11/04/2024 (2024-04-10)
[Source : les7duquebec.net]
Par Khider Mesloub
Depuis l’élection de Macron, « président du chaos, du désordre et de la violence », la France sombre dans la décadence, l’indigence et l’indécence. Ces dernières décennies, la France est fréquemment frappée par des émeutes. Et, depuis quelques années, par l’esprit de mutinerie.
La plus récente mutinerie, menée non pas à la pointe de l’épée ou du pistolet, mais par l’arme épistolaire, a été orchestrée en 2021 par des hauts gradés de l’armée aux facultés intellectuelles dégradées et faisandées appartenant à la mouvance de l’extrême droite.
Plusieurs généraux séditieux avaient commis une tribune appelant à l’insurrection contre les hordes banlieusardes (c’est l’expression polie usitée en lieu et place de « hordes arabes et musulmanes », pour ne pas tomber sous le coup de l’hypocrite loi antisémite), accusées d’entretenir un climat de violence.
Dans cette tribune de militaires publiée le 21 avril 2021 par Valeurs actuelles, parue quelques jours après l’appel à l’insurrection lancé par Philippe de Villiers, intitulée « Pour un retour de l’honneur de nos gouvernants », les signataires militaires menaçaient d’intervenir pour enrayer le « chaos croissant », procéder à une opération de « pacification du pays », probablement selon les méthodes éprouvées durant la « guerre d’Algérie » par les autorités coloniales françaises qui avaient mobilisé 1 500 000 tueurs assermentés, autrement dit soldats, pour livrer la guerre aux Algériens innocents et désarmés en lutte pour l’obtention de l’indépendance de leur pays.
Dans cette tribune de ces militaires séditieux racistes, le premier sujet cité était : « l’islamisme et les hordes de banlieue » qui « entraîneraient le détachement de multiples parcelles de la nation pour les transformer en territoires soumis à des dogmes contraires à notre Constitution », selon les termes de ces signataires xénophobes.
En France, la lutte contre l’islamisme est le cache-sexe de la haine de l’islam et des Arabes, tout comme la prétendue lutte contre la délinquance par les élites et les politiciens (qui vivent majoritairement dans des quartiers huppés, prémunis donc de toute promiscuité avec les délinquants et proximité avec l’insécurité) est le paravent de leur racisme anti-maghrébins et anti-noirs, désignés systématiquement comme les principaux responsables de la criminalité. (Voir : À quoi servent les gesticulations bellicistes et les élucubrations guerrières de Macron ? — les 7 du Québec).
La tribune, publiée soixante ans jour pour jour après le putsch d’Alger de 1961, signée par une vingtaine de généraux, une centaine de hauts gradés et plus d’un millier d’autres militaires, dénonçait le « délitement » qui frappe, selon eux, « la patrie », et se proclamaient être « disposés à soutenir les politiques qui prendront en considération la sauvegarde de la nation ».
La tribune s’en prenait au « délitement » qui s’attaque à la France. Les auteurs de la tribune avaient usé d’une rhétorique comminatoire. « Par contre, si rien n’est entrepris, le laxisme continuera à se répandre inexorablement dans la société, provoquant au final une explosion et l’intervention de nos camarades d’active dans une mission périlleuse », annonçaient-ils. Leur constat se voulait alarmant : « La guerre civile mettra un terme à ce chaos croissant, et les morts, dont vous porterez la responsabilité, se compteront par milliers. » Les militaires étaient clairs. Ils seraient « disposés à soutenir les politiques qui prendront en considération la sauvegarde de la nation ».
Cette mutinerie militaire épistolaire s’inscrit dans cette atmosphère anomique très répandue actuellement en France, autrement dit une France en proie au dérèglement social, à l’absence de normes morales et à l’anéantissement des règles de conduite. Un dérèglement social couronné en haut lieu, au sommet de l’État, d’un bellicisme hystérique et agressif.
Ces dernières années, la France est gangrenée par la violence. Toutes les strates de la société sont rongées par l’agressivité, l’intolérance, la haine, l’esprit pogromiste. On assiste à l’ensauvagement de la société française, depuis le sommet de l’État, responsable d’une violente politique antisociale et d’une répression policière sanguinaire, jusqu’à la base de la société déchirée par de furieuses tensions, en passant par les entreprises dont les salariés sont en butte à la détresse psychologique et au délabrement physique.
Ironie de l’histoire, les militaires, signataires de la tribune, censés donner l’exemple en matière de discipline, de respect de l’ordre et de la loi, ont adopté les mêmes mœurs de voyous que ceux qu’ils dénoncent dans leur tribune : par leurs menaces de mutinerie sociale, de sédition politique, de subversion armée.
En effet, par leur infraction des règlements, transgression du droit de réserve, violation de la civilité, désobéissance politique, ils se sont comportés comme les « hordes de banlieue » qu’ils fustigent encore aujourd’hui, comme la police raciste qu’ils encensent, comme le gouvernement mafieux et belliciste qu’ils condamnent.
Il n’est pas surprenant que la France, en proie à l’anémie intellectuelle, l’anomie sociale, la pandémie raciste, l’esprit pogromiste, une gouvernance belliciste, abrite une horde de voyous galonnés mus par un racisme décomplexé et un comportement civiquement désaxé.
