14/01/2021 (2021-01-14)
Par Joseph Stroberg
Les systèmes scolaires et « éducatifs » modernes ont largement démontré leur faillite sur de nombreux plans. Presque tous les pays (y compris en Occident) voient une proportion croissante d’élèves et d’étudiants abandonner avant terme leur formation scolaire ou leur cursus universitaire. Dans le même temps, les professeurs connaissent une augmentation des burn-out, des dépressions et des suicides. Et les écoles disposant de moyens technologiques à la pointe du « progrès » ne sont pas nécessairement les plus épargnées. Il existe plusieurs causes à cela, à des degrés divers suivant les nations et les cultures. Cependant, il sera probablement démontré un jour que toutes ces causes découlent d’une cause plus fondamentale : la diminution de la conscience morale au détriment d’une forte augmentation de la stimulation du désir.
Pour simplifier, la perte des valeurs et de la conscience morale que les religions procuraient n’a pas été remplacée par la science (qui est elle-même gangrénée par la corruption) ni par les dogmes de la laïcité. Par contre, au nom de la liberté individuelle, le marketing, la publicité omniprésente et l’industrie hollywoodienne ont fait et continuent de faire la promotion de la satisfaction des envies et des désirs personnels. Il ne faut donc pas s’étonner qu’après deux ou trois générations ayant subi un véritable lavage de cerveau propre à en extirper la conscience morale, les professeurs et les parents doivent maintenant faire face à un irrespect croissant et presque généralisé des règles, règlements, et lois (religieuses, politiques, sociales, éducatives, économiques ou de n’importe quelle autre nature). Et un tel irrespect se double bien sûr de celui envers les promoteurs ou les suiveurs de règles : les professeurs, les directeurs, les politiciens, les technocrates, et les fonctionnaires… Car la seule règle qui compte désormais pour la grande masse de nos jeunes, c’est celle de la satisfaction du désir, physique ou émotionnel.
Comme la nature du désir est de n’être jamais totalement satisfait, les jeunes générations se lancent dans une course éperdue à la recherche de sensations et d’émotions de plus en plus extrêmes, irrationnelles et irresponsables pour tenter de combler ce désir. Cependant, celui-ci est un puits sans fond et, comme le tonneau des Danaïdes, il ne peut jamais être pleinement rempli. Même les drogues et les sports extrêmes n’apportent qu’une satisfaction éphémère. Face à un tel vide existentiel, de nombreux jeunes finissent par se suicider ou par s’autodétruire d’une manière ou d’une autre. Les rares enfants et adolescents qui ne sont pas emportés par un tel flot décadent sont ceux dont la famille a su apporter des fondements solides, à la fois intellectuels, culturels, moraux et spirituels. De telles familles existent-elles d’ailleurs encore, lorsque la norme est celle des familles détruites par le divorce ou recomposées ?
Est-ce que les systèmes scolaires modernes (qui visent à fabriquer de bons citoyens ou de bons travailleurs aptes à répondre aux besoins des administrations, des patrons ou des multinationales) peuvent sortir de leur impasse actuelle et rénover l’école ? Ou bien faut-il faire marche arrière ? Ou encore est-il possible de trouver une nouvelle voie ? En fait, nous sortons généralement d’une impasse en faisant demi-tour ou marche arrière. Mais la jeunesse actuelle n’est plus celle d’il y a cinquante ans ou un siècle. Donc, même tenter de réparer les pots cassés est probablement aussi voué à l’échec. La seule solution est alors de chercher quelque chose de complètement nouveau. À cette fin, il est nécessaire de revoir et repenser les fondements de l’école en tant que potentiel formateur ou éducatif complémentaire de la cellule familiale.
Les jeunes générations ont beaucoup trop goûté à la liberté pour qu’un système coercitif fasse autre chose que les détruire. En conséquence, l’école future devra tenir compte de ce goût prononcé et devenir elle-même un espace de liberté. Elle ne doit plus être obligatoire, mais facultative. Et ceci est déjà une révolution face aux systèmes éducatifs actuels. De plus, pour réparer les dégâts subits par les lavages de cerveau guidés par l’économie et la finance, cette école devra trouver le moyen de remplacer le désir brut par autre chose qui puisse être comblé. Or, le désir ne peut être transmuté ou dépassé que par la volonté. Pour autant, la volonté n’est pas quelque chose de suffisamment puissant chez la grande majorité des êtres humains, surtout dans leur jeune âge, pour être capable de surmonter à elle seule la force du désir. Il n’est alors guère d’autre choix que de stimuler ce désir dans de nouvelles directions et de lui adjoindre cette fois des garde-fous que sont la raison (propre au mental) et la conscience morale (d’essence spirituelle).
Si la raison peut très bien être stimulée dans une « école », la conscience morale gagne, elle, à naître ou à être renforcée au sein même de la famille. Et si elle est innée, elle ne doit plus être éteinte par l’école ou par tout système prétendument éducatif. La raison ne doit alors que la servir, mais pas la remplacer. L’école doit devenir un complément optionnel de la famille, mais surtout pas un supplétif obligatoire sans lequel la vie adulte ne serait pas possible.
Avec les moyens technologiques modernes, surtout en matière informatique, chaque école future peut facilement devenir une base de connaissances de tous ordres à la libre disposition des plus jeunes, des adolescents et des jeunes adultes non encore entrés dans la vie sociale ou professionnelle. Elle pourrait inclure des livres sur papier, des documents électroniques, des vidéos sur différents supports, etc. en plus de matériel pédagogique et ludique plus concret et même d’accessoires propres au sport et aux différentes disciplines physiques. L’école future pourra ainsi stimuler l’épanouissement des jeunes sur les plans physique, émotionnel et mental, sans contrecarrer les acquis sur le plan spirituel et de la conscience. Il n’y aura plus lieu de fournir des cours magistraux devant des étudiants passifs, mais des ateliers, des séances de réflexion, d’entraînement, de remise en question, et d’apprentissage ludique ou au moins stimulateur de la curiosité et de la soif d’apprendre. Ainsi, les jeunes désireront d’eux-mêmes aller à l’école. Quant à la formation professionnelle, elle pourra être dispensée sur les lieux mêmes de la future profession envisagée, sous forme de parrainage ou à l’image de la relation maître-apprenti qui avait cours en d’autres temps.
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