Le deuxième tour peut-il inverser les résultats du premier ? Analyse de Dominique Delawarde

12/04/2022 (2022-04-12)

Par Dominique DELAWARDE le 12 avril 2022

Nombre de mes amis me disent que la réédition du scénario de 2017 est en cours et qu’il aura le même épilogue, bref, que l’élection est « pliée ».

Je ne partage pas totalement cette analyse pour les raisons suivantes.

Certes, le président qui sortira des urnes sera un président élu par défaut puisque 80 % ou plus des électeurs inscrits n’auront pas porté leurs suffrages sur elle ou lui.

Comme en 2017, 39 millions des 48,7 millions d’électeurs inscrits n’ont pas voté pour le candidat arrivé en tête, ce qui relativise l’ampleur de sa victoire au 1er round et laisse déjà présager de grandes difficultés pour gouverner la France pour cinq années de plus.

Mais la question qui se pose aujourd’hui est la suivante : se peut-il que le vote par défaut qui a servi Monsieur Macron au 2e tour de 2017 favorise, cette fois, Marine Le Pen ? Et si oui, pourquoi ?

Examinons les deux situations, les chiffres, les différences fondamentales entre les deux situations (2017 et 2022) qui, en dépit des apparences, ne sont pas du tout les mêmes.

En 2017, les résultats du premier tour faisaient apparaître QUATRE candidats avec des scores élevés : TROIS que l’on retrouve aujourd’hui et UN candidat LR, Monsieur Fillon dont les électeurs s’étaient, en large part et sur son appel, reportés sur Mr Macron au deuxième tour.

En 2022, le réservoir de vote par défaut des LR au profit de Mr Macron a quasiment disparu.

Ce vote par défaut des électeurs LR de Fillon a été anticipé dès le premier tour de 2022, ainsi que le démontre le piètre score de Mme PECRESSE et le score plus élevé de Mr Macron. Le résultat de la primaire LR montre qu’en dépit de l’appel de Mme Pécresse, nombre d’électeurs LR, restés au bercail, se reporteront sur MLP au 2e tour avec Mr Ciotti et beaucoup d’autres, dans le cadre bien compris d’Union des droites, qui seul peut sauver les LR de la disparition.

Ce sont donc, cette fois, les électeurs de Mr MELENCHON, qui feront la différence et le résultat du 2e tour, dans leurs votes par défaut. Soit ils s’abstiendront ou voteront blanc, ce qui revient à voter pour Macron, mais aussi à suivre les consignes de Mr Mélenchon, soit ils voteront, à contrecœur, pour Mr Macron et assureront sa victoire, soit, comme un tiers l’avaient déjà fait en 2017, ils voteront MLP.

Ce que nul ne sait vraiment aujourd’hui c’est l’ampleur du vote par défaut « Tout sauf Macron », qui pourrait bien l’emporter, aujourd’hui sur l’ampleur du vote par défaut « tout sauf MLP ».

Or, des raisons existent pour une telle évolution, un tel changement d’attitude des électeurs et particulièrement des électeurs « Insoumis ». Il y a eu, bien sûr, la crise des Gilets jaunes et la répression plus que musclée qui restera dans les mémoires. Il y a eu cette gestion dictatoriale et calamiteuse de la crise sanitaire qui a fait apparaître plusieurs scandales de corruption (Mac Kinsey, Pfizer) et qui a placé la France dans le peloton de queue des plus mauvaises gestions au niveau mondial. Je doute qu’un personnel soignant Insoumis, qui a perdu son emploi pour refus de se faire vacciner, suive les consignes de vote de Mr Mélenchon. Je doute qu’un Gilet jaune qui a perdu un œil et qui a voté Insoumis suive les consignes de Mr Mélenchon. Je doute que les parents qui ont perdu un proche ou un enfant des effets secondaires de la vaccination expérimentale suivent les consignes de Mr Mélenchon, de Mr Jadot ou de Mme Pécresse.

En clair, il n’est pas impossible que la détestation que Mr Macron a suscitée et entretenue sur sa personne change l’orientation du vote par défaut et favorise un vote « dégagiste » qui lui soit, in fine, défavorable. Les sondeurs ne s’y trompent pas qui donnent une victoire incertaine de Mr Macron, dans la marge d’erreur des sondages.

Mais, me direz-vous, il y a l’Ukraine. Mr Macron serait-il plus apte que MLP pour gérer cette crise ?

Pour répondre à cette question, il faut prendre en compte le fait indéniable que la crise ukrainienne est, en fait, l’expression d’un bras de fer entre deux mondes : un monde occidental unipolaire sous hégémonie US-OTAN-Dollar-GAFAM (20 % de la population mondiale) et un monde qui se voudrait multipolaire, dont beaucoup d’États vivent sous la contrainte permanente de menaces de sanctions US, économiques ou militaires, qui comptent 80 % de la population mondiale, prêts à suivre la Chine et la Russie pour échapper à ceux qui les exploitent.

Ce cadre étant posé, le vote Macron par défaut, c’est la fuite en avant vers le jusqu’au-boutisme guerrier occidental et mondialiste qui se terminera mal et qui n’est pas vraiment la tasse de thé des Insoumis.

La paix reviendra un jour prochain en Ukraine. Quoiqu’il arrive, l’Occident, l’UE et la France devront reprendre des relations avec la Russie et avec les nombreux pays qui suivent avec intérêt, voire soutiennent, la tentative russe de bousculer l’hégémonisme occidental. Monsieur Macron, allié inconditionnel du mondialisme US-OTAN-GAFAM-Dollar, sera certainement moins bien placé que MLP pour négocier avec la Russie et le monde multipolaire.

On peut jouer les bravaches, mettre de l’huile sur le feu, inciter à la guerre, mais pour faire la guerre, il faut avoir quelques chances de la gagner. L’état des forces militaires de la France et de l’OTAN ne permet pas d’envisager de nouvelles provocations dans l’est de l’Europe, provocations bien peu raisonnables, pouvant déboucher sur un conflit nucléaire qui ne compterait que des perdants.

En conclusion, à qui profitera le vote par défaut ? Le dégagisme et le « Tout sauf Macron » l’emportera-t-il sur le « Tout sauf RN » ? Les électeurs réaliseront-ils que s’abstenir ou voter blanc c’est voter Macron ? Que le vote à la présidentielle sera suivi d’un vote pour des législatives qui permettra de tempérer les ardeurs du candidat élu ?

Réponse le 24 avril.

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