06/09/2021 (2021-01-04)
Auteurs : Docteurs Nicole et Gérard Delépine
Mieux vaut tard que jamais, mais combien de morts inutiles ?
Alors que le Conseil de l’Ordre des Médecins français poursuit le Pr Raoult et 5 autres médecins pour utilisation et/ou promotion de « traitement dont l’efficacité n’a pas été reconnue » (chloroquine à faibles doses en phase précoce, entre autres), ce traitement vient d’être reconnu en Italie par sa plus haute juridiction, après l’examen d’un rapport exhaustif du problème par les Professeurs Alessandro Capucci, Luigi Cavanna et Paola Varese du 7 décembre 2020.[1 et 2]
Cette reconnaissance officielle de l’efficacité de l’Hydroxychloroquine et des autres antipaludéens sur le Covid19 s’ajoute à celles déjà actées dans plus de 20 pays [3] dont les populations cumulées dépassent les 3 milliards d’humains.
Mais le conseil de l’ordre doit s’estimer plus qualifié scientifiquement que les experts internationaux.
Le rapport d’expertise scientifique des Professeurs Alessandro Capucci, Luigi Cavanna et Paola Varese mérite d’être lu en entier (30 pages). Nous en donnons ci-après quelques courts extraits commentés.
Sécurité de l’Hydroxychloroquine (HCQ) à faibles doses : le mythe des risques cardiaques
HCQ est un médicament sur le marché depuis 1959 pour les maladies chroniques. Plusieurs travaux ont mis en évidence l’innocuité de l’utilisation du HCQ à la fois dans les thérapies prolongées et dans les cycles thérapeutiques courts avec des doses de 200 mg 3 fois par jour.
Le médicament est actuellement utilisé en Italie par environ 60000 patients souffrant de polyarthrite rhumatoïde ou de lupus. Le Pr Roberto Gerli, président de la Société italienne de rhumatologie, a confirmé, « depuis 35 ans qu’ils [les rhumatologues] l’utilisent, ils n’ont pas enregistré d’effets indésirables significatifs au niveau cardiologique ».
La macroanalyse de Risch (2020) confirme l’innocuité absolue du médicament, utilisé à des doses thérapeutiques et en évitant les patients prédisposés aux réactions cardiaques. L’étude de Pascarella et coll. spécifiquement consacrée à l’examen de l’association entre HCQ et les risques cardiaques (2020), montre que l’utilisation de HCQ n’est pas associée à l’allongement de l’intervalle QT chez une importante cohorte de patients atteints de maladies rhumatismales inflammatoires chroniques.
Les données confirmant l’innocuité de HCQ ont récemment été présentées au Congrès annuel de l’American College de Rhumatologie[4]. La sécurité de HCQ pour la Covid 19[5] concluait : l’hydroxychloroquine est protectrice pour le cœur, pas nocive.
À l’exception de certains rapports d’effets bénins (allongement de QT dans 23% des sujets), HCQ est même associé à une incidence réduite des événements cardiaques défavorables mortels.
Shivraj Padiyar dans sa revue récente[6] conclue « la plupart des données disponibles et crédibles suggèrent que l’HCQ est un médicament sûr, y compris l’essai RECOVERY indiquant l’absence de cardiotoxicité par l’HCQ. »
Les travaux de Hung 2018 décrivent un risque réduit de maladie coronarienne chez les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde traitée avec HCQ.
Selon les données de Sharma en 2016, les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde traités par HCQ avaient une réduction de 72% des risques cardiovasculaires.
Ces observations expliqueraient la réduction de la mortalité globale de l’étude Gentry et coll. 2020, qui a analysé l’utilisation de HCQ chez les anciens combattants souffrant de maladies rhumatismales et démontré une augmentation de leur survie par rapport aux contrôles, sur la même base que d’autres médicaments immunomodulateurs et stéroïdes.
Isaac V. Cohen dans une revue récente des évènements indésirables[7] liés au traitement par chloroquine (CQ) et HCQ[8] remarque que « plusieurs rapports de cas décrivent la mortalité cardiaque associée à l’inflammation du myocarde. L’utilisation de CQ et HCQ dans les cohortes de lupus érythémateux et polyarthrite rhumatoïde, pour l’étude est une coïncidence bénéfique, car ce sont également des conditions inflammatoires affectant le système cardiovasculaire qui sont également traitées avec CQ et HCQ.
