Poésie : Laurence Guillon contre « les dévoués valets des Ténèbres »

Par Nicolas Bonnal

Ce texte sur des vers rimés promis à de rares Happy Few (l’expression n’est pas de Stendhal, mais de Shakespeare comme toujours) s’adresse aux fans de Laurence Guillon, qui offre l’originalité d’un blog double — de combat et de lutte contre les ténèbres du mondialisme ; et de survie et résurrection intérieure, résurrection qui se passe dans le cadre qui lui convenait de notre Russie orthodoxe et profonde. Le cas est assez exceptionnel : on pense à cette autrichienne ministre persécutée (Karin K.) depuis, qui est aussi polymathe, et que Poutine avait salué le jour de son mariage. Laurence poétesse est aussi traductrice, jardinière, musicienne, chanteuse et peintre — elle m’a offert un très beau tableau solaire qui orne mon deuxième appartement de travail dans mon bled andalou. Je ne peux malheureusement pas dire que l’Espagne pourtant moins esquintée que leur hexagone ait gardé les vertus que Laurence trouve en Russie profonde, à cent bornes de Moscou ? Mais Laurence est tout sauf une illuminée, cette aventurière voit les choses telles qu’elles sont, c’est une mystique avec un regard réaliste et parfois justement profane. Le mystique trop rêveur a vite fait de se faire bouffer — esprit compris — par les Temps qui courent.

Soyons réalistes donc. J’ai demandé ses poèmes à Laurence par curiosité et aussi ai-je ajouté parce qu’ils sont trop chers. Ancien poète amateur moi-même j’ai bradé les miens (écrits depuis trente-cinq ans quand même) à trois euros sur Amazon. Et j’ai des couillons de lecteurs qui tentent de revendre mon recueil à deux euros. La poésie est un risque à courir (on se fait traiter de mirlitons par les amateurs de destruction massive) par les temps qui courent, puisqu’il n’y a plus de lecteurs — ou peu s’en faut. Le mieux est de lui virer à Laurence une somme sur un compte français et de recevoir le PDF. Ou carrément et courageusement (achetez le couscous et les bougies avant) de commander le livre, si mon texte le justifie !
J’ai aimé le ton et les sujets guerriers des textes, et j’ai pensé au grandiose peintre Desvallières, l’ami flamboyant de Léon Bloy, génie méconnu, mystique et expressionniste, père de toute une tribu, et qui s’engagea sous les drapeaux à 53 ans pour défendre sa patrie, dans cette guerre où les derniers nobles français moururent. Après on n’eut plus que des électeurs et des consommateurs.
Laurence écrit dans son très grand poème l’Arche, toute consciente des enjeux apocalyptiques actuels :

« Le monde s’ouvre en deux, comme un crâne brisé,
Coulent les ténèbres, avec le sang versé,
Où se noient emmêlés les bêtes et les gens,
Trop peu de coupables et beaucoup d’innocents. »

Je trouve malheureusement qu’il y a bien moins d’innocents que jadis, qu’il s’agisse de guerre américaine, de vaccins, de credo climatique ou autre. Avant le paysan sacrifié par Napoléon ou Gambetta n’était pas informé, maintenant son héritier présumé aime se désinformer, fût-ce au risque de se faire écharper, affamer et ruiner. Le troupeau est enthousiaste comme dit Céline avant la giclée de Quarante. Il aime le mensonge, il aime le chiqué.
Refusons alors leur sabbat (climat vaccin guerre totale) :

« Les voilà tous dansant sur nos tombes futures.
Et l’unique chose dont je puis être sûre,
C’est qu’à leur bal maudit, je n’irai pas valser
Sans doute je mourrai, mais sans avoir chanté
Les louanges du diable et de ses diablotins
Qu’encensent bégayant tous ces tristes pantins. »

C’est tout ce qu’on peut faire en effet : refuser de chanter avec ce pape (lui ou un autre) le diable et ses sacrements.
Laurence visionnaire écrit ensuite dans son Écho secret des massacres :

« Voilà qu’arrive l’impossible…
Ces cohortes épouvantées
Devant le fracas des armées,
Et ces nuages invisibles,

Depuis ces villes écharpées,
Sont pleins des présences terribles
Que vous nous avez déchaînées,
Dévoués valets des ténèbres,

Malfaiteurs puissants et célèbres,
Aux âmes déjà remplacées
Par ceux qui vous les ont volées. »

Ce grand remplacement des âmes est en effet grandiose ; je cite toujours le film de Don Siegel l’Invasion des profanateurs de sépultures. Nous voulions montrer que les gens devenaient des légumes, disait ce maître du réalisme brutal et de Clint Eastwood. On est au milieu des années cinquante : la télé bouffe tout, l’autoroute (voyez aussi Stanley Donen) aussi, et bientôt le monde cybernétique qui inspirera à Debord des lignes superbes.
Le combat du système technétronique pour reprendre un terme célèbre passe par une censure de la terre, une interdiction de tous les éléments : terre, air, soleil, eau. L’écologiste informaticien rêve d’une terre brûlée (cf. Hawaii) et d’un homme affalé effaré (cf. Rousseau Sandrine). En effet le diable veut nous priver de la nature pas seulement de la vie (voyez et écoutez Harari sur les Territoires occupés).
Laurence écrit dans Joyeux Noël :

« C’est la terre qu’ils n’aiment pas,
Et qu’ils nous ont privée de voix,
Et puis le ciel bleu par-dessus,
Qui leur blesse par trop la vue.

Ils n’aiment pas la vie qui sourd
Des moindres failles du béton,
Tout ce qui brûle avec passion
Et sanctifie le fil des jours. »

C’est le sujet de mon libre sur la Destruction de la France au cinéma, France bétonnée et remplacée dans les années soixante par un gouvernement soi-disant souverainiste. Voyez Mélodie en sous-sol (ô Gabin à Sarcelles ville nouvelle…), Alphaville de Godard ou Play Time de Tati pour comprendre.
Laurence ajoute :

« Ils sont laids, froids, méchants et bas
Mais on n’entend plus que leurs voix,
Leurs mille voix dans le désert
De nos pays prêts à la guerre. »

Les techno-démocraties sont toujours en guerre depuis des siècles, mais ces guerres sentent la mort, elles ne témoignent jamais d’un excès de vie. De pures guerres d’attrition, celle de Quatorze et de Quarante, des guerres voulues par la bulle financière « anglo-saxonne » (ouaf), comme celle d’Ukraine. Une élite aux vues reptiliennes ou extraterrestres dirait-on.

Dans Cassandre (lisez le chant II de l’Enéide mon Dieu), Laurence écrit superbement :

« La bêtise aux cent mille bouches,
Le grand tohu-bohu du diable,
S’en va remplir ses desseins louches
En rameutant la foule instable,

Chien noir de cet affreux berger,
Glapissant à tous les échos,
Elle pousse à courir nos troupeaux
Sur les chemins qu’il a tracés.

Et comme il y va volontiers,
Le grand troupeau des imbéciles,
À l’abattoir sans barguigner,
Se pressant pour doubler la file. »

Le troupeau des imbéciles a été fabriqué artificiellement par la culture et l’art moderne (lisez Jacques Barzun, qui en parle bien, un autre exilé lui aussi) ; mon ami Paucard avait excellemment titré : la crétinisation par la culture — et par la télé, et par les médias, et par l’immobilier, et par l’économie, et par les vacances, et par la politique (mais quel futur gentil candidat de droite fera enfin la guerre à la Russie, merde ?).
C’est Alain Soral qui disait l’autre jour que la France ne pourrait être sauvée que par un miracle : que c’est juste !
Car la France est tombée plus bas que la plupart des pays, même d’Europe. Et comme je l’ai montré, ce n’est pas parce qu’elle est une victime ; c’est parce qu’elle l’a voulu. C’est le coq hérétique, ou comme dit Van Helsing dans le Dracula de Coppola la concubine de Satan, et depuis longtemps.
Très beau poème aux teintes géographiques : Aigues-mortes, Saintes-Maries. Laurence pense à Saint Louis tandis que l’emplâtre revote Macron :

« Aigues-Mortes, Saintes-Maries,
Aux quatre vents bien élargies,
Reviendra-t-il jamais le saint roi d’autrefois
Dans sa robe de lys, sur son blanc palefroi ?

Aigues-Mortes, Saintes-Maries,
Verrons-nous demain déferler,
Sur vos ruines de sel blanchies,
De sombres foules d’étrangers,

De conquérants et de bandits,
De bateleurs et d’usuriers,
Qui vendront vos fils au marché
Sous l’amer soleil du midi ? »

Quand on est Français sincère et lucide on a de quoi désespérer — j’en sais quelque chose. Laurence écrit sans hésiter dans la Fin du jour :

« Je meurs sans descendance et j’en rends grâce à Dieu,
Sur l’autel de Moloch, je n’étendrai personne.
Pas de fille soumise au plaisir des messieurs,
Pas de garçon brisé par le canon qui tonne. »

Sur l’imbécillité cosmique qui frappe ce peuple depuis longtemps (revoir Drumont, Céline ou Bernanos) Laurence écrit un texte admirable, l’abîme :

« L’abîme s’élargit et le tumulte croît
Sur la terre entière, le grand tohu-bohu…
Mais la France ébahie ne le voit toujours pas
Et n’entend pas les voix de ses anges perdus.

Elle ne comprend pas que déjà tout finit,
Qu’en bradant son honneur aux bandits de rencontre,
Elle dut en concevoir tous ces horribles fruits
Qui, mûris à présent, vont et partout se montrent.

Étrangers à la terre et bien trop loin du ciel,
Nous voici pourrissants dans cet entre-deux,
Sans idées, sans patrie, sans famille et sans Dieu,
Mollusques accrochés au néant démentiel. »

Mollusques accrochés au néant démentiel : je parlais Desvallières, on dirait du Goya. Il faudrait être Tarkovski pour filmer un texte comme celui-là. J’aime Voir les textes, pas les lire.
Pour se raccrocher, on a les animaux (je repense toujours à Leopardi et à ses oiseaux) ; dans Hommage notre poétesse écrit :

« Mon gentil petit chien, vas-tu me pardonner
De recueillir si tôt ce chien qui te ressemble ?
Malgré tout, je le sais, dedans l’éternité,
Nous nous retrouverons à jamais tous ensemble.
Et tu ne seras plus, là-bas, aussi jaloux,
Car d’amour jaillissant nous ne manquerons point. »

L’amitié des animaux est un don divin comme on sait (elle peut aussi devenir un don pour crétins, tout étant parodié en nos temps retournés) ; alors Laurence ajoute :

« Et toi, pendant neuf ans, mon joli petit chien,
Tu fus le gai soleil des instants quotidiens,
Gracieux comme un lutin.
Je t’ai porté là-bas, dans notre monastère,
Je t’ai bercé longtemps dans le vent de l’été,
Qui croyait avec toi pouvoir encore jouer,
Puis j’ai dû te coucher, souple et doux, dans la terre
Pour la première fois, j’ai dû t’abandonner. »

Parfois Laurence sur son blog écrit des phrases fulgurantes sur son paysage russe, et surtout sur le ciel. Je ne me suis jamais risqué à décrire le ciel moi (trop peur qu’il me tombe sur la tête !) ; mais dans l’Arc-en-ciel elle écrit :

« De tous ces plats d’argent renversés sur les champs,
Coule le lait de la lumière qui s’étale,
Et dans les blancs remous de cette gloire pâle,
De scintillants oiseaux montent tourbillonnants.

Au loin, l’ourlet bleui des collines dormantes
Borde de noirs labours et des vignes crispées,
Les nuées soulevées basculent, chancelantes,
De lourdes draperies au nord-ouest épanchées.

Et sous leurs plis violets s’esquisse l’arc-en-ciel… »

C’est très beau, innocent, et cela me mène à mon poème préféré, que je ne commenterai pas :

Pressentiment

« Il est des jours d’été pleins d’automne secret,
Comme au sein d’un beau fruit l’obscur noyau repose.
Leur lumière est plus douce et leur vent est plus frais,
Je ne sais quel mystère imprègne toutes choses.

Sur le ciel trop brûlant passe un voile doré
Qui donne à la nature un fond glorieux d’icône,
Les arbres s’illuminent et les prés desséchés
Font au nimbe solaire un drap de paille jaune.

Et mon cœur s’éclairant, pareil au verre frêle
De la lampe allumée, couvant la jeune flamme,
Laisse monter sereine à timide coups d’ailes,
La lente adoration qui embrase mon âme. »

On a ici un bel héritage de cette culture française qui n’existe pas. Mais pas de commentaires !

Dans Sainte Rencontre, Laurence écrit sur les astres et la Croix :

« Le vieillard Siméon prit le petit enfant,
Qui portait les étoiles dedans son corps langé,
Et vit dans ce moment jusqu’au fond le passé
Qui monte vers demain sous le flot des instants.

La grande croix du temps qui perce nos destins,
Irradiant nos larmes d’une lumière sans fin,
Instrument de supplice qui jette sur nos vies
L’éclat écartelé qui les réconcilie.

Verticale des siècles dans la mer éternelle,
Astre des jours plongé sous l’écume actuelle,
Qui tremble à la surface de l’océan profond
De l’antique existence au centre des éons. »

Ici on se promène dans le cosmos et à travers le temps.

Dans Croquis sinon Laurence renonce à nos alexandrins et affronte un mètre brutal :

« Ruissellement
Roucoulements
Tout petit chant
Intermittent
File une abeille.
Le grand azur bascule à l’orée des murailles,
Lisses, lents déplacements, très hauts lacis
Des martinets précis.
Le soleil assis sur le toit,
Rêve et balance ses pieds d’or.
L’ombre bleue le boude à l’écart,
Sous les loques lourdes de la pierraille,
Fuyant l’effroyable et douce lumière… »

On arrive à l’acédie, thème qui me préoccupe depuis toujours ; j’en ai parlé dans mon Graal et dans mon livre sur Cassien. Les moines les premiers ont vécu cette épreuve qui frappe aussi des chevaliers dont Galehot :

« Mon cœur est sourd
Comme le plomb,
Étanche et lourd
Et sans passion.
Lampe sans feu,
Miroir sans tain
Des vieux chagrins,
Vide de Dieu.
Pourquoi Seigneur
Me laisser choir
Dans ce trou noir
Et sans lueur ? »

Il y a un ton saturnien (le plomb) qui évoque Verlaine bien sûr et le titre même du recueil de Laurence : A l’ombre de Mars. Les planètes et leurs métaux, une belle alchimie…
Dans Vieil ami on a un ton hugolien, quand la nature parle (cf. Stella : « un vent frais m’éveilla, je sortis de mon rêve… ») :

« Le vent frais me caresse et sa chanson me suit,
De l’orée de mes jours à leur issue prochaine,
Mon plus fidèle amant me chante la rengaine
Dont jamais ne fut las mon cœur par trop meurtri.

J’écoute autour de moi son verbiage indistinct,
Ses cent chuchotements et ses multiples ailes,
Dans les remous d’azur du glorieux matin
Qui célèbre toujours son enfance éternelle.

Je passerai bientôt, mais son mouvement bleu
Et sa folle oraison ne prendront jamais fin.
Je laisserai sur terre à ses jeux incertains
La trace de mes pas et mes derniers adieux. »

Quel beau chuchotement éolien tout de même. J’ai toujours sinon pensé que trois quatrains aussi c’est mieux que deux quatrains et deux tercets.

Un dernier texte, le Lac final alors que la patrie trahie s’en est allée :

« Et je me souviendrai, devant l’espace ouvert,
De la mer vivante et douce, des rivages
Où j’allais tout enfant cherchant des coquillages
Dans la tiédeur salée, dans les parfums amers.

Large mer des larmes, ma douce France enfuie
Je m’écarte de toi comme on quitte un tombeau,
Sur nos tendres années implacablement clos,
Gisant silencieux en notre terre trahie. »

SOURCES

Laurence Guillon, à l’ombre de Mars.

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Paul Virilio et l’ère de la dissuasion globale

Par Nicolas Bonnal — Septembre 2019 — Source nicolasbonnal.wordpress.com

Jamais nous n’avons tant eu l’impression que notre planète, comme dit Hamlet (ou plus exactement Rosencrantz) est devenue une prison, prison dotée d’une foule de geôles, d’interdits, de flics de la pensée. La France est un camp de concentration médiatique, culturel et politique dont on ne s’échappe que par l’exode virtuel, ce qui est une faible consolation, puisque les responsabilités de l’aliénation sont imputables à cette même omniprésente et addictive technologie. Nous prétendons retourner contre l’ennemi les armes qu’il utilise pour nous emprisonner. Comme si nous n’avions pas compris Tolkien et la menace protéiforme et polyfacétique de son anneau…

Un des plus brillants penseurs de notre époque aura été l’urbaniste et théologien Paul Virilio qui dans un langage particulièrement inspiré a expliqué cet anéantissement de l’espace par la dromocratie (la dictature de la vitesse). Virilio évoque les grands bonds de cette vitesse depuis la renaissance ou l’épouvantable Napoléon, mais René Guénon parlait déjà d’Abel, de Caïn, et du temps dévoré par l’espace ; puis de l’espace dévoré à son tour.

Dans un passionnant entretien avec Jean-Luc Evard, Virilio nous éclaire :

Ce qui est en cause dans le progrès, c’est une accélération sans décélération, c’est-à-dire une hubris, une démesure.

On relira Eschyle sur ce point (car on oublie que pour Eschyle le fou dans Prométhée n’est pas le titan enchaîné, mais le néo-dieu usurpateur Zeus). Et on continue sur notre incarcération du monde :

À côté de la pollution des substances (dont traite l’écologie « verte »), il y a une pollution des distances : le progrès réduit à rien l’étendue du monde. Il y a là une perte insupportable, qui sera bien plus rapide que la pollution des substances. Et qui aura des conséquences autrement plus drastiques que celles relevées par Foucault à la suite du grand enfermement — la réalisation du grand enfermement, de l’incarcération du monde, dans un monde réduit par l’accélération des transports et des transmissions. Pour moi, l’écologie grise remet en cause la grandeur nature.

Et Virilio d’indiquer :

Projetons-nous en imagination deux générations devant nous : vivre sur terre sera insupportable, de par le phénomène d’incarcération dans un espace réduit à rien.

Quant à la « fin » (de la géographie, ou de l’histoire), il s’y agit de la finitude — non d’un terminal.

Virilio nous met en garde contre la farce scientifique (l’expression est de moi), qui, bâtie sur le mensonge éhonté de la conquête spatiale, nous fit miroiter d’autres mondes :

Face à ces phénomènes d’incarcération, d’enfermement, on est en train de chercher un outre-monde (des terraformations, par géo-ingénierie). Les astrophysiciens sont déjà en train de nous préparer une autre Terre promise. En Europe, il y a déjà des gens qui vivent enfermés dans des containers pour expérimenter les voyages vers Mars, la vie en exil aux limites de l’extrême. Toutes ces choses-là sont des signes pathologiques de l’exil à venir, ou de l’exode. Derrière l’écologie et la préservation de l’environnement, pour beaucoup de scientifiques, c’est déjà fichu. On est déjà en train d’anticiper une outre-Terre.

Lisez et relisez les lignes de Guénon sur cette capacité hallucinatoire du monde moderne. Puis pensez à ces jeunes du métro ou du train, logés dans six mètres carrés, et qui passent leur espace/temps sur les centimètres carrés des écrans lumineux de leur smartphone… puis pensez aux enfants de trois ans déjà hypnotisés et aliénés par une techno-addiction qui les rendra obèses, asexués, déracinés, humainement invertébrés et politiquement esclaves. Le système, et ses élites devenues folles ou simplement achetées, exulte.

On sait que notre monde moderne s’est bâti sur les grandes découvertes et les colonies. Virilio observe que le virtuel repose sur les mêmes préceptes et illusions :

Autre exemple de cette recolonisation, de cette quête d’une terre promise, ce sont les cyber-continents, l’espace virtuel.

Le sixième continent est une colonie virtuelle.

On nous dit que les gens s’y amusent, que c’est pour leur bien, pour la communication. En réalité, l’aventure coloniale recommence. Aussi bien chez ceux qui recherchent d’autres planètes que chez ceux qui peuplent l’outre — monde du sixième (cyber) continent qui vient supplanter — je dis bien : supplanter — les cinq autres, ceux de la géologie et de la géographie. L’idée de la colonie est très importante.

C’est que la colonie nous enferme :

Pour l’instant, la globalisation est un phénomène d’endo-colonisation. Et le colonisateur, c’est la vitesse, engendrée par le progrès de la technique (transports, transmissions, etc.). C’est le pouvoir de la vitesse, qui nous enferme, nous conditionne. C’est en ce sens que c’est une musicologie, un envoûtement.

Roland Barthes remarque du reste dans ses Mythologies si peu lues que les héros soi-disant aventuriers de Jules Verne aiment vivre enfermés dans des machines ou des décors de théâtre.

Virilio rappelle qu’enfant il vécut mal la guerre entre les occupants et les alliés :

Les Allemands dans la rue et les amis qui nous bombardaient. Eh bien j’ai de nouveau le sentiment d’être occupé. La mondialisation nous occupe, elle nous enferme. D’où mon intérêt pour le Mur de l’Atlantique (sur lequel j’ai travaillé dix ans). La clôture. La forclusion du monde.

Il rappelle l’illusion de la mobilité qui est une mobilité formelle et factice (aéroports, queues, embouteillages, salles d’attente, avions, trains, bagnoles) :

Qui sont les sédentaires ? Ceux qui ne quittent jamais leur siège d’avion, d’automobile, ceux qui sont partout chez eux, grâce au téléphone portable. Qui sont les nomades ? Ceux qui ne sont nulle part chez eux sauf sur les trottoirs, sous les tentes des sans-abri. C’est pourquoi je dis : « Ne me parlez pas de la périphérie. »

Oui, le nomade au sens actuel n’est pas le milliardaire d’Attali qui s’y connaît en bible comme Bocuse en Panzani. Le nomade c’est le pauvre hère sous une tente.

Et basculons. Le procès du transport moderne devient le procès des camps d’extermination :

On va là vers une révolution de l’emport, pas du transport, de l’emport, je veux dire : la quantité déplacée. Il y a là quelque chose qui a été vécu dans la déportation et l’extermination nazie. Il ne faut jamais oublier — et là je suis d’accord avec R. Hillberg — que la déportation est plus importante que l’extermination. C’est la déportation qui a mené à l’extermination. Le mouvement de déplacement de population a été l’origine de l’extermination.

Et de conclure sur cette question épineuse (jusqu’où peut-on incriminer notre usage de la technique ?) :

Là encore, quand on met l’accent sur les camps et que par ailleurs on demande à la Deutsche Bahn de faire son mea culpa, on a raison. Sur la photo la plus connue du camp d’Auschwitz, on voit les rails et le portail. Il faut la regarder en sens inverse : les rails sont plus importants, sans les rails, il n’y aurait pas eu Auschwitz.

Une belle réponse de chrétien, inspiré par notre Thérèse de Lisieux, serait la pauvreté :

Je me sens franciscain : la pauvreté, « Dame Pauvreté », cela nous ramène à la théologie de la pauvreté. À la théologie de la vitesse.

À la théologie de la pauvreté de la vitesse. Quelle est la pauvreté de la décélération par rapport à la richesse de l’accélération ? C’est une des grandes questions de l’humilité chrétienne.

Thérèse : « L’humilité c’est la vérité. ». Phrase théologique, bien sûr, mais aussi scientifique (et que les scientifiques n’ont pas comprise).

On peut toujours rêver chrétiennement, surtout avec un Vatican comme ça. Mais on sait que « le destin du spectacle n’est pas de finir en despotisme éclairé (Debord). »

Virilio établit une définition importante sur les charlatans (Debord toujours) postmodernes que sont devenus les savants et autres experts en réchauffements, soucoupes, nanotechnologies, racismes :

Jean-Luc Evard. Quelle différence fais-tu entre scientifiques et technoscientifiques ?

Paul Virilio. Comme disait un scientifique récemment : « Nous appliquons au monde que nous ne connaissons pas la physique que nous connaissons. » Là, de fait, on est devant l’illusionnisme scientifique.

Et puis vient la cerise sur le gâteau. Le système nous fait peur, le système nous persécute, le système nous dissuade. C’est la fin des grandes évasions de nos jeunesses. Virilio rappelle la mésaventure du cinéaste Éric Rohmer…

Je considère qu’après la dissuasion militaire (Est-Ouest), qui a duré une quarantaine d’années, nous sommes entrés, avec la mondialisation, dans l’ère d’une dissuasion civile, c’est-à-dire globale. D’où les interdits si nombreux qui se multiplient aujourd’hui (exemples : un des acteurs de La Cage aux folles déclarant qu’aujourd’hui on ne pourrait plus tourner ce film ; ou mon ami Éric Rohmer à qui son film, L’Astrée, a valu un procès, un président de conseil régional l’attaquant pour avoir déclaré que L’Astrée — le film — n’a pu être tourné sur les lieux du récit, engloutis par l’urbanisation, tu te rends compte ?). Donc je suis très sensible au fait que nous sommes des Dissuadés.

C’est bien en effet la prison sans barreaux dont nous a déjà parlé Aldous Huxley ; elle est en voie non plus de réalisation mais d’achèvement. Et cette expression de dissuadés a du génie et ô combien de justesse : nous sommes en effet dissuadés d’agir, puisque c’est la prison ; de parler, puisque c’est les amendes ; de penser, puisque c’est inutile ; et de vivre, puisque cela pollue.




Édouard Drumont, et la montée du grand impérialisme américain

Par Nicolas Bonnal

On a déjà étudié Mgr Delassus et sa conjuration antichrétienne — et son étude sur l’américanisme qui montre que l’Amérique est sans doute une matrice et une république (une république ou un royaume comme celui d’Oz ?) antéchristique qui repose sur quatre piliers : le militarisme messianique d’essence biblique ; le matérialisme effroyable ; la subversion morale totale qui défie et renverse aujourd’hui toutes les civilisations (LGBTQ, BLM, Cancel culture, Green Deal, etc.). Quatrième pilier enfin : pire qu’Hiroshima, l’arme absolue semble être cette bombe informatique dont l’admirable et déjà oublié Paul Virilio (dernier penseur français d’importance) a parlé. L’éditeur de Virilio, Galilée, a d’ailleurs repris un de mes textes sur cet esprit fondamental.

Dans le tome deuxième de sa Conjuration Mgr Delassus cite Drumont (Drumont c’est comme Céline : on oublie ses propos sur les juifs et on se concentre sur le reste) sur la naissance de l’impérialisme gnostique des USA qui volent impunément — en arguant d’un attentat attribué à Ben Laden, pardon au gouvernement espagnol d’alors — Cuba et les Philippines pour faire de l’une un bordel (puis un paradis de sanctions communistes…) et de l’autre une colonie pénitentiaire (300 000 morts tout de même, voyez mon texte sur fr.sputniknews.com basé sur des historiens libertariens) puis capitaliste ad vitam (voyez le sort des ouvrières philippines dans film The Bourne Legacy avec Jeremy Renner par exemple).

L’étonnant et fondamental Monseigneur Delassus donc, le dernier très grand esprit du dévasté depuis clergé catholique (voir aussi Mgr Gaume bien sûr) :

« M. Edouard Drumont faisait tout récemment ces observations : “Ce dont il faut bien se pénétrer, c’est que les États-Unis d’aujourd’hui ne ressemblent plus du tout aux États-Unis d’il y a seulement vingt ans.”

“II y a eu, surtout depuis la guerre avec l’Espagne, une transformation radicale des mœurs, des idées et des sentiments de ce pays. Les États-Unis étaient naguère une grande démocratie laborieuse et pacifique ; ils sont devenus peu à peu une démocratie militaire, orgueilleuse de sa force, avide d’agrandissements et de conquêtes ; il n’y a peut-être pas dans le monde entier d’impérialisme plus ambitieux, plus résolu et plus tenace que l’impérialisme américain. Chez ce peuple, qui eût haussé les épaules autrefois si on lui eût parlé de la possibilité d’une guerre avec une puissance quelconque, il n’est question actuellement que de dissentiments, de conflits et d’aventures.” »

On verra ou reverra à ce propos l’admirable Le Lion et le Vent de John Milius, avec Sean Connery, qui illustrait bien cette fièvre définitive d’impérialisme qui prendra fin (prochaine) avec le monde.

Drumont ajoute (je ne sais d’où sort ce texte — sans doute est-ce un article de son journal) :

« Remarquez également combien l’action diplomatique des États-Unis est différente de ce qu’elle était jadis. Au lieu de se borner à maintenir l’intangibilité de la doctrine de Monroe, la grande République a la prétention maintenant de jouer partout son rôle de puissance mondiale. Elle ne veut pas que nous intervenions dans les affaires américaines, mais elle intervient à chaque instant et à tout propos dans nos affaires d’Europe. On n’a pas oublié le mauvais goût et le sans-gêne avec lesquels Roosevelt, il y a deux ou trois ans, voulut s’immiscer dans les affaires intérieures de la Roumanie, à propos des Juifs. Il est vrai que les États-Unis sont en voie de devenir une puissance juive, puisque dans une seule ville, comme New-York, il y a près d’un million d’Hébreux ! Ajoutez à cela la fermentation continue de toutes ces races juxtaposées, mais non fusionnées, qui bouillonnent perpétuellement sur ce vaste territoire, comme en une immense cuve : la question chinoise, la question japonaise, la question nègre, presque aussi aiguë aujourd’hui qu’elle l’était à la veille de la guerre de Sécession. Tout cela fait ressembler la République américaine à un volcan gigantesque qui lance déjà des jets de fumée et des bouffées de lave, en attendant l’éruption qui ne peut manquer d’éclater tôt ou tard… »

Comme la république impérialiste des Romains qui unifia et détruisit les cultures antiques (Oswald Spengler en parle bien), l’empire détruit et unifie tout ; Delassus ajoute :

« C’est en Amérique surtout qu’a pris corps le projet de l’établissement d’une religion humanitaire, devant se substituer aux religions existantes. Depuis longtemps on y travaille à abaisser les barrières dogmatiques et à unifier les confessions de façon à favoriser les voies à l’humanitarisme. »

La liquidation du catholicisme romain par l’agent Bergoglio est une belle illustration. Et à propos de cette fusion des intérêts juifs et américains, Delassus (qui cite beaucoup, et comme il a raison) cite l’historien Henry Bargy :

Il croit pouvoir poser ces deux assertions :

« La République des États-Unis est, dans la pensée des Juifs d’Amérique, la Jérusalem future ».

