L’Humanité débordée

12/10/2023 (2023-10-12)

Nous sommes débordés. Occasion de rappeler les somptueuses réflexions de Baudrillard sur les simulacres d’histoire et notre infecte « troisième guerre MENTALE » :

« Car, je ne crois pas à cette apocalypse réelle. Je ne crois pas au réalisme de toute façon, ni à une échéance linéaire de l’apocalypse. À la limite, si l’on pouvait espérer cet accident total, il n’y aurait qu’à le précipiter, il ne faudrait pas y résister. L’avènement du virtuel lui-même est notre apocalypse, et il nous prive de l’évènement réel de l’apocalypse. Mais telle est notre situation paradoxale, il faut aller jusqu’au bout du paradoxe. »

Notre société anglo-américaine et démocratique matinée de gnosticisme techno (voyez notre Internet) et de messianisme militaire semble folle et intégriste. On le sait depuis 1914, lisez Huddleston et Grenfell traduits par nos amis de lesakerfrancophone.fr. Le duo anglo-saxon aura détruit l’Europe et établi partout le communisme pour anéantir l’Allemagne.

Pour lutter contre le terrorisme, on a tué/bousculé/déplacé trente millions de musulmans avec l’assentiment des loques européennes submergées de pauvres réfugiés (jusque-là pas de simulacre…).

Ici on veut une troisième guerre mondiale et une extermination de l’Iran ; là on nous dit que tout est simulacre et conditionnement, guerre mentale et non mondiale. Notre Lucien Cerise avait résumé cette position :

« Pour Baudrillard, la véritable apocalypse n’était pas la fin réelle du monde, sa fin physique, matérielle, assumée, mais son unification dans ce qu’il appelait le “mondial”, ce que l’on appelle aujourd’hui le mondialisme, et qui signait la vraie fin, le simulacre ultime, le “crime parfait”, c’est-à-dire la fin niant qu’elle est la fin, la fin non assumée, donnant l’illusion que ça continue. La Matrice, comme dans le film, si vous voulez. »

En 1991, dans sa très pointue Guerre du Golfe qui n’a pas eu lieu, Baudrillard se lâchait en fin de texte. Je retraduis de la version espagnole :

« Il s’avère malgré tout digne d’admiration que nous traitions les Arabes, les Musulmans, de fondamentalistes, avec le même dégoût avec lequel nous traitons quelqu’un de raciste, alors que nous sommes en train de vivre dans une société typiquement fondamentaliste, bien que simultanément sur la bonne voie de désintégration. »

Puis le maître, depuis traîné dans la boue par les analphabètes-système, ajoute — sur cet intégrisme démocratique, cet incessant djihad médiatique :

« Nous ne pratiquons pas l’intégrisme fondamentaliste dur, mais nous pratiquons l’intégrisme démocratique doux, subtil et honteux, celui du consensus. Cependant, le fondamentalisme consensuel (celui des Lumières, des droits de l’homme, de la gauche au pouvoir, de l’intellectuel repentant, de l’humanisme sentimental) est aussi féroce que toute religion tribale ou société primitive. »

Oui, c’est aussi un féminisme débile et militant, celui dont a parlé Todd à propos de Clinton dans son livre « Après l’Empire ». Baudrillard ajoutait :

« Il signale l’autre exactement de la même manière comme le Mal absolu (ce sont les termes employés par François Mitterrand faisant référence à l’affaire Salman Rushdie ; allez, mais où trouve-t-il une façon de penser aussi archaïque ?). »

Tout en étant humanitaire-doux, l’intégrisme occidental est dangereux, car il hérite des siècles de suprématie militaire. La bible dans une main, le fusil de l’autre, la bombe atomique dans une main, la Déclaration des droits de l’homme dans l’autre.