L’efficacité de la chloroquine à faible dose dans la Covid est démontrée par de nombreuses études rétrospectives
L’étude CORIST, étude rétrospective italienne, analyse l’évolution de 3451 patients admis dans 33 centres cliniques en Italie du 19 février 2020 au 23 mai 2020. 76,3 % des patients ont été traités par HCQ avec une réduction de 30 % de la mortalité et de la morbidité intra-hospitalière
Celle de Catteau et coll. est une étude observationnelle avec un échantillon très important de sujets hospitalisés : 8075 dont 4542 en monothérapie HCQ et 3533 dans le groupe témoin). Des décès ont été enregistrés chez 17,7 % des sujets du groupe HCQ contre 27,1 % du groupe sans HCQ, ce qui équivaut à une différence de mortalité de 30 % pour les patients hospitalisés recevant un traitement par HCQ.
L’efficacité de la chloroquine précoce à faible dose est démontrée par de nombreuses études prospectives du traitement de la Covid
Ainsi Ladapo et coll. dans leur méta-analyse de 5577 patients[9] inclus dans 5 essais randomisés montrent que l’utilisation du médicament HCQ réduit le risque d’infection, d’hospitalisation ou de décès de 24 %, sans aucune interruption de la thérapie due à la toxicité.
Selon les méta-analyses publiées, l’efficacité du médicament HCQ dépend de la posologie et disparait en cas de surdosage (apport quotidien supérieur à 600 mg) ne respectant pas les recommandations nationales d’utiliser HCQ 200 mg trois fois par jour pendant 5 à 7 jours. Ainsi, si on exclue les 4 publications randomisées utilisant des doses trop élevées (dont les deux grands essais de l’OMS, RECOVERY et SOLIDARITY qui ont utilisé 800 mg/j pendant 9 ou 10 jours respectivement, et une dose totale de 9 200 ou 10000 mg HCQ, on observe une réduction de la mortalité jusqu’à 35%.
La pertinence des faits avérés
« Les données probantes sur le terrain, qui sont les plus importantes pour les malades démontrent avec une très grande certitude statistique l’efficacité et l’innocuité du médicament ».
Dans le cas d’études observationnelles non contrôlées, la référence pour évaluer l’ampleur de l’effet d’un médicament en termes comparatifs est le taux d’hospitalisation dans l’échantillon de malades traités précocement par rapport à la population soumise à d’autres protocoles de traitement ou à leur absence.
Les faits recueillis spontanément dans diverses régions d’Italie au cours de la première phase épidémique (mars-avril 2020) montrent de façon constante et répétée que la comparaison entre le taux d’hospitalisation des personnes traitées à l’hydroxychloroquine (±azithromycine) est de 5 à 6 %, par rapport à un taux de 20% chez les sujets atteints du SRAS-COV-2 soumis à d’autres protocoles thérapeutiques, tel que rapporté par les rapports de l’Institut Supérieur de Santéde la même période.
Cela est constamment relevé dans des situations différentes, menés par des médecins différents dans différentes parties de l’Italie (et dans diverses régions du monde), avec comme seul élément commun : le même protocole de traitement l’hydroxychloroquine (±azithromycine).
Une méthodologie rigide qui aurait rendu aveugle
Le rapport italien propose une explication généreuse[10] aux errements de l’Agence italienne du médicament :
« probablement par excès de zèle, l’Agence Italienne du médicament (AIFA) ainsi que les autres agences internationales de médicaments et instituts supranationaux (FDA, EMA, OMS, etc.) chargés de sauvegarder la santé des citoyens, ont fondé leur jugement sur des données qui n’étaient absolument pas pertinentes à l’élucidation de la question relative à l’efficacité et à l’innocuité de HCQ dans les soins à domicile de la première étape de l’infection par le SARS-CoV-2.
