Gougenot et l’avènement apocalyptique du mondialisme totalitaire (1865)

05/01/2024 (2024-01-05)

Par Nicolas Bonnal

La mise en place du mondialisme technologique évoque bien sûr l’Apocalypse. Même sans être de culture juive ou chrétienne, on peut comprendre (même le chien Ran-Tan-Plan) qu’il se passe quelque chose d’abominable en ce moment à mi-chemin entre le contrôle et l’extermination.

Le penseur Gougenot des Mousseaux publie en 1865 un livre sur les démons. Ce fanatique chrétien comme on dirait aujourd’hui se rapproche du Dostoïevski théologien de la Fin que j’ai évoqué dans plusieurs textes et pour finir dans mon livre sur lui et la modernité occidentale (voyez les Démons, les Karamazov et le fastueux rêve final de Raskolnikoff). Une minorité folle va terrasser, réduire et dominer un troupeau sans âme et sans défense. Nous y sommes.

Dans son dernier chapitre, Gougenot (ancien camérier de Charles X, dernier roi sacré) évoque l’avènement antéchristique qu’il relie aux temps modernes : socialisme, industrie, presse, fin des religions, mondialisation. Voyez aussi sur cette question mon texte sur Chateaubriand et la mondialisation. Gougenot :

« Le premier, le plus inconcevable de tous les miracles, ce serait que tant de peuples ennemis, que tant de nations acharnées de si longue date les unes contre les autres, ouvrissent enfin leur âme, pour la laisser pacifiquement s’épanouir aux rayons d’une même et nouvelle religion, représentée par un seul et même monarque. »

Gougenot évoque même comme le dément Stolz une fédération mondiale à venir :

« Existe-t-il, peut-il exister un moyen de rallier et d’unir en un seul corps politique, en une seule et unique fédération la grande et immense masse des peuples ; une masse qui, par elle-même et par son irrésistible prépondérance, entraînerait en quelque sorte la totalité du genre humain ? »

Il évoque un catholicisme à l’envers :

« Mais où chercher encore, où trouver la cause puissante, la cause génératrice de cette même et unique croyance, de ce catholicisme à l’envers, par lequel il s’agit de révolutionner et de passionner, en le propageant d’un bout à l’autre du monde social, le cœur de nos semblables ? Où donc ? »

L’Antéchrist se rapproche ; l’homme moderne arrive, celui des réseaux et de l’électricité, celui des « fluides » comme dit Gougenot (Nerval y fait allusion aussi dans Aurélia, voyez mon livre sur Internet) :

« Dans ces conditions si simples, et auxquelles les prophéties, d’accord avec les événements, semblent nous préparer, l’Antéchrist, « l’homme des fluides », selon l’expression prophétique de l’hérésiarque Vintras, serait tout uniment l’Homme-RévoIution et pouvoir, l’homme spirite ou pythonisé, l’Homme-Démon, le Verbe de l’Enfer, celui qui briserait et charmerait les peuples, en donnant à la pensée de propagande qui doit réaliser ses plans l’unité nécessaire pour en assurer le règne sur la terre. »

Gougenot évoque une conspiration révolutionnaire, machine à détruire régimes (sauf républicains…) et nations. Le monde multipolaire n’est pour demain (lisez Laurence Guillon pour comprendre ce qui se passe en Russie — quant à ceux qui voient dans la Chine une alternative…) :

« La conspiration pousse encore à la destruction des divers empires et royaumes par les principes nouveaux qu’elle proclame et qu’elle travaille de toutes ses forces à faire prévaloir partout. Déjà elle a mis le trouble dans plusieurs ; elle y a excité des révoltes et des révolutions… »

Le mythe de la fraternité crée le totalitarisme global :

« Et comme ce caractère de fraternité ou d’humanité est identique partout et pour tous les hommes, il s’en suit qu’une seule et même législation, un seul et même gouvernement, doivent être à la fin admis pour répondre aux droits de la fraternité et de l’humanité. »

