Uttarakhand a semble-t-il décidé de l’imiter, mais son site gouvernemental n’en fait pas mention — du moins pas en anglais. Il est intéressant de le suivre, car c’est dans cet état que se tient cette année le pèlerinage de Kumbh Mela, qui rassemble des millions de visiteurs venus de toute l’Inde.
– l’état du Maharashtra, comme le relate cet article, applique les directives du gouvernement central indien concernant l’utilisation de l’ivermectine en traitement précoce, mais la Haute Court rendra en juin sa réponse à une demande d’autoriser l’ivermectine en traitement préventif aux côtésde la vitamine D.
– l’état du Tamil Nadu, inversement, à refusé d’appliquer les directives de Ministère indien de la Santé, et en guise de traitement précoce, ne préconise que le zinc et la vitamine C. Le taux d’incidence du Tamil Nadu, qui était en dessous de la moyenne indienne, a dépassé cette moyenne dès le 7 mai, et en est le triple au 30 mai.
Pour plus de lisibilité, on a isolé ces états et quelques autres sur des graphiques représentant l’évolution des taux d’incidence (nombre de cas détectés par million d’habitants, Fig.5) et le taux de mortalité quotidien (nombre de « décès Covid » par million d’habitants, Fig.6).
Il faut se garder de considérer que la politique officielle d’un état s’applique à la population de façon immédiate et exhaustive, mais on peut commencer par supposer qu’il existe un lien entre les recommandations d’un état et la proportion de la population qui a recours aux traitements recommandés. Il est donc raisonnable (même si on ne dispose pas de preuve et qu’il conviendrait d’étudier d’autres facteurs explicatifs) de faire, en première hypothèse, le lien entre la hausse observée au Tamil Nadu et le refus des traitements précoces par son gouvernement local.
Mexique
Un phénomène semblable plonge l’expérience du Mexique dans l’ombre . On a certes beaucoup entendu parler du Mexique lors de la vague qui l’a frappé cet hiver, mais on a moins entendu parler du fait que l’ivermectine a été adoptée par plusieurs états et par la sécurité sociale mexicaine à partir de fin décembre 2020. Un article de Capital, mentionnant l’expérience du Chiapas, fait figure d’exception.
L’étude de Merino et al., menée avec la Ville de Mexico, sur plus de 230.000 patients testés positifs, dont 77.000 ont reçu un kit de traitement (ivermectine + azithromycine) et faisant état de son expérience, selon laquelle le traitement a réduit de 75 % le risque d’hospitalisation chez les personnes testées positives, n’a pas eu énormément d’écho dans les grands médias.
Faisant suite à plusieurs billets précédents (ici, ici, là ou là), on poursuivra ici la veille sur l’évolution du Covid-19 au Mexique, à partir des données officielles du gouvernement mexicain, reprises de façon plus maniable sur cette page.
Rappelons que le gouvernement central mexicain continue à considérer qu’aucun traitement n’existe (Fig.7) et que les seuls médicaments à prendre sont destinés à alléger les symptômes. Il est suivi par la plupart des états qui composent le Mexique, avec quelques exceptions : le Chiapas dès Juillet 2020, suivi à partir de fin décembre par la Ville de Mexico, puis par l’état d’Aguascalientes et celui de Guanajuato, mais surtout par l’IMSS (la sécurité sociale du secteur privé), qui ont inclus l’ivermectine et l’azithromycine dans leurs recommandations de traitement précoce. L’IMSS, qui a des centres de dépistage dans tous les états et qui y distribue des kits de traitement à toute personne recevant un test positif, a donc un impact potentiel sur tout le pays — sans pour autant avoir la maîtrise de la politique sanitaire. Les Mexicains ont d’ailleurs d’autres centres de dépistage que ceux de l’IMSS, et contrairement à ces derniers, certains centres ne leur fourniront pas de kit de traitement précoce en cas de tests positif.
Qu’observe-t-on au Mexique ?
Une tendance est manifeste : depuis la mi-janvier, « ça baisse » (Fig.8).
Ce graphique représente le taux d’incidence pour chaque état du Mexique et permet devoir que la baisse est continue, et particulièrement marquée pour la Ville de Mexico, qui a quitté sa place de pire état du Mexique depuis quelques semaines. C’est encore plus net pour la mortalité (Fig.9), qui a atteint son plus bas niveau depuis les prémisses de l’épidémie en mars 2020. On est bien plus bas qu’au moment « d’accalmie » de l’automne 2020. Pourtant deux ou trois états semblent moins profiter de cette baisse générale.