Bis repetita, les militaires viennent de récidiver. Cette fois ces nouveaux galonnés, supposément patriotiques pacifiques, menacent directement le président Macron de sédition. En effet, 12 généraux se rebellent contre la politique belliciste et interventionniste de Macron. Dans leur appel, les 12 généraux, rassemblés dans le « Cercle de réflexion interarmées », déclarent leur totale opposition à la posture guerrière antirusse du président Macron. Une position partagée par de nombreux officiers. C’est sous le titre « ALERTE » que ces officiers généraux ont signé leur rébellion contre la guerre de Macron en Ukraine. Ils lancent un appel ouvert au cessez-le-feu en Ukraine.
« Combien de morts ? Combien de morts encore ? La guerre russo-ukrainienne est déjà un désastre absolu (…) Les dévastations futures pourraient être exponentiellement plus grandes à mesure que des puissances nucléaires se rapprochent de la guerre ouverte. Aujourd’hui quelques voix timides se hasardent à parler de paix. (…) Nous devons, nous Français, nous Européens, rechercher de la part des deux parties leur accord pour que soit immédiatement déclaré un cessez-le-feu. Pour convaincre, il faudra que les négociateurs, à mandater par l’ONU, présentent avec eux un canevas sur les modalités de sa mise en place », écrivent-ils dans leur Appel publié sur le site Le Courrier des Stratèges.
Petit rappel historique : au cours du XXe siècle, la France a connu plusieurs mutineries, dont les plus célèbres sont celles de 1917, 1958, 1961.
Au cours de la mutinerie de 1917, en pleine guerre des milliers de soldats se mutinent contre leurs officiers en scandant « À bas la guerre ! » et en chantant la glorieuse Internationale. (Voir : Vidéos Bing).
« Nous avons refusé de monter en ligne mardi soir […]. Nous nous sommes mis presque en grève, et beaucoup d’autres régiments ont fait comme nous […]. Ils nous prennent pour des bêtes, nous font marcher comme cela et pas grand-chose à manger, et encore se faire casser la figure pour rien, on aurait monté à l’attaque, il en serait resté moitié et on n’aurait pas avancé pour cela. Peut-être que vous ne recevrez pas ma lettre, ils vont peut-être les ouvrir […]. Moi je m’en moque, j’en ai assez de leur guerre… », raconte, dans une lettre à sa femme, un soldat.
Influencés et galvanisés par la révolution en Russie plusieurs soldats de dix régiments signent un tract appelant les réfractaires à la sédition : « Camarades ! […] nous venons vous prier de vous joindre à nous pour […] arrêter ce carnage, cette guerre qui a pour but premier d’enrichir le capitaliste et de détruire la classe ouvrière. »
Le gouvernement s’alarme. Le général Pétain, prenant conscience de l’ampleur de la mutinerie, alerte le ministre de la Guerre : « Depuis quelques jours, les actes d’indiscipline collectifs et les manifestations se multiplient de façon inquiétante. Ils sont certainement organisés et laissent pressentir des mouvements plus sérieux. »
Dans les mois suivant la neutralisation de la mutinerie, des milliers de soldats seront déférés devant des tribunaux. 3 427 condamnations seront prononcées par la justice militaire dont 554 à mort.
Le 13 mai 1958 est orchestré par les réseaux activistes gaullistes d’Alger un coup d’État militaire qui permet au général de Gaulle de revenir au pouvoir. Ce coup d’État en bonne et due force octroie les pleins pouvoirs à de Gaulle. Il lui permet ensuite d’obtenir une dévolution légale du pouvoir qui sera actée par le référendum de septembre, et l’approbation d’une Constitution (la V°) d’inspiration militaire, dont le régime présidentialiste trahit sa dimension dictatoriale (la Constitution gaullienne est truffée d’articles de neutralisation ressemblant à des revolvers pointés sur la nuque des citoyens).
[Voir :
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En avril 1961 a lieu la mutinerie des généraux, également en pleine guerre d’Algérie. En effet, les généraux français Zeller, Challe, Jouhaud et Salan prennent le contrôle d’Alger. Le général de Gaulle, apeuré, craignant l’effet de contagion en métropole, est contraint d’intervenir à la télévision pour solliciter l’aide de la population française. Dans son allocution radiodiffusée et télévisée du dimanche 23 avril, le général de Gaulle implore les Français de l’aider pour sauver son régime putschiste. Dénonçant le « Pronunciamiento militaire », le « quarteron de généraux à la retraite », de Gaulle implore les Français en ces termes : « Françaises, Français, aidez-moi ! ». Les putschistes, incapables de rallier suffisamment d’officiers de haut rang à leur cause, se rendent fin avril.
Il est utile de rappeler que Napoléon I et son neveu Napoléon III se sont hissés au pouvoir également par un coup d’État, c’est-à-dire une mutinerie : le premier en novembre 1799, le second en décembre 1851.
Par ce petit rappel historique, on découvre que la France n’a rien à envier aux Républiques bannières, aux pays africains caractérisés par de fréquentes mutineries militaires concoctées en métropole coloniale. La France est une République canonnière à laquelle le prolétariat ne doit pas adhérer.
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