Comme Joly dans un texte célèbre, notre auteur évoque le rôle des sociétés secrètes (en fait elles ne l’ont jamais été) :

« sur quoi, il faut savoir que les sociétés secrètes, organisées depuis un siècle dans toutes les parties de l’Europe, ou plutôt dans le monde entier, sous divers noms et sous diverses formes sont le vrai foyer où fermentent tous ces projets détestables, et d’où part le mouvement, la force d’agression qui s’attaque ensemble et à l’Église et aux puissances temporelles… »

Gougenot précise ensuite les actions de l’Antéchrist — il est lié au monstre froid de Nietzsche, j’ai nommé l’État :

« Le socialisme, aboutissant au communisme, est la doctrine antisociale qui tend et aboutit à faire de l’État le maître absolu de toutes choses, c’est-à-dire des personnes et des biens, des corps et des âmes. Or, l’Antéchrist se présentant comme l’apôtre et le chef de cette œuvre de fausse et détestable charité, comme le propagateur et le soutien de ce plan de fraternité cosmopolite et démoniaque, il deviendra la personnification parfaite de ce régime, dont la réalisation se complétera sous son sceptre. Préparé de longue main déjà par les essais révolutionnaires, par l’énormité croissante des charges, par ce principe monstrueux dont retentirent, sous le dernier règne, les échos de la tribune législative… »

Cet antéchrist est séducteur et comédien :

« Et personne ne se rencontrera qui se hasarde à contester à ce bateleur couronné, à ce terrible et prodigieux comédien, à ce séducteur des foules, ces excès de bon plaisir sévissant sous la Corme hypocrite des droits et des intérêts de tous ! »

On a droit comme avec Schwab et Davos à l’abolition de la propriété privée :

« Les propriétaires, graduellement courbés et accablés sous un joug impitoyable et intolérable de charges et d’impôts, solliciteront alors, comme un moyen de s’exonérer et de vivre en paix, la faveur de passer à l’état de fermiers ou de tenanciers. Et selon son caprice ou ses intérêts, il expulsera les uns et acceptera les autres, tenant à la fois les hommes par la terre et la terre par les hommes.

Le nom de propriétaire aura péri ; il n’y aura, dès lors, ni classes élevées ni classes inférieures ; il n’y aura ni pauvres ni riches, ni petits ni grands, si ce n’est ceux qu’il lui plaira de combler et d’élever autant que durera son caprice. »

Comme s’il prévoyait l’ordinateur et son clavier, Gougenot voit un « clavecin révolutionnaire » qui sera l’expression et l’instrument (cf. Thalès, Microsoft, Cisco, Google, Apple, etc.) de cette monstruosité totalitaire — et il cite le fameux passage de Saint-Jean :

« Un clavier du plus implacable niveau représentera la société tout entière, chaque touche de ce clavecin révolutionnaire, s’élevant et s’abaissant au gré du maître, et sous le mouvement de ses doigts. C’est ce degré d’égalité dans l’abaissement que nous peignent, avec une prophétique énergie, les paroles littéralement véridiques de Saint-Jean : « Nul ne pourra plus acheter ni vendre sans la permission de la bête, et sans l’exhibition de son signe ! »

Les religions seront tuées. On le voit maintenant (cf. les « grands travaux » de Notre-Dame) avec l’indifférence du troupeau hébété :

« Tenant à la fois en main tous les fils de sa trame, l’Antéchrist détruira, chemin faisant, toute religion, tout culte, excepté celui de sa personne… »

Les résistants seront liquidés :

« Car ses images, universalisant sa présence, sueront le miracle, et le dragon de l’abîme, le démon du spiritisme les animant, elles parleront, elles feront entendre la parole de celui qu’elles représentent. Et qui ne leur obéira point, qui ne les adorera point sera mis à mort !… Et quiconque n’observera point sa loi, quiconque ne s’assujettira pas à tenir pour bon et pour mauvais ce que ce monstre aura décrété bon ou mauvais sera coupable, et devra mourir. »