Ils ont vraisemblablement été submergés par la quantité considérable d’informations reçues avec un important biais de l’information des principaux producteurs de connaissances de ce secteur – c’est-à-dire les compagnies pharmaceutiques elles-mêmes, et les instituts de recherche financés par eux… »
« En favorisant les exigences méthodologiques de validité interne, les agences pharmaceutiques ont été contraintes, en raison de l’absence d’études expérimentales menées sur la population de référence réelle (patients covid-positifs traités à domicile), de violer l’exigence de validité externe, qui prime toutefois tout autre critère, car elle détermine la pertinence de la preuve.
Cette violation est confirmée par l’utilisation de critères d’évaluation inadéquats, tels que le taux de mortalité ou la période de séjour à l’hôpital, alors que le critère de jugement le plus approprié pour vérifier l’utilité clinique (et pharmaco-économique) de l’hydroxychloroquine est celui du taux d’hospitalisation des sujets traités. »
Conflits d’intérêt et prise de contrôle (dite « capture » selon le terme international)[11] des agences de régulation
La pratique réglementaire montre la persistance de certains problèmes fondamentaux. Deux d’entre eux sont les phénomènes de conflits d’intérêts et les conséquences de la prise en main (capture) des organismes de réglementation par les régulés eux -mêmes.
La prise de contrôle du régulateur par les régulés eux-mêmes compromet l’intégrité et l’exactitude des décisions publiques, qui ne visent plus à la protection et la satisfaction des intérêts généraux, mais celle des intérêts privés de groupes spécifiques.
L’analyse des cas de capture ou détournement du contrôle des agences de régulation (regulatory capture) a généré des milliers de contributions scientifiques, théoriques et empiriques, appartenant à un large éventail de disciplines académiques qui sont généralement ignorées du grand public. Elles sont malheureusement ignorées complètement en France.[12]
Diverses causes et mécanismes convergent pour permettre la « capture » du régulateur par le régulé.
Tout d’abord, il y a un état général d’asymétrie d’information qui afflige le régulateur et les experts qu’il utilise, qui provient de la plus grande expérience de l’industrie régulée par rapport au régulateur, la difficile mesurabilité des phénomènes biomédicaux, l’imperfection des processus de validation expérimentale et de publication scientifique, le déficit de ressources publiques ou d’inertie institutionnelle. Les firmes en représentant partiellement les différents éléments de risque et de décision, peuvent conduire à des décisions publiques erronées ou sous-optimales dans la défense de la sécurité sanitaire.
Un tel pouvoir de conditionnement est renforcé par le fait que dans certains pays, il y a un manque de garanties réglementaires spécifiques pour la transparence et la réglementation des activités de lobbying et/ou d’autres mécanismes de participation des parties prenantes comme celui des « pantouflages », dans lesquelles les régulateurs complaisants sont ensuite embauchés à prix d’or par les régulés, (La Pira et Thomas, 2017).
Comme le montre la littérature, les phénomènes d’asymétrie de l’information, de lobbying, de pantouflage aboutissant à la capture du régulateur sont particulièrement fréquents dans le monde de la santé, en raison de l’importance économique des intérêts en jeu, de l’urgence dans laquelle les décisions sont souvent prises, de la puissance financière de l’industrie du médicament (qui gère la gestion de la quasi-totalité des essais cliniques), des ressources souvent limitées du régulateur et de l’utilisation stratégique faite par l’industrie privée de la hiérarchie des preuves scientifiques et des publications.[13]
En Italie (comme en France), des épisodes de prise en main de la formation biomédicale et de mise à jour professionnelle ont été mises en évidence. Enfin, il convient de noter que, bien que dans les cas les plus graves, il existe des épisodes de corruption, extorsion ou détournement de fonds (comme, par exemple, dans les événements qui ont abouti à la condamnation n ° 5756 de 2012 de la Cour Suprême, United Civil Sections).
L’asymétrie d’information et les autres moyes de capture du régulateur peuvent le conduire à prendre des décisions erronées même s’il agit en parfaite bonne foi.