« L’Américain croit sa nation venue de Dieu ».

Et il ajoute :

« Dans cette confiance patriotique des Américains, les Juifs ont reconnu la leur. Leur orgueil national est venu s’appuyer sur celui de leurs nouveaux compatriotes. Les uns comme les autres attendent de leur race le salut de la terre (1). »

Avec des messies comme ça qui tiennent l’informatique, la presse et les billets de banque, nous sommes mal partis. Delassus annonce même le Grand Reset, simple application des idéaux socialistes et maçonniques. Mais découvrez son œuvre admirable.

PS Je découvre en terminant ce texte que Google devient inutilisable.

M. Bargy, dans son livre : La Religion dans la société aux États-Unis dit :

« La République des États-Unis est, dans la pensée des Juifs d’Amérique, la Jérusalem future. »

Les Sources principales citées :




Poésie et crépuscule : les meilleures pages de JMLP

« … à mesure que je grandissais puis que je prenais une certaine importance, mon pays rapetissait… »

Mon ami Guillaume de Thieulloy (les4verites.com, où j’ai écrit dix-huit ans) a publié aux éditions Muller le tome premier des mémoires de Jean-Marie Le Pen et bien lui en a pris puisqu’il en a vendu beaucoup — et ce n’est pas terminé…

À titre personnel j’ai rencontré plusieurs fois Le Pen dans les années 90 grâce à Serge de Beketch (voyez mon livre sur Serge). Nous avions fait une belle émission le 3 janvier 90 sur Radio-courtoisie où je l’avais étonné, tout « jeune homme que j’étais par mes connaissances sur l’ésotérisme et notre tradition » (nous évoquions les doriphories(([1] cycles planétaires et grandes concentrations planétaires selon les astrologues)) de Jean Phaure à propos des évènements de Roumanie). Le Pen est un bloc de culture et de sensibilité traditionnelle et française, et il me semble d’ailleurs que c’est comme cela qu’il faut lire ses mémoires, comme un bréviaire pour maintenir le cap spirituel en ces âges sombres où tout a été rasé, religion catholique romaine y compris ! Il ne subsistera que les catholiques parcs que j’ai évoqué dans un conte publié par Philippe Randa, ou ces oasis de tradition dont a parlé Benoit XVI (lui aussi remplacé, et de quelle manière !). La politique était foutue en France comme partout et c’est son message de solide menhir celte et enraciné qu’il faut méditer maintenant ; car Le Pen est un éclairé et ce n’est pas pour rien si ce phare breton (sic) tient depuis si longtemps.

Je l’ai interviewé pour la presse russe en 2012 (Pravdareport.com) et il avait étincelé, évoquant un arc d’union boréale qui irait de la Bretagne à la Sibérie. (nous en sommes loin…). Comme Serge, il avait compris que la Russie virerait à la tradition dès les années 90.

Ce chevalier sauvage m’a toujours impressionné par ses qualités (culture, phrasé, humour, force, flamme, énergie). Son combat était perdu d’avance on le sait, mais lui ne chargeait que plus. Souvent trahi, jamais culbuté. On devient immortel en se sacrifiant, pas en se planquant. Ce qui n’a pas tué Le Pen ne l’a pas seulement rendu plus fort, il l’a rendu plus grand. Et là en écrabouillant par ses ventes tous les Hollande et petits plumitifs de la planète média, il montre que le peuple n’est pas totalement mort.

Je laisse le début du livre bien déprimant. La mer, les tempêtes, la famille orpheline, la guerre, l’occupation, la Libération-épuration, le rejet du communisme… La malédiction française, « terre du fiasco récurrent » depuis deux siècles comme dit un historien anglais. Quelques phrases magnifiques sur la fin des cathédrales de voiles :

« Mais “tant que la mer est par-dessous, c’est le marin qui tient le bon bout”. Ces risques, ces souffrances ne tarirent jamais le recrutement tant au moins que la machine laissa survivre ces splendides cathédrales de voile, marchant “avec la respiration du bon Dieu” comme aurait dit maître Cornille, le meunier d’Alphonse Daudet. Quand l’évolution des techniques les condamna à la démolition, avec eux disparut la race des titans de la mer et fut tournée l’une des pages les plus poétiques et les plus émouvantes de notre histoire maritime. »

Je prends ces pages du milieu des années cinquante. Un peu d’Indochine et les débuts du poujadisme, cette fronde technophobe si sympa quand on voit que nous sommes depuis devenus un camp de concentration électronique et technocratique mondialisé. Le Pen peut à la fois être cet « extrémiste » patenté et redouté (en réalité un provo de la corpo…) ou un humaniste en guerre contre cet inframonde moderne.

Sur de Gaulle :

« J’allai voir le 23 juillet le général De Gaulle à Auray. Pour toucher le grand homme. Il n’avait pas encore acquis le métier des bains de foule et passait hiératique, un peu excédé, au milieu de la masse enthousiaste. Je serrai cette main indifférente. Il me parut laid et dit quelques banalités à la tribune tendue de tricolore. Il n’avait pas une tête de héros. Un héros doit être beau. Comme saint Michel ou le maréchal Pétain. J’étais à nouveau déçu. »

Sur l’Indochine coloniale :

« Comme tous ceux qui l’ont vue alors, l’Indochine m’avait conquis. Le pays était prenant, le peuple charmant, j’en aimais les bruits et les odeurs. Malgré la guerre sauvage, la saleté, la misère à l’occasion, ces gens minces et gracieux ne me répugnaient jamais. L’amour était simple. Les femmes pas lascives, mais douces, accueillantes. Avec les paysans, les rapports étaient naturels, ils ressemblaient aux paysans français, mêmes structures mentales et affectives. En plus petits, plus frêles. On avait l’impression de boy-scouts. »

Sur la fin du monde :

« Le monde que nous avons connu est mort, je préfère garder mes images intactes. Depuis est survenue une catastrophe. »

Sur la catastrophe communiste :

« Mon “boy” n’était ni un “béni-oui-oui” ni un “collaborateur”, pour reprendre le vocabulaire que parvient à comprendre une intelligentsia faisandée, c’était un homme du peuple qui avait senti au fond de lui-même que la moins mauvaise des tutelles qu’il pourrait connaître, la moins dictatoriale, la plus émancipatrice, était celle de la France. Quand Saigon tomba, je me demandai comment rendre hommage à ce monde englouti d’un seul coup, à ce peuple abandonné à l’esclavage, dont la défaite bafouait les sacrifices. »

Sur les mensonges éternels de la presse-système qui frappaient tous les génies littéraires du dix-neuvième siècle (Flaubert, Tolstoï, Nietzsche…) :

« Au-delà des larmes de rage, jusqu’à l’hébétude, on touche l’horreur de cette presse qui ment. Pour cela aussi, je devais faire de la politique. Pour combattre le mensonge. Flétrir non seulement le communisme, mais les modérés qui le laissaient faire, les compagnons de route, la sale presse qui s’en faisait complice. Pour les morts, pour les vivants, pour la France, pour les enfants à naître, il fallait rétablir la vérité. »

Sur Poujade donc et sa révolte contre la technocratie montante qui aboutirait au très eschatologique binôme Macron-Hollande :

« Le mouvement Poujade était un rassemblement qui mettait en synergie les Français, quels que soient leurs intérêts particuliers, leur rôle social. À l’opposé de l’idéologie marxiste dominant le monde politique, qui opérait la division des Français par le dogme mortel de la lutte des classes, Poujade dirigeait un mouvement proprement politique, visant le bien commun de la Cité entière, non celui d’une seule classe. »

Sur la juste révolte contre le fisc :

« Il n’est pas indifférent qu’il (le poujadisme) se soit manifesté contre les abus du fisc. Ce sont les abus du fisc qui ont jeté depuis des siècles les braves gens de France dans la révolte, des jacqueries à Jacquou le croquant, et le terme exaction fut d’abord appliqué aux exempts du fisc. Consentir à l’impôt est l’une des prérogatives majeures des représentants du peuple. »

Le Pen note sur le vrai grand remplacement dont j’ai parlé avec Guitry de la France traditionnelle, et qui allait être liquidée et exterminée par le techno-gaullisme américanisé dans les années soixante (c’est le remplacement des Français par les néo-français, comparez Manon des sources aux Valseuses de Blier pour comprendre) :

« Au milieu des années cinquante se déroula une révolution qui allait faire disparaître assez vite non seulement la plupart des commerçants et artisans, mais aussi les paysans, c’est-à-dire la France traditionnelle des travailleurs indépendants, au profit d’une armée de salariés et de fonctionnaires. »

Ces braves engloutis furent nos koulaks :

« D’origine sociale modeste, l’homme qui allait disparaître était son propre patron, révolté par l’outrecuidance des irresponsables qui l’interpellaient au nom de l’État joufflu : le choc culturel était palpable, d’un côté les agents du fisc, de vrais pros, et de l’autre leurs victimes, des amateurs qui n’avaient pas les codes, ni social ni administratif. »

Après le poujadisme Le Pen entrevoit la catastrophe de la grande distribution et l’enlaidissement sidérant du pays :

« La révolution sociale et mentale que les technocrates menaient par l’impôt devait engendrer, en matière de commerce, les géants de la grande distribution. Pierre Poujade se révolta contre l’État qui spoliait les petits au profit des gros. »

Et on en est resté là, au populisme comme on dit. Ô présent perpétuel (Ortega Y Gasset dit « définitif »)…

Après écoutez bien, c’est génial, Le Pen héritier de Tocqueville :

« J’ajoute que le mouvement Poujade, que l’on présente comme un combat d’arrière-garde de ploucs ringards, de beaufs menés par quelques fascistes, était en fait très en avance.

D’une part, c’est l’agriculture industrielle et la grande distribution qui sont aujourd’hui obsolètes, alors que le bio, le raisonné, le commerce de proximité, les circuits courts ont montré leur intérêt : le coût social de prétendus progrès des années cinquante et soixante n’a pas fini d’être calculé. D’autre part, le fiscalisme, dont je n’ai cessé en soixante ans de carrière politique de dénoncer les méfaits, est non seulement un étrangloir économique, mais la matrice de l’État policier.

L’habitude de surveillance, les instruments statistiques qu’il crée, ont été mis à profit par le totalitarisme informatisé qui s’installe. »

Encore un peu de Poujade et de pression fiscale :

« Poujade avait su rendre leur fierté aux pauvres gens injustement traités, humiliés, offensés, bafoués. Il faut savoir que les polyvalents, armée recrutée à la va-vite, se croyaient autorisés à perquisitionner comme des policiers, vidaient les armoires, jetaient les draps par terre, laissant les mères de famille en pleurs :

— Ils nous traitent pire que faisaient les boches, ça va pas ! »

Le résultat de cette Gestapo fiscale c’est le chiffre donné récemment par Mélenchon : 32 milliardaires sont plus riches que les vingt-sept millions de Français les plus pauvres. Le phénomène est d’ailleurs mondial.

Un beau moment démocratique, le triomphe électoral :

« Les résultats du scrutin secouèrent la France et l’Europe. Cinquante-trois députés poujadistes entraient au Palais Bourbon. Quand j’y pénétrai, précédé des huissiers à chaîne, sous le roulement des tambours des gardes républicains, j’eus, avec la chair de poule, une pensée pour mon père, qui m’avait inscrit au collège de Vannes. C’était la première fois que je votais et j’étais élu. Je n’ai pas besoin de décrire la fierté de ma mère. »

La découverte du prodigieux talent oratoire :

« Étant donné le peu d’habitude de la tribune de la plupart de mes collègues poujadistes, je fus amené à prendre très vite la parole, sans respecter le temps de silence et d’observation imposé traditionnellement aux députés novices. J’étais le plus jeune élu de l’assemblée et je ne me débrouillais pas trop mal. »

Modeste ! Je l’ai vu-entendu parler des heures sans faire tinter la syntaxe une fois, en gardant sa pensée bien sauvage (dixit Baudrillard).

Tiens, une preuve sur la fin du chant et de la culture traditionnelle. On dirait du Leopardi :

« Le chant est aussi naturel à l’homme qu’à l’oiseau. Les deux fonctions de la musique sont complémentaires »

Après JMLP s’en prend à la culture musicale comme arme de destruction massive (de Johnny à Lady Gaga…) :

« On se limite aujourd’hui à la fonction passive d’écoute. On se mutile de la fonction active. Sans doute reste-t-il des gens qui chantent ou jouent d’un instrument, mais cela fait partie de la culture savante. La culture populaire ingurgite une soupe toute faite et servie par la télé, la radio, les concerts, internet. Le peuple a perdu sa voix. Nous chantions à l’école, le maître était aussi professeur de chant. Les mélodies de mon enfance me sont restées gravées dans la tête et dans le cœur. L’église était le temple du chant collectif, chants en latin de la liturgie que l’on connaissait ou cantiques des processions et des pardons qui se transmettaient de père en fils. »

Et la conclusion :

« Dans les années soixante, tout a été attaqué ensemble chez nous : la liturgie romaine et le grégorien, la poésie classique, la musique. On essaya de remplacer Mozart et Beethoven par la musique sérielle, mais cela n’a pas très bien marché, en même temps qu’on remplaçait la goualante, le musette, la chanson traditionnelle par une pop façonnée sur le rock — et cela a marché, dans l’ensemble. »

Le Pen a raison : le système fou n’a pu remplacer Bach et Vivaldi par Boulez et Stockhausen.

Pour le reste c’est le grand remplacement culturel :

« C’est le grand remplacement du chant de la France.

Alors l’orphéon de village se raréfie et les ouvriers ne chantent presque plus, la société ne chante plus ensemble. Cela creuse un grand vide. C’est peut-être une compensation à cela que pas mal de jeunes cherchent dans leurs raves-parties déjantées, ils veulent retrouver un langage commun, un moment où ils s’expriment ensemble, ce que les pontifiantes fadaises de la Kultur officielle ne leur donnent pas. Nous, cela nous était donné sans que personne n’ait à s’en occuper. Quand le peuple chantait lors des pardons, on aurait dit la mer, qui revient sans cesse sur elle-même, qui ne finit jamais. Mais tout finit. »

Je trouve qu’il y a une certaine grandeur de sa part à le reconnaître : « tout finit. » Et on restera là.

Sources

Jean-Marie Le Pen — Mémoires Fils de la nation – ÉDITIONS MULLER




Jean-Marie Le Pen et la décadence de la France sous De Gaulle

Par Nicolas Bonnal

J’évoque dans mon nouveau livre sur le Cinéma la destruction de la France. Comme on sait elle a eu lieu sous de Gaulle et Pompidou, sans oublier Giscard. Je fournis des dizaines de preuves en images. Même Debré s’en rend compte dans ses entretiens avec de Gaulles (le vieux acquiesce et laisse faire : pourquoi est-il revenu au pouvoir, lui qui avait créé tous les monstres y compris la sécu ?).

Le pays est effondré moralement et culturellement en mai 68 et le peuple déjà remplacé mentalement peut se préparer à être remplacé physiquement, alors qu’il a perdu sa foi, sa culture, son originalité — voyez les Amis de Blain. La meilleure preuve ? Les comédies musicales américaines, qui ont arrêté alors d’aimer Paris : comparez Funny Face de Donen à Charade du même Donen et vous comprendrez.

Enfin, comparez Biquefarre et Farrebique (produit par RKO…) du même Rouquier et puis vous comprendrez.

Comparez la septième compagnie de l’autre à l’Alerte au sud de Jean Devaivre et vous comprendrez. Jean Devaivre était résistant, mais comme le colonel Rémy scénariste du fabuleux monocle il se battait pour un Empire, pas pour la république et la France lumière du monde, pas pour les mots.

Ou vous ne comprendrez pas.

Je sais que cela énerve les imbéciles qui ont fait du gaullisme l’âge d’or de leur rêverie historique. Donc je continue. Avec un modèle, le Vive la France ! de Michel Audiard qui montre en se marrant qu’avec de Gaulle déjà le repeuplement de la France déchue par les anciens colonisés commence. Mais quand on est bouché… La grandeur de la France c’est le mantra dont on nous abreuve les oreilles, avec 95 % du territoire perdu, l’américanisation (Johnny, Salut les copains) et la marxisation (Sartre, Althusser, Bataille) de la culture, et le maintien dans l’UE, en attendant Giscard et ses Young leaders. Giscard six ans ministre de l’Économie tout de même sous de Gaulle. En 1972 quand je débarque en France je découvre une émission d’épouvante : la France défigurée, qui est l’œuvre de journalistes de droite (le gaullisme ne l’est pas) pourtant…

Je n’ai plus envie de polémiquer. J’aurais envie d’éviter ceux qui ne comprennent pas. Comme dit Modeste Schwartz il ne faut pas s’étonner que personne n’ait envie de voter pour ceux (Asselineau et Philippot) qui se réclament du gaullisme : de Chirac à Juppé en passant par Hollande ou Macron ils s’en sont déjà tous réclamés, alors…

En relisant l’excellent tome premier des Mémoires de Le Pen j’y trouve ces observations suivantes, qui montrent que Le Pen a raté le coche dans les années soixante (il le dit lui-même : le pays était plus sain) et qui résument le grand remplacement de la France (lisez Mattelart sur ce rapport Ozbekhan-Perlmutter qui « défigura » définitivement la France.) par le gaullisme et sa technocratie progressiste : villes nouvelles, industrialisation ratée, immigration bâclée, déchetterie culturelle grâce à Malraux et triomphe du politiquement correct. Lisez mon ami Jean Raspail, qui n’a pas écrit son livre en 2020, pas vrai ?

« Du point de vue strictement politique, avec la manifestation sur les Champs Élysées du 30 mai et les élections bleu horizon qui suivirent, le gaullisme allait se refaire pour un an. Mais il avait perdu définitivement la jeunesse, et le pourrissement massif des têtes, dont nous mourons aujourd’hui, commença. La réforme d’Edgar Faure et la loi d’orientation scolaire signaient l’abandon de l’éducation nationale à la gauche, le Yalta culturel qui fut désormais le fondement de la Cinquième République, I’abandon de l’esprit public au marxisme. D’un strict point de vue universitaire, ce fut une catastrophe. Amener toute la jeunesse à l’Université quels que soient ses possibilités et ses buts, C’est voler les contribuables français, c’est fourvoyer les jeunes, c’est gaspiller l’énergie et le potentiel de la Nation. »

Le monstre soviétiforme de l’EN ; Le Pen lui règle bien son compte (en vain comme toujours) dans les lignes suivantes :

« L’Université tend aujourd’hui, sous la pression de ses milliers de mandarins, à l’universalité. Bénéficiaire du premier budget de la Nation, I’Éducation nationale réclame chaque année plus de moyens, bien que le nombre d’enfants à scolariser diminue corrélativement à la crise démographique, un peu compensée par l’immigration. Le patient de Knock mourait guéri, nous mourrons tous savants. Après avoir élevé l’âge et le niveau des scolarités obligatoires, on prétend enseigner les handicapés profonds, les aliénés, les immigrés, les malades, les détenus, les étrangers chez nous, chez eux, avant leur métier, pendant leur vie, après leur retraite. Ce rêve fou d’hégémonie scolaire est le fruit paradoxal de la “révolution” de Mai 68, qui vouait la fonction enseignante au nettoyage des WC. La Salope n’est pas crevée, tel un moloch femelle qui se renforce des armes tournées contre elles. L’Alma Mater affermit la Dictature des pions. »

Dictature des pions et des pionnes : pensez au virus, au vaccin, au prochain, au prochain vaccin et au prochain passe carbone. Vive Sandrine Rousseau pythie républicaine. Le Pen ajoute :

« Ce n’est pas la République des robots qui nous menace, mais celle des Pions, sous-système d’un ubuesque univers galactique de fonctionnaires. L’Éducation Nationale dicte sa loi au pays. Elle détermine les programmes, les orientations, l’avancement. Mais le dommage de Mai G8 est encore plus vaste, car au désastre de l’école s’ajoute celui des médias, de la littérature, des arts, du cinéma et de la télévision, de tout ce qui sous le mot impropre culture influe sur la mentalité des hommes, et dont la maîtrise, le philosophe italien Gramsci l’a rappelé à toute une génération de révolutionnaires, permet de prendre le pouvoir sans peine. »

Le Pen on le sait parle de la gravure à l’eau-forte. Première frappe en 68, deuxième le 10 mai 81 quand le peuple est fin prêt pour son remplacement :

« En gros, vous pouvez entailler la plaque de cuivre que l’on va encrer pour imprimer, de deux manières. Soit directement avec un burin, c’est long, difficile et cela demande de la force : c’est la révolution à l’ancienne, brutale et aléatoire. Soit vous choisissez ce que l’on appelle l’eau-forte. Sur la plaque de cuivre vous passez un vernis qui résiste à l’acide, puis vous entaillez cette couche protectrice avec une pointe d’un maniement souple qui permet un dessin fin, avant de plonger la plaque dans un bain d’acide. En quelques heures les parties dont vous avez ôté la protection sont attaquées par l’acide et prêtes à recevoir l’encre. Ainsi a procédé la révolution de Mai 68. Avec son slogan directeur, il est interdit d’interdire, elle a plongé la civilisation européenne dans un bain d’acide où nous sommes restés durant toutes les années soixante-dix, puis, au fil des années quatre-vingt, on a sorti la plaque, on l’a essuyée, et la gravure à l’eau-forte est apparue, image de la nouvelle civilisation, avec sa nouvelle morale, sa nouvelle esthétique, ses nouveaux fondements politiques, dans laquelle nous vivons. Le monde ancien, homme ancien, ont été dissous, et se dessinent maintenant l’homme nouveau et ses valeurs nouvelles. »

Belle conclusion :

« Aux héros et aux saints qu’on nous montrait en exemple a succédé l’écocitoyen LGBT friendly et phobophobe, ouvert au vivre ensemble, au culte de la terre mère, qui ne fume pas, accueille le migrant et se prépare à rouler en voiture autonome. »

On ne dira rien de ce qui nous reste de curés et de militaires aujourd’hui : certains crétins font encore semblant que cela EXISTE ENCORE. Debord nous prévenait :

« Non seulement on fait croire aux assujettis qu’ils sont encore, pour l’essentiel, dans un monde que l’on a fait disparaître, mais les gouvernants eux-mêmes souffrent parfois de l’inconséquence de s’y croire encore par quelques côtés. Il leur arrive de penser à une part de ce qu’ils ont supprimé, comme si c’était demeuré une réalité, et qui devrait rester présente dans leurs calculs. »

Faire croire que quelque chose existe (la France, la Liberté, l’économie, la culture, la famille, etc.) qui est déjà mort est devenue une marotte. Mais Debord ajoute :

« Ce retard ne se prolongera pas beaucoup. Qui a pu en faire tant sans peine ira forcément plus loin. »

Cela donne Macron ; Debord :

« Il faut conclure qu’une relève est imminente et inéluctable dans la caste cooptée… »

Mais continuons avec Le Pen ; meurtre de Paris sous de Gaulle (voyez Du rififi à Paname ou Anatomie d’un livreur…) :

« Le ventre de Paris était tout près, le pouvoir gaulliste avait décidé en l960 de transférer les Halles à La Villette et Rungis, mais le déménagement ne devait se faire qu’en 1969. On disait adieu au vieux Paris. Tout un peuple de vivandiers venus des banlieues et des provinces approvisionnait la capitale depuis le XIXème siècle dans un décor que le dix-neuvième avait rationalisé sans le changer en profondeur. Ce peuple qui avait fait naguère un triomphe à Poujade allait se trouver remplacé par un mélange de petits-bourgeois consuméristes le jour et de zonards la nuit. Les mots disent tout : un Forum remplacerait les Halles, des bobos multi colores à prétention intello en prendraient possession. Mais avant qu’un grand trou n’occupe symboliquement les lieux pour assurer la transition d’un passé millénaire vers la nouvelle ville, le quartier grouillait pour quelques mois encore de ses métiers et vivait intensément la nuit. Les putains en étaient l’ornement nécessaire. Elles avaient leurs spécialités. Les amateurs de petites filles venaient s’y tourner, non pas qu’elles fussent mineures, mais, même avancées en âge, elles se déguisaient pour complaire aux diverses marottes des clients. »

On voit déjà la clique de débauchés et de pédophiles qui s’amène dans les années 70 et on n’a pas besoin de geindre après les années 2020. On baigne dans cette merde depuis cinquante ou soixante ans. Revoyez Godard, Deville et les autres.




Dostoïevski et la légende du grand inquisiteur

[Illustration : Jésus est tenté trois fois par Satan dans le désert au début de son ministère. Il refuse alors de changer la pierre en pain, de se jeter dans le vide et de s’agenouiller devant le tentateur.
Leemage via AFP.]

Par Nicolas Bonnal

Dostoïevski : La légende du grand inquisiteur dans Les Frères Karamazov. Le Maître écrit notamment :

« Mais il ne veut s’incliner que devant une force incontestée, que tous les humains respectent par un consentement universel. Ces pauvres créatures se tourmentent à chercher un culte qui réunisse non seulement quelques fidèles, mais dans lequel tous ensemble communient, unis par la même foi. Ce besoin de la communauté dans l’adoration est le principal tourment de chaque individu et de l’humanité tout entière, depuis le commencement des siècles. C’est pour réaliser ce rêve qu’on s’est exterminé par le glaive. »

Sommet de l’Histoire de la littérature, sommet pour comprendre les tristes secrets de l’esprit humain.


Avec ces temps modernes, les hommes n’aiment pas la liberté. Ils préfèrent le pain, la télé et la sécurité, et mourir à l’eau tiède. Dostoïevski…

« Sans nous, ils seront toujours affamés. Aucune science ne leur donnera du pain, tant qu’ils demeureront libres, mais ils finiront par la déposer à nos pieds, cette liberté, en disant : “Réduisez-nous plutôt en servitude, mais nourrissez-nous.” Ils comprendront enfin que la liberté est inconciliable avec le pain de la terre à discrétion, parce que jamais ils ne sauront le répartir entre eux ! Ils se convaincront aussi de leur impuissance à se faire libres, étant faibles, dépravés, nuls et révoltés. »

Le tortionnaire sévillan (visitez leurs sémillants musées de la torture) rappelle :

« Tu leur promettais le pain du ciel ; encore un coup, est-il comparable à celui de la terre aux yeux de la faible race humaine, éternellement ingrate et dépravée ? Des milliers et des dizaines de milliers d’âmes te suivront à cause de ce pain, mais que deviendront les millions et les milliards qui n’auront pas le courage de préférer le pain du ciel à celui de la terre ? Ne chérirais-tu que les grands et les forts, à qui les autres, la multitude innombrable, qui est faible mais qui t’aime, ne servirait que de matière exploitable ? Ils nous sont chers aussi, les êtres faibles. Quoique dépravés et révoltés, ils deviendront finalement dociles. »

Le besoin de la communauté et du troupeau. Dostoïevski annonce ici le dernier homme de Zarathoustra et le croyant en papier mâché.

« Mais il ne veut s’incliner que devant une force incontestée, que tous les humains respectent par un consentement universel. Ces pauvres créatures se tourmentent à chercher un culte qui réunisse non seulement quelques fidèles, mais dans lequel tous ensemble communient, unis par la même foi. Ce besoin de la communauté dans l’adoration est le principal tourment de chaque individu et de l’humanité tout entière, depuis le commencement des siècles. C’est pour réaliser ce rêve qu’on s’est exterminé par le glaive. »

Surtout, pas de liberté :

« Vois ce que tu fis ensuite, toujours au nom de la liberté ! Il n’y a pas, je te le répète, de souci plus cuisant pour l’homme que de trouver au plus tôt un être à qui déléguer ce don de la liberté que le malheureux apporte en naissant. Mais pour disposer de la liberté des hommes, il faut leur donner la paix de la conscience. »

Le Christ a perdu car il a refusé l’antique dosage de la religion traditionnelle, basée sur le miracle, le mystère, l’autorité :

« Tu as ainsi préparé la ruine de ton royaume ; n’accuse donc personne de cette ruine. Cependant, était-ce là ce qu’on te proposait ? Il y a trois forces, les seules qui puissent subjuguer à jamais la conscience de ces faibles révoltés, ce sont : le miracle, le mystère, l’autorité ! Tu les as repoussées toutes trois, donnant ainsi un exemple. »

https://www.amazon.fr/Dostoievski-Modernitatea-Occidentala-Nicolas-Bonnal/dp/6069078454

C’est que Jésus rêvait à tort de liberté, de rebelles :

« Tu ne l’as pas fait, car de nouveau tu n’as pas voulu asservir l’homme par un miracle ; tu désirais une foi qui fût libre et non point inspirée par le merveilleux.
Il te fallait un libre amour, et non les serviles transports d’un esclave terrifié. Là encore, tu te faisais une trop haute idée des hommes, car ce sont des esclaves, bien qu’ils aient été créés rebelles. »

Et le bilan est là…

« Vois et juge, après quinze siècles révolus ; qui as-tu élevé jusqu’à toi ? Je le jure, l’homme est plus faible et plus vil que tu ne pensais. »

La suite nous concerne.

On aura donc à la place le césarisme universel et la mondialisation de l’esclavage démocratique :

« … nous avons accepté Rome et le glaive de César, et nous nous sommes déclarés les seuls rois de la terre, bien que jusqu’à présent nous n’ayons pas encore eu le temps de parachever notre œuvre. Mais à qui la faute ? Oh ! L’affaire n’est qu’au début, elle est loin d’être terminée, et la terre aura encore beaucoup à souffrir, mais nous atteindrons notre but, nous serons César, alors nous songerons au bonheur universel. »

Car le rêve du grand inquisiteur, c’est bien le nouvel ordre mondial :

« L’humanité a toujours tendu dans son ensemble à s’organiser sur une base universelle. Il y a eu de grands peuples à l’histoire glorieuse, mais à mesure qu’ils se sont élevés, ils ont souffert davantage, éprouvant plus fortement que les autres le besoin de l’union universelle. Les grands conquérants, les Tamerlan et les Gengis-Khan, qui ont parcouru la terre comme un ouragan, incarnaient, eux aussi, sans en avoir conscience, cette aspiration des peuples vers l’unité. En acceptant la pourpre de César, tu aurais fondé l’empire universel et donné la paix au monde. »

Comme Tocqueville, on prévoit un troupeau bien doux et obéissant :

« Qui a le plus contribué à cette incompréhension, dis-moi ? Qui a divisé le troupeau et l’a dispersé sur des routes inconnues ? Mais le troupeau se reformera, il rentrera dans l’obéissance et ce sera pour toujours. Alors nous leur donnerons un bonheur doux et humble, un bonheur adapté à de faibles créatures comme eux.

Nous les persuaderons, enfin, de ne pas s’enorgueillir, car c’est toi, en les élevant, qui le leur a enseigné ; nous leur prouverons qu’ils sont débiles, qu’ils sont de pitoyables enfants, mais que le bonheur puéril est le plus délectable. »

Une élite torturée dominera ces légions d’esclaves :

« Ils nous soumettront les secrets les plus pénibles de leur conscience, nous résoudrons tous les cas et ils accepteront notre décision avec allégresse, car elle leur épargnera le grave souci de choisir eux-mêmes librement. Et tous seront heureux, des millions de créatures, sauf une centaine de mille, leurs directeurs, sauf nous, les dépositaires du secret. Les heureux se compteront par milliards et il y aura cent mille martyrs chargés de la connaissance maudite du bien et du mal. »

Le bilan pour leur âme :

« Ils mourront paisiblement, ils s’éteindront doucement en ton nom, et dans l’au-delà ils ne trouveront que la mort. Mais nous garderons le secret ; nous les bercerons, pour leur bonheur, d’une récompense éternelle dans le ciel. »

Et le troupeau aidera la hiérarchie cléricale à renverser Dieu définitivement !

« Je suis revenu me joindre à ceux qui ont corrigé ton œuvre. J’ai quitté les fiers, je suis revenu aux humbles, pour faire leur bonheur. Ce que je te dis s’accomplira et notre empire s’édifiera. Je te le répète, demain, sur un signe de moi, tu verras ce troupeau docile apporter des charbons ardents au bûcher où tu monteras, pour être venu entraver notre œuvre. Car si quelqu’un a mérité plus que tous le bûcher, c’est toi. Demain, je te brûlerai. Dixi. »

On cite souvent Schiller à propos de ce prodigieux discours — mais on oublie Alexis de Tocqueville qui a mieux que quiconque décrit ce pouvoir mondialisé et anesthésiant (sauf pour les victimes de ses bombes et de ses sanctions) :

« Au-dessus de ceux-là s’élève un pouvoir immense et tutélaire, qui se charge seul d’assurer leur jouissance et de veiller sur leur sort. Il est absolu, détaillé, régulier, prévoyant et doux. Il ressemblerait à la puissance paternelle si, comme elle, il avait pour objet de préparer les hommes à l’âge viril ; mais il ne cherche, au contraire, qu’à les fixer irrévocablement dans l’enfance ; il aime que les citoyens se réjouissent, pourvu qu’ils ne songent qu’à se réjouir… »

Grand lecteur de Dostoïevski (« le seul qui m’ait appris quelque chose en psychologie… »), Nietzsche écrit dans son Zarathoustra :

« Un peu de poison de-ci de-là, pour se procurer des rêves agréables. Et beaucoup de poisons enfin, pour mourir agréablement. On travaille encore, car le travail est une distraction. Mais l’on veille à ce que la distraction ne débilite point. On ne devient plus ni pauvre ni riche : ce sont deux choses trop pénibles. Qui voudrait encore gouverner ? Qui voudrait obéir encore ? Ce sont deux choses trop pénibles. »

Car même les maîtres sont fatigués…

Nicolas Bonnal sur Amazon.fr




Michel Foucault et le progrès de la surveillance dans notre monde moderne

Par Nicolas Bonnal

Plus personne ne conteste que nous vivons dans des sociétés de vigilance et de surveillance. Le pouvoir bienveillant, tutélaire et doux peut désormais tout contrôler avec les progrès de la technologie et le déclin de la réactivité des populations. Le terrorisme, la dette ou la Russie serviront de croquemitaine. Bernanos écrivait en 1945 :

« Aujourd’hui l’exception est devenue la règle, la Démocratie mobilise tout, hommes, femmes, enfants, animaux et machines, sans même nous demander de trinquer à sa santé. »

Évoquons Michel Foucault. On le prend pour le maître à penser de tous ceux qui au pouvoir achèvent de replâtrer notre société. En réalité, en le relisant, je me rends compte qu’il est possible sans se forcer de faire une lecture guénonienne et traditionaliste de Foucault — comme on peut en faire une de Nietzsche ou même de Karl Marx quand il décrit l’apparition du capitalisme et la progressive et monstrueuse destruction du libre paysan d’Angleterre (Capital, I, 6). Foucault a très bien décrit la monstruosité moderne en marche à partir de la fin du Moyen-Âge par exemple, ce que nos profs et experts appellent eux les Lumières. Son texte résonne curieusement quand il évoque le Moyen-Âge, âge définitivement plus libre que nos temps modernes. Pensez au grand critique soviétique Bakhtine et à sa relecture révolutionnaire/traditionnelle de Rabelais par exemple.

On l’écoute et on le relit un peu mieux alors (Surveiller et punir, surtout) :

« Les Lumières, qui ont découvert les libertés, ont également inventé les disciplines. »

Foucault prend le contre-pied de Debord (la Société du Spectacle…) et évoque une société moderne post-spectaculaire fondée sur des techniques et des technologies du contrôle humain :

« La punition a cessé peu à peu d’être théâtre. Et tout ce qu’il pourrait prendre avec lui comme un spectacle sera affecté par un indice négatif. »

Il écrit le rôle des couvents baroques (comme il a raison), des casernes et des hôpitaux dans cette gestation de notre monde sinistre où il faut, disait une sage dame, périr en symétrie. Il souligne le rôle de la Réforme et des armées protestantes :

« La grande discipline militaire a été formée, dans les armées protestantes de Maurice d’Orange et Gustave-Adolphe, à travers un rythme qui a été souligné par les exercices de piété ; l’existence dans l’armée doit avoir, dit plus tard Boussanelle, “des perfections du cloître lui-même”. »

Pensons aux automates de Kleist. On progressa alors, on fit des manœuvres, des pas, des exercices. Et des danses aussi, dont se moquent Montesquieu, Pouchkine et Molière :

« L’acte est décomposé en ses éléments ; la position du corps, des membres, des articulations est définie ; à chaque mouvement est assignée une adresse, une amplitude, une durée ; son ordre de succession est prescrit. Le temps pénètre dans le corps, et avec lui toutes les minutieuses commandes de puissance. »

Foucault remet à leur place les psychologues et les fonctionnaires de l’orthopédie morale :

« Il y a dans la justice moderne et dans ceux qui l’administrent un embarras de punir qui n’exclut pas toujours le zèle ; il croît sans cesse : sur cette blessure, le psychologue fourmille aussi bien que le modeste fonctionnaire de l’orthopédie morale. »

Comme Sorel dans son histoire oubliée de Francion, Foucault décrit l’atmosphère carcérale — pour ne pas dire concentrationnaire ! — du collège jésuite :

« Prenons l’exemple de la “classe”. Dans les écoles jésuites, il y avait encore une organisation binaire et massive à la fois : les classes, qui pouvaient avoir jusqu’à deux ou trois cents élèves, et étaient divisées en groupes de dix. Chacun de ces groupes avec leur décurion était placé dans un champ, le romain ou le carthaginois ; à chaque décurie correspondait une décurie inverse. La forme générale était celle de la guerre et de la rivalité entre Carthage et Rome. »

Foucault évoque la grande modification, pour parler comme Butor. On torture toujours les hommes, mais autrement :

« La souffrance physique, la douleur du corps même, ne sont plus les éléments constitutifs du chagrin. La punition est passée d’un art de sensations insupportables à une économie de droits suspendus. »

Foucault ajoute sarcastique :

« À la suite de cette nouvelle circonspection, toute une armée de techniciens est venue soulager le bourreau, l’anatomiste immédiat de la souffrance : les gardes, les médecins, les aumôniers, les psychiatres, les psychologues, les éducateurs. »

L’homme tranquillisé d’Huxley est bien sûr au programme :

« Au moment où l’heure de l’exécution approche, les patients reçoivent des injections de tranquillisants. Utopie de la modestie judiciaire : supprimer l’existence en évitant de ressentir les dommages, en privant tous les droits sans les faire souffrir, en imposant des peines libérées de la souffrance. L’utilisation de la psychopharmacologie et de divers “déconnecteurs” physiologiques, même s’ils doivent être provisoires, s’inscrit dans la logique de cette pénalité. »

Du coup on sera privé des spectacles punitifs :

« Le grand spectacle de la punition physique disparaît alors au début du XIXe siècle ; le corps suppléé est déguisé ; l’appareil théâtral de la souffrance est exclu de la punition. On entre dans l’ère de la sobriété punitive. »

C’est qu’on délaisse le corps pour attaquer l’âme :

« Depuis les 150 ou 200 ans que l’Europe a mis en place ses nouveaux systèmes de sanctions, les juges, peu à peu, mais selon un processus qui remonte à loin, ont été mis à même de juger autre chose que des crimes : “l’âme” des criminels. »

Ambiance religieuse réformatrice. Foucault use du mot « cellule » :

« La cellule, cette technique du monachisme chrétien qui ne subsistait que dans les pays catholiques, devient dans cette société protestante l’instrument par lequel l’homo oeconomicus et la conscience religieuse peuvent se reconstituer en même temps. »

Il évoque l’ambiance carcérale de l’univers de Nicolas Ledoux ou d’Oberkampf, qui fabrique alors nos toiles de Jouy. C’est que le monde moderne naît dans la prison :

« La prison, lieu d’exécution de la sentence, est en même temps un lieu d’observation des individus punis. Dans deux sens. Surveillance naturellement. Mais aussi la connaissance de chaque détenu, de son comportement, de ses dispositions profondes, de son amendement progressif ; les prisons devraient être conçues comme un lieu de formation pour une connaissance clinique des condamnés… »

Foucault évoque bien sûr le panopticon1 du monstrueux Bentham (il fit pendre un de ses domestiques pour un vol de fourchette) devenu l’idole des penseurs contemporains :

« Le panopticon devint vers 1830-1840 le programme architectural de la plupart des projets pénitentiaires. »

Le programme, avant la machine à habiter de Le Corbusier :

« En bref, constituer une prison-machine avec une cellule de visibilité où le détenu sera coincé “dans la maison de verre du philosophe grec” et un point central à partir duquel un regard permanent peut contrôler à la fois les prisonniers et le personnel. »

Très nourri de lectures juridiques et pénitentiaires, Foucault évoque l’Allemand Julius :

« Julius lut comme un processus historique accompli ce que Bentham avait décrit comme un programme technique. Notre société n’est pas celle du spectacle, mais de la vigilance ; sous la surface des images, vous atteignez les corps en profondeur… »

J’ai évoqué ici Fukuyama qui dit que le bourgeois fut une fabrication de l’intelligence britannique, à partir de Locke et de Hobbes. Foucault remarque :

« La belle totalité de l’individu n’est pas amputée, réprimée, altérée par notre ordre social, mais l’individu y est soigneusement fabriqué, selon toute une tactique de forces et de corps. »

Notre néo-classique explique bellement :

« Nous sommes beaucoup moins grecs que nous le pensons. Nous ne sommes pas sur les gradins ou sur la scène, mais sur la machine panoptique, dominée par ses effets de puissance que nous étendons nous-mêmes, puisque nous sommes l’un de ses rouages. »

Cet aspect laborantin du monde moderne est ici excellemment décrit :

« L’hôpital d’abord, puis l’école et plus tard encore l’atelier n’ont pas simplement été “mis en ordre” par les disciplines ; ils sont devenus, grâce à elles, de tels appareils que tout mécanisme d’objectivation peut être utilisé comme instrument de sujétion, et tout accroissement de pouvoir donne naissance à une connaissance possible ; de ce lien, typique des systèmes technologiques, c’est ainsi que la médecine clinique ; la psychiatrie ; la psychologie des enfants ; la psychopédagogie ; la rationalisation du travail ont pu se former dans l’élément disciplinaire. »

J’espère en avoir assez fait pour susciter chez les plus attentifs une relecture traditionnelle et antimoderne de Michel Foucault. Je laisserai encore la parole au maître Tocqueville, cet expert en prisons d’ailleurs, qui écrit dans sa démocratie en Amérique :

« Sous le gouvernement absolu d’un seul, despotisme, pour arriver à l’âme, frappait grossièrement le corps ; et l’âme, échappant à ces coups, s’élevait glorieuse au-dessus de lui ; mais dans les républiques démocratiques, ce n’est point -là que la tyrannie ; elle laisse le corps et va droit à l’âme. »

Nicolas Bonnal sur Amazon.fr





Small is beautiful

[Source : dedefensa.org]

Par Nicolas Bonnal

Le penseur austro-américain Léopold Kohr était cité avec Jacques Ellul et Guy Debord à la fin du documentaire apocalyptique Koyaanisqatsi. C’est comme cela que je l’ai découvert en 1983. En réalité son nom est inconnu alors que son lemme est mythique : small is beautiful(([1] [La petite taille est belle])). Kohr est l’esprit qui a mis en doute le monde moderne dans tout ce qu’il a de gigantesque, de titanesque et de compliqué. Pour lui tout s’écroulera de ce fait ; ou, si cela ne s’écroule pas, finira mal. À l’heure où l’Europe tangue, où les USA tanguent, où l’Espagne et le royaume désuni tanguent, on ferait mieux de redécouvrir son breakdown of nations publié il y a plus d’un demi-siècle. Proche des libertariens ou des traditionnels (je suis des deux écoles, donc je me sens bien concerné), la pensée de Kohr ne pourrait qu’inspirer une solution de rechange à notre civilisation marquée par le gigantisme messianique et l’hypnotisme techno-totalitaire.

Léopold Kohr est un peu comme René Girard. Son explication doit tout expliquer. Voici ce qu’il écrit au début de son effondrement des nations :

« Comme les physiciens de notre temps ont essayé d’élaborer une théorie unique, capable d’expliquer non seulement certains, mais tous phénomènes de l’univers physique, j’ai essayé de développer une seule théorie à travers laquelle non seulement certains, mais tous les phénomènes de l’univers social peuvent être réduits à un commun dénominateur. »

Et son secret, inspiré par une remarque de notre Jonathan Swift est le refus du bulk, de la masse, de la taille :

Le résultat est une philosophie politique nouvelle et unifiée centrée autour de la taille. Elle suggère qu’il semble y avoir une seule cause derrière toutes les formes de misère sociale : la grandeur. Aussi simpliste que cela puisse paraître, nous trouverons l’idée plus facilement acceptable si nous considérons que la grandeur, ou surdimension est vraiment beaucoup plus que juste un problème social. Elle semble être le seul et unique problème imprégnant toute la création. « Où quelque chose ne va pas, c’est que quelque chose est trop gros. »

Il multiplie ensuite les exemples physiques et médicaux :

 « Si les étoiles dans le ciel ou les atomes d’uranium se désagrègent en explosion spontanée, ce n’est pas parce que leur substance a perdu son équilibre. C’est parce que la matière a tenté d’étendre au-delà des barrières infranchissables fixées à chaque accumulation. Leur masse est devenue trop grande. Si le corps humain devient malade, c’est, comme dans le cancer, parce qu’une cellule, ou un groupe de cellules, a commencé à dépasser ses limites étroites attribuées. »

Sans alluder à Le Bon et à tous ceux (Canetti, Freud, Pearson), qui ont étudié la triste civilisation des masses et de l’abrutissement collectiviste moderne, Kohr ajoute très justement :

 « Et si les corps sociaux deviennent malades avec la fièvre de l’agression, la brutalité, le collectivisme, ou l’idiotie massive, ce n’est pas parce qu’ils ont été victimes d’un mauvais leadership ou d’un dérangement mental. C’est parce que les êtres humains, si charmants en tant qu’individus ou en petites agrégations, ont été soudés en unités sociales concentrées telles que des foules, syndicats, cartels ou grandes puissances. C’est alors qu’ils commencent à glisser en catastrophe incontrôlable. »

La société postmoderne semble moins dangereuse, mais devient plus stupide. Huizinga avait bien parlé lui de cette dérive du sport massifié dans son Homo ludens, qui est aussi un hommage au monde traditionnel non massifié. Kohr ajoute en hommage à Malthus (pourquoi pas ?) cette fois :

 « Les problèmes sociaux, pour paraphraser la doctrine de la population de Thomas Malthus, ont la malheureuse tendance à croître à un rapport géométrique avec la croissance de l’organisme dont ils font partie, tandis que la capacité de l’homme à faire face avec eux, si elle peut être étendue, ne croît qu’à un rapport arithmétique. Ce qui signifie que, si une société se développe au-delà de sa taille optimale, ses problèmes doivent finalement dépasser la croissance des facultés humaines qui sont nécessaires pour y faire face. »

On se rapproche de notre sujet du moment : la dérive fasciste et eschatologique des États-Unis d’Amérique. Kohr écrit :

« Après la Seconde Guerre mondiale, une tendance similaire à la destruction de sa propre puissance mondiale s’installa, à un rythme cependant beaucoup plus lent. Entre-temps, il a été complètement arrêté. Il n’y a plus de possibilité que les États-Unis ne soient pas une grande puissance. En conséquence, l’état d’esprit correspondant, se développant comme une conséquence peut-être indésirable, mais inévitable, a déjà commencé à se manifester à de nombreuses reprises, par exemple lorsque le secrétaire à la Défense du Président Truman, Louis Johnson, a envisagé en 1950 une guerre préventive, ou lorsque le général Eisenhower, dans un discours devant le Congrès dans la même année, a déclaré que nous pouvons écrabouiller (lick) le monde. Ce dernier mot ressemblait plus à une déclaration de l’exubérant Kaiser d’Allemagne qu’au président de l’université de Columbia. Pourquoi un défenseur de la paix et de la démocratie devrait-il vouloir écrabouiller le monde ? Exprimée de façon non agressive, l’affirmation aurait été que, si nous sommes unis, le monde entier ne peut pas nous liquider. »

Kohr donne son explication à ces temps nouveaux d’hubris et de terreur et de lutte contre la terreur :

« Cependant, cela montre comment le pouvoir engendre cet état d’esprit particulier, en particulier chez un homme qui, en général, doit connaître toute l’étendue du potentiel de l’Amérique. Il montre aussi qu’aucune idéologie de la paix, aussi ancrée soit-elle dans les traditions d’un pays, ne peut empêcher la guerre si une certaine condition de pouvoir est apparue. Il peut avoir un effet retardateur et embellissant, mais c’est tout, comme l’indique le mythe trompeur de la guerre préventive qui préconise l’agression pour le but solennellement déclaré de l’éviter. C’est comme si quelqu’un allait tuer un homme pour lui épargner la peine de mourir. »

Cela me fait penser au « principe de précaution » dont l’usage ne peut être que menaçant dans ses applications, dérisoire dans ses résultats et totalitaire dans son aboutissement. Kohr reprend Hegel et Marx pour qui la modification quantitative entraîne nécessairement une mutation qualitative. La tranquille nation de Jefferson devient un petit monstre sous Lincoln ou Roosevelt I, un énorme monstre sous Roosevelt II-Truman et une créature tératologique et cocasse sous Bush-Obama-Trump.

Il explique :

« C’est donc toujours la masse critique du pouvoir qui transforme les nations en agresseurs, tandis que l’absence de pouvoir critique semble toujours la condition qui les rend pacifiques. Le calme n’est donc pas une attitude mentale ou une qualité acquise qui peut être formée en nous. Il nous revient automatiquement comme le résultat de la faiblesse physique. Les tribus les plus sauvages sont paisibles lorsqu’elles sont faibles. Mais, pour la même raison, les peuples civilisés deviennent des sauvages quand ils sont forts. »

En devenant forts, nous devenons dangereux (États tortionnaires puis empires coloniaux pour les nations extrême-occidentales européennes). Et en devenant gros, nous devenons aussi médiocres. Nietzsche, Hobsbawn ou Bakounine ont remarqué la stérilisation culturelle et musicale de l’Allemagne et de l’Italie au moment de leur unification… qui a débouché sur les monstres politiques que l’on sait par ailleurs.

Kohr redoute plus encore, vers 1960, l’État mondial ou la démence farfelue de la construction européenne. Il nous reste à remarquer que son culte des petits États (plus pacifiques, solidaires, cultivés, etc.) peut facilement être détourné et recyclé par « les puissances », au sens paulinien, du jour. Il n’est pas démontré que la déconstruction de nos pauvres États-nations — ou de ce qu’il en reste — serve nécessairement la liberté, la prospérité et surtout la culture de nos peuples. C’est une élimination de plus dans le projet flasque et grotesque d’une gargantuesque construction mondialiste.

[Note de Joseph : nous pouvons cependant aussi trouver des exemples du fait que des systèmes trop petits ne sont pas non plus adéquatement fonctionnels ou ne parviennent pas à remplir les objectifs envisagés, ne serait-ce que parce qu’ils manquent de puissance. Une masse d’hydrogène relativement trop petite, comme Jupiter, ne devient pas une étoile, mais reste froide et incapable de fournir lumière et chaleur à ses satellites naturels. Un maçon seul ne peut construire une cathédrale, alors que plusieurs dizaines travaillant ensemble le peuvent. Le critère n’est alors pas la petitesse, mais l’optimisation, la modération, le juste milieu, les moyens adaptés aux besoins, le principe de moindre action ou encore la loi d’économie : ni trop, ni trop peu ; la dépense d’énergie minimale pour le résultat optimal… Pour émettre un son, la corde de guitare doit être suffisamment tendue, mais pas trop, sinon elle se rompt. Pour émettre de la lumière pendant longtemps et de manière douce, la masse d’hydrogène doit être suffisamment grosse, mais pas trop, sinon elle finit par exploser dramatiquement, et trop vite. Le Soleil en comparaison de la Terre et des Hommes est énorme, gigantesque, démesurément massif. Pourtant il vit depuis 5 milliards d’années et vivra encore autant, fournissant pendant tout ce temps une énergie gratuite aux planètes et aux êtres vivants du Système solaire. Chaque système doit trouver sa taille optimale selon les ressources dont il dispose et la manière dont il est organisé. Une organisation efficace demande moins de ressources et engendre moins de frictions, de conflits, de problèmes… Cependant, la Conscience doit être à la mesure de la complexité de l’organisation ou du système. La cause de la violence croissante dans nos cités et nos nations ne se réduit pas à leur taille. Elle provient de plusieurs facteurs, dont la relativement faible conscience morale et spirituelle qui anime un trop grand nombre d’individus.]





Louis-Ferdinand Céline et la robotisation du monde et des gens

Par Nicolas Bonnal

Comme Saint-Exupéry(([1] Saint-Exupéry  : « Deux milliards d’hommes n’entendent plus que le robot »)) et Bernanos, Céline combat les robots. Le mot « robot » revient trente-sept fois dans Bagatelles pour un massacre, ce qui est énorme. Car comme je l’ai montré ce que combat Céline dans les Pamphlets c’est le monde moderne ; voyez dans mon livre le chapitre sur le Loup des steppes, ouvrage jadis en vogue, et qui lutte aussi — comme Stefan Zweig à la même époque, qui préféra mourir au Brésil (dans une ville magique, Petrópolis, où j’ai vécu deux fois) que vivre riche à Hollywood dans la terre de la grande uniformisation qu’il avait magnifiquement dénoncée.

Comme les robots ont gagné la partie, et que l’on est déjà remplacés, numérisés, transsexuels, lobotomisés, éliminés et même affamés par les autorités US en la matière (redécouvrir Georges Duhamel), il me semble important de citer quelques bonnes pages céliniennes sur les robots (mot inventé dans les années vingt par Carel Capek).

On commence p. 102 :

« C’est le français idéal pour Robots. L’Homme véritablement, idéalement dépouillé, celui pour lequel tous les artistes littéraires d’aujourd’hui semblent écrire, c’est un robot. On peut rendre, notons-le, tout Robot, aussi luisant, “lignes simples”, aussi laqué, aérodynamique, rationalisé qu’on le désire, parfaitement élégantissime, au goût du jour. Il devrait tenir tout le centre du Palais de la Découverte le Robot… Il est lui l’aboutissement de tant d’efforts civilisateurs “rationnels”… admirablement naturalistes et objectifs (toutefois Robot frappé d’ivrognerie ! seul trait humain du Robot à ce jour)… Depuis la Renaissance l’on tend à travailler de plus en plus passionnément pour l’avènement du Royaume des Sciences et du Robot social. Le plus dépouillé… le plus objectif des langages c’est le parfait [168] journalistique objectif langage Robot… Nous y sommes… Plus besoin d’avoir une âme en face des trous pour s’exprimer humainement… Que des volumes ! des arêtes ! des pans ! et de la publicité !… et n’importe quelle baliverne robotique triomphe ! Nous y sommes… »

Puis Céline parle de nos écrivains modernes qu’il ne supporte pas (on sait qu’il pense que l’on a perdu le combat littéraire au seizième siècle quand le latin-grec d’Amyot traducteur de Plutarque s’est imposé à notre langue) :

« Ils pontifient en style “public”, impeccable, envers et contre tout, saltimbanques, devins cocus… Ils grandissent avec leur cuirasse… Ils crèvent avec leur cuirasse, dans leur cuirasse, étreints, bandagés, saucissonnés au plus juste. bouclés, couques, polis, reluisants robots, scaphandres rampants sous l’attirail énorme, emprunté de dix mille tuyaux et ficelles à peu près immobiles, presque aveugles, à tâtons, ils rampent ainsi vers le joli but lumineux de ces existences, au fond au fond ténèbres… la Retraite… Il n’émane des pertuis de leur armure, des fissures de ces robots “d’élite” que quelques gerbes, bouquets graciles, d’infinis minuscules glouglous, leurs bulles qui remontent à l’air libre. On ne les félicite jamais de ce qu’ils sont enfin parvenus à crever un jour, dépecer leur extraordinaire carcan métallique, mais au contraire de ce qu’ils réussissent parfois à s’harnacher encore plus pesamment que la veille… »

Il y a un aspect nietzschéen chez Céline : le lion contre le chameau. Il y a aussi un aspect guénonien : la Renaissance qui avec le siècle de Louis XIV mène aux catastrophes culturelles ; Balzac, Nerval ou Flaubert (dans sa correspondance) en avaient pris conscience. L’âme française disparaît peu à peu aux temps modernes, quand les latinistes-hellénistes-grammairiens-Vaugelas-femmes-savantes prennent le pouvoir (Bernanos en parle très bien aussi — et du paganisme gréco-romain et du culte étatique qui va avec).

Le robot perdure (le passage est tordant et on pense aux deux robots gay et trottinette de la Guerre des étoiles !) :

« Chaque fois, qu’ils s’agitent un peu ou beaucoup ça remue… ça bouge… il en sort des petits bruits insolites, des grêles tintements, des petites fausses notes. Et puis c’est marre, et puis c’est tout… L’invasion surréaliste, je la trouve absolument prête, elle peut déferler sans hésitation, par l’effet de la loi du nombre… Il ne reste pour ainsi dire plus rien devant l’art Robot, prêt à fondre. »

Dans mon livre sur internet j’avais insisté sur l’importance luciférienne — progressiste du Wunderkammer, du cabinet de curiosités. Céline :

« Je ne vois rien dans ces babioles qui puisse vraiment nous passionner… de quoi réveiller une vraie mouche, une mouche vivante, une mouche qui vole… la cause me paraît entendue, Renaissance, naturalisme, objectivisme, surréalisme, parfaite progression vers le Robot. Nous y sommes. »

Autre bel exemple de haine littéraire :

« M. Giraudoux, c’est un fait bien pertinent, fignolise quand il s’y donne, tout aussi bien que Prout-Proust. M. Paul des Cimetières Valéry mousse, picore, disparaît dans les vagues, beadekerinne, unanimise, surréalise s’il le faut comme un Romain… reparaît au bord comme Maurras, revient en Barrès, se perd encore, bergsonise, entesté, nous nargue de petits riens… »

Laissons de côté les « juifs » (une manière de dire chez lui) et allons au grain comme on dit chez moi :

« Une bonne standardisation littéraire internationale, bien avilissante, bien ahurissante, viendrait en ce moment fort à point, parachever l’œuvre d’insensibilisation, de nivellement artistique que les Juifs ont parfaitement accomplie déjà dans la peinture, la musique et le cinéma. Ainsi le cycle de la robotisation internationale des esprits serait chose parfaite. »

La machine à standardiser arrive avec entre autres le cinéma (je rappelle que pas mal de grands esprits Juifs la dénoncent, à commencer par Zweig, Bloom, Broch ou les plus grands cinéastes — Kubrick, Donen, Oz, Pollack…) :

« Le reste, tout ce qu’il ne peut absorber, pervertir, déglutir, saloper standardiser, doit disparaître. C’est le plus simple. Il le décrète. Les banques exécutent. Pour le monde robot qu’on nous prépare, il suffira de quelques articles, reproductions à l’infini, fades simulacres, cartonnages inoffensifs, romans, voitures, pommes, professeurs, généraux, vedettes, pissotières tendancieuses, le tout standard, avec énormément de tam-tam d’imposture et de snobisme La camelote universelle, en somme, bruyante, juive et infecte… Le Juif tient tous les gouvernements, il commande toutes les machines à standardiser, il possède tous les câbles, tous les courants, demain tous les Robots. »

Les robots ne se révoltent pas. Asimov avait raison : donc on a transformé les gens en robots, ce qui était facile, reconnaissons-le, voyez comment Lewis Mumford décrit l’antique mégamachine et comment l’immense et méconnu Lévi-Strauss décrit la construction des pyramides.

« Plus aucune révolte à redouter des individus pré-robotiques, que nous sommes, nos meubles, romans, films, voitures, langage, l’immense majorité des populations modernes sont déjà standardisés. La civilisation moderne c’est la standardisation totale. »

C’est là qu’intervient la culture industrielle moderne, très bien tancée par Debord mais aussi par Adorno :

« Les grands lupanars d’arts modernes, les immenses clans hollywoodiens, toutes les sous-galères de l’art robot, ne manqueront jamais de ces saltimbanques dépravés… Le recrutement est infini. Le lecteur moyen, l’amateur rafignolesque, le snob cocktailien, le public enfin, la horde abjecte cinéphage, les abrutis-radios, les fanatiques envedettés, cet international prodigieux, glapissant, grouillement de jobards ivrognes et cocus, constitue la base piétinable à travers villes et continents, l’humus magnifique le terreau miraculeux, dans lequel les merdes juives publicitaires vont resplendir, séduire, ensorceler comme jamais. »

Et le cinéma présumé juif (dont je suis un fervent défenseur) en prend pour son grade avec Hollywood :

« Àla vénération du super-confort, des superproductions ; des super-branlées platitudes youtres, aux supersmokings, super-cocktails, super-bagnoles, enfin toute la super-connerie mécanisante et robotisante des salles obscures, de ces cavernes cent mille fois plus abrutissantes que les pires idolâtriques catacombes des premiers siècles. Tous ces miséreux, ces serfs délirants, complètement vermoulus par la propagande “idéolochique” de la radio du film et du “cancan” délirent à présent de désirs matériels et de muflerie militante. Les chômeurs louent des smokings ! »

Alors rassurons-nous : nous sommes des robots depuis longtemps. Et à propos de ces Juifs hollywoodiens on pourra lire mon hommage à l’âge d’or de la comédie musicale ! On reverra aussi l’excellent Woody et les robots, un des Woody Allen les plus roboratifs-sic de sa grande époque.

Sources principales :

https://childrenofyhwh.com/multimedia/video/bibliotheque/bibliotheque/C%C3%83%C2%A9line/Bagatelles%20pour%20un%20massacre.pdf



Saint-Exupéry  : « Deux milliards d’hommes n’entendent plus que le robot »

Par Nicolas Bonnal

Une admirable lettre de Saint-Exupéry au général X : « Deux milliards d’hommes n’entendent plus que le robot »1

Pilote de guerre, Saint-Ex est placé pour parler de la technologie ; or celle-ci anéantit le combat et le goût du combat et le voyage et le goût du voyage.

Il écrit donc dans sa lettre :

« Je viens de faire quelques vols sur “P-38”. C’est une belle machine. J’aurais été heureux de disposer de ce cadeau-là pour mes vingt ans. Je constate avec mélancolie qu’aujourd’hui, à quarante-trois ans, après quelque six mille cinq cents heures de vol sous tous les ciels du monde, je ne puis plus trouver grand plaisir à ce jeu-là. Ce n’est plus qu’un instrument de déplacement — ici, de guerre. Si je me soumets à la vitesse et à l’altitude à un âge patriarcal pour ce métier, c’est bien plus pour ne rien refuser des emmerdements de ma génération que dans l’espoir de retrouver les satisfactions d’autrefois. Ceci est peut-être mélancolique, mais peut-être bien ne l’est pas. »

Il a redécouvert par hasard le goût du déplacement en carriole, le goût du cheval, du mouton, des oliviers :

« Ceci est peut-être mélancolique, mais peut-être bien ne l’est pas. C’est sans doute quand j’avais vingt ans que je me trompais. En octobre 1940, de retour d’Afrique du Nord où le groupe 2-33 avait émigré, ma voiture étant remisée, exsangue, dans quelque garage poussiéreux, j’ai découvert la carriole et le cheval. Par elle, l’herbe des chemins. Les moutons et les oliviers. Ces oliviers avaient un autre rôle que celui de battre la mesure derrière les vitres à cent trente kilomètres à l’heure. Ils se montraient dans leur rythme vrai qui est de lentement fabriquer des olives. Les moutons n’avaient pas pour fin exclusive de faire tomber la moyenne. Ils redevenaient vivants. Ils faisaient de vraies crottes et fabriquaient de la vraie laine. Et l’herbe aussi avait un sens puisqu’ils la broutaient. »

Même la poussière est parfumée :

« Et je me suis senti revivre dans ce seul coin du monde où la poussière soit parfumée (je suis injuste, elle l’est en Grèce aussi comme en Provence). Et il m’a semblé que, durant toute ma vie, j’avais été un imbécile… »

Après, la tristesse devant la mécanisation du monde lui revient :

« Tout cela pour vous expliquer que cette existence grégaire au cœur d’une base américaine, ces repas expédiés debout en dix minutes, ce va-et-vient entre les monoplaces de 2 600 CV dans une sorte de bâtisse abstraite où nous sommes entassés à trois par chambre, ce terrible désert humain, en un mot, n’a rien qui me caresse le cœur. Ça aussi, comme les missions sans profit ou espoir de retour de juin 1940, c’est une maladie à passer. Je suis “malade” pour un temps inconnu. Mais je ne me reconnais pas le droit de ne pas subir cette maladie. Voilà tout. Aujourd’hui, je suis profondément triste — et en profondeur. Je suis triste pour ma génération qui est vide de toute substance humaine. Qui, n’ayant connu que le bar, les mathématiques et les Bugatti comme forme de vie spirituelle, se trouve aujourd’hui dans une action strictement grégaire qui n’a plus aucune couleur. »

En trois mots il expédie son époque :

« De la tragédie grecque, l’humanité, dans sa décadence, est tombée jusqu’au théâtre de M. Louis Verneuil (on ne peut guère aller plus loin). Siècle de la publicité, du système Bedeau, des régimes totalitaires et des armées sans clairons, ni drapeaux, ni messe pour les morts. Je hais mon époque de toutes mes forces. L’homme y meurt de soif. »

Ce n’est pas le même style (quelle chance nous avions tout de même), mais ce sont les thèmes de Céline et Bernanos. Saint-Ex ajoute sur la disparition spirituelle de la guerre :

« Considérez combien il intégrait d’efforts pour qu’il fût répondu à la vie spirituelle, poétique ou simplement humaine de l’homme. Aujourd’hui que nous sommes plus desséchés que des briques, nous sourions de ces niaiseries. Les costumes, les drapeaux, les chants, la musique, les victoires (il n’est pas de victoire aujourd’hui, rien qui ait la densité poétique d’un Austerlitz.) »

Et alors que Bernanos prépare sa France contre les robots (pauvre France ! Pauvre Bernanos !), il écrit notre pilote :

« Ah ! Général, il n’y a qu’un problème, un seul de par le monde. Rendre aux hommes une signification spirituelle, des inquiétudes spirituelles. Faire pleuvoir sur eux quelque chose qui ressemble à un chant grégorien. Deux milliards d’hommes n’entendent plus que le robot, ne comprennent plus que le robot, se font robots. Tous les craquements des trente dernières années n’ont que deux sources : les impasses du système économique du XIXe siècle, le désespoir spirituel. »

Il pressent que l’après-guerre sera terrible, les termites (il en parle aussi) n’ayant rien compris :

« À quoi servira de gagner la guerre si nous en avons pour cent ans de crise d’épilepsie révolutionnaire ? Quand la question allemande sera enfin réglée, tous les problèmes véritables commenceront à se poser. Il est peu probable que la spéculation sur les stocks américains suffise, au sortir de cette guerre, à distraire, comme en 1919, l’humanité de ses soucis véritables. Faute d’un courant spirituel fort, il poussera, comme champignons, trente-six sectes qui se diviseront les unes les autres. Le marxisme lui-même, trop vieillot, se décomposera en une multitude de néo-marxismes contradictoires. On l’a bien observé en Espagne. À moins qu’un César français ne nous installe dans un camp de concentration néo-socialiste pour l’éternité. »

Le César on l’a ; il s’appelle Jupiter. Vive nos antiquités gréco-latines contre lesquelles se déchaînent aussi Bernanos et Céline.

On nous châtrés, ajoute le maître :

« Nous sommes étonnamment bien châtrés. Ainsi sommes-nous enfin libres. On nous a coupé les bras et les jambes, puis on nous a laissés libres de marcher. Mais je hais cette époque où l’homme devient, sous un totalitarisme universel, bétail doux, poli et tranquille. On nous fait prendre ça pour un progrès moral ! Ce que je hais dans le marxisme, c’est le totalitarisme à quoi il conduit. L’homme y est défini comme producteur et consommateur, le problème essentiel est celui de distribution. Ainsi dans les fermes modèles. Ce que je hais dans le nazisme, c’est le totalitarisme à quoi il prétend par son essence même. On fait défiler les ouvriers de la Ruhr devant un Van Gogh, un Cézanne et un chromo. Ils votent naturellement pour le chromo. Voilà la vérité du peuple ! »

Et il n’avait pas vu la télé et les réseaux sociaux !

Plus on est allé vers le peuple au nom de la république ou de la démocratie libérale ou socialo (éducation, conscription, élections), plus on a récolté le totalitarisme qui a son tout a récolté le peuple. On a le bétail soumis en échange.

Le maître ajoute :

« On boucle solidement dans un camp de concentration les candidats Cézanne, les candidats

Van Gogh, tous les grands non-conformistes, et l’on alimente en chromos un bétail soumis. Mais où vont les États-Unis et où allons-nous, nous aussi, à cette époque de fonctionnariat universel ? L’homme robot, l’homme termite, l’homme oscillant du travail à la chaîne : système Bedeau, à la belote. L’homme châtré de tout son pouvoir créateur et qui ne sait même plus, du fond de son village, créer une danse ni une chanson. L’homme que l’on alimente en culture de confection, en culture standard comme on alimente les bœufs en foin. C’est cela, l’homme d’aujourd’hui. »

Hommage à la princesse de Clèves qui avait tant énervé l’insupportable Sarkozy :

« Et moi, je pense que, il n’y a pas trois cents ans, on pouvait écrireLa Princesse de Clèvesou s’enfermer dans un couvent pour la vie à cause d’un amour perdu, tant était brûlant l’amour. Aujourd’hui, bien sûr, des gens se suicident. Mais la souffrance de ceux-là est de l’ordre d’une rage de dents. Intolérable. Ça n’a point à faire avec l’amour. »

Et il conclut pensant à ses pauvres voisins endormis dans son baraquement militaire :

« Depuis le temps que j’écris, deux camarades se sont endormis devant moi dans ma chambre. Il va me falloir me coucher aussi, car je suppose que ma lumière les gêne (ça me manque bien, un coin à moi !). Ces deux camarades, dans leur genre, sont merveilleux. C’est droit, c’est noble, c’est propre, c’est fidèle. Et je ne sais pourquoi j’éprouve, à les regarder dormir ainsi, une sorte de pitié impuissante. Car, s’ils ignorent leur propre inquiétude, je la sens bien. Droits, nobles, propres, fidèles, oui, mais aussi terriblement pauvres. Ils auraient tant besoin d’un dieu. Pardonnez-moi si cette mauvaise lampe électrique que je vais éteindre vous a aussi empêché de dormir et croyez en mon amitié. »

Car, s’ils ignorent leur propre inquiétude, je la sens bien.

Tu vas voir le prochain vaccin, tu vas voir leur Reset, tu vas voit leur nouvelle guerre mondiale, tu vas voir les CBDC.


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Kubrick et la question russe

Par Nicolas Bonnal

Entre Spartacus, héros communiste (et excellent ballet), 2001 et les cosmonautes russes (dirigés par des femmes) et l’argot russe des voyous d’orange mécanique — sans oublier bien sûr la Lolita de Nabokov ou Dr Folamour — Kubrick semble obsédé par les Russes — et pas négativement. En musique aussi : pensons à Chostakovitch (EWS), à Khatchaturian (2001)…

Citons notre livre sur Kubrick alors pour balayer le problème et offrir quelques pistes de réflexion. On n’évoquera pas son frère Raoul membre du parti communiste…

« Kubrick et les Russes. En voilà une question pour le directeur de Folamour ! Mais commençons par le Commencement, par 2001, qui aurait des origines… russes. »

« Nous avons évoqué Solaris, un des plus célèbres et élitistes films de science-fiction du monde. Cela pose la question soviétique et Dieu disait qu’elle se pose dans le monde de Kubrick, surtout au cœur des années soixante ! Kubrick filme Spartacus, Folamour, il adapte un grand auteur russe dans Lolita,

Kubrick filme l’argot russe dans Orange mécanique, Kubrick enfin organise une importante rencontre avec des savants russes dans 2001 ; et ces derniers ne sont pas le moins du monde tournés en ridicule, ils sont juste privés d’information comme dans tout le monde dans ce film finalement habité par la conspiration. La science-fiction s’étant surtout développée dans un contexte de guerre froide, et la conquête spatiale aussi finalement (elle a pris fin avec la guerre des étoiles du président Reagan, aussi farcesque que le film du même nom !), il nous semble important de reposer la question russe — d’autant qu’à l’époque les Russes multiplient les films spatiaux.

La SF des empires, des jeux vidéo, des superhéros et des jeux galactiques n’étant pas celle de Kubrick, d’où pouvait venir son modèle ?

La critique américaine croyait que son modèle venait du sympathique George Pal (d’ailleurs sujet hongrois) ou de certains films japonais ?

En réalité son modèle venait d’un très beau film soviétique, En route vers les étoiles, de Pavel Klushantsev. Ce petit chef-d’œuvre est un documentaire de 1957 et l’on peut voir que Kubrick et son équipe y ont puisé beaucoup. Kubrick l’a dit lui-même, il n’est donc pas question de parler de plagiat, mais de source d’inspiration. Voyons voir :

  • — Le film soviétique veut décrire la conquête spatiale, ses enjeux scientifiques et techniques. Nous y sommes avec 2001.
  • — En route vers les étoiles (Doroga k svesdam) dure cinquante minutes, montre les préparatifs puis filme le vol poétiquement.
  • — La tête d’un homme adulte se surimpressionne sur la planète bleue. On est aussi dans 2001. C’est au début de ce film stupéfiant.
  • — La lumière est très forte, les vaisseaux blancs, notable par leur vaillance. Leur lenteur est aussi bien nette à l’écran. Les maquettes sont similaires.
  • — On voit l’intérieur des vaisseaux. On a un petit confort matériel, un intérieur cosy, on joue aux échecs, on prend soin d’un jeune chat. Il y a des femmes d’un niveau scientifique respectable, même des Asiatiques. Kubrick aurait pu envoyer Draba dans l’espace !
  • — On voit les cosmonautes sortir dans l’espace, s’approcher du vaisseau, le tout est filmé comme un ballet. Dans son film sur la Lune, Klushantsev utilisera Tchaïkovski ! C’est d’ailleurs un musicien soviétique, Khatchatourian, que Kubrick utilise pour décrire la petite vie des cosmonautes. Khatchatourian est aussi l’auteur d’un ballet nommé… Spartacus.
  • — L’intérieur de la station est un hémicycle, même les fauteuils ressemblent un peu à ceux du Hilton dans 2001 (ils sont noirs). Les maquettes et les formes sont très proches. Les cosmonautes sont vêtus identiquement — mais sans couleur.
  • — Les Russes installent un jardin expérimental, celui de… Silent running, le film de Douglas Trumbull, le génie des effets spéciaux de 2001. Il y a une station météo à bord et l’on essaie de comprendre le mystère de la vie.
  • — Une séquence tournée en Crimée montre un canot à moteur devant récupérer en mer Noire les cosmonautes amerrissant dans un futur proche. Certaines prises de vue de la mer sont des négatifs, exactement comme dans les célèbres séquences de la Vision à la fin de 2001.
  • — La voix off sécurisante évoque beaucoup de voix off chez Kubrick. Elle s’émerveille devant le progrès et souligne que toutes ces missions sont faites pour le bonheur de ceux qui vivent sur terre !

Ces lignes ne rendent pas de la beauté plastique impressionnante qui ressort de ce poème cinématographique plein de confiance (ou de mensonges…) en l’avenir et en la science. Un grand documentaire est supérieur à presque tous les films, et c’est pourquoi il ne faut pas négliger non plus les documentaires du jeune Kubrick. Certes c’est un film de propagande, mais ce n’est pas une insulte. 2001 est aussi un film de propagande, fait avec infiniment plus d’argent, et c’était aussi un film sur le futur, toujours très hypothétique comme on sait. Dans un livre amusant et disparate, l’alors marxiste Dominique Noguez parlait très bien de 2001 comme d’un film expérimental (son livre se nommait le cinéma, autrement) certes, mais aussi comme d’un film impérialiste à la gloire des USA. C’est exactement comme cela qu’il a été perçu à l’époque, au moment où gagnant apparemment la conquête spatiale, l’Amérique conquérait les cerveaux et gagnait la guerre froide.

On a partout des drapeaux américains dans le film, partout des symboles IBM, partout les symboles ATT, American Express (ne partez pas sans elle !), ou les Hilton cités plus haut. 2001 célèbre l’Amérique comme l’aînée des nations du monde, le modèle des sciences, des corporations et des héros people — ici discrets et humbles en plus.

En s’inspirant du film de Pavel Klushantsev, Kubrick a fait d’une pierre deux coups : il s’est inspiré d’une source que peu d’autres iraient voir (car qui connaît sérieusement le cinéma soviétique, qui fut longtemps le premier et le plus important du monde ?) ; il a fait un film pédagogique et anagogique, élevant l’esprit de l’homme ; il a fait un documentaire en même temps qu’une œuvre de fiction ; il a célébré comme on le faisait alors la science et le progrès depuis l’aube de l’humanité.

Après Kubrick a rajouté les traits propres à son génie : l’inquiétant ordinateur, qui annonce notre contrôle moderne ; la fantaisie visionnaire (qui existe toujours dans le cinéma russe de l’époque, voyez mon livre sur Ptouchko aussi et Rou) ; et la musique. Et dire qu’il a emprunté des musiques d’artistes du bloc communiste ! Pensez à Khatchaturian et à la mélancolique partition de Gayaneh dans 2001, à la suite pour jazz de Chostakovitch dans son dernier opus. »

Russophilie et crypto-bolchévisme

« Kubrick est-il resté un bolchevik discret jusqu’à la fin ? En tout cas nous pouvons relever dans son œuvre une dimension bien russophile. Certains ont voulu voir dans la tempête de neige de Shining une métaphore de la guerre froide.

Mais même la russophilie relative de Kubrick doit aussi être notée : il y a les entretiens téléphoniques du président dans Folamour ; les Russes sont traités comme de grandes personnes et les personnages les plus chargés sont les généraux anticommunistes Turgidson et Ripper — qui se plaint de son impuissance via l’évocation furibarde de la fluorisation de l’eau ! Mais le président, raisonnablement ridiculisé, tente de s’entendre avec les Russes.

Dans Orange mécanique, la révolte de la jeunesse nécessite un autre langage, un autre argot, à base de russe — ce n’est pas dit dans le film ! Mais les maltchiks, devotchkas et malinkis donnent à cette jeunesse anglaise déboussolée, cette jeunesse anglaise héritière du Welfare State et de Lord Beveridge une tonalité bien russe !

Enfin dans 2001 : l’odyssée de l’espace le rôle des Russes n’est pas à négliger. Dans leur livre sur le fœtus astral, les professeurs structuralistes Dumont et Monod se moquaient d’eux, et ils avaient bien tort. Après les Soviétiques que chez eux les femmes ne sont pas des secrétaires ou des serveuses, mais des ingénieurs et des cosmonautes. L’une de ces femmes est d’ailleurs amie de Floyd, elle connaît sa famille, il s’agit d’une relation de travail ; la guerre froide est bien dépassée depuis… Dr Folamour. Dans le film ce sont clairement les Américains et Floyd qui sont en faute pour rétention d’informations importantes (on a osé parler d’épidémie, ce qui n’était ni moral ni malin).

Nous traiterons ailleurs des emprunts des inspirations soviétiques de 2001, surtout liées au film génial de Pavel Klushantsev. On peut rajouter à propos de ce film que le savant russe est nommé Smyslov, comme le plus grand joueur d’échecs de son temps ! A-t-on assez parlé du goût de Kubrick pour les échecs ! En réalité il devait avoir une certaine estime pour les Russes et les Soviétiques, par-delà la guerre froide dont il se moque dans Folamour et, paraît-il, dans Shining… Le beau personnage du joueur d’échecs russophone dans la Razzia le démontre : Maurice est la seule personne intelligente et cultivée du film.

Oui, en ce sens oui, on peut bien dire que Kubrick était un bolchevik. Culte du cinéma, goût des échecs et de l’ordre, dénonciation du rôle de l’argent des guerres impériales, du délire du complexe militaro-sexuel, critique radicale du Deep State américain et de ses couches supérieures, tout son monde montre bien qui il aurait fait un excellent propagandiste !

Est-ce à dire que pour cette raison on l’aurait tué ? C’est l’interprétation délirante, marrante et paranoïaque d’une partie du web consacré à Kubrick. La charge contre les Ziegler ricanants qui dirigent cette planète et mènent le monde à se perte aurait valu au vieux cinéaste un royal châtiment digne de Shakespeare. En dénonçant les Illuminati et les élites hostiles — pensez au ministre tory d’Orange mécanique, l’auteur de Spartacus (nom de guerre du premier Illuminati !), de Folamour et de Shining aurait pris des risques… Et 666 jours avant 2001 il mourut. Inexplicablement. »

Orange mécanique et la langue russe

« Que c’est drôle quand même !

Dans Orange mécanique, Gulliver fait penser à Swift, mais cette parole en russe veut dire tête, qui vient de golova en russe. Swift aussi aimait se jouer des mots pour se jouer du monde. Kubrick reprend aussi les mots suivants recyclés froidement par Burgess pour créer sa novlangue : le célèbre maltchik pour garçon, soumka pour le sac, prestoupnick pour le criminel, malenky pour petit, rooka pour main, litso pour le visage. Un petit peu plus complexe est le lien entre Horror show et horosho (“très bien !” en russe) et veck et cheloveck (l’homme en russe). Tout ce charabia russifiant et sonore est un régal pour les oreilles et n’a pas peu contribué à l’énorme succès du film.

On n’a pas trace d’un goût pour le désir véritable avant le début des années soixante dans le cinéma de Kubrick. Le goût pour l’extase verbale est sans doute venu avec la Lolita de Nabokov… » Nabokov a marqué un tournant dans son œuvre avec Lolita. Nous avons écrit tout un chapitre sur le goût de l’extase verbale (Folamour, Orange, Full metal jacket…) chez Kubrick…

Sources :




Pierre-Antoine Plaquevent et la conspiration ploutocratique

Par Nicolas Bonnal

Voici un travail sensationnel, formidablement documenté et référencé. Il commence par un long rappel de la catastrophe vaccinale à travers non pas les âges, mais les mois et les années, catastrophe miraculeusement passée sous silence. On citera encore Guy Debord qui notait alors dans ses Commentaires :

« Jamais censure n’a été plus parfaite. Jamais l’opinion de ceux à qui l’on fait croire encore, dans quelques pays, qu’ils sont restés des citoyens libres, n’a été moins autorisée à se faire connaître, chaque fois qu’il s’agit d’un choix qui affectera leur vie réelle. Jamais il n’a été permis de leur mentir avec une si parfaite absence de conséquence. Le spectateur est seulement censé ignorer tout, ne mériter rien. »

L’excellence du travail de Pierre-Antoine Plaquevent permettra à tous les béotiens en la matière de maîtriser la plupart des paramètres de cette globalisation devenue folle et dangereuse. Le livre insiste aussi sur le péril chinois qui s’est manifesté lors de la crise du Covid et qui a démontré la collusion entre l’empire totalitaire chinois et l’OMS de l’effrayant Bill Gates. La progression de la tyrannie numérique et de la gouvernance totale — par-delà l’inconstante et bien vague gesticulation des Brics — n’échappe qu’aux aveugles qui en sont restés aux enfantillages des camps des bons et des méchants, à un manichéisme de théâtre. La réalité que montre la situation actuelle est totalement orwellienne : il y a une élite technocratique et politique qui se renforce partout et un troupeau politique qui se renforce partout dans son acceptation aberrante de la situation (servitude volontaire, que de crimes ne commettra-t-on pas en ton nom ?).

La gouvernance est rendue possible par les progrès de la science et de la technologie. Plaquevent invente un néologisme dans ce domaine : la technosophie.

« La volonté de transcender les capacités humaines par la technoscience et l’ingénierie génétique est un fil conducteur de sa pensée, une véritable gnose de la technique. J’emploie pour ma part le terme de technosophie pour designer cette croyance quasiment religieuse dans les capacités de transformation du genre humain et même de l’ensemble du vivant par la science et la technique. »

Pierre-Antoine rappelle les hauts faits de la famille Huxley dotée d’un pouvoir formidable après la Guerre grâce à l’UNESCO :

« En 1939, Julian Huxley était déjà à l’origine du Manifeste des généticiens, un écrit collectif qui s’intéressait aux moyens nécessaires pour l’amélioration sociale et biologique de l’humanité dans son ensemble. Parmi ceux-ci, était déjà envisagée l’idée d’une fédération. »

Le mondialisme est un humanisme et un transhumanisme !

Mais parlons d’un point de vue de lecteur : en tant que recenseur du présent permanent j’ai particulièrement apprécié l’aperçu historique qui dans ce livre montre l’ancienneté de cette conspiration essentiellement anglo-américaine. Les allusions à Galton notamment sont excellentes. J’ai parlé plusieurs fois de termites et de la hiérarchie de castes et de la resucée sacerdotale (cf. Abellio). Sur Galton Plaquevent écrit :

« Mais Galton lui donne un second sens : la race désigne une classe sociale. Les différences entre les classes sociales, visibles par la réussite sociale, s’expliquent par des facteurs héréditaires. C’est la démarche initiale à partir de laquelle il construira l’eugénisme. Il divise la “race anglaise” en trois classes sociales : l’aristocratie, à laquelle il s’identifie, qui correspond à l’élite et qu’il appelle les “désirables” (the gifted class), la bourgeoisie encore acceptable, mais sans talent particulier et une classe importante de pauvres qu’il appelle les “indésirables”. Selon Galton et ses contemporains, la pauvreté correspond à un état biologique : le pauvre est pauvre, car il est déterminé biologiquement ainsi. »

Le pauvre devient un indigne. On ne le sait que trop maintenant. Au fur et à mesure que les riches ne sont plus accablés d’impôts, les pauvres le sont. Et la dette de la nation savamment augmentée par chaque gouvernement est là pour les emprisonner puis les réduire.

Ces lignes sur Galton me semblent essentielles pour expliquer la situation française actuelle. Par exemple : on n’a plus de droite ni de gauche (au sens d’une vision culturelle ou idéologique du monde : il n’y a plus non plus de religion catholique). Par contre on a un président (vive cette constitution de la cinquième république, tant vantée par les imbéciles, et qui devait tôt ou tard nous mener à cette catastrophe dictatoriale) pour les riches ou, comme disait le peu regretté Hollande, les très riches. La mise en place de la ploutocratie progressiste avait été sentie par des esprits comme Drumont, Bernanos ou Céline (voyez mes textes sur cette question) ; et là, explique Plaquevent, elle a été mise en place dans le cadre d’une gouvernance technique, bancaire et sanitaire du monde. Dès les années 1910 Jack London en parle dans le Talon de fer en dénonçant une élite de businessmen qui désire bien faire (la philanthropie milliardaire) ; et Chesterton dans son roman à clés Un nommé Jeudi parle de cette conspiration milliardaire contre laquelle nations et policiers ne peuvent déjà plus rien. Les grands initiés et autres prédateurs (le Horla de Maupassant) ont gagné la partie.

Sur ce point précis de la conspiration milliardaire progressiste Plaquevent explique que :

« C’est en fait tout un milieu eugéniste de “gauche” libéral au sens anglo-saxon de ce terme) qui sera à l’origine de la fondation des grands organismes culturels, politiques et sanitaires de la gouvernance mondiale. Avec l’appui de grands argentiers mondialistes comme la famille Rockefeller, les bases d’une planification démographique globaliste et eugéniste furent élaborées et mises en place à cette époque, dans l’immédiat après-guerre. »

Les objectifs restent certains de ceux du nazisme, mais il va falloir s’y prendre of course autrement :

« Après la défaite militaro-politique de l’hérésie politique du socialisme internationaliste que fut le national-socialisme, l’eugénisme prenait désormais la forme unique et décomplexée d’un eugénisme humanitaire, projeté à l’échelle planétaire et cosmopolitique. »

Relire Smedley Butler sur cette proximité idéologique et comportementale entre nazisme et gouvernance dictatoriale-démocrate aux USA.

La dangerosité de ce monde moderne dominée par de progressistes forces d’argent n’est plus à démontrer ; la littérature populaire s’en est saisie (que l’on pense à Fantômas…) au début du vingtième siècle quand les 300 qui dirigent le monde (Rathenau) se connaissent déjà tous ; la guerre facilitera la gouvernance mondialiste une fois écrasée l’Allemagne (First we take Manhattan then we take Berlin comme dit la chanson du contre-initié Léonard C.). Gustave Le Rouge a publié un livre nommé la Conspiration des milliardaires… tous américains.

Mais restons à la nôtre d’époque. Plaquevent rappelle l’incroyable :

« Le 15 mai 2009, se réunissait à New-York un groupe restreint de milliardaires parmi les plus influents afin de débattre des “problèmes de la planète” selon l’expression consacrée. »

Comme on sait le problème de la planète, c’est nous, les huit milliards moins riches ! Pierre-Antoine ajoute :

« Parmi ceux-ci on retrouvait : Bill Gates, George Soros, Warren Buffett, David Rockefeller, Ted Turner et Oprah Winfrey. Mais aussi d’autres personnalités moins connues du grand public francophone comme le couple d’affairistes Eli et Edythe Broad. »

Le dernier nommé semble avoir été un contre-initié de haut vol notamment dans le domaine de l’architecture. On reverra à ce sujet l’œuf du serpent de Bergman dont le message implicite est le suivant : « toutes les villes et constructions nouvelles n’avaient qu’un but de contrôle psychologique et social. »

Passons à la fameuse « bombe démographique », brandie par ceux-là mêmes qui remplissent nos villes de migrants pour aboutir à leurs fins.

Le livre évoque bien sûr ces menaces, notamment celles des démographes catastrophistes des années 60-70 (les Ehrlich) dont toutes les prédictions se sont révélées fausses. On lit, car c’est édifiant (cf. notre planète en ébullition) :

« Bien que ses vues restent inchangées en matière de démographie planétaire, Paul Ehrlich semble quelque peu obligé de refréner ses anxiétés compte tenu des nombreuses prophéties catastrophistes qu’il annonçait dans les années 70 et qui ne se sont pas réalisées. Parmi ces prédictions, on peut citer les suivantes dont certaines sont assez étonnantes :

« Dans dix ans, toute vie animale importante dans la mer aura disparu. De vastes zones côtières devront être évacuées à cause de la puanteur des poissons morts. »
« La chute des températures ferait s’enfoncer les calottes glaciaires dans l’océan, produisant “un raz-de-marée mondial qui pourrait anéantir une grande partie de l’humanité” et faire “monter le niveau de la mer de 60 à 100 pieds”. »

Soixante ans donc de tartines Rousseau relayées par Al Gore. Il semble que la montée non pas des océans, mais de l’imbécillité médiatique rende la croisade de ces fous possible aujourd’hui. Ici on retrouve le R.P. Bruckberger et cette obsession suicidaire de la race blanche rendue possible par une déchristianisation massive et totale (Notre-Dame, es-tu là ?).

Pierre-Antoine rappelle nûment :

« Surtout, comme nous le verrons plus loin, ce type de discours catastrophistes servira de prétexte à des formes d’ingérences dépopulationnistes à travers le monde entier. Interventions dont l’habillage humanitaire-sanitaire camoufle mal des objectifs très concrets de domination géopolitique. »

La dépopulation est déjà là en Europe, de la France à l’Allemagne en passant par la Pologne. Effondrement de la natalité et explosion de la mortalité. Sous Hollande et Macron (vive les socialos que dénonçait Trotski justement, toujours alliés des milliardaires et du capital américain depuis les années vingt), la natalité française est passée de 800 000 à 600 000. Ce dépeuplement voulu et coordonné est en bonne marche, accompagné d’une invasion migrante extravagante.

C’est Tocqueville qui écrit quelque part (je cite de mémoire) :

« Je pense, qu’à tout prendre, l’aristocratie manufacturière que nous voyons s’élever sous nos yeux, est une des plus dures qui aient paru sur la terre… c’est de ce côté que les amis de la démocratie doivent sans cesse tourner avec inquiétude leurs regards ; car, si jamais l’inégalité permanente des conditions et l’aristocratie pénètrent de nouveau dans le monde, on peut prédire qu’elles y entreront par cette porte. »

Et l’objet de cette manufacture aujourd’hui c’est la biomasse humaine qu’il faut à la fois réduire et transformer. C’est nous.

On vous laisse découvrir ce merveilleux ouvrage immense et protéiforme (le tome deuxième est plus techno-scientifique et orienté sur les manipulations climatiques), véritable encyclopédie des conspirations ploutocratiques et génocidaires en cours. J’ai bien sûr insisté sur les points qui m’étaient le plus familiers (tout le monde n’est pas encyclopédiste !).




Comment le cinéma reflète la société et annonce son devenir

[Source : Nicolas Bonnal et Avatar Media]






Mort au QI trop faible ?

Par Nicolas Bonnal

Mort au QI trop faible : Aldous Huxley et le nouveau principe d’Archimède : « Peut-être que les hommes de génie sont les seuls vrais hommes. Dans toute l’histoire de la race, il n’y a eu que quelques milliers d’hommes réels. Et nous autres, que sommes-nous ? Animaux enseignables. Sans l’aide des vrais hommes, nous n’aurions presque rien découvert du tout… Il y a eu des nations entières de chiens, pensais-je ; des époques entières où aucun Homme n’est né. » Toute cette littérature prétend justifier le génocide en préparation voulu par les élites mondialistes milliardaires.

L’eugénisme rejoint le transhumanisme : faire survivre seulement le riche-éduqué.

Aldous Huxley est comme on sait un prophète noir britannique qui a décrit et célébré (et non dénoncé, comme on croit à l’école) le cauchemar que nous allons vivre grâce aux gouvernements achetés et aux populations hébétées. Auteur d’une œuvre littéraire assez médiocre aussi, cet essayiste scientifique proche d’Harari à sa manière a annoncé la couleur (douleur) dans une nouvelle nommée « Le Jeune Archimède » que l’on pourrait résumer ici ainsi : si tu n’es pas Mozart ou Einstein, crève. Pierre Bourdieu avait parlé pendant les crises des années 90 de ce racisme de l’intelligence, racisme qui a depuis gagné le cerveau de crétins comme notre ministre de l’économie.

Le narrateur séjourne en Italie, repère un enfant surdoué (Harari sort aussi de ces écoles) ; et cela donne les réflexions suivantes :

« J’ai pensé aux grandes différences entre les êtres humains. On classe les hommes selon la couleur de leurs yeux et de leurs cheveux, la forme de leur crâne. Ne serait-il pas plus judicieux de les diviser en espèces intellectuelles ? Il y aurait des fossés encore plus larges entre les types mentaux extrêmes qu’entre un Bochiman et un Scandinave. Cet enfant, pensais-je, quand il sera grand, sera pour moi, intellectuellement, ce qu’un homme est pour un chien. Et il y a d’autres hommes et femmes qui sont, peut-être, presque comme des chiens pour moi. »

Donc il y a « les chiens et les Bochimans » qui à côté de Bill Gates ou d’Harari ne méritent pas de vivre (quand on voit comment Gates et Harari parlent ou écrivent l’anglais, on croit rire — mais passons). On continue ; seul le génie a droit à l’être et à l’âme :

« Peut-être que les hommes de génie sont les seuls vrais hommes. Dans toute l’histoire de la race, il n’y a eu que quelques milliers d’hommes réels. Et nous autres, que sommes-nous ? Animaux enseignables. Sans l’aide des vrais hommes, nous n’aurions presque rien découvert du tout. Presque toutes les idées qui nous sont familières n’auraient jamais pu venir à des esprits comme le nôtre. Plantez les graines là-bas et elles pousseront ; mais nos esprits n’auraient jamais pu les générer spontanément. »

Vaste prison de médiocres l’humanité doit son salut à une élite de cerveaux depuis réfugiés à Davos (lieu comme on sait de la Montagne magique de Mann — livre à relire pour comprendre ce qui arrive à l’Europe). Le reste c’est des chiens, des kelb comme on disait chez moi à La Goulette :

« Il y a eu des nations entières de chiens, pensais-je ; des époques entières où aucun Homme n’est né. Des Égyptiens ternes, les Grecs ont pris une expérience grossière et des règles empiriques et ont fait des sciences. Plus de mille ans se sont écoulés avant qu’Archimède ait un successeur comparable. Il n’y a eu qu’un seul Bouddha, un seul Jésus, un seul Bach à notre connaissance, un seul Michel-Ange. »

Huxley pleure la rareté des génies :

« Est-ce par hasard, me demandais-je, qu’un Homme naît de temps en temps ? Qu’est-ce qui fait qu’une constellation entière d’entre eux naissent en même temps et sont issus d’un seul peuple ? Taine pensait que Léonard, Michel-Ange et Raphaël étaient nés quand ils étaient parce que le temps était venu pour les grands peintres et la scène italienne sympathique. Dans la bouche d’un Français rationaliste du XIXe siècle, la doctrine est étrangement mystique ; cela n’en est peut-être pas moins vrai. Mais qu’en est-il de ceux qui sont nés hors du temps ? Blake, par exemple. Qu’en est-il de ceux-là ? »

Huxley passe ensuite aux généralités sur les enfants surdoués ; on croirait lire Rémy Chauvin que j’ai interviewé en 1992 — mais sur d’autres sujets plus amusants.

« Je pensais à cet étrange talent distinct et séparé du reste de l’esprit, indépendant, presque, de l’expérience. Les enfants prodiges typiques sont musicaux et mathématiques ; les autres talents mûrissent lentement sous l’influence de l’expérience émotionnelle et de la croissance. Jusqu’à trente ans, Balzac ne fit preuve que d’incompétence ; mais à quatre ans, le jeune Mozart était déjà musicien, et certaines des œuvres les plus brillantes de Pascal ont été réalisées avant qu’il ne soit sorti de son adolescence. »

Huxley devient éducateur de son enfant de chômeur :

« Dans les semaines qui ont suivi, j’ai alterné les cours quotidiens de piano avec des cours de mathématiques. Des conseils plutôt que des leçons qu’ils étaient ; car je ne faisais que des suggestions, indiquais des méthodes, et laissais à l’enfant le soin d’élaborer les idées en détail. Ainsi je l’initiai à l’algèbre en lui montrant une autre preuve du théorème de Pythagore. »

Il ne s’agit pas ici de contester l’enfance surdouée ou les Mozart : ils sont passés où d’ailleurs mon cher Huxley ? Et les Bruckner, et les Berlioz et les Mahler ? Ont-ils été trop vaccinés, comme le redoutait Rudolf Steiner (voir mon texte) ? Peut-on citer un seul compositeur, romancier ou même cinéaste de ce siècle de désastres ? Seuls les informaticiens des GAFAM sont tes surhommes ?

« Guido était aussi enchanté par les rudiments de l’algèbre qu’il l’aurait été si je lui avais donné une machine fonctionnant à la vapeur, avec une lampe à alcool méthylique pour chauffer la chaudière ; plus enchanté, peut-être, car le moteur se serait cassé, et, restant toujours lui-même, aurait de toute façon perdu de son charme, tandis que les rudiments d’algèbre continuaient de croître et de fleurir dans son esprit avec une luxuriance indéfectible. Chaque jour, il faisait la découverte de quelque chose qui lui paraissait d’une beauté exquise ; le nouveau jouet était inépuisable dans ses potentialités. »

Après évidemment le génie prend son air fatigué. Pensez à la gueule de Mathusalem de Bill Gates ou de golem raté de Schwab-Hariri. Fatigué de notre misère notre génie prend froid et meurt jeune :

« C’était un été exceptionnellement chaud. Au début de juillet, notre petit Robin, peu habitué à ces températures élevées, commença à avoir l’air pâle et fatigué ; il était apathique, avait perdu l’appétit et l’énergie. Le médecin a conseillé l’air de la montagne. Nous avons décidé de passer les dix ou douze prochaines semaines en Suisse. »

Ah, la Suisse, son pognon, ses montagnes magiques, ses coffres et son Davos ! Dostoïevski en a peur d’ailleurs. C’est dans l’Idiot (sic). On y reviendra.

Sources :

http://www.naturalthinker.net/AldousHuxley-Young-Archimedes.pdf
https://fr.wikipedia.org/wiki/Sur_la_télévision
Nicolas Bonnal — Petits écrits libertariens : Contre le monstre froid




Le Réchauffement Chromatique

[Source : AVATAR Media ou Nicolas Bonnal]




La solution c’est le problème : retour sur Paul Watzlawick et les impasses occidentales

Par Nicolas Bonnal

La guerre contre la Russie devait être la solution : elle est devenue le problème. L’Europe technocratique supranationale devait être la solution : elle est le problème. Le vaccin devait être la solution : il est devenu le problème. On continue ?

Le légendaire Paul Watzlawick avait souligné le caractère gothique de nos monstrueux systèmes de « santé » : la multiplication par trente des dépenses médicales a créé les conditions d’un effondrement humain : faible, endetté, complexé, le citoyen serait bon pour les abattoirs de la postmodernité et pour soixante vaccins par an. Tournant le dos aux enseignements de Jünger (dans les années cinquante — voyez mes textes) ou de Rudolf Steiner (dans les années vingt) le petit blanc occidental se donne aux monstres et aux charlatans des hôpitaux (Debord, Commentaires) pour un oui ou pour un non.

Deux caractères m’enchantent chez Watzlawick, sa culture littéraire qui est la mienne — et son humour.

Pour Watzlawick la solution est souvent le problème : et la presse britannique découvre l’écrasante défaite aujourd’hui de l’Ukraine et de l’OTAN face à l’ours d’argile russe… Toutes les solutions de nos technocrates et politiciens froncés n’ont fait que créer de nouveaux problèmes sans jamais rien solutionner. Ce Watzlawick est un sage taoïste ironisant face au triomphe apocalyptique-millénaire des bureaucrates.

Mais laissons-lui la parole.

Faites vous-même votre malheur, début du livre :

« Ce que les directeurs de zoo pratiquent dans leur modeste domaine, les gouvernements modernes tentent de l’accomplir à l’échelle nationale : confits dans la sécurité, il faut que les citoyens mènent une existence dégoulinante de bonheur du berceau jusqu’à la tombe. Pour atteindre ce noble objectif, il faut, entre autres choses, entreprendre et mener sans relâche l’éducation du public pour lui permettre d’accéder à des niveaux toujours plus élevés d’incompétence sociale. Il ne faut donc pas s’étonner de voir l’accroissement vertigineux des sommes consacrées dans le monde à la santé publique et aux diverses entreprises à caractère social. »

L’ironie dénonce cette attitude protectrice (cf. Tocqueville) qui débouche sur ses conséquences tragi-comiques et catastrophiques :

« Donnons quelques exemples : le total des dépenses de santé des États-Unis s’est élevé de 12,7 milliards de dollars en 1950 à 247,2 milliards en 1980. Les seules dépenses de médicaments et d’articles médicaux sont passées de 3,7 milliards à 19,2 milliards pendant la même période. Et les dépenses de Sécurité sociale ont connu une évolution aussi faramineuse, passant de 23,5 milliards en 1950 à 428,4 milliards en 1979 (24). Pour prendre un seul exemple européen, les statistiques actuelles font apparaître en Allemagne de l’Ouest une dépense quotidienne de 450 millions de DM pour le système de santé, c’est-à-dire trente fois plus qu’en 1950. Elles montrent aussi que l’on compte à tout moment une moyenne de 10 millions de personnes malades en République fédérale et que le citoyen moyen d’Allemagne de l’Ouest engloutit trente mille comprimés dans le cours de sa vie. »

On répète parce que c’est drôle : « le citoyen moyen d’Allemagne de l’Ouest engloutit trente mille comprimés dans le cours de sa vie. »

Et vous ? Et moi ?

Certes un système aussi effroyable ne peut être interrompu. Il doit aller au bout comme le Titanic de la « civilisation » moderne dont a parlé Jünger dans son Rebelle :

« Que l’on imagine ce qui nous arriverait en cas de ralentissement, voire ce qu’à Dieu ne plaise ! — d’inversion de cette tendance. Des ministères entiers et toutes sortes d’autres institutions monstrueuses s’effondreraient, des pans entiers de l’industrie feraient faillite et des millions d’hommes et de femmes se retrouveraient au chômage. Pour participer à la lutte contre l’éventualité d’un tel désastre, j’ai conscience du rôle modeste, mais réel que peut jouer ce petit livre. »

La clé c’est ça. L’État moderne rend le citoyen nul et incapable, dépendant jusqu’au suicide — Tocqueville toujours et cette puissance publique, ce souverain qui nous enlèvera le trouble de penser et la peine de vivre, qui nous débarrassera dit Pearson vers 1990 du fardeau de la personnalité :

« L’État moderne a si grand besoin de l’impuissance et du malheur toujours croissant de ses citoyens qu’on ne peut laisser la satisfaction d’un tel besoin à la seule initiative individuelle, quelles qu’en soient les bonnes intentions. Comme dans tous les autres domaines de la vie humaine, le chemin de la réussite passe ici par la planification et le dirigisme de l’État. Être malheureux est certes à la portée du premier venu. »

Après l’art de se rendre malheureux devient une occupation à plein temps, via la pharmacie ou les livres de « développement personnel » (défense de rire) :

« Mais se rendre malheureux, faire soi-même son propre mal heur sont des techniques qu’il faut apprendre : à cet apprentissage-là, quelques coups du destin ne suffisent pas. Or, même dans les écrits des professionnels (c’est-à-dire des psychiatres et des psychologues), les renseignements utiles sont rares et le plus souvent fournis au hasard, en dehors de toute intention de l’auteur… »

https://www.telegraph.co.uk/news/2023/07/18/ukraine-and-the-west-are-facing-a-devastating-defeat/




La destruction de la France au cinéma

Par Nicolas Bonnal

Texte de deux mille mots environ, présentant mon prochain livre (Amazon.fr pour les fauchés, mais aussi Avatar Éditions) sur la disparition de la France sous les Trente Glorieuses, bien avant l’immigration si tancée donc.

Ce livre commente la destruction — ou la disparition de la France — de 1945 aux années 70. Je considère que si la France est devenue ce que l’on sait depuis, elle était déjà foutue alors — dans les années 70. Je l’ai perçue ainsi enfant déjà quand j’y venais, sorti de ma tranquille Tunisie. Je suis arrivé à Brest en famille en 1972, ville entièrement détruite et reconstruite, artificielle au possible. Cela ne parlait que football et télé à l’école et j’avais déjà le caractère des trois vieux emmerdeurs des Vieux de la Vieille. Mon seul réconfort visuel : les classiques US à la télé encore bien doublés et Chapeau melon et bottes de cuir — Emma Peel et Tara King.



Ce qui restait de la France c’était des bribes : le petit village, la petite campagne vite captée, le tourisme industriel avant de servir d’investissement immobilier au bourgeois écolo — on ne disait pas encore bobo. Le reste était promis à plus d’industrialisation, plus de destruction, plus de remplacement. On avait une émission très bonne qui s’appelait : la France défigurée (Péricard et Bériot) le samedi, je crois, après manger.

Le remplacement aussi m’est apparu dès cette époque : on se foutait de l’histoire, de la littérature ; on aimait la baise, le tourisme, la gesticulation motorisée ; on aimait la ville nouvelle, la bouffe nouvelle, et la spéculation. Et on est passé de mille balles du mètre à dix mille euros en cinquante ans, et à peu près partout. On s’adapte, comme dit Céline.

Le cinéma a bien filmé tout cela : il est la vérité vingt-quatre fois par seconde quand la télé est le mensonge vingt-quatre fois par seconde — conditionnement pour accepter tout ça et pour la fermer. J’ai vu par le cinéma la France remplacée dans Play Time de Tati, j’ai vu la France cybernétique et totalitaire dans Alphaville, et j’ai vu comme Rimbaud les effets sur les populations : les valseuses. J’ai vu la fin des ânes dans Balthazar.

J’ai vu disparaître ce qui restait d’Ancien Régime : le marquis libertin de la Femme du boulanger, les paysans traditionnels de Farrebique, les chevaliers servants de l’Empire dans Alerte au Sud (admirable et méconnu film de Devaivre). J’ai vu disparaître les curés aussi : c’est l’athée Jean Renoir qui filme un chant du cygne antimoderne dans le Déjeuner sur l’herbe. Son curé y est prodigieux et y annonce comme ceux de Pagnol la grande catastrophe. Mais les idiots avancent toujours, les somnambules, dit Hermann Broch.

À la place est apparue une société froide et structurée autour de nouveaux axiomes : le capitalisme, l’État-providence, le court terme, le sexe, la violence fantasmée, la sottise télé. Tout cela a suscité au début des résistances (merci à Guy Debord qui m’aura éclairé pour tout) et puis on s’est habitué. Va critiquer la télé maintenant, va… Va remettre en cause l’usage hypnotique de la technologie, va… C’est Fahrenheit 451 partout (marrant tout de même ce film de Truffaut tourné en anglais et pas en français).

Un écrivain américain a parlé de conquête du cool et il dit qu’en cinq ans on change un peuple. Patrick McGoohan (le Prisonnier donc, la seule série à connaître) dit qu’on ne peut échapper ni au Pentagone, ni à Madison, ni à la télé. Le peuple froncé fut créé sous le gaullisme en quelques années. On peut dire que le phénomène était partout le même, mais je tape quand même sur le gaullisme, sur son culte indécent, sur sa constitution, sur ses trente glorieuses, sur ses grandes transformations, sur sa société de consommation. Comme disait André Bercoff dans sa Reconquête, ces technocrates auraient dû lire les situationnistes pour voir dans quel hexagone ils nous mettaient et soumettaient.

Certes la France est coutumière du fait : c’est un pays implacable quand il s’agit d’idées, a dit le professeur Paul Hazard. On aime s’y refaire à neuf. Le bonheur est une idée neuve, etc. On aime les nouvelles vagues, etc. On aime se moderniser, se créoliser, etc. C’est la Lumière du monde (dixit de Gaulle) donc on peut tout se permettre. Mais franchement c’est ici que la technocratie aura fait le plus de dégâts ; ensuite les écologistes ont pris le relais et ont couvert leur hexagone d’éoliennes.

J’en suis resté à Nerval et à Adrienne moi, et à la danse de la Chapelle dans Drôle de frimousse, filmé par un petit juif nommé Stanley Donen, qui avait déjà réalisé dix chefs-d’œuvre et qui lui aussi allait affronter l’ère du cool américaine et ne plus s’en remettre — voyez mon livre sur la comédie musicale américaine. Stanley bis (l’autre c’est Kubrick) a filmé la chute de Paris dans Charade : on est en 1963 seulement. Chute brutale : la ville perd son charisme ; c’est une « commodité ». Après c’est Open bar, après c’est les drugstores, les aéroports, les autorités, les banlieues dégueulasses pour parler comme Belmondo (Nanterre forever), les villes nouvelles, les camps de vacances (vive les bronzés !), après c’est aussi une bonne inconscience de plus abrutis par la consommation et par la télé, abrutissement que filment Godard ou Pierre Etaix au début des années soixante. Etaix aussi ne s’en remettra pas et Godard disparaît pour une décennie et sans doute pour toujours — un peu comme Rimbaud parti pour l’Abyssinie et revenu pour se faire amputer — ici par la commission d’avances sur recettes.

Dans les années cinquante quand Tati filme mon Oncle, le public français réagit encore (peut encore réagir) et le monde entier aime son film ; et en URSS explique le grand et génial Jacques, le film rencontre un immense succès, car la bourgeoisie en prend plein la gueule. Dix ans plus tard, le modèle américain a gagné, la bourgeoisie américanisée et motorisée a gagné et elle a imposé son modèle. Play Time est un film aussitôt oublié et nié : on a mieux à faire dans les journaux bourgeois, on adore le gauchisme, le cul, la violence, la rébellion, notions toutes recyclées par nos bourgeois. La société postmoderne vit de la haine qu’elle s’inspire comme tel champ vit de la merde de ses paysans.

Mais comme c’est au sens figuré, c’est plus grave.

Le système crée alors d’autres modèles : ses vieux râleurs (Gabin…), ses nostalgiques (Audiard…) qu’on aime bien et qu’on évoquera ici. Il crée de risibles jeunes chrétiens, des loubards, des queutards, des pauvres filles, des bobos, des renégats, des richards, des paumés, des consommateurs, des petits cultivés dont jl a fait partie. On est dans la société de services. Et les sévices vont se multiplier.

Trois citations pour terminer — ou pour commencer. On espère qu’elles exaspéreront les imbéciles et rafraîchiront l’imagination des bons chrétiens comme dit Léon Bloy. Mes fidèles lecteurs les connaissant déjà :

Debord sur la mafia et l’avilissement universel :

« C’était une forme de crime organisé qui ne pouvait prospérer que sur la “protection” de minorités attardées, en dehors du monde des villes, là où ne pouvait pas pénétrer le contrôle d’une police rationnelle et des lois de la bourgeoisie. La tactique défensive de la Mafia ne pouvait jamais être que la suppression des témoignages, pour neutraliser la police et la justice, et faire régner dans sa sphère d’activité le secret qui lui est nécessaire. Elle a par la suite trouvé un champ nouveau dans le nouvel obscurantisme de la société du spectaculaire diffus, puis intégré : avec la victoire totale du secret, la démission générale des citoyens, la perte complète de la logique, et les progrès de la vénalité et de la lâcheté universelles, toutes les conditions favorables furent réunies pour qu’elle devînt une puissance moderne, et offensive. »

Bonald sur la disparition du sol et du peuple :

« Le sol n’est pas la patrie de l’homme civilisé ; il n’est pas même celle du sauvage, qui se croit toujours dans sa patrie lorsqu’il emporte avec lui les ossements de ses pères. Le sol n’est la patrie que de l’animal ; et, pour les renards et les ours, la patrie est leur tanière. Pour l’homme en société publique, le sol qu’il cultive n’est pas plus la patrie, que pour l’homme domestique la maison qu’il habite n’est la famille. L’homme civilisé ne voit la patrie que dans les lois qui régissent la société, dans l’ordre qui y règne, dans les pouvoirs qui la gouvernent, dans la religion qu’on y professe, et pour lui son pays peut n’être pas toujours sa patrie… Dès lors, l’émigration fut une nécessité pour les uns, un devoir pour les autres, un droit pour tous. »

Drumont enfin sur le Français et Paris remplacés :

« L’être qui est là est un moderne, un nihiliste, il ne tient à rien. Il n’est guère plus patriote que les trois cent mille étrangers, que l’aveuglement de nos gouvernants a laissé s’entasser dans ce Paris dont ils seront les maîtres quand ils voudront ; il ne se révoltera pas comme les aïeux sous l’empire de quelque excitation passagère, sous une influence atmosphérique en quelque sorte qui échauffe les têtes et fait surgir des barricades instantanément. »

Cela me paraît important pour dire que l’immigration et le racisme qui va avec n’ont rien à faire ici et que le Grand Remplacement était joué dans les seventies [les années 1970] sous Pompidou-Giscard. Après on a créé un être festif et nul (le bobo) nourri au bio et au cinoche de festival — et aussi et surtout comme partout ailleurs un maniaque du cinéma américain — non pas de Walsh, Hawks et Wilder, mais des blockbusters et des films-culte. C’est un autre sujet.

On n’a choisi que 72 films ici et comme dit notre correcteur Franz cela fait notice. C’est l’effet recherché. On a oublié de parler de Melville (encore un juif bien outillé intellectuellement et heureusement d’ailleurs parce que le froncé…) qui dans plusieurs films a fait mouche : dans l’Orchestre rouge, il montre la société froide et glacée et technocratique qui sort du gaullisme (une société structuraliste) ; dans l’Armée des ombres, il montre le martyrologue de la Résistance (la France antichrétienne adore se créer des religions de substitution) ; et dans Deux hommes dans Manhattan il dévoile les dessous sexuels des élites françaises à New York, la laideur de New York by night sans technicolor et la pourriture de l’ONU qui n’a pas fini de nous en faire baver. Le tout sans prétentions, sans y toucher, presque humblement. Pas étonnant qu’on l’ait oublié : de toute manière il n’y a plus de nostalgie. Tout est mort et très enterré — y compris les nostalgiques. Je peux en parler moi qui ai pleuré à la mort de Tati (un Russe), de Buñuel (un Aragonais) ou de Simone Signoret (autre immigrée) qui l’a bien dit : la nostalgie n’est plus et ne sera plus ce qu’elle était. Le Grand Reset a déjà eu lieu dans tous les cerveaux et le froncé pouvait se faire remplacer physiquement. Il ne sait plus s’il est vivant, le froncé, entre sa télé et sa pharmacopée. Ce n’est même pas vrai d’ailleurs : il est plus vieux, engraissé par la dette, et servi par le tiers-monde après avoir bien vécu après mai 68 ; mais de quoi se plaint-il ?

Un grand regret, que les films français de cette époque damnée ne soient pas meilleurs — mais c’est que la France est depuis longtemps un pays surfait et brillant qui vit de sa légende et de sa propagande ; Paris aussi est surestimé un peu comme Washington, car c’est une ville qui a été conçue par les bonapartistes et les républicains pour impressionner, et épater le touriste bourgeois). Le Grand Meaulnes est un film d’italien tourné avec un acteur… ukrainien ; on n’a rien fait sur Nerval et son Adrienne essence de la France druidique et médiévale enfouie ; du coup on a rajouté quelques comédies musicales à notre convenance qui toutes tournées dans les années cinquante ont montré au béotien hexagonal ce que c’était Paris avant son impeccable destruction moderniste et industrielle des années soixante. Comme dit mon ami Paucard dans ses Criminels du béton, on n’a plus écrit de chanson à la gloire de Paris depuis cette époque, alors…

J’ai donc cité peu de films des années 80 et d’après. Je considère en effet que le mal était fait. On n’avait plus que du crétinisme subventionné à pourfendre et notre religion était faite avec JJ Annaud : il valait mieux s’exporter que s’abonner aux Nuits fauves des huns et des autres. Notre film préféré à Tetyana et moi ce sont les Visiteurs parce que le serf s’adapte tout de suite (normal on est dans une société de services) à l’affreux monde (banquiers, bowlings et château recyclé sans oublier la rocade qui traumatise notre génial dentiste surexcité) et parce que le noble Hubert qui trouve que tout pue décide de retourner dans son moyen âge, laissant nos contemporains à leur kolkhoze fleuri, comme dit Audiard (on a fait pire que le kolkhoze ici comme à l’ouest du Pecos, Michel, allez !).

Notre plan préféré ? Gabin de retour à Sarcelles ne reconnaît pas sa ville.




De la mafia française depuis 1815

Par Nicolas Bonnal

[Source de l’illustration :
https://commons.wikimedia.org/wiki/File:James_Tissot_-The_Circle_of_the_Rue_Royale-_Google_Art_Project.jpg]

Macron caracole en tête de cet hexagone promis à la guerre et au Reset avec un personnel politique et technique bourgeois, qui s’est mondialisé et américanisé, mais qui est caractéristique de leur France. En revoyant les Mystères de Paris, les Misérables ou le Comte de Monte-Cristo (extraordinaire version de Claude Autant-Lara) je me suis dit que sur le plan métaphorique ce film exprimait une vérité bien française génialement décrite par Balzac et Joly : la France est dirigée par une mafia — au sens de l’élite de l’ombre — bourgeoise.

Certains l’appellent la caste. On peut dire que la France est dominée par une élite républicaine dangereuse et cruelle, et ce depuis longtemps. C’est une élite de talents (comme on disait fièrement chez les bourgeois) et de diplômes, mais pas seulement. C’est une élite d’argent, de maçonneries, de gens invisibles ou visibles, parfois cooptés, mais rudement bien connectés en réseaux. C’est une élite qui conspire et qui joua à la politique : droite et gauche. C’est aussi une élite de familles et dynasties bourgeoises : les enfants sont un signe de richesse, m’a dit un bourgeois. Les bourgeois seront les seuls autorisés à se produire : c’est aussi ça le Grand Reset. Sa mission est d’interdire tout mouvement à l’ancienne masse citoyenne imprudemment mise en avant par la bourgeoisie sauvage de 1789 et 1793. Cette bourgeoisie sauvage (ou mafieuse donc) a eu recours aux guerres pour diminuer-réduire ce peuple, aux guerres coloniales et à l’immigration ensuite. Elle tient sa guerre contre la Russie pour asseoir totalement son pouvoir.

Sa mise en place à cette mafia moderne (antiaristocratique d’abord, elle s’agrégea la noblesse ensuite) eut un merveilleux descripteur : Balzac. Mais on a aussi Eugène Sue (les bas-fonds de Paris qui décrit l’ascension de la mafia française), le Dumas de Monte-Cristo (horrible société d’après-guerre, d’après la révolution et l’empire donc), le Hugo des Misérables (avec deux pièces maîtresses dans l’échiquier, le flic Javert et le truand Thénardier).

Balzac donc (Z. Marcas, seize pages de vision pure) :

« Il m’a dit en 1831 ce qui devait arriver et ce qui est arrivé : les assassinats, les conspirations, le règne des juifs, la gêne des mouvements de la France, la disette d’intelligences dans la sphère supérieure, et l’abondance de talents dans les bas-fonds où les plus beaux courages s’éteignent sous les cendres du cigare. Que devenir ? »

Certes il y a des raisons physiques. Trop d’apprentis-bourgeois, trop de diplômés qui veulent (ô mal français) vivre de la manne étatique. Balzac explique :

« Aujourd’hui que tout est un combat d’intelligence, il faut savoir rester des quarante-huit heures de suite assis dans son fauteuil et devant une table, comme un général restait deux jours en selle sur son cheval. L’affluence des postulants a forcé la médecine à se diviser en catégories : il y a le médecin qui écrit, le médecin qui professe, le médecin politique et le médecin militant ; quatre manières différentes d’être médecin, quatre sections déjà pleines. Quant à la cinquième division, celle des docteurs qui vendent des remèdes, il y a concurrence, et l’on s’y bat à coups d’affiches infâmes sur les murs de Paris. »

Nos professions dites libérales sont décidément très étatisées :

« Dans tous les tribunaux, il y a presque autant d’avocats que de causes. L’avocat s’est rejeté sur le journalisme, sur la politique, sur la littérature. Enfin l’État, assailli pour les moindres places de la magistrature, a fini par demander une certaine fortune aux solliciteurs. »

La Mafia française va se métamorphoser et se grandir avec le bonapartisme et la ploutocratie.

La France est dirigée par une bourgeoisie sauvage (il y avait une bourgeoisie chrétienne plus sage, mais les frontières sont poreuses comme disait Mitterrand des années quarante…) depuis l’Empire. L’Empire marie une haute et féroce fonction publique avec les profiteurs de guerre et la bourgeoisie héritière de la braderie des biens nationaux. Le Second Empire renforce cette société haïssable que Maurice Joly décrit bien mieux que Zola ; société qui va s’accommoder comme un charme de la république de 1870.

Ici on vire à la ploutocratie, mais n’est-ce pas la définition de toute bonne société finalement ? On reverra avec plaisir les bas-fonds du très honorable André Hunebelle (Jean Marais et Pierre Mondy), le Comte de Monte-Cristo (toujours Mondy et Louis Jourdan) et le colonel Chabert avec un prodigieux Raimu.

Quant à Marx il a aussi brillamment écrit sur ce sujet bonapartiste qui taraude les rares observateurs :

« Dans ces voyages, que le grand Moniteur officiel et les petits Moniteurs privés de Bonaparte ne pouvaient moins faire que de célébrer comme des tournées triomphales, il était constamment accompagné d’affiliés de la société du 10 décembre. Cette société avait été fondée en 1849. Sous le prétexte de fonder une société de bienfaisance, on avait organisé le sous-prolétariat parisien en sections secrètes, mis à la tête de chacune d’elles des agents bonapartistes, la société elle-même étant dirigée par un général bonapartiste. À côté de “roués” ruinés, aux moyens d’existence douteux, et d’origine également douteuse, d’aventuriers et de déchets corrompus de la bourgeoisie, des forçats sortis du bagne, des galériens en rupture de ban, des filous, des charlatans, des lazzaroni, des pickpockets, des escamoteurs, des joueurs, des souteneurs, des tenanciers de maisons publiques, des portefaix, des écrivassiers, des joueurs d’orgues, des chiffonniers, des rémouleurs, des rétameurs, des mendiants, bref, toute cette masse confuse, décomposée, flottante, que les Français appellent la “bohème”. »

Bohème peut-être, mais qui va s’occuper de tout. L’État fort et inefficace n’est pas un vain mythe dans nos contrées latines :

« Ce pouvoir exécutif, avec son immense organisation bureaucratique et militaire, avec son mécanisme étatique complexe et artificiel, son armée de fonctionnaires d’un demi-million d’hommes et son autre armée de cinq cent mille soldats, effroyable corps parasite, qui recouvre comme d’une membrane le corps de la société française et en bouche tous les pores, se constitua à l’époque de la monarchie absolue, au déclin de la féodalité, qu’il aida à renverser. »

Problème :

« Toutes les révolutions politiques n’ont fait que perfectionner cette machine, au lieu de la briser. Les partis qui luttèrent à tour de rôle pour le pouvoir considérèrent la conquête de cet immense édifice d’État comme la principale proie du vainqueur. »

Dans mon livre sur la destruction de la France au cinéma je montre le rôle sinistre du gaullisme (rôle dénoncé par Godard, Tati, Verneuil, etc.) et de ses villes nouvelles déracinées et hors-sol comme on dit, qui a abouti à l’irréel hexagone que l’on sait.




Oswald Spengler et la stérilité des Européens vers 1920…

Par Nicolas Bonnal

On va parler de Spengler, mais je voudrais faire quelques rappels pour expliquer pourquoi les Européens sont morts depuis longtemps. Nietzsche en a parlé, et Yockey et Drieu…

Dans mon recueil sur les penseurs allemands, j’ai souligné cette haine et cette peur du monde moderne et de la catastrophe qu’il amène ; on les retrouve chez tous les grands penseurs allemands ou autrichiens, y compris les juifs.

Dans son petit texte sur la guerre, voici ce Freud écrit sur la culture :

« Et voici ce que j’ajoute : depuis des temps immémoriaux, l’humanité subit le phénomène du développement de la culture (d’aucuns préfèrent, je le sais, user ici du terme de civilisation.) C’est à ce phénomène que nous devons le meilleur de ce dont nous sommes faits et une bonne part de ce dont nous souffrons. Ses causes et ses origines sont obscures, son aboutissement est incertain, et quelques-uns de ses caractères sont aisément discernables. »

Voici les conséquences de ce développement culturel si nocif à certains égards, et auxquelles nos élites actuelles se consacrent grandement :

« Peut-être conduit-il à l’extinction du genre humain, car il nuit par plus d’un côté à la fonction sexuelle, et actuellement déjà les races incultes et les couches arriérées de la population s’accroissent dans de plus fortes proportions que les catégories raffinées. »

Goethe lui rêvait déjà du paysan, pas encore trop pollué par la civilisation :

« Notre population des campagnes, en effet, répondit Goethe, s’est toujours conservée vigoureuse, et il faut espérer que pendant longtemps encore elle sera en état non seulement de nous fournir des cavaliers, mais aussi de nous préserver d’une décadence absolue ; elle est comme un dépôt où viennent sans cesse se refaire et se retremper les forces alanguies de l’humanité. Mais allez dans nos grandes villes, et vous aurez une autre impression… »

Et il insiste encore, au début du tome deuxième de ses entretiens avec Eckermann (voyez mes textes), sur l’affaiblissement des hommes modernes :

« Causez avec un nouveau Diable boiteux, ou liez-vous avec un médecin ayant une clientèle considérable — il vous racontera tout bas des histoires qui vous feront tressaillir en vous montrant de quelles misères, de quelles infirmités souffrent la nature humaine et la société… »

Venons-en au déclin de l’occident de Spengler. Dans le tome II et le chapitre sur les villes notre auteur écrit des lignes admirables sur la fin du tact cosmique. On écoute le maître :

« Ce qui rend le citadin de la ville mondiale incapable de vivre ailleurs que sur ce terrain artificiel, c’est la régression du tact cosmique de son être, tandis que les tensions de son être éveillé deviennent chaque jour plus dangereuses. N’oublions pas que le côté animal du microcosme, l’être éveillé, s’ajoute à l’être végétal, mais non inversement. Tact et tension, sang et esprit, destin et causalité sont entre eux comme la campagne fleurie et la ville pétrifiée, comme l’être et ce qui dépend de lui. La tension sans le tact cosmique qui l’anime est le passage au néant. »

Comme Mirbeau Spengler se rend compte que dans les grandes villes « toutes les têtes se ressemblent » :

« L’intelligence est le substitut de l’expérience inconsciente de la vie, l’exercice magistral d’une pensée squelettique et décharnée. Les visages intelligents se ressemblent chez tous les peuples. C’est la race elle-même qui se retire d’eux. Moins l’être sent le nécessaire et l’évident, plus il s’habitue à vouloir tout “éclairer”, plus l’être éveillé calme sa phobie par la causalité. D’où l’identification par l’homme du savoir et de la démonstration ; d’où la substitution aussi du mythe causal ou théorie scientifique au mythe religieux ; d’où enfin la notion d’argent abstrait, considéré comme pure causalité de la vie économique, par opposition au commerce d’échanges ruraux qui est tact et non système de tensions. »

Et comme je citais Mirbeau :

« … j’ai remarqué, à quelques exceptions près, que les villes, surtout les villes de travail et de richesses, qui, comme Anvers, sont des déversoirs de toutes les humanités, ont vite fait d’unifier, en un seul type, le caractère des visages… Il semble maintenant que, dans les grandes agglomérations, tous les riches se ressemblent, et aussi tous les pauvres. »

C’est dans La 628-E8, un livre prodigieux dont l’héroïne est une automobile.

Maigre divertissement urbain (Spengler de nouveau) :

« La seule forme de récréation, spécifique à la ville mondiale, que connaisse la tension intellectuelle est la détente, la “distraction”. »

Et tout amène logiquement à la stérilité qui frappe toutes les races et tous les peuples du monde en ce vingt-et-unième épris de grands remplacements et d’inintelligence artificielle. Spengler :

« Et de ce déracinement croissant de l’être, de cette tension croissante de l’être éveillé il résulte, comme conséquence suprême, un phénomène préparé de longue date, sourdement, qui se manifeste soudain à la claire lumière de l’histoire pour mettre fin à tout ce spectacle : la stérilité du civilisé. »

Ce n’est pas la culture de mort du pape polonais, c’est « le tournant métaphysique vers la mort » qu’incrimine plus justement Spengler (cela explique pourquoi les renaissances chrétiennes envisagées depuis deux siècles ont toutes échoué) :

« Ce phénomène est impossible à comprendre par la causalité physiologique, comme l’a tenté, par exemple, journellement la science moderne. Car il implique absolument un tournant métaphysique vers la mort. Certes oui comme individu, mais comme type, comme collectivité, le dernier homme des villes mondiales ne veut plus vivre : la phobie de la mort est éteinte dans cet organisme collectif. La crainte profonde et obscure qui s’empare du paysan, l’idée de la mort de sa famille et de son nom, ont perdu leur sens. Dans la continuité du sang, proche parent du monde intérieur visible ; on ne sent plus un devoir du sang, la condition dernière de l’être, une fatalité. »

Spengler sera rejoint par Freud sur ce point précis :

« Les enfants manquent non seulement parce que leur naissance devient impossible, mais parce que l’intelligence extrêmement avancée ne trouve plus de raisons pour sa propre existence. »

Problème auquel furent déjà exposés les Grecs et les Romains (voyez mon recueil sur leur décadence) et dont parla abondamment Ibn Khaldun. On voit bien du reste cette impossibilité — en Russie actuelle comme ailleurs — de repeupler. Les gens ne veulent/peuvent plus. Le dépeuplement venu de la civilisation nihiliste occidentale n’est pas ce besoin dont a parlé Hitler à Rauschning : c’est devenu un destin.

Sources :

https://www.dedefensa.org/article/goethe-et-les-entropies-du-monde-moderne

https://www.dedefensa.org/article/sigmund-freud-politiquement-incorrect

https://ia802903.us.archive.org/14/items/oswaldspenglerledeclindeloccident.esquissedunemorphologiedelhistoireuniverselle1923/Oswald%20Spengler%20-%20Le%20d%C3%A9clin%20de%20l%27Occident.%20Esquisse%20d%27une%20morphologie%20de%20l%27Histoire%20universelle%20%281923%29.pdf

https://lesakerfrancophone.fr/ibn-khaldun-et-notre-moderne-decadence

https://reseauinternational.net/pourquoi-ibn-khaldun-prefere-les-gens-des-campagnes-a-ceux-des-villes/

http://www.dedefensa.org/article/ibn-khaldun-et-le-modele-arabe-de-la-liberte-1

http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2021/03/12/goethe-et-la-devitalisation-des-europeens-6303097.html

http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2018/09/28/goethe-et-les-entropies-du-monde-moderne-6093015.html




Chrétien de Troyes et les grands mystères de la canicule

Par Nicolas Bonnal

La chaleur…

Nous voici à nouveau en période de canicule. Elle est terrible où je vis. La canicule rend dépressif (pic de suicides en août), peut tuer même et causer des guerres (août 1914…) et elle a toujours été redoutée. Les clergés païens de jadis savaient mieux que Bergoglio comment l’encadrer, nos écrivains aussi puisque le plus grand d’entre eux, Chrétien de Troyes consacra son meilleur roman à cette canicule, et au chevalier au lion (ou au chien) qui l’accompagne.

Voyons le dictionnaire :

Canicule vient du latin Canicula, qui signifie «chien», en liaison avec Sirius, étoile principale de la constellation du Grand Chien. Elle ne concerne donc à l’origine que la période annuelle du 24 juillet au 24 août, où cette étoile se couche et se lève en même temps que le Soleil, ce qui avait laissé penser aux anciens qu’il existait un lien entre l’apparition de cette étoile et les grandes chaleurs1.

Le grand Pline l’Ancien ajoutait :

« Quant à la Canicule, qui ignore que, se levant, elle allume l’ardeur du soleil ? Les effets de cet astre sont les plus puissants sur la terre : les mers bouillonnent à son lever, les vins fermentent dans les celliers, les eaux stagnantes s’agitent. Les chiens aussi sont plus exposés à la rage durant tout cet intervalle de temps ; cela n’est pas douteux2. »

Encadrée car redoutée, la canicule était ainsi fêtée au temps des romains (au passage faisons la pub pour les Fastes d’Ovide, notre livre de chevet, absolument essentiel) :

Dans la Rome antique, le début de la Canicule était célébré par la fête de Neptunalia (le 24 juillet), on lui attribuait de mauvaises influences (maladies causées par la chaleur et hurlements des chiens) et on tentait de conjurer l’influence néfaste de Sirius sur les moissons en immolant des chiens roux comme le soleil. La Canicule s’achevait par la fête de Vulcania le 24 août ; c’est notre saint Barthélémy (quand je vous disais qu’il y avait un lien…).

La canicule est liée au chasseur Orion (que reprend Tolkien dans le Silmarillion) et à Sirius (Huan pour les amateurs). Le nom Sirius vient du grec « Σείριος » via le latin Sirius, signifiant « ardent ». C’était le nom du chien que possédait le personnage de la mythologie grecque Orion éponyme de la constellation Orion, qui se situe à proximité immédiate de Sirius, qui lui-même fait partie du Grand Chien. Orion et le Grand Chien furent placés dans le ciel à la suite du décès du grand chasseur.

Nous en venons au Chevalier au lion. Pour avoir raté un rendez-vous courtois après la Saint-Jean, un chevalier est éconduit par sa Belle (une fée qui commande au Temps avec sa savante servante Lunette – petite Lune) et devient fou. Il retrouvera son équilibre avec son Lion et vaincra les épreuves. Sa vie de nudiste dégénéré dans les bois fait penser à nos vacances aoûtiennes (à poil partout, à bouffer de la viande crue ; je vois cela tous les jours).

L’universitaire Philippe Walther croit à l’inspiration folklorique, et c’est heureux. Il écrit dans sa très belle notice de la Pléiade :

« Ce conte adapte, selon toute vraisemblance, les résidus d’un vieux mythe saisonnier d’origine celtique selon lequel un roi est appelé à être remplacé, grâce au meurtre rituel accompli sur sa personne, en période de Canicule. L’épreuve rituelle consiste en un défi cosmique (la fontaine aux tempêtes) suivi d’un combat à caractère eschatologique. En outre, selon la conception celtique, c’est l’union avec la fée qui procure au prétendant sa souveraineté3. »

Philippe Walther souligne l’importance solaire et astrologique de l’événement :

« La date du premier juillet – huit jours après la Saint-Jean – retenue pour ce délai fatidique partage d’ailleurs l’année en deux moitiés égales, marquant ainsi une échéance médiane symbolique : Yvain se trouve alors au carrefour de son destin… Dans la tradition astrologique, le Lion solaire de l’été est le signe royal par excellence. En rencontrant et en acceptant le compagnonnage du lion, Yvain découvre son affinité profonde pour cet animal conquérant ».

Et il ajoute cette note très importante : Yvain serait conçu lors de la nuit de Samain (Halloween !!!) pour naître lors de la fête de Lug, le premier août donc.

« Le lion est aussi très certainement le signe zodiacal de naissance d’Yvain si l’on se fonde sur un texte gallois peu connu et qui raconte l’engendrement mythique du héros. Celui-ci s’opère sous le signe du chien, dans le comté de Denbigh, là où se trouve une paroisse appelée Llanferrys. Urien y connaît charnellement la fille du roi d’Annwn qui prend les traits d’une lavandière de la nuit. L’engendrement a lieu lors de la nuit de Samain (1er novembre) ; il donnera naissance, neuf mois plus tard, le 1er août, lors de la fête celtique de Lugnasad, à un héros solaire. Chevalier de la Canicule, Yvain rejoint ainsi les grandes figures caniculaires de la tradition mythologique4. »

Quel plaisir quand un universitaire comprend son sujet !

Mais il nous manque la vision supérieure, hérétiquement considérée par l’université, et qui nous sera commentée par René Guénon.

Voici ce qu’inspiré par le Maître je note dans mon livre5 :

« Dans le même texte d’Yvain, solaire et initiatique à souhait, on connaît la panique solsticiale et la peur du dérèglement cosmologique et temporel.

C’est la folie d’Yvain qui arrive trop tard après la Saint-Jean, et qui n’a pas obéi à sa Dame conçue ici comme Reine du Ciel et des cycles naturels (il n’a pas non plus été le bon gardien de la source fervente).

En réalité la folie d’Yvain est solsticiale et elle est liée à la Saint-Jean estivale qu’il n’a pas respectée. Ce terme produit le châtiment astrologique de sa Dame. Voici ce que dit Guénon sur cette Saint-Jean liée au Baptiste :

« Bien que l’été soit généralement considéré comme une saison joyeuse et l’hiver comme une saison triste, par là même que le premier représente en quelque sorte le triomphe de la lumière et le second celui de l’obscurité, les deux solstices correspondants n’en ont pas moins, en réalité, un caractère exactement opposé à celui-là… En effet, ce qui a atteint son maximum ne peut plus que décroître, et ce qui est parvenu à son minimum ne peut au contraire que commencer aussitôt à croître ; c’est pourquoi le solstice d’été marque le début de la moitié descendante de l’année, et le solstice d’hiver, inversement, celui de sa moitié ascendante ».

Guénon justifie ensuite la course malheureuse de notre Yvain arrivé après la Saint Jean :

« En réalité, c’est la moitié ascendante du cycle annuel qui est la période « joyeuse », c’est-à-dire bénéfique ou favorable, et sa moitié descendante qui est la période « triste », c’est-à-dire maléfique ou défavorable ; et le même caractère appartient naturellement à la porte solsticiale qui ouvre chacune de ces deux périodes en lesquelles l’année se trouve divisée par le sens même de la marche du soleil6 ».

Notre savant impeccable explique ensuite qu’il y a autour du cercle du cycle une figure de deux tangentes (cf. Gibraltar et les piliers d’Hercule), et que ces points sont comme les bornes que le soleil ne peut jamais dépasser au cours de sa marche. Yvain l’ayant fait, il sombre dans une folie solsticiale. Nous la lions à la canicule qui déchaîne aussi les passions et prodigue la fameuse dépression estivale des aoutiens.

Un dernier point sur le caractère solaire et celtique d’Yvain :

« Le lendemain, à midi, Owein revêtit une robe, un surcot et un manteau jaunes, rehaussé d’un large orfroi de fil d’or; ses pieds étaient chaussés de brodequins de cordwal bigarré, fermes par une figure de lion en or7 ».

Notes

1 Wikipédia, article canicule

2 Pline, Histoire naturelle

3 Chrétien de Troyes, la Pléiade, notice p.1173-4

4 Ibid., p. 1184

5 La chevalerie hyperboréenne et le Graal, p. 236

6 Guénon, Symboles de la Science sacrée, XXXV

7 Mabinogion, Owein




Le Déchaînement mondialiste

[Source : AVATAR Media]

Le coup de gueule de Nicolas Bonnal.




Les mystères de notre soumission au parti démocrate américain

Par Nicolas Bonnal

Le parti démocrate est le parti préféré des Français et des Européens ; c’est le parti dit-on du social et des minorités, le parti des écologistes et des LGBTQ et le parti surtout de la guerre à mort contre la Chine et la Russie. Quand Obama fit soi-disant tuer le Ben Laden de service, Kagan se rengorgea et se dit que l’on pouvait « démocratement » mener une guerre messianique d’extermination contre le reste du monde. Surtout avec Trump en face…

Mais le parti démocrate c’est surtout celui des deux premières guerres mondiales : les USA ont vu, ils sont venus, ils ont vaincu — et comme dit Trotski ils ont commis à leur service la social-démocratie européenne pour mettre l’Europe à la portion congrue.

Il semble que le parti démocrate invincible et indéboulonnable sera aussi le parti de la troisième guerre mondiale qui achèvera le vieillard débile et consentant européen.

En France terre des droits de l’homme et des guerres en boucle on honore surtout le parti démocrate. Le téléphage froncé voulait dans les sondages voter à 90 % pour Biden contre Trump qui lui garantissait la paix et l’énergie peu chère (mais on ne refera pas les Français). On honore la mémoire de Roosevelt (Franklin Delano), de Wilson donc ou de Kennedy. On y a déifié Obama en France, qui a démoli la Libye, peuple l’Europe de migrants, et qui a déclenché les hostilités finales contre la Russie en 2014, tout en recevant un prix Nobel à Stockholm et en déclenchant sur ordre écolo-bancaire la liquidation de nos industries.

Ce parti démocrate mène le monde à sa perdition avec sa troisième guerre mondiale contre la Chine et la Russie ; il mène l’Europe à sa ruine totale et il livre l’Amérique aux hordes ethniques comme on dit, au lobby LGBTQ et à la faillite financière via la dette — le tout sur fond de hausse infinie et arrogante de la bourse.

C’est lui qui peuplé de « dibbouks »1 (Kunstler2) a créé sous Wilson (élu grâce à une division des républicains et à une participation abusive et sans doute contrôlée de Théodore Roosevelt aux élections présidentielles de 1912) la Banque Fédérale avec les Warburg, c’est lui qui a liquidé le libéralisme américain et renforcé et créé l’État moderne (voyez l’ouvrage collectif de Denton, Goldberg ou Hoppe), c’est lui qui a militarisé la nation et créé les mille bases, c’est lui qui a créé la Deuxième Guerre Mondiale et réduit l’Europe à la portion congrue, c’est lui qui avec Truman a créé de A à Z la guerre froide contre la Russie (génial Ralph Raico) et c’est lui qui a fait la guerre pendant dix ans au Vietnam, guerre inutile, assassine et cruelle. Mais c’est lui qui est adoré.

Et ce parti en même temps qu’il veut une guerre d’extermination contre la Russie et la Chine désire remplacer la population (quel que soit le pays qu’il contrôle en Europe) et liquider agriculture et industrie (Harris-Kerry).

Et c’est normal puisque c’est le parti non pas du chaos (comme dit Kunstler) mais de la mort. L’Occidental des temps de la Fin adore l’obscur, disait Guénon, alors qu’il adore la mort.

Et on ne parlera pas de JFK, par pitié. On répétera avec Trotski :

« Pendant ce temps, l’Amérique édifie son plan et se prépare à mettre tout le monde à la portion congrue… La social-démocratie est chargée de préparer cette nouvelle situation, c’est-à-dire d’aider politiquement le capital américain à rationner l’Europe. Que fait en ce moment la social-démocratie allemande et française, que font les socialistes de toute l’Europe ? Ils s’éduquent et s’efforcent d’éduquer les masses ouvrières dans la religion de l’américanisme ; autrement dit, ils font de l’américanisme, du rôle du capital américain en Europe, une nouvelle religion politique. »





Comment la mode annonce ou prépare la dictature écologiste et woke

[Source : Le Saker Francophone]

La mode comme matrice de la dictature écologiste et woke

Par Nicolas Bonnal

Nicolas Bonnal

Je revoyais le film de Robert Altman Prêt-à-porter mal reçu en son temps (1994). Il ne s’agit certainement pas d’un policier (un gros bourgeois s’étrangle avec un sandwich) mais d’une satire “chorale” (des dizaines de grands acteurs) et sociale dont le Maître avait le secret et qui renouait avec le génie d’opus pétroniens comme MASH ou Nashville. Mais en voyant ce cortège de tarés (les gens de la mode donc) balayés par la caméra acide d’Altman, on découvrait que la mode ne reflète pas la dictature actuelle qui sévit rageusement en occident, mais qu’elle l’inspire.

La fin du film montre un défilé à poil comme on sait, alors essayons en quelques lignes de mettre à nu ce monde abominable dont les défilés “genrés” accompagnent et précèdent les décisions totalitaires et démentes de la commission de Bruxelles et de Washington. Rappelons que c’est un type de la mode (JP Goude) qui organisa le défilé du bicentenaire de la Révolution qui consacra la tyrannie de la gauche-caviar qui achève la liquidation de la France actuellement (cf. mon Mitterrand le grand initié) : les grands travaux auront eu un impact psychologique et occultiste mondial. Résumons donc (à chacun d’ajouter et de développer un thème à son goût) :

La mode (IE les gens de la mode) est new Age et occultiste en diable. Elle court après les gourous. La mode est bourrée de pognon, ne crache pas dessus, se fout des pauvres mais est à l’avant-garde de tous les bouleversements sociétaux.

La mode est végétarienne et si possible véganienne.

La mode veut voyager en jet exclusivement mais ne veut pas d’avions pour le reste de la planète. Idem pour nos oligarques et politiques.

La mode est unisexe ou transmaniaque ; elle baigne dans tous les scandales liés au blanchiment, à la drogue, aux mafias (Versace etc.).

Antiraciste avant tout le monde (années soixante déjà), la mode a imposé l’agenda multiculturel anti-blanc d’aujourd’hui : si seulement il pouvait nous débarrasser des “créateurs” blancs dégénérés d’aujourd’hui ! On nage dans le Sardanapale de notre cher Artaud qui sous-titrait ainsi son livre : l’anarchiste couronné.

La mode est hystérique et dispose depuis longtemps de ses propres chaînes de télé (ils les regardent toute la journée pour s’y voir et se rassurer).

La mode est bavarde, pédante et surtout irresponsable, comme tous les toqués qui nous dirigent. On attend les défilés-seringue.

La mode est stupide et ne vit comme un petit insecte que pour une saison ou même quelques jours. Elle partage le présent permanent des imbéciles.

La mode a gagné le catholicisme romain (Castelbajac ou le Roma de Fellini) et l’on pourra donc rappeler que l’habit fait le moine ; être à la mode c’est être moderne. Elle frappe surtout un pays comme la France. Montesquieu a écrit sur cette mode folie française dans ses lettres persanes (dans une lettre, la C, beaucoup plus importante que celle imposée à l’école) :

Quand je te dis qu’ils méprisent tout ce qui est étranger, je ne parle que des bagatelles ; car, sur les choses importantes, ils semblent s’être méfiés d’eux-mêmes jusqu’à se dégrader. Ils avouent de bon cœur que les autres peuples sont plus sages, pourvu qu’on convienne qu’ils sont mieux vêtus ; ils veulent bien s’assujettir aux lois d’une nation rivale, pourvu que les perruquiers français décident en législateurs sur la forme des perruques étrangères. Rien ne leur paraît si beau que de voir le goût de leurs cuisiniers régner du septentrion au midi, et les ordonnances de leurs coiffeuses portées dans toutes les toilettes de l’Europe.

Montesquieu parle de SERVITUDE dans la même lettre. Et dans la lettre la plus connue il évoque ce présent permanent dont je parle souvent et cette capacité d’oubli débile :

Je trouve les caprices de la mode, chez les Français, étonnants. Ils ont oublié comment ils étaient habillés cet été ; ils ignorent encore plus comment ils le seront cet hiver ; mais surtout on ne saurait croire combien il en coûte à un mari pour mettre sa femme à la mode.

Le texte de Montesquieu est essentiel pour comprendre que nous entrons dans la modernité : le temps des abrutis est arrivé. Comment peut-on être persan (et pas perçant en effet). Ajoutons que Montesquieu a inventé le style journalistique dans ce même méphitique ouvrage à la solde de l’Angleterre.

Mais concluons pour souligner l’importance de ce sujet négligé. Le vêtement n’est pas secondaire, et le métaphysicien traditionaliste Frithjof Schuon en a parlé mieux que Carlyle ou Montesquieu dans son texte sur LE MESSAGE D’UN ART VESTIMENTAIRE.

Schuon donc :

le vêtement, comme le langage et la position verticale, est une des prérogatives de l’homme ; beaucoup moins important sans doute que les deux autres prérogatives mentionnées, il n’en est pas moins caractéristique de l’homo faber.

Schuon ajoute :

…le « vêtement » pouvant avoir pour fonction, soit de dissimuler le corps, soit au contraire d’en rehausser le symbolisme ou la beauté. L’existence des vêtements princiers et sacerdotaux prouve que le vêtement confère à l’homme une personnalité, c’est-à-dire qu’il exprime ou manifeste une fonction qui éventuellement dépasse ou ennoblit l’individu.

Et on terminera par cette belle envolée :

Le vêtement en soi peut représenter ce qui voile, donc l’exotérisme, mais il s’intériorise et s’« ésotérise » moyennant ses éléments symboliques, son langage sacerdotal précisément. Dans ce cas, le vêtement représente à son tour l’âme ou l’esprit, donc l’intérieur, le corps ne signifiant alors que notre existence matérielle et terrestre.

Assez pour Schuon. La consécration de l’occident à Satan, évidente aujourd’hui, n’est pas visible que dans la mode ; voyez le site vigilantcitizen.com qui fait très bien le lien entre musique, vidéo, mode et même politique (la noce rouge des Getty avec Pelosi, les liens de Microsoft avec Abramovic, Apple et les défilés Queer). La transformation en diable par le costume a été bien filmée par Ridley Scott (voyez mon livre) dans le négligé film Légende, qui forme sans doute l’épicentre de son œuvre alchimique. Scott est le producteur exécutif des clips de Lady Gaga dont on ne rappellera pas ici les exploits.

Et revoyez le Vatican Fashion Show de Fellini-Roma pour rire : il avait prévu et filmé la fin de la religion en occident. Le cinéma aura pu tout montrer car la foule télé était trop nulle pour croire et voir.

Nicolas Bonnal sur Amazon.fr

Sources

  • Schuon – Avoir un centre (recueil)
  • Bonnal – Ridley Scott (Amazon, Dualpha)
  • Montesquieu – Les lettres persanes



De Gambetta à Zelenski : une leçon d’histoire par Drumont

Par Nicolas Bonnal

Zelenski fait liquider les Ukrainiens pour les raisons que l’on connaît et que je ne vais pas discuter ici — on ne les connaît tous que trop ; mais il me semble opportun de rappeler que nous avons eu un héros national qui fit la même chose, qui n’était pas français et qui a envoyé les Français se faire liquider pour rien par les Prussiens mieux préparés et armés après une défaite impériale bien méritée (une « correction », disait Marx dans son Dix-Huit Brumaire, outré par les méfaits de l’armée française au milieu du siècle — colonisation génocidaire, répression politique et sociale, participation au putsch bonapartiste et à la dictature, massacres divers, etc.) : il s’agit de Gambetta. On va laisser parler Drumont, redécouvert surtout grâce à Bernanos, au sujet de Gambetta, dont le nom orne des milliers de rues en France comme celui d’autres tueurs de peuples coloriés et de classes populaires françaises (Thiers, Ferry, Clemenceau, Freycinet, Poincaré, etc.).

Drumont fait le point après Sedan. On pouvait s’arrêter là — comme Zelenski, pas vrai ? Mais non il veut l’OTAN, la guerre mondiale, la guerre nucléaire et l’extermination messianique. Entouré de nazis encore plus humiliés par les Russes que la dernière fois, notre aventurier-messie des médias occidentaux veut finir comme Hitler : dans un bunker après avoir tout fait cramé, Paris compris.

« La situation était très simple, la France a passé son existence de nation à gagner des victoires éclatantes et à subir d’affreuses défaites, elle a eu tour à tour Tolbiac, Bouvines, Marignan, Rocroy, Denain, Fontenoy, Austerlitz, Iéna, Solferino et Crécy, Azincourt, Poitiers, Pavie, Rosbach, Waterloo, elle n’avait qu’à faire ce qu’elle avait toujours fait dans des circonstances analogues, à signer la paix, à soigner ses blessures, à dire : “Je serai plus heureuse une autre fois.” »

Drumont rappelle que Bismarck à qui on avait déclaré la guerre pour une peccadille (cette impératrice espagnole…) était plutôt cool dans cette histoire :

« C’est ainsi que Bismarck, qui raisonnait d’après les principes du sens commun, avait compris les choses. Ainsi qu’il l’a déclaré à maintes reprises, notamment à M. Werlé, maire de Reims [181], il comptait signer la paix à Reims, [386] après quoi chacun serait rentré chez soi, les uns avec un pied de nez, les autres avec des lauriers, ainsi que cela se voit depuis le commencement du monde. »

Après, Drumont s’énerve certes. Mais lisez donc Kunstler qui s’énerve aussi contre les juifs néo-cons dans son texte publié sur son site et traduit par lesakerfrancophone.fr ; il les appelle les dibbouks, notion qu’on ne développera pas ici.

« Deux milliards, c’était bien maigre, pour les Juifs, qui traînaient après eux tout un personnel d’affamés, auxquels on avait promis les dépouilles de la France. »

Et puis intervient Gambetta, pianiste à queue en quelque sorte, un gars au tempérament bohème qui va envoyer tout le monde se faire tuer (et créer les racines d’un conflit franco-allemand catastrophique pour la « civilisation occidentale ») :

« Il se produisit alors un des faits qui restera le plus singulier du XIXe siècle et, on peut le dire, de tous les siècles. Un monsieur, né de parents restés Italiens, à peine Français lui-même, puisqu’il n’avait opté pour la nationalité française qu’au dernier moment et avec la certitude qu’une infirmité le dispenserait de tout service, doublement étranger, puisqu’il était juif (NDLR : on s’en fout du reste de savoir si Gambetta l’était), et qui, en tout cas, ne représentait que les douze mille électeurs qui l’avaient nommé, vint dire :

« Mon honneur est tellement chatouilleux, mon courage est d’une essence si rare, que je ne puis consentir à ce qu’on fasse la paix et que, de mon autorité privée, je veux continuer une guerre à outrance ». »

Et comme avec l’ange exterminateur Zelenski on ne discute pas avec Gambetta, autre adoré des médias et des historiens fonctionnarisés aux ordres. C’est open bar pour l’extermination — sans discussion (vite, Macron, fais de même !) :

« Dans les civilisations les plus rudimentaires, chez les Cafres et chez les Boschiman, il y a, dans les cas graves, un semblant de consultation du pays, on demande à la tribu réunie :

« Êtes-vous d’avis de prendre vos arcs, vos flèches ou vos tomahawks ? »

Les rois chevelus consultaient leurs leudes, Charlemagne consultait ses pairs, sous l’ancien régime, on réunissait [387] les États généraux dans les circonstances critiques. À force de marcher dans la voie du progrès, comme on dit, on a rétrogradé au-delà des Cafres et, durant cinq mois, un aventurier génois envoya les gens se faire casser les bras et les jambes, pendant qu’il fumait des cigares exquis, et cela sans que nul ne s’avisât de protester. »

Et là non plus, 300 ou 400 000 morts ukrainiens, tous les Occidentaux s’en foutent, attendant que la presse envoie ce qui nous reste de jeunesse se faire massacrer par les armes russes. À moins que l’on préfère se faire raser de frais au nucléaire pour obéir aux divins anges exterminateurs Biden-Nuland-Kagan-Blinken-Zelensky.

Vive Gambetta donc.

Et un peu de rappel de Kunstler au cas où quelqu’un s’aviserait de me chercher noise :

« En tant que Juif américain et connaisseur du folklore de mon peuple, j’attire votre attention sur la figure troublante du dibbouk (dih-bik), un démon désincarné qui, à cause de ses péchés, erre sans cesse parmi nous et peut entrer dans la chair d’une personne vivante, qui affligera et tourmentera alors la communauté jusqu’à ce qu’elle soit correctement exorcisée par un minian de rabbins vêtus de linceuls funéraires blancs et brandissant des serments sacrés.

Ainsi, je vous présente Andrew Weissmann, avocat, le dibbouk en chef américain, présent sur la scène depuis des décennies, semant la zizanie et le malheur, à la tête d’une foule impie de dibboukim se faisant appeler Lawfare pour infester les tribunaux et s’immiscer dans les élections. Pensez-y : Michael Sussman, l’un des instigateurs du RussiaGate ; Michael Bromwich, ancien inspecteur général du ministère de la justice (!), puis conseiller de Christine Blasey Ford (vous vous souvenez d’elle ?), David Laufman, ancien lutin du contre-espionnage du ministère de la justice et garçon de course de Blasey Ford, Marc Elias, ingénieur extraordinaire des opérations de récolte des bulletins de vote pour les élections de 2020 et de nombreuses farces connexes, Dan Goldman, avocat principal de la commission judiciaire de la Chambre des représentants pour la mise en accusation de Donald J. Trump… tous des dibbouks ! »

Je rappelle que le texte de Drumont est disponible sur Wikisource.org. Là aussi, qu’on ne me casse pas les pieds. Ou censurez Wikisource.org avec Tik Tok.

Sources

https://lesakerfrancophone.fr/appelez-les-exorcistes

https://fr.wikisource.org/wiki/La_France_juive/Texte_entier/Tome_premier




L’Autodestruction Programmée

[Source : AVATAR Media]




Le cinéaste Jean Renoir entre mondialisation et fin de la nation (1960)

[Illustration : Renoir en train de tourner son film de 1962, Le caporal épinglé.
Agence France Presse/Getty Images]

Par Nicolas Bonnal

Guillaume Faye écrivit dans les années 80 un brillant livre sur le Système à tuer les peuples. Mais dix ans avant lui le plus grand cinéaste français Jean Renoir remarque la fin de la nation — et le triomphe de la banque, de l’ordinateur et la mondialisation. Et cela donne dans le dernier chapitre de ses passionnantes Mémoires :

« Mes amis français me posent tous la même question : “Pourquoi as-tu choisi de vivre en Amérique ? Tu es Français et tu as besoin de l’environnement français.” Ma réponse est que l’environnement qui m’a fait ce que je suis, c’est le cinéma. Je suis un citoyen du cinématographe. Avec l’avènement de nouveaux moyens de communication, nous retournons au cloisonnement horizontal, comme au Moyen Âge où le latin et la religion chrétienne unissaient l’Occident. Notre religion, maintenant, c’est la banque et notre latin, c’est la publicité. Le mot d’ordre est le rendement, qui permet de produire plus. »

On est proche du monologue sauce Reset du milliardaire du très grand film Network (« the world is a business, Mr Beale »). Renoir comprend ainsi la logique des guerres :

« Lorsque le marché mondial est saturé, on déclenche une guerre pour gagner de nouveaux clients. Le but des guerres n’est plus la conquête, mais la construction. Quand le bâtiment va, tout va. Sur les ruines fumantes des pagodes, on érige des gratte-ciel. Ces constructions assurent le pain de la classe ouvrière qui, sans cela, se révolterait. J’imagine très bien un coup de téléphone ultrasecret entre un chef d’État russe et le président des États-Unis : l’Américain : “Donnez-moi un coup de main, cher confrère, la confection des armes diminue chez nous de façon inquiétante.” Le Russe : “Chez nous aussi. On s’en tire avec la fabrication du dernier super-jet XYZ, mais ça ne saurait durer et il faudra bien trouver autre chose.” L’Américain : N’y a-t-il pas moyen de susciter une petite guerre ? Cela sauverait l’industrie des armements. »

Renoir comprend que le futur c’est la fin de la nation — et la solidarité de classe ou de métier :

« En Inde, les étrangers pénètrent rarement dans la maison. Or, non seulement on nous admettait, mais on nous choyait comme on l’eût fait d’enfants revenant d’un long voyage. Nous avions été précédés par la parole de Mowgli dans “Le Livre de la Jungle” : Nous sommes du même sang, toi et moi. » Ce sang commun qui faisait de nous les frères d’une même famille, c’était le cinéma. Lorsqu’un fermier français se trouve à dîner à la même table qu’un financier français, ces deux Français n’ont rien à se dire. Ce qui intéresse l’un laisse l’autre parfaitement indifférent. Mais si nous imaginons une réunion entre notre fer français et un fermier chinois, ils auront des tas de choses à se raconter. Ce thème du rassemblement des hommes par métiers ou par intérêts communs m’a poursuivi toute ma vie et me poursuit encore. C’est le thème de « La Grande Illusion. » Il figure plus ou moins dans chacun de mes ouvrages. »

Cette idée évoque le problème des manipulateurs de symboles (R. Reich) qui créent un monde global et abstrait qui liquide informatiquement les nations : les solidarités ne sont plus nationales (cf. Guilluy).

Renoir explique aussi le crépuscule de la modernité nationaliste (cf. Evola) :

« Fin de la nation, telle que nous la connaissons, est l’invention de la Révolution française. De simples sujets, les hommes étaient passés au grade de citoyens. Les systèmes s’écroulent lentement. La carcasse de l’Empire romain est restée debout des siècles après la disparition du dernier empereur. De longues années s’écouleront avant qu’un menuisier italien cesse de se considérer comme un citoyen italien et proclame : “Je suis un citoyen de la menuiserie.” Nous sommes encore bien loin de l’acceptation par chaque individu du concept de citoyen du monde. »

Renoir constate que les dés sont jetés, que toutes les nations vont se dissoudre (cf. la Dissolution dans le Règne de la Quantité de Guénon cette fois) :

« La nation est comme un immeuble qui s’effrite, mais nous aimons cet immeuble et nous le préférons à un logement plus moderne. C’était bien agréable, la nation ! Les frontières permettaient de garder les coutumes, les langages différents. »

Problème : on va vers la grande homogénéisation dont on ne se rend plus compte.

Renoir :

« Le monde ne présentait pas cette ennuyeuse unité vers laquelle nous marchons à grands pas. Bientôt on fera le tour du monde sans même s’en apercevoir. L’avion nous débarquera dans un aéroport identique à celui que nous avons quitté. La chambre d’hôtel sera la même. Le menu dans le restaurant sera semblable à tous les menus de tous les restaurants du monde. Pourquoi même n’organiserait-on pas des tours du monde en avion sans escale ? On s’embarquerait à New York et on débarquerait New York. Le voyage se passerait à regarder un film. Quelquefois, dans les compagnies se targuant d’originalité, le film représenterait les paysages survolés. »

Renoir ajoute sur un ton nostalgique qui évoque Tati et le Monsieur Hulot de mon Oncle :

« C’était bien agréable, la nation § La nation, c’était la vitrine de l’épicier du coin. C’était l’accent auvergnat du marchand de charbon. C’était l’odeur de friture qui montait de chez le concierge. C’était le chant du peintre en bâtiment qui nous venait à travers le feuillage des marronniers. C’est la chevelure de la femme aimée, la caresse d’un animal familier. »

Mais pour lui star mondiale il faut s’adapter aussi :

« C’était bien agréable, la nation l Malheureusement, elle est en train de mourir. On ne ressuscite pas les morts. Nous oublions surtout que pendant que nous essayons de revivre à l’étranger le monde de notre enfance, le cadre de celui-ci se modifie constamment. Et avec le cadre, l’esprit se modifie. Au bout de quelques années, nous revenons sur les lieux de notre jeunesse et nous ne les reconnaissons pas. C’est pourquoi, pour notre paix spirituelle, nous devons essayer d’échapper à la magie des souvenirs. Notre salut, c’est de plonger résolument dans l’enfer du monde nouveau, du monde divisé passion, horizontalement, du monde du monde utilitaire, du monde sans nostalgie. »

Et pour cause :

« Il nous faut oublier le bistrot de Magagnosc. Il y a d’ailleurs des chances pour que nous recherchions en vain cette oasis. Elle a dû disparaître sous des montagnes de ciment. »




John Coleman : les 300 et leur extermination des mangeurs inutiles

[Source : Le Saker Francophone]

Par Nicolas Bonnal

Au début des années 90 dans son ouvrage légendaire John Coleman évoque le dépeuplement des peuples blancs occidentaux, la famine, la pénurie, la fin de l’eau, l’invasion migratoire, la disparition de l’électricité, les guerres d’attrition en Europe, la confiscation du logement, l’interdiction de déplacement ; mais aussi le contrôle de l’argent par la technologie et la liquidation en conséquent. Instrument génocidaire de la volonté satanique des oligarques européens et américains, l’UE va tout mettre en œuvre pour arriver à ses fins. Les complicités politiques et parlementaires, les politiciens achetés et une masse de crétins manipulables feraient le reste. La fin de la foi chrétienne, de l’éducation et de la culture et le grand abrutissement intellectuel de la « vieille race blanche » rendent ces visions cauchemardesques réalistes ; quelques extraits en français ici.

Coleman sur la liquidation des mangeurs inutiles :

Au moins 4 milliards de « mangeurs inutiles » seront éliminés d’ici 2050 grâce à guerres limitées, épidémies organisées de maladies mortelles à action rapide et famine. L’énergie, la nourriture et l’eau doivent être maintenues au niveau de subsistance pour les non-élites, en commençant par les populations blanches d’Europe occidentale et d’Amérique du Nord, puis s’étendant à d’autres. La population du Canada, de l’Europe occidentale et des États-Unis sera décimée plus rapidement que sur les autres continents, jusqu’à ce que la population mondiale atteigne le niveau gérable de 1 milliard, dont 500 millions seront constitués de Chinois et de Japonais pures races, sélectionnées parce que ce sont des gens enrégimentés depuis des siècles et qui sont habitués à obéir sans poser de questions à l’autorité.

Pénuries d’eau (merci Macron), d’électricité, de nourriture (on a les insectes) ? Coleman:

De temps en temps, il y aura des pénuries artificielles de nourriture, d’eau et de soins médicaux pour rappeler aux masses que leur existence même dépend du bon vouloir du Comité des 300.

Confiscation des logements et prédation et raréfaction scientifique :

les logements limités et les industries de toute nature autorisées à rester seront sous la direction du Club de Rome de l’OTAN, ainsi que tous les développements scientifiques et de l’exploration spatiale, limités à l’élite sous le contrôle du Comité des 300. Les armes spatiales de toutes les anciennes nations seront détruites avec les armes nucléaires.

Centralisation et informatisation et disparition pour finir de la médecine :

Tous les produits pharmaceutiques essentiels et non essentiels, médecins, dentistes, personnels de santé, travailleurs sociaux seront enregistrés dans la banque de données informatique centrale et aucun médicament ni soin médical ne sera prescrit sans autorisation expresse des contrôleurs régionaux responsables de chaque ville et village.

Submersion migratoire généralisée :

Les États-Unis seront inondés de peuples de cultures étrangères qui finiront par submerger l’Amérique blanche, des gens qui n’ont aucune idée de ce que la Constitution des États-Unis représente et qui, par conséquent, ne fera rien pour la défendre, et dans l’esprit de qui concept de liberté et de justice est si faible qu’il importe peu. LA NOURRITURE et le logement seront les principales préoccupations.

La question de l’argent : le virtualiser pour le confisquer.

Aucune banque centrale, à l’exception de la Banque des règlements internationaux et de la Banque mondiale, ne sera autorisée à fonctionner. Les banques privées seront interdites. La rémunération du travail effectué sera soumise à une échelle prédéterminée uniforme dans tout le gouvernement mondial unique.

Les non-élites n’auront rien, ajoute Coleman qui savait tout depuis les années 70 du programme exécuté maintenant :

Il n’y aura pas d’argent ou de monnaie entre les mains des non-élites. Toutes les transactions doivent être effectuées au moyen d’une carte de débit portant le numéro d’identification du titulaire. Toute personne qui, de quelque manière que ce soit, enfreint les règles et règlements du Comité des 300 verra l’utilisation de sa carte suspendue pour une durée variable selon la nature et la gravité de l’infraction… Ces personnes constateront, lorsqu’elles iront faire des achats, que leur carte est sur liste noire et ils ne pourront pas obtenir de services de quelque nature que ce soit. Tenter d’échanger de « vieilles » pièces, c’est-à-dire les pièces d’argent des nations précédentes et aujourd’hui disparues, sera traité comme un crime capital passible de la peine de mort. Toutes ces pièces doivent être remises dans un délai donné ainsi que les fusils, les explosifs et les automobiles. Seuls l’élite et les hauts fonctionnaires du gouvernement mondial seront autorisés à voyager à titre privé, et à posséder armes, pièces de monnaie et automobiles.

La carte de crédit sera saisie :

Si l’infraction est grave, la carte sera saisie au point de contrôle où elle sera présentée. Par la suite, cette personne ne pourra plus obtenir de nourriture, d’eau, d’abri, de services médicaux, du travail et sera officiellement répertoriée comme hors-la-loi. De grandes bandes de hors-la-loi seront ainsi créées et ils vivront dans les régions qui permettent le mieux leur subsistance, sujets à être traqués et abattus à vue. Toute personne aidant les hors-la-loi de quelque manière que ce soit sera également fusillée. Les hors-la-loi qui ne se rendent pas à la police ou à l’armée après une période de temps déclarée verront un ancien membre de la famille choisi au hasard pour purger des peines de prison à leur place.

Guerres partout :

Les différences ethniques et religieuses doivent être amplifiées et les conflits exacerbés et violents comme moyen de « régler » leurs différends doivent être encouragés encore et encore.

Le gouvernement mondial (qui peut se mettre en place malgré ou grâce aux guerres) :

Tous les services d’information et les médias imprimés seront sous le contrôle du One World Gouvernement [Gouvernement Mondial Unique]. Les mesures régulières de contrôle du lavage de cerveau doivent être présentées comme « divertissement » dans la manière dont il a été pratiqué et est devenu un art dans les États-Unis. Les jeunes retirés de « parents déloyaux » recevront une éducation spéciale conçue pour les brutaliser.

[Voir aussi :
L’asservissement des peuples par le contrôle des ressources]

Le reste du livre ici sur le site de la… CIA.

Nicolas Bonnal sur Amazon.fr

Sources


[Source : favoris-alcyonpleiades]






S.O.S. Chaînes Infos

[Source : AVATAR Media et Nicolas Bonnal]

[Voir aussi :
L’effet CNN
et
L’implosion du Titan et le complot de la catastrophe du Titanic]




Apocalypse woke !

[Source : AVATAR Media]

Voir aussi :




Quand Hitler vaincu prédisait l’autodestruction occidentale et la fin du colonialisme

Par Nicolas Bonnal

« Les blancs ont toutefois apporté quelque chose à ces peuples, le pire qu’ils pussent leur apporter, les plaies du monde qui est le nôtre : le matérialisme, le fanatisme, l’alcoolisme et la syphilis. Pour le reste, ce que ces peuples possédaient en propre étant supérieur à ce que nous pouvions leur donner, ils sont demeurés eux-mêmes. » Et sur l’écroulement US : « Si l’Amérique du Nord ne réussit pas à construire une doctrine un peu moins puérile que celle qui lui sert actuellement de morale passe-partout, à base de grands principes creux et de science dite chrétienne, l’on peut se demander si elle demeurera longtemps un continent à prédominance de blancs. Il serait démontré que ce colosse aux pieds d’argile était tout juste capable, après une montée en flèche, de travailler à son autodestruction. » Texte repris — sans nous citer ! — par E&R (26.11.2017).


Adolf Hitler philosophe un peu tard, en 1945. C’est son testament ; il pense avoir retenu quelques leçons. On va voir que comme tous les vaincus le dictateur-monstre maudit prédisait bien les conséquences de sa guerre désespérée et perdue.

Sur la colonisation qui va se terminer partout :

« Un peuple qui veut prospérer doit rester lié à sa terre. Un homme ne doit jamais perdre contact avec le sol sur lequel il a eu le privilège de naître. Il ne doit s’en éloigner que temporairement et toujours avec l’idée d’y revenir. »

Sur le déclin des nations colonisatrices :

« L’Espagne, la France et l’Angleterre se sont anémiées, dévitalisées, vidées dans ces vaines entreprises coloniales. Les continents auxquels l’Espagne et l’Angleterre ont donné la vie, qu’elles ont créés de toutes pièces, ont acquis aujourd’hui une vie propre et résolument égoïste. Ils ont perdu jusqu’au souvenir de leurs origines, sinon en paroles. Ce sont néanmoins des mondes fabriqués, auxquels il manque une âme, une culture, une civilisation originale. De ce point de vue là, ils ne sont rien de plus que des excroissances. »

Sur la maigreur du bilan de civilisation (Gustave Le Bon disait dans sa très belle civilisation des Arabes, « les blancs » (sic) sont des colonisateurs, pas des civilisateurs) :

« Dans les continents habités ; l’échec fut encore plus marqué. Là, les blancs ne se sont imposés que par la force, et leur action sur les habitants a été quasiment nulle. Les Hindous sont restés des Hindous, les Chinois des Chinois, les Musulmans des Musulmans. Pas de transformations profondes, sur le plan religieux moins que sur les autres et en dépit de l’effort gigantesque des missions chrétiennes. »

Nietzsche disait que les peuples colonisés disparaissaient du fait de deux stupéfiants, le christianisme et l’alcoolisme. Hitler :

« Les blancs ont toutefois apporté quelque chose à ces peuples, le pire qu’ils pussent leur apporter, les plaies du monde qui est le nôtre : le matérialisme, le fanatisme, l’alcoolisme et la syphilis. Pour le reste, ce que ces peuples possédaient en propre étant supérieur à ce que nous pouvions leur donner, ils sont demeurés eux-mêmes. »

Hitler entrevoit aussi l’effondrement du christianisme !

« Une seule réussite à l’actif des colonisateurs : ils ont partout suscité la haine. Cette haine qui pousse tous ces peuples, réveillés par nous de leur sommeil, à nous chasser. Il semble même qu’ils ne se soient réveillés que pour cela ! Qu’on me dise si la colonisation a fait augmenter le nombre des chrétiens par le monde ! Où sont les conversions en masse qui font le succès de l’Islam ? Je vois, çà et là, des îlots de chrétiens, de nom plus encore que de fait. Voilà tout le succès de cette magnifique religion chrétienne, détentrice de la suprême vérité ! »

Hitler anti-colonisateur propose alors (et de quelle manière, avec les camps, la SS et la Gestapo !) une « Europe aux Européens » :

« Nous devrions imposer à l’Europe une doctrine de Monroe applicable à l’Europe : “L’Europe aux Européens !” Et cela signifierait que les Européens n’interviennent pas dans les affaires des autres continents. »

Il souligne qu’il n’est pas raciste et qu’il respecte certaines races hautement civilisées que les Anglo-saxons bombardèrent à l’opium et au nucléaire, et durant un siècle encore :

« Je n’ai jamais pensé qu’un Chinois ou un Japonais nous fussent inférieurs. Ils appartiennent à de vieilles civilisations, et j’admets même que leur passé soit supérieur au nôtre. Ils ont des raisons d’en être fiers comme nous sommes fiers de la civilisation à laquelle nous appartenons. Je pense même que plus les Chinois et les Japonais demeureront fiers de leur race, plus il me sera facile de m’entendre avec eux. »

[Note de Joseph : comme on peut le voir aussi dans la suite de l’article, Hitler n’était pas exempt de contradictions, notamment entre ses actes et ses propos, car pour ce qui est du racisme, c’est quand même lui qui a fortement encouragé l’envoi de prétendus « untermenschen » (« sous-hommes ») juifs, tziganes… en camps de concentration. Et ses capacités de jugement n’ont pas été démontrées comme excellentes, tant s’en faut, lorsque l’on considère notamment ses erreurs stratégiques contre la Russie.]

Il regrette surtout de n’avoir pas aidé l’Afrique du Nord et les peuples colonisés par la République française à se libérer :

« À aucun prix nous ne devions jouer la carte française contre les peuples qui subissaient le joug de la France. Nous devions au contraire les aider à se libérer de cette tutelle, les y pousser au besoin. Rien ne nous empêchait, en 1940, de faire ce geste dans le Proche-Orient et en Afrique du Nord. Eh bien, notre diplomatie s’est appliquée à consolider le pouvoir des Français aussi bien en Syrie qu’en Tunisie, en Algérie et au Maroc. »

Il souligne (cela fera plaisir aux gros malins qui aiment fasciser les Arabes) que les diplomates allemands se sont trompés et que les Arabes eussent alors été loyaux :

« Nos gentlemen préféraient certainement entretenir des rapports avec des Français distingués plutôt qu’avec des révolutionnaires hirsutes, avec des officiers à badine qui ne songeaient qu’à nous flouer plutôt qu’avec les Arabes — qui eussent été pour nous de loyaux partenaires. »

Il souligne un problème important, qui nuira toujours à la construction européenne comme on dit, la germanophobie française :

« La haine tenace du Français à l’égard de l’Allemand a quelque chose d’autrement profond. Il y a là pour nous une leçon à retenir… Sa déliquescence et ses crises de nerfs ont pu parfois nous porter à minimiser l’importance de ses gestes. »

Hitler rappelle que la colonisation n’était pas populaire en France (y compris et surtout chez les nationalistes) :

« Sous Louis XV aussi bien que sous Jules Ferry le peuple s’est révolté contre l’absurdité des entreprises coloniales. Je ne sache pas que Napoléon ait été impopulaire pour avoir bazardé la Louisiane. C’est inouï, en revanche, la désaffection que s’est value son incapable neveu en allant guerroyer au Mexique ! »

Il rappelle sa popularité auprès des populations colonisées :

« Tout l’Islam vibrait à l’annonce de nos victoires.
Les Égyptiens, les Irakiens et le Proche-Orient tout entier étaient prêts à se soulever.
Que pouvions-nous faire pour les aider, pour les pousser même, comme c’eût été notre intérêt et notre devoir. »

Mais les Allemands restaient empêtrés par leur alliance italienne et par Mussolini, « cette plus grande fraude de l’histoire du vingtième siècle » (A.J.P. Taylor) :

« La présence à nos côtés des Italiens nous paralysait, et elle créait un malaise chez nos amis de l’Islam, car ils voyaient en nous des complices, volontaires ou non, de leurs oppresseurs. Or les Italiens, dans ces régions, sont encore plus haïs que les Français et les Anglais. Le souvenir des barbares représailles exercées contre les Senoussis y est toujours vivant. Et d’autre part la ridicule prétention du Duce d’être considéré comme le Glaive de l’Islam entretient encore le long ricanement qu’elle suscita avant la guerre. Ce titre qui convient à Mahomet et à un grand conquérant comme Omar, Mussolini se l’était fait donner par quelques pauvres bougres, qu’il avait payés ou terrorisés. »

Il souligne encore sur l’islam :

« Il y avait une grande politique à faire à l’égard de l’Islam. C’est raté ! Cette politique aurait suscité l’enthousiasme dans tout l’Islam. C’est en effet une particularité du monde musulman que ce qui touche les uns, en bien ou en mal, y est ressenti par tous les autres, des rives de l’Atlantique à celles du Pacifique. »

Hitler rappelle le racisme anti-jaune des Américains, qui vire aujourd’hui à la rage antichinoise :

« Les Américains, après leurs désillusions de 1919, étaient peu désireux d’intervenir à nouveau dans une guerre européenne. En revanche, ils étaient plus que jamais obsédés par l’idée du péril jaune… Je suis convaincu, en l’occurrence, qu’ils ont vu très loin et qu’ils ont envisagé la possibilité de faire abattre par une puissance blanche cet Empire du Soleil-Levant devenu une puissance mondiale, et depuis toujours réfractaire à leur contamination. »

Mais allons plus loin encore. Dans ce testament, Hitler s’en prend aux pays latins (qui auraient pu chiper la Méditerranée à l’Angleterre tout de même !) :

« Les pays latins cumulent la faiblesse matérielle avec la prétention la plus ridicule.
Qu’il s’agisse de l’Italie amie ou de la France ennemie, leur faiblesse à toutes deux nous aura donc été également fatale. »

Il rappelle que sa doctrine n’était pas exportable (dans ce cas, pourquoi contrôler l’Europe à coups de trique ?) :

« La doctrine nationale-socialiste, je l’ai toujours proclamé, n’est pas une doctrine d’exportation. Elle a été conçue pour le peuple allemand. »

Hitler reconnaît avoir été berné à Munich par les Anglo-saxons qui gagnaient du temps. J’ai exposé cette thèse plusieurs fois, en utilisant les travaux de Beard, Sanborn et ceux de mon ami Guido Preparata.

« Il fallait faire la guerre en 1938. C’était la dernière occasion pour nous de localiser la guerre.
Mais ils ont tout lâché. Ils ont cédé, comme des pleutres, à toutes nos exigences. Dans ces conditions-là, il était vraiment difficile de prendre l’initiative des hostilités. Nous avons manqué à Munich une occasion unique de gagner facilement et rapidement une guerre inévitable. »

Il reconnaît ici après Nietzsche (Jenseits, § 251) le génie métapolitique russe, réveillé avec Vladimir Poutine :

« Pour avoir le don de la patience, il nous faudrait aussi le temps et l’espace, et nous ne disposons ni de l’un ni de l’autre. Les Russes ont la chance d’avoir l’un et l’autre — sans compter la prédisposition à la passivité qui est la marque du tempérament slave. »

Il ajoute même (les néocons vont trépigner…) :

« La patience des Soviets s’explique par la philosophie qu’ils pratiquent, qui leur permet d’éviter les risques et d’attendre le temps qu’il faut pour réaliser leurs desseins — une année, une génération, un siècle au besoin. Le temps ne leur coûte rien. »

Il rappelle comme un fou, comme un cabri même son besoin ardent de construction européenne :

« L’Europe ne peut être construite que sur des ruines. Non sur des ruines matérielles, mais sur la ruine conjuguée des intérêts privés, des coalitions économiques, sur la ruine des idées étroites, des particularismes périmés et du stupide esprit de clocher. Il faut faire l’Europe dans l’intérêt de tous et sans ménager personne. Napoléon l’avait parfaitement compris. »

Mais si Hitler préfère les Asiatiques aux Français, pourquoi faire l’Europe alors ? Il déclare à ce propos :

« Je suis persuadé que les Japonais, les Chinois et les peuples régis par l’Islam seront toujours plus proches de nous que la France, par exemple, en dépit de la parenté du sang qui coule dans nos veines. »

Hitler affirme qu’il ne faut pas que l’Allemagne se soumette à un des deux grands. Comme on sait, Himmler envoie trois mois plus tard une lettre à de Gaulle, que le général cite au tome III de ses Mémoires. Je l’ai longuement référencée sur mon blog de sputniknews.fr.

« Je le proclame avec force : il ne faut à aucun prix que les Allemands acceptent de jouer le rôle d’un pion dans le jeu des Américains ou des Russes. »

Enfin il annonce la chute de la maison Amérique. Comme Lincoln, il entrevoit qu’elle mourra de son suicide, d’autodestruction :

« Si l’Amérique du Nord ne réussit pas à construire une doctrine un peu moins puérile que celle qui lui sert actuellement de morale passe-partout, à base de grands principes creux et de science dite chrétienne, l’on peut se demander si elle demeurera longtemps un continent à prédominance de blancs. Il serait démontré que ce colosse aux pieds d’argile était tout juste capable, après une montée en flèche, de travailler à son autodestruction. »

Hitler rappelle que les moyens qu’on utilisa contre l’Allemagne, aussi bien pendant la première que la Deuxième Guerre mondiale, furent extrêmement destructeurs :

« Il leur fallait abattre le national-socialisme à n’importe quel prix, la planète dût-elle être détruite. »

Lisez et relisez Ralph Raico ; en fascisant tout ennemi aujourd’hui, on se prépare à des catastrophes similaires ; le vieil occident hystérique use des mêmes procédés envers tout le monde…

Source

Adolf Hitler – Le testament politique

https://www.egaliteetreconciliation.fr/A-la-redecouverte-des-ecrits-anticolonialistes-et-protectionnistes-d-Adolf-Hitler-48669.html




Zygmunt Bauman et le bon usage du terrorisme

[Publié initialement sur dedefensa.org]

Par Nicolas Bonnal

Il est important de contrôler les masses rétives et de les faire plier. L’attentat de Strasbourg [et plus récemment celui d’Annecy] n’a pas failli à cet égard. Las, chat échaudé craint l’eau froide. Et le pouvoir aux abois, avec cette arme ridicule de 1892, n’a pas su exploiter le massacre pour interdire à la France de se réveiller. Le Bataclan, lui aussi coordonné dans des circonstances invraisemblables, fut mieux exploité et maintint l’État-PS et le lobby euro-atlantiste au pouvoir, mal dans les baskets des déplorables depuis l’élection du Donald. 

On va relire le sociologue israélo-britannique Zygmunt Bauman, auteur de remarquables essais sur notre postmoderne et zombi mondialisation. Il a bien compris que la clé c’est la peur et son exploitation (on est en 2002) :

« Mais l’envoi de troupes en Irak n’a fait qu’aggraver la crainte de l’insécurité, aux États-Unis et ailleurs… Comme on aurait pu s’y attendre, le sentiment de sécurité ne fut pas la seule victime collatérale de cette guerre. Les libertés personnelles et la démocratie ont vite connu le même sort. Pour citer l’avertissement prophétique d’Alexander Hamilton :

« La destruction violente des vies et des biens que cause la guerre et l’inquiétude permanente qu’entraîne un état de danger permanent obligeront les nations les plus attachées à la liberté à chercher le calme et la sécurité auprès d’institutions qui tendent à détruire leurs droits civils et politiques. Pour être plus protégées, elles finissent par accepter le risque d’être moins libres. » »

On croirait lire Thucydide. Mais ne biaisons pas. Bauman ajoute :

« La vie sociale change quand les hommes commencent à vivre derrière des murs, à engager des gardes, à conduire des véhicules blindés, à porter des matraques et des revolvers et à suivre des cours d’arts martiaux. La difficulté est la suivante : ces activités renforcent et contribuent à produire la sensation de désordre que nos actions visaient à empêcher. »

L’important dans ce ministère de la peur, comme dirait Fritz Lang, qui connut et le nazisme et le maccarthysme, est de créer une peur qui se nourrit d’elle-même. C’est le sujet du passionnant et percutant Captain America (le soldat d’hiver) produit par les Israéliens de Marvel Comics. Le pouvoir se nourrit d’attentats, car ils servent à soumettre. Debord a aussi écrit sur le sujet. Mais restons-en à Bauman :

« Il semble que nos peurs soient devenues capables de s’auto-perpétuer et de s’auto-renforcer, comme si elles avaient acquis un dynamisme propre et pouvaient continuer à croître en puisant exclusivement dans leurs propres ressources. »

La peur gagne sans rire tous les domaines, la météo, le sexe, le vêtement, la bouffe :

« Nous cherchons à dépister “les sept signes du cancer” ou “les cinq symptômes de la dépression”, nous tentons d’exorciser le spectre de la tension trop forte, du taux de cholestérol trop important, du stress ou de l’obésité. Autrement dit, nous sommes en quête de cibles de substitution sur lesquelles décharger le surplus de crainte existentielle qui n’a pas pu trouver ses débouchés naturels, et nous découvrons ces cibles de fortune en prenant de grandes précautions pour ne pas inhaler la fumée de cigarette des autres, pour ne pas ingérer d’aliments gras ou de “mauvaises” bactéries — tout en avalant goulûment les liquides qui se vantent de contenir “les bonnes” —, pour éviter l’exposition au soleil ou les relations sexuelles non protégées… »

Bauman ici explique pourquoi on croule sous d’horribles et coûteuses voitures informelles. Cela correspond à la paranoïa du « capitalisme de catastrophe » (Ramonet) :

« L’exploitation commerciale de l’insécurité et de la peur a des retombées commerciales considérables. Selon Stephen Graham, “les publicitaires exploitent délibérément la crainte très répandue du terrorisme catastrophique pour dynamiser les ventes très lucratives de 4 x 4”. Ces monstres militaires très gourmands en carburant, que les Américains appellent SUV (sport utility vehicles), représentent déjà 45 % de l’ensemble des ventes de voitures aux États-Unis et s’intégrent dans la vie urbaine de tous les jours sous le nom de “capsules défensives”. Le 4 x 4 est un signifiant de sécurité que les publicités dépeignent, à l’instar des communautés fermées au sein desquelles on les voit souvent rouler, comme permettant d’affronter la vie urbaine, pleine de risques et d’imprévus […]. Ces véhicules semblent apaiser les craintes que ressentent les membres de la bourgeoisie lorsqu’ils se déplacent en ville (ou sont bloqués dans les embouteillages). »

Puis il revient au sujet, le terrorisme et son utilité comme ingénierie sociale :

« En octobre 2004, la BBC a diffusé une série documentaire sous le titre The Power of Nightmares : the Rise of the Politics of Fear (“Le pouvoir des cauchemars : la montée de la politique de la peur”). Adam Curtis, auteur et réalisateur de cette série, l’un des documentaristes les plus acclamés en Grande-Bretagne, y montre que, si le terrorisme international est assurément un danger réel qui se reproduit continuellement dans le no mans land mondial, une bonne partie — sinon l’essentiel — de sa menace officielle “est un fantasme qui a été exagéré et déformé par les politiciens. Cette sombre illusion s’est propagée sans jamais être contestée à travers les gouvernements du monde entier, les services de sécurité et les médias internationaux”. Il ne serait pas difficile d’identifier les raisons du succès rapide et spectaculaire de cette illusion : “À une époque où toutes les grandes idées ont perdu leur crédibilité, la peur d’un ennemi fantôme est tout ce qu’il reste aux politiciens pour conserver leur pouvoir.” »

Et comme s’il avait lu Guy Debord, Bauman rappelle les années de plomb allemandes (l’actuel fascisme humanitaire-antiraciste-féministe en Allemagne a de beaux précédents) :

« Capitaliser sur la peur est une stratégie bien établie, une tradition qui remonte aux premières années de l’assaut néolibéral contre l’État social. 

Bien avant les événements du 11 septembre, beaucoup avaient déjà succombé à cette tentation, séduits par ses redoutables avantages. Dans une étude judicieusement intitulée “Le terrorisme, ami du pouvoir de l’État”, Victor Grotowicz analyse l’utilisation des attentats de la Fraction armée rouge par la République fédérale allemande à la fin des années 1970. En 1976, seuls 7 % des citoyens allemands considéraient leur sécurité personnelle comme une question politique importante, tandis que, deux ans après, une majorité considérable d’Allemands en faisait une priorité, avant la lutte contre le chômage ou contre l’inflation. Durant ces deux années, la nation put voir à la télévision des reportages sur les exploits des forces de police et des services secrets, alors en pleine expansion, et put entendre les hommes politiques promettre des mesures toujours plus dures dans la guerre totale contre les terroristes. »

Il est important de rappeler cela, qu’il s’agisse de Sarkozy-Macron-Hollande, de Bush, May, Clinton-Obama, Merkel et du reste ; l’État fasciste-sécuritaire accompagne la dégradation-extinction de l’État de droit et de l’État social. L’État renonce à la carotte et a recours à la trique du CRS et au contrôle par des services plus ou moins secrets :

« On en venait à se demander si la fonction manifeste de ces nouvelles mesures, sévères et ostensiblement impitoyables, censées éradiquer la menace terroriste, ne dissimulait pas une fonction latente : déplacer le fondement de l’autorité de l’État d’un domaine qu’elle ne voulait ni ne pouvait maîtriser efficacement vers un autre domaine où son pouvoir et sa détermination pouvaient se manifester de façon spectaculaire, en remportant presque tous les suffrages. Le résultat le plus évident de la campagne antiterroriste fut une rapide hausse de la peur dans tous les rangs de la société. »

D’où évidemment un incessant recours à ces insaisissables émanations terroristes (dans Captain America, cela s’appelle justement Hydra). Bauman rappelle qu’on baptisa l’hydre du terrorisme mondial pour effrayer les chaumières et servir l’avènement de l’État policier universel :

« Adam Curtis, déjà cité, va encore plus loin et suggère qu’Al-Qaida existait à peine, sinon comme vague programme visant à “purifier par la violence religieuse un monde corrompu”, et ne fut créé que par l’ingéniosité des juristes ; Al-Qaida ne fut ainsi baptisée que début 2001, quand le gouvernement américain décida de poursuivre Ben Laden en son absence et dut utiliser les lois antimafia qui exigeaient l’existence d’une organisation criminelle portant un nom ».

Le terrorisme compte donc sur l’État postmoderne, dont il est le meilleur et le plus régulier allié :

« Contrairement à leurs ennemis déclarés, les terroristes ne sont pas limités par l’étendue modeste de leurs ressources. Lorsqu’ils conçoivent leur stratégie et leur tactique, ils peuvent compter au nombre de leurs atouts la réaction attendue et quasi certaine de “l’ennemi”, qui viendra considérablement amplifier l’impact des atrocités commises. Si le but des terroristes est de répandre la terreur au sein de la population ennemie, l’armée et la police ennemies veilleront à ce qu’ils y parviennent bien au-delà de ce qu’ils auraient pu accomplir par leurs propres moyens. »

Dure et rigoureuse conclusion de Bauman :

« De fait, on ne peut que reprendre l’analyse de Michael Meacher : le plus souvent, et surtout depuis le 11 septembre, nous avons l’air de “jouer le jeu de Ben Laden”. Cette attitude peut avoir des conséquences tragiques. »

On a tous vu la nullité brouillonne des forces du désordre à Strasbourg. Mais ce chaos fait partie de la mise en scène, et Bauman vous l’explique :

« Les forces terroristes ne souffrent guère de ce genre d’attaques ; au contraire, c’est dans la maladresse et dans la prodigalité extravagante de leur adversaire qu’elles puissent une énergie renouvelée. L’excès n’est pas seulement la marque des opérations explicitement antiterroristes ; il caractérise aussi les alertes et avertissements adressés à leurs propres populations par la coalition antiterroriste. »

Le grand vainqueur est l’État postmoderne (avec le bonapartisme la France a toujours eu de l’avance). On rappelle du reste la citation de Maurice Joly :

« Il y aura peut-être des complots vrais, je n’en réponds pas ; mais à coup sûr il y aura des complots simulés. À de certains moments, ce peut être un excellent moyen pour exciter la sympathie du peuple en faveur du prince, lorsque sa popularité décroît. »

Je reprends mon étude sur Joly :

Le pouvoir subventionne la presse et devient journaliste :

« Dans les pays parlementaires, c’est presque toujours par la presse que périssent les gouvernements, eh bien, j’entrevois la possibilité de neutraliser la presse par la presse elle-même. Puisque c’est une si grande force que le journalisme, savez-vous ce que ferait mon gouvernement ? Il se ferait journaliste, ce serait le journalisme incarné. »

Le pouvoir contrôle et soudoie tout, opposition populiste comprise :

« Comme le dieu Vishnou, ma presse aura cent bras, et ces bras donneront la main à toutes les nuances d’opinion quelconque sur la surface entière du pays. On sera de mon parti sans le savoir. Ceux qui croiront parler leur langue parleront la mienne, ceux qui croiront agiter leur parti agiteront le mien, ceux qui croiront marcher sous leur drapeau marcheront sous le mien. »

Joly avait même inventé l’expression « pensée unique ».

Gouverner par le chaos alors ? En effet et dix ans avant notre Lucien Cerise, Bauman écrit :

« La société n’est plus protégée par l’État, ou, du moins, elle ne peut plus se fier à la protection offerte ; elle est désormais exposée à la rapacité de forces qu’elle ne contrôle pas et qu’elle ne compte ni n’espère reconquérir et dompter. C’est pour cette raison, en premier lieu, que les gouvernements qui se débattent pour affronter les orages actuels passent d’une série de mesures d’urgence à une autre, d’une campagne ad hoc de gestion de la crise à une autre, en rêvant uniquement de rester au pouvoir après les prochaines élections, mais sont par ailleurs dépourvus de toute ambition à long terme, sans parler d’envisager une solution radicale aux problèmes récurrents de la nation. »

Sources principales :

Zygmunt Bauman, la Société liquide, Seuil, 2002

Maurice Joly, Entretiens, Wikisource.org

Guy Debord — Commentaires

https://reseauinternational.net/maurice-joly-et-la-naissance-du-systeme-1864/



De Gaulle face au Kali-Yuga français

[Source : lesakerfrancophone.fr]

« La France et le monde sont dans une situation où il n’y a plus rien à faire ; je ne souhaite pas que le référendum réussisse »

le Général de Gaulle face au Kali-Yuga français

Juin 2023 — Source Nicolas Bonnal

Nicolas Bonnal

J’ai évoqué la chute de la France sous la présidence de de Gaulle : pour un Québec libre d’ailleurs peu suivi d’effet, il a fallu se payer l’industrialisation, la pollution, l’immigration, mai 68, la contestation sociale, le noyautage culturel marxiste (cf. Éric Zemmour sur le rôle sinistre de Malraux), le pays de Cocagne de Pierre Etaix et le Play-Time de Tati, sans oublier l’Alphaville de Godard. On y créa le froncé (([1] Jeu de mot avec « Français »)) abruti, tétanisé, hébété, qui a rompu avec tous les modèles antérieurs et était prêt pour la goberge télé et bagnole. Je vais écrire et publier un livre sur ce thème : la disparition de la France au cinéma. Car de Farrebique ou de Jean Devaivre (découvrez par exemple l’admirable Alerte au Sud sur notre chevalerie coloniale, notre épopée saharienne) aux Valseuses et à Mortelle randonnée, on s’est bien effondré.

Le pire est que le Général, porté aux nues par des politiciens d’extrême-droite (la smalah JMLP-Zemmour) qu’il aurait fait fusiller en 44, en est parfaitement conscient. On le sait, le vénérable et pathétique-amusant Debré père qui est lui-même encore plus traumatisé par ce que devient et va devenir la France au cours des années : marxisation culturelle via Malraux (voir livre p. 145), inflation et taux d’intérêt à 15 % (livre p. 151), relâchement moral et spirituel (et même militaire : on n’a pas plus d’empire comme me le rappela mon ami historien de Sparte Nicolas Richer), effondrement du christianisme, Debré et de Gaulle sont conscients de tout. L’Histoire de France est terminée et cela va se sentir.

Dans ses Entretiens avec le général, publiés par mon éditeur Albin Michel (moi mon dada c’était Mitterrand, et je ne le regrette pas, j’en reparlerai un jour de Mitterrand), Debré écrit donc (p. 57-58) :

J’évoque ces forces violentes qui désirent tant l’intégration de la France dans l’Europe, c’est-à-dire en fin de compte la fin de la France, et je crains aussi que les divisions de l’Occident et l’incapacité américaine ne conduisent notre civilisation au déclin décisif. Je parle d’abord des forces qui poussent à l’intégration européenne : tous ceux qui Sont hostiles à l’État, tous ceux qui ne comprennent pas la nécessité d’une pensée et d’une action indépendantes, se précipitent vers la supranationalité parce qu’ils savent, au fond d’eux-mêmes, que la supranationalité, c’est le protectorat américain.

On a parfaitement compris donc pourquoi Asselineau et Philippot qui sautent comme des cabris au nom du Général font 1 % des voix. La masse veut la supranationalité et sans rire le protectorat américain avec ses armes qui ont cinquante ans de retard.
Dans le livre de Debré d’ailleurs le Général paraît souvent triste, distrait, impuissant (idem pour son fils avec qui j’ai eu l’honneur de discuter aux jardins du Ranelagh si chers à mon maître et ami Parvulesco) : il est en position non de gourou, mais de disciple anxieux et sans maître — comprendre ce que la France devient à cette époque, il faut l’oser en effet, pas vrai ?

Le général de Gaulle m’interrompt pour me demander si je crois possible de résister à ces forces. « Il n’y a que vous et moi qui pensons à l’Indépendance de la France. » Je lui réponds que nous devons être, en réalité, plus que deux et j’ajoute qu’il y aura tellement de déceptions à la suite de cette politique d’intégration qu’il ne faut pas douter d’être dans la vérité en expliquant qu’il faut faire l’Europe par l’association des États et non par la disparition des nations, à commencer par la disparition de la France.

Malheureusement les réponses sont et seront matérielles et matérialistes (Pompidou-Giscard — deux traîtres —, immobilier et nucléaire) :

« Que faire pour encourager ce mouvement ? » me dit-il. Je lui expose que les chemins sont clairs pour maintenir aux Français et à la France la volonté de demeurer une nation. Il faut poursuivre notre effort de modernisation industrielle. Il faut poursuivre notre volonté d’être une puissance militaire atomique et il faut aussi ne pas chercher à nous dégager de nos responsabilités africaines. Je lui expose que ses réticences à l’égard des réunions des chefs d’État africains d’expression française, réunions qui pourraient avoir lieu autour de lui, aboutissent à couper des liens qui pourraient être renforcés.

Le grand projet gaulliste est un leurre auquel Kerillis avait très bien tordu le cou.
De Gaulle échoue — mais il en ressort qu’on ne pouvait qu’échouer. Je confirme !
Sur le referendum — sa porte de sortie comme on sait — nous sommes clairement entendus :

J’expose au Général que le but de ma visite est de préciser les conditions qui peuvent permettre le succès, du référendum. Interruption du Général : « Je ne souhaite pas que le référendum réussisse. La France et le monde sont dans une situation où il n’y a plus rien à faire et en face des appétits, des aspirations, en face du fait que toutes les sociétés se contestent elles-mêmes, rien ne peut être fait, pas plus qu’on ne pouvait faire quelque chose contre la rupture du barrage de Fréjus. Il n’y aura bientôt plus de gouvernement anglais ; le gouvernement allemand est impuissant ; le gouvernement italien sera difficile à faire ; même le président des États-Unis ne sera bientôt plus qu’un personnage pour la parade. Le monde entier est comme un fleuve qui ne veut pas rencontrer d’obstacle ni même se tenir entre des môles. Je n’ai plus rien à faire là-dedans, donc il faut que je m’en aille et, pour m’en aller, je n’ai pas d’autre formule que de faire le peuple français juge lui-même de son destin (p.112).

On répète parce que c’est merveilleux :

Je n’ai plus rien à faire là-dedans, donc il faut que je m’en aille et, pour m’en aller, je n’ai pas d’autre formule que de faire le peuple français juge lui-même de son destin.

Vive Pompidou, Beaubourg, Michel Sardou, la loi Veil et Emmanuelle.

C’est qu’il n’y a plus de religion. Debré ajoute ces lignes stupéfiantes :

Le Général redit son analyse. Ce qui paraît le frapper le plus c’est le fait que les sociétés elles-mêmes se contestent et qu’elles n’acceptent plus de règles, qu’il s’agisse de l’Église, de l’Université, et qu’il subsiste uniquement le monde des affaires, dans la mesure où le monde des affaires permet gagner de l’argent et d’avoir des revenus. Mais sinon il n’y a plus rien (p. 122).

C’est le Kali Yuga, donc on ne peut rien faire — à part se remplir les poches, en bon vaishya. On peut se demander quand même pourquoi la masse des couillons ne réagit plus. C’est ce que fait le Général :

Le Général m’interrompt pour me dire, à la suite des exemples que je lui donne : “Comment se fait-il que les chefs d’établissement ou les recteurs n’interviennent pas ?” Je rappelle au Général ce que je disais tout à l’heure. L’autorité n’existe plus de par la volonté délibérée du ministère de l’Éducation nationale et j’ajoute en outre que, pour ce qui concerne les activités socio-éducatives. Les chefs d’établissement ont des instructions formelles de ne point intervenir. Je regrette d’autant plus cette abdication et cette complicité que l’on sent les prodromes d’une réaction. Le corps enseignant, même dans ses éléments gauchisants, ne comprend plus cette anarchie et s’émeut de ses conséquences.

Et puis de Gaulle comprend ensuite que la famille disparaît, qu’elle n’est plus la structure unifiant la société chrétienne — puisqu’il n’y a plus de société chrétienne :

Le Général me dit : “Comment se fait-il que les familles ne réagissent pas ?
La vie familiale aujourd’hui n’est plus celle d’hier. L’évolution fait que l’État, le corps enseignant ont pris une responsabilité de plus en plus grande à l’égard des enfants. C’est là une situation à laquelle les familles se sont peut-être trop facilement habituées. Au surplus les réactions des parents se dispersent dans toute une série de directions : le programme, les examens, le comportement des professeurs, et, de ce fait, quand elles s’orientent contre certaines dégradations de l’enseignement, n’ont pas la même force (p. 174).

La famille, seul État qui crée et aime ses citoyens (Chesterton), va disparaître.

C’est là que je cesse toute critique à son encontre (ce qui m’énerve c’est son culte). Il fallait passer le témoin aux Giscard et aux soixante-huitards. La France moderniste, progressiste et républicaine voulait son Kali-Yuga.

À ce propos et grâce aux talents de Tetyana j’ai scanné la page de Daniélou sur cette question transcendantale :

C’est armé de ce bagage que j’ai commencé à reprendre contact avec l’Europe qui m’est apparue comme une région malade, atteinte d’une sorte de cancer qui fait que certaines cellules se développent de façon incontrôlée et contaminent peu à peu les autres. Ce développement a forcément une limite. L’espace vital est de plus en plus réduit pour chacun dans ces énormes termitières qui recouvrent peu à peu les campagnes et les forêts. Certains aspects de la vie prennent une place démesurée par rapport à d’autres, créant un profond déséquilibre. La recherche de la prospérité étouffe celle de la sagesse et du bonheur de vivre. Je me suis interrogé sur les raisons qui rendaient les Occidentaux modernes si agités et en somme assez rarement heureux.

Daniélou prévoit même l’autodestruction européenne que nous vivons — et qui promet d’être inévitable et épouvantable, tant la masse zombie de la société de consommation se laisse faire :

Les Aryens dont sont issus la plupart des peuples qui ont dominé l’Europe, les Achéens, les Doriens, les Celtes, les Romains, les Germains, les Russes, sont des peuples de prédateurs. Ayant récemment envahi une grande partie de la planète, peuplé les Amériques et l’Australie, imposé leurs langues à l’Afrique et parfois même à l’Asie, ils ont atteint une limite et leur force d’expansion se retourne contre eux-mêmes. Il semble peu probable qu’ils arrivent à se contrôler. C’est un vaste problème d’histoire. Lorsque l’équilibre naturel est rompu, certaines espèces animales tendent à se multiplier jusqu’au point où elles se détruisent elles-mêmes…

De Gaulle et la vocation de la France ont disparu dans les années soixante (mon enfance) comme le christianisme. On demande à Bruckberger de compléter (voyez mes textes). Il cite Lévi-Strauss dans une interview inouïe. Prince de la science humaine, le vieux savant juif devenu marginal génial répond courageusement à une stupide interview catho :

Je vous dirai que ce qui se passe dans l’Église depuis le dernier concile me trouble. Il me semble vu de l’extérieur, que l’on appauvrit ou que l’on dépouille la foi religieuse (ou son exercice) d’une très grande partie des valeurs propres à toucher la sensibilité, qui n’est pas moins importante que la raison.

LE JOURNALISTE : Par exemple ?

C. LÉVI-STRAUSS : C’est vraiment l’appauvrissement du rituel qui me frappe. Un ethnologue a toujours le plus grand respect pour le rituel. Et un respect d’autant plus grand que ce rituel plonge ses racines dans un lointain passé. Il y verra le moyen de rendre immédiatement perceptibles un certain nombre de valeurs qui toucheraient moins directement l’âme si l’on s’efforçait de les faire pénétrer par des moyens uniquement rationnels, Louis XIV dit, dans son testament, en de s’efforçant justifier e cérémonial de la Cour, des choses assez profondes : qu’on ne peut pas demander à tout le monde d’aller au fond des choses Il faut qu’il y ait des expressions sensibles qui ne passent pas le biais de la connaissance discursive.

LE JOURNALISTE : Vous pensez que l’affadissement du rituel d’un groupe social est le signe d’une crise de son système des valeurs ?

C. LÉVI-STRAUSS : J’entends bien que tout rituel doit évoluer. Une société religieusement vivante serait une société capable d’enrichir son rituel. Mais les tentatives de renouvellement du moins ce que j’en vois quand j’assiste à des messes d’enterrement ou de mariage ne paraissent pas très convaincantes.

Et le courageux Bruckberger, disciple de Bernanos, de conclure :

On ne peut dire plus clairement, ni avec plus de prudence et de gentillesse, qu’en France, la réforme liturgique issue du dernier concile est un fiasco. Un grand savant agnostique s’en dit troublé. Nos évêques, eux, n’en sont nullement troublés : même si elle devait entraîner la mort du patient, ils nous forceraient à tenir la bouche ouverte jusqu’à ce que toute la potion soit avalée. Un grand savant explique ce qu’Aristote nous avait depuis longtemps appris : il n’est rien dans l’intelligence qui ne soit d’abord tombé sous les sens et que tout ce qui touche la sensibilité, surtout si ça vient de loin, doit être modifié avec la plus grande prudence.

Flanqué de tels esprits, le Général ne pouvait qu’exhaler cette grandeur triste (pensez au mage Taliesin) que j’ai retrouvée dans les traits de son fils — honoré par une lettre de Vladimir Poutine lors de son centenaire (les démons doivent en trembler encore), quand je parlais avec lui aux jardins du Ranelagh.

À nous d’en finir maintenant avec les démons déchaînés de l’enfer et de la médiocrité.

[Note de Joseph :
Le Général était certainement bien conscient de la puissance des forces matérialistes en jeu et contre lesquelles, même à son niveau il n’a pas pu faire grand-chose. Par ailleurs, la présence d’un Malraux à ses côtés tend à démontrer qu’il ne s’est pas nécessairement entouré des meilleurs esprits, de même que Poutine peut avoir des conseillers ou des ministres enténébrés. Le Kali Yuga représente aussi l’avancée des ténèbres et il faut de puissantes lumières pour percer ces dernières. La flamme de bougies ou du mental n’y suffit pas en dehors d’un périmètre fort limité. Ce n’est probablement pas pour rien que l’Apocalypse prophétise que seul le Messie fera tomber Babylone. Même ses témoins sont ou seront vaincus. Le Christ, si je ne m’abuse, se présentait comme la Lumière du monde et il était parangon de Vérité. Lumière et Vérité sont étroitement liés. Dans un monde d’obscurité (du fait de la seule prise en compte de la Matière), nous faisons face au Mensonge, au Malin et à l’exaltation du Moi. La Lumière, la Loi (naturelle et universelle) et Lui ne sont plus que rarement reconnus.]




Télévision et Dictature

[Source : AVATAR Media]

Le Coup de Gueule de Nicolas Bonnal




La Déchéance Française

[Source : AVATAR Media]

Le Coup de Gueule de Nicolas Bonnal, la rubrique de Café Noir du mardi 06 juin 2023. Pour une sélection de livres avec liens de Nicolas & Tetyana Bonnal voir ci-dessous [après la vidéo].

LIVRES DE BONNAL CHEZ AVATAR EDITIONS

https://avatareditions.com/livre/internet-la-nouvelle-voie-initiatique/
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LIVRES DE N. BONNAL CHEZ D’AUTRES ÉDITEURS

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