L’humanité deviendra le troupeau dont rêve Platon, troupeau que voit arriver Vance Packard étudié ici :

« Les mariages ne seront, sous sa loi, que des unions de passage entre individus de sexes différents. Il en imposera le devoir, afin de pourvoir à la conservation de l’espèce ; mais il les dissoudra selon son caprice, selon le vœu de quelque nouvel intérêt. Seul maître et seul éducateur des enfants procréés sous le jeu de ce vaste système de prostitution, il se proposera pour but d’anéantir toutes les traditions de la famille ; et sa république réalisera, quant aux mariages, mais en les dépassant, les cyniques beautés de la république de Platon. »

Le troupeau sera marqué au signe de la bête (au code QR donc) en attendant mieux)  :

« Et ne nous récrions point contre cette expression d’éleveur qui doit nous sembler si grossière ; car les hommes, sous ce néfaste empire, ne formeront, à la lettre, qu’un immense troupeau dont chaque tête se verra marquer au signe de la bête2. »

Tout cela est lié au progrès de la technologie de la communication. À l’époque on a le télégraphe pour créer la Babel mondialiste :

« Voyez le fil électrisé du télégraphe s’emparant de la pensée pour lui donner le vol de l’éclair ! Chaque jour donc, les relations de peuple à peuple, en se multipliant, se simplifient !… et, déjà, deux ou trois langues, élevées à la hauteur de langues universelles par le vœu de la littérature et des affaires commerciales, offrent au prix de faciles études les clefs de toute intelligence humaine ! Le libre-échange de la pensée, que Babel avait interrompu, et qui prépare l’unisson de la pensée, semble donc poindre et précéder le libre-échange de toits les biens de la terre, ce principe devant lequel, poussé par l’esprit aventurier du commerce, l’économiste moderne veut que s’effacent toute frontière et toute nationalité. »

Le patriotisme sera à exterminer :

«  Car le patriotisme, déjà, n’est plus qu’insigne étroitesse d’esprit et de cœur pour les vrais libéraux du progrès, pour ceux que décore le titre de cosmopolites, ces prochains dominateurs de l’opinion… »

Pauvres Zemmour, Marine, Florian et Asselineau ! Ils ont face à eux l’Antéchrist en personne, le tueur des nations !

On aura un César mondial :

« … et bientôt, du fond de son palais, un seul maître, un César, dieu, pontife et monarque, la main sur le fil électrique, pourra dater ses décrets, je ne sais d’où, sera-ce de Paris, de Moscou, je veux dire de Constantinople, de Rome ou d’ailleurs ? »

Sa Majesté du Pouvoir Humanitaire (belle expression) poursuivra de sa haine tous les résistants :

« Faites périr, effacez de la liste des vivants tel homme, telle famille, ou telle secte, qui semble méconnaître en ma personne la Majesté du Pouvoir humanitaire. Quelques minutes après, le fil du télégraphe ? obéissant, apportera cette réponse : Sire, vous avez dit, et votre parole, — ainsi que doit être — a fait la loi ! bénie soit-elle : l’ordre règne. »

À la même époque (simple rappel), le frère Jules Verne et le frère Ulysse S. Grant célèbrent cette rapide unification électrique et politique du monde.

Frères qui nous présentent aujourd’hui l’addition salée…

Sources :

https://archive.org/details/mursetpratiquesd00goug_0

https://reseauinternational.net/le-president-grant-et-la-republique-universelle-en-1873/

https://reseauinternational.net/dostoievski-et-la-prophetie-du-nouvel-ordre-mondial/

https://www.dedefensa.org/article/maurice-joly-et-le-gouvernement-par-le-chaos-vers-1864

https://fr.wikipedia.org/wiki/Roger_Gougenot_des_Mousseaux


[Voir aussi : La religion de l’Antéchrist]

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