En particulier, l’état de Quintana Roo, au Sud Est du Mexique, est en hausse depuis 3 mois.
Il faudrait se pencher en détail sur ce qui s’y passe. On sait que le gouvernement local de cet état ne préconise pas les traitements précoces, qu’il y a même des campagnes de désinformation sur l’ivermectine, comme par exemple ce message (Fig.10)*
publié par un groupe Facebook se présentant comme émanant de pneumologues et cardiologues ; on sait aussi que le compte de l’IMSS du Quintana Roo a été suspendu par Twitter (Fig.11) ; mais il serait hasardeux d’affirmer que seuls les habitants du Quintana Roo seraient sujets à de telles pressions. Une évaluation de la part des patients recevant (et prenant) un traitement précoce dans chaque état serait une information précieuse, mais elle ne semble pas disponible.
Ce serait d’autant plus précieux que les médias mexicains ne sont pas très diserts sur le fait qu’un traitement précoce a été largement mis en œuvre. D’après un article de TrialSiteNews, les médias mexicains ne font même pas état de la spectaculaire amélioration de la situation ! On trouve par ailleurs une dépêche de Bloomberg attribuant le recul rapide de l’épidémie à l’immunité post-infection, à la vaccination (bien qu’environ 16% des mexicains aient reçu une dose de vaccin), au réchauffement météorologique et… à la proximité avec les USA. Les traitements ne sont même pas mentionnés comme hypothèse.
On gardera donc le doute sur ce qui se passe au Quintana Roo. Et pour rester rigoureux, on précisera que le lien entre le recul de l’épidémie et les traitements précoces, que ce soit au Mexique, en Inde ou ailleurs, reste une hypothèse. Mais que cette hypothèse est cohérente avec toutes les observations faites dans divers pays, mais surtout avec les preuves scientifiques, apportées par des méta-analyses et des revues systématiques publiées, concluant à la grande efficacité de l’ivermectine face au Covid-19, notamment en traitement précoce.
Brésil
Suite à deux précédents billets (ici et là), voici un aperçu de la situation au Brésil (Fig.12).
L’étude d’Emmmerich s’était arrêtée au 15 mars 2021. Depuis, même si les chiffres ont évolué et partiellement atténué l’effet qu’il décrivait, le constat reste le même : l’état du Pará a traversé la deuxième vague brésilienne avec nettement moins de pertes que l’état voisin de l’Amazonas. Le Pará a fait une deuxième vague plus tardive que l’Amazonas (ce qu’Emmerich n’avait pas pu voir), mais nettement moins haute. Et, si le bilan de cette vague n’est plus 5 fois pire, il est encore 2,2 fois plus élevé en Amazonas qu’au Pará : 1949 décès par million d’habitants entre le 1er décembre et le 29 mai en Amazonas, contre 879 au Pará. Un indice supplémentaire : depuis juin 2020, après l’organisation de la mise en œuvre des traitements précoces, le Pará n’est plus jamais repassé au-dessus de la moyenne brésilienne en termes de mortalité.
Zimbabwe
On n’a pas encore abordé le cas du Zimbabwe sur ce blog. Il est singulier : l’ivermectine, qui y était interdite, a été autorisée fin janvier, après la mort de trois ministres emportés par le Covid-19 lors d’une vague inédite. La chute des décès dus au Covid a dès lors été plus rapide et plus durable que pour ses voisins (Fig. 13).
Pourquoi le Zimbabwe a-t-il été plus touché, en janvier 2021 que la Zambie et le Mozambique, mais moins que le Botswana et l’Afrique du Sud, cela mériterait une enquête poussée (quelle fiabilité des données, quelles politiques de santé publique, quels traitements distribués, contre le Covid ou contre d’autres maladies avec un possible effet sur le Covid…) Sauf éléments concrets permettant d’en douter, une chose semble lisible : à partir de janvier, le Zimbabwe a rejoint le groupe des pays voisins les moins touchés par le Covid-19 et y est resté.
*le document provient du site du gouvernement de Goa, sous le lien « Pro-Active Measures Adopted By Govt On Covid-19 »
** Sur ce post, on peut lire « Non à l’ivermetine« , puis « La publication qui a tout commencé, sur l’effet in vitro de l’Ivermectine contre SARS-CoV-2 est officiellement RETRACTÉE« . Ce qui est faux : l’image reproduite est tirée d’une autre étude, effectivement rétractée avant même d’être publiée, mais sans lien avec l’étude de Caly et al. qui a « tout commencé ».
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