Parmi les solutions proposées dans la littérature, il y a le renforcement de recettes déjà proposées dans le passé, mais pour la plupart non appliquées : comme l’interdiction / limitation du parrainage privé d’événements scientifiques biomédicaux, une plus grande implication des sociétés scientifiques dans la détection des conflits d’intérêts, l’ouverture aux différentes parties prenantes, la transparence des documents et accès aux comptes rendus des séances des agences, aux documents réglementaires, utilisation du benchmarking international afin d’acquérir et d’évaluer des preuves du contraire, aux fins d’enquêtes complémentaires.
Que retenir de ce rapport scientifique qui a conduit le Conseil d’État Italien à approuver le traitement précoce par HCQ ?
HCQ à faibles doses n’est pas nocive et parait même protectrice pour le cœur.
Le traitement précoce par HCQ à faibles doses diminue d’environ 30% le risque d’hospitalisation des malades atteints de Covid19. Le traitement précoce par HCQ à faibles doses diminue d’autant la mortalité.
Les agences sanitaires ont été et sont sous influence des laboratoires pharmaceutiques et de leurs complices, qui ont détourné le pouvoir réglementaire des agences dans les seuls intérêts de l’industrie et affidés politiques et scientifiques et/ou médecins, pharmaciens, biologistes, sociétés savantes etc. L’exemple savoureux et dramatique du Remdesivir est le plus récent. Mais c’est une autre saga.
[Notes]
[1] L’usage de l’hydroxychloroquine autorisé en Italie : le rapport scientifique complet – PLANETES360
[2] Hydroxychloroquine approuvée en Italie – PaSiDupes (wordpress.com)
[3] Dont la Chine, l’Inde, le Maroc, la Tunisie, la Malaisie, de nombreux pays arabes du moyen orient…
[4] ParkE, et coll. L’utilisation du HCQ n’a pas été associée à l’augmentation de l’intervalle QT dans une grande cohorte de patients atteints de LSL et de PR 2020 (étude portant sur 681 patients)
[5] New Microbe and New Infect 2020; 37:100747) https://doi.org/10.1016/j.nmni.2020.10074 [lien dysfonctionnel] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7439006/
[6] Shivraj Padiyar 1, Debashish Danda Revisiter la sécurité cardiaque de l’hydroxychloroquine dans les maladies rhumatologiques à l’ère du COVID-19 : faits et mythesEur J Rheumatol 8 octobre 2020. doi : 10.5152/eurjrheum.2020.20174 [–> Revisiting cardiac safety of hydroxychloroquine in rheumatological diseases during COVID-19 era: Facts and myths (eurjrheumatol.org)]
[7] Isaac V. Cohen Événements indésirables cardiaques associés à une exposition à la chloroquine et à l’hydroxychloroquine au cours de 20 ans de rapports de surveillance de l’innocuité des médicaments Sci Rep. 2020 ; 10 : 19199
[8] IsaacV. Cohen Cardiac adverse events associated with chloroquine and hydroxychloroquine exposure in 20 years of drug safety surveillance reports https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7644696/pdf/41598_2020_Article_76258.pdf
[9] Joseph A. Ladapo Randomized Controlled Trials of Early Ambulatory Hydroxychloroquine in the Prevention of COVID-19 Infection, Hospitalization, and Death : Meta-Analysis https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2020.09.30.20204693v1
[10] Ne soulignant pas les conflits d’intérêts pourtant majeurs dans la prise de décisions
[11] « il est plausible que le gouvernement et les organismes supranationaux soient victimes du phénomène de « la capture réglementaire ». Il s’agit d’un phénomène aujourd’hui bien connu dans la littérature qui décrit les effets de l’asymétrie de l’information entre l’industrie (en l’occurrence pharmaceutique) et l’organisme de réglementation, au détriment de ce dernier, qui doit se prononcer sur des questions pertinentes pour l’industrie, avec des informations et des critères interprétant les éléments de preuve, fourni par ce dernier.
Dans cette relation asymétrique, le régulateur n’est pas seulement un décideur autonome, car il dépend de l’industrie comme principale source d’information, mais finit par assumer son « état d’esprit » en absorbant aussi son axiologie.
[13] Mitnick, B., (2011), « Capturing ̳Capture » : Definition and Mechanisms, dans : Levi-Faur D., (2011), Handbook on the Politics of Regulation, E. Elgar
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