Et si le RN à Matignon était le chaos dont Macron rêve ?

10/06/2024 (2024-06-10)

[Source : ripostelaique.com]

Par Charles Demassieux

J’aimerais avoir les emballements de jeunesse que les électeurs du Rassemblement national ont eus coup sur coup dimanche soir en découvrant le score de Jordan Bardella aux européennes puis, dans la foulée, en entendant le sordide de l’Élysée déclarer la dissolution de l’Assemblée nationale.

Sauf que, dans le cas d’une cohabitation, où Jordan Bardella serait logiquement Premier ministre, les changements de politique ne seraient qu’apparents.

Prenons par exemple la politique migratoire. À moins de quitter l’Europe – ce que ne veut absolument pas le RN – il sera presque impossible d’appliquer le programme préconisé par ce parti. Parce que : 

« Le Conseil européen joue un rôle important dans ce domaine car il fixe les priorités stratégiques. »

Et l’on sait que, tout comme dans celle des mœurs les plus folles qu’elle nous impose un peu plus chaque jour – malheur aux récalcitrants qui sont alors condamnés par la cour de justice de l’UE ! –, l’hydre européenne commande dans cette histoire. L’Italie de Giorgia Meloni l’a bien compris, qui s’en est remise au Conseil européen pour une politique migratoire plus « dure », c’est-à-dire un tout petit peu moins molle que d’habitude, avec son dernier « Pacte migratoire ». Lequel pacte a été massivement rejeté par les mouvements patriotiques des pays européens, ce qui est un signe de son inefficacité. Car c’est un pacte qui ne résout rien en profondeur, et les migrants continuent d’affluer en Europe. Et sans la pleine possession de ses frontières, la France continuera de se voir submergée.

Mais admettons que nous soyons totalement autonomes en matière d’immigration, il reste une barrière pour l’heure infranchissable : la justice française rouge, celle qui annule les expulsions à tour de bras. Or, pour changer de justice il faut changer de Constitution.

Certes, un député, tout comme le Président de la République, en a le droit, comme le stipule l’article 89 :

«  À l’origine d’une révision constitutionnelle, il peut y avoir :

  • soit une initiative du Président de la République, sur proposition du Premier ministre, et on est en présence d’un projet de révision,
  • soit une initiative de n’importe quel parlementaire, c’est-à-dire un député ou un sénateur, et on est en présence d’une proposition de révision. »

Cependant : 

« Une fois inscrit(e) à l’ordre du jour du Parlement, le projet ou la proposition de révision doit être voté(e) en termes identiques par l’Assemblée nationale et le Sénat. Il s’agit d’un vote à la majorité simple. À la différence de ce qui se passe pour les lois ordinaires, le Gouvernement ne peut pas donner