Missiles à longue portée : l’OTAN pousse à la confrontation avec la Russie

10/09/2024 (2024-09-10)

[Source : russiepolitics.blogspot.com]

Par Karine Bechet-Golovko

Stoltenberg se félicite de l’envoi de missiles à longue portée en Ukraine, pour pouvoir viser des cibles en profondeur en Russie, ce qui doit permettre soi-disant à l’Ukraine de soi-disant se défendre. Le discours atlantiste est bien fondé sur ces deux mythes : le premier est que c’est l’Ukraine qui se bat, le second est qu’elle se défend. Des mythes, qui sont censés permettre d’éviter les pays de l’Axe atlantiste d’expliquer à leur population qu’ils font la guerre à la Russie sur le front ukrainien pour défendre des intérêts, qui ne sont pas les leurs.

L’OTAN, par la voix de Stoltenberg, insiste. Les missiles à longue portée doivent changer la donne. Comme les chars devaient changer la donne. Comme les avions devaient changer la donne. Rien ne change « la donne », la guerre continue et en toute logique elle s’aggrave. 

À Oslo, le Secrétaire général de l’OTAN prenait des distances hypocrites avec l’attaque de Koursk et la violation de la frontière étatique dans cette région russe :

« L’Ukraine a accompli “beaucoup” de choses lors de son offensive de Koursk en Russie, mais il est difficile de dire comment la situation va évoluer ensuite, a déclaré jeudi à Oslo le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg. “Seuls les Ukrainiens peuvent faire les choix difficiles qui s’imposent, comme le lieu où déployer leurs forces et le type de guerre approprié dans cette situation”, a déclaré M. Stoltenberg. »

Soi-disant, l’Ukraine est un pays souverain, qui prend logiquement ses décisions, notamment militaires, en toute indépendance. Surtout lorsque son armée est formée par les pays de l’OTAN, qu’elle est armée par les pays de l’OTAN et qu’elle agit en fonction du renseignement fourni par les pays de l’OTAN, avec des conseillers de l’OTAN et des « mercenaires » de l’OTAN. 

Sans ce mythe, les pays de l’OTAN se retrouvent en position de partie au conflit. Ce qu’ils sont en réalité. Car du point de vue de l’OTAN, l’Ukraine est un front.

Et Stoltenberg de poursuivre au sujet des missiles à longue portée.

« Stoltenberg a déclaré que l’Ukraine avait le droit de se défendre, notamment avec des missiles à longue portée qui peuvent atteindre des cibles militaires sur le territoire russe.

« Je suis heureux que de nombreux pays de l’OTAN aient donné cette possibilité, et que ceux qui avaient encore des restrictions aient assoupli celles-ci pour que l’Ukraine puisse se défendre », a déclaré Stoltenberg. »

Le second mythe est celui selon lequel l’Ukraine se défend contre la Russie. Pour cela, l’histoire revue et corrigée a commencé en février 2022. Avant, il n’y a que du néant. Il n’y a pas de renversement de pouvoir organisé en Ukraine par les Atlantistes, il n’y a pas d’occupation du territoire ukrainien par les Atlantistes, il n’y a pas l’envoi de forces armées contre les populations à l’Est, il n’y a pas de concentration de forces armées aux frontières russes, il n’y a pas de tirs sur les régions de Koursk et de Belgorod ni de menace de faire de l’Ukraine une puissance nucléaire au sein de l’OTAN. 

En se fondant sur ces deux mythes, l’OTAN entraîne les pays occidentaux de plus en plus loin. Désormais, il s’agit d’utiliser les missiles à longue portée en profondeur en Russie.

La France et la Grande-Bretagne n’y voient pas de problème. Formellement, les États-Unis n’ont pas encore donné leur accord à l’utilisation de ces armes en profondeur sur le territoire russe, mais annoncent pouvoir changer d’avis en fonction de la situation.

De son côté, la Russie prend acte. À part cela, de toute manière, il est évident qu’elle ne peut pas faire grand-chose de plus sur le terrain : elle détruit déjà les stocks d’armes occidentales livrées en Ukraine, vise les centres de formation militaire où se trouvent des « formateurs » étrangers, etc.

Ce qui est incompréhensible du point de vue russe, c’est la communication. Avec une certaine force, Lavrov déclare que les États-Unis doivent faire attention aux fameuses « lignes rouges » de la Russie :

« Ils doivent comprendre nos “lignes rouges”. Il n’y a pas lieu de plaisanter sur nos “lignes rouges”. Et ils savent parfaitement où elles se trouvent. »

Et en parallèle, certainement pour que les États-Unis comprennent bien le sérieux de la chose, Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin, déclare que l’Ukraine tire déjà en Russie avec des armes américaines.  

L’on ne parlera même pas des récentes déclarations présidentielles, selon lesquelles, en vrac, la Russie est toujours prête à négocier (pendant Koursk ?) ; la Russie ne mène pas une politique de déglobalisation, elle a été obligée de ne plus utiliser le dollar (donc pas de volonté politique antiglobaliste ?) ; la Russie est prête à envoyer du gaz en Allemagne si l’Allemagne appuie sur le bouton (business is usual en temps de guerre ?)… Quel que soit le but, même s’il ne s’agit que d’une rhétorique et non pas d’une position idéologique profonde, toutes ces déclarations affaiblissent sérieusement la position de la Russie. Surtout à la troisième année de guerre.

Au regard de tout cela, en voyant l’évolution du conflit, l’on a envie de poser une question, rhétorique et légèrement provocatrice : est-ce parce que les États-Unis savent très bien où se trouve la véritable ligne rouge de la Russie qu’ils continuent à aggraver le conflit en Ukraine ?

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