« La différence entre les deux intégrismes (dur et doux) est que le nôtre (le doux) détient tous les moyens de détruire l’autre, et ne se prive pas de le faire. Par coïncidence, il s’avère que c’est toujours l’intégrisme des Lumières qui opprime et détruit l’autre, qui ne peut que le défier symboliquement. Pour nous justifier, nous donnons corps à la menace, la fatwa sur Salman Rushdie suspendue comme une épée de Damoclès sur le monde occidental, gardant une terreur disproportionnée, avec une ignorance totale de la différence qui sert de médiateur entre un défi symbolique et une agression technique. »

On verra si notre Vautrin, Biden saura se limiter au virtuel ou s’il déclenchera une énième apocalypse démocratique pour satisfaire ses commanditaires… Une proche me dit que l’Amérique anéantirait l’Iran comme elle a anéanti le Japon. La planète applaudirait et retendrait son cou à ce clown-bourreau décidément amusant…

Ou nous aurons un règlement de comptes numérique : veni vidi twitti, et non plus vinci, qui mettra un terme à l’histoire. Les mollahs y vont mollo (comme notre Biden bis) et c’est dans les Leslie Nielsen qu’il faudra chercher les plus sophistiquées évocations des bouffonnades de ces messieurs enturbannés ou pas…

Sources :

La guerre du Golfe n’a pas eu lieu, 1991
Internet, nouvelle voie initiatique


Autre texte :

« Le virtuel nous prive de notre apocalypse »

Le moins que l’on puisse dire pour le moment c’est qu’il nous prive de notre prise de conscience par rapport au coup d’État mondial et au Grand Reset. Les foules cliquent et même quand elles ronchonnent comme nous elles ne sont guère dangereuses. C’est en ce sens que nous estimons que Baudrillard dit superbement que le virtuel nous prive de notre réaction à l’apocalypse.

Un lien sur son dialogue avec JP Petit (le paroxyste indifférent, p. 46-47) :

« Paul Virilio, qui est plus chrétien que vous, pense que les intellectuels ont le devoir de résister aux formes mondiales de domination. Ils sont, dit-il, dans la posture des peintres qui ont résisté à la photographie au siècle dernier. N’êtes-vous pas à votre manière un résistant qui attend de passer à l’offensive ? J.B. : Nous avons longtemps travaillé ensemble, avec Virilio, en toute complicité, et sans aucun problème. Je n’avais pas vu affleurer à l’époque son christianisme. Cela me surprend, car ses livres démentent la possibilité même d’une morale de résistance. Son analyse du cybermonde est intransigeante, inexorable, fatale si j’ose dire, je la trouve remarquable et très belle. Mais je ne crois pas à ce qu’il y oppose. J’espère que lui y croit.

Il se place en position apocalyptique, de prophète anti-apocalyptique tout en étant persuadé que le pire peut advenir. Sur ce point, on a fini par diverger. Car, je ne crois pas à cette apocalypse réelle. Je ne crois pas au réalisme de toute façon, ni à une échéance linéaire de l’apocalypse. À la limite, si l’on pouvait espérer cet accident total, il n’y aurait qu’à le précipiter, il ne faudrait pas y résister. L’avènement du virtuel lui-même est notre apocalypse, et il nous prive de l’évènement réel de l’apocalypse. Mais telle est notre situation paradoxale, il faut aller jusqu’au bout du paradoxe. Virilio le fait d’ailleurs, tout en se réservant une ligne de repli… »

Trop habité par ce mirage que rien n’existe ou mort trop tôt pour voir le cauchemar numérique des mondialistes à l’œuvre, Baudrillard ne penserait peut-être pas comme cela aujourd’hui. Le virtuel nous prive de notre réaction, de notre protestation et de notre mobilisation. Il nous liquide, y compris au sens de Bauman. Mais il n’empêchera pas l’Apocalypse de se produire, pour qui a été écrite la sentence numérique du nombre de la bête. De ce point de vue nous sommes très mal barrés.

Rappelons que la cybernétique désigne en grec l’art de barrer — un bateau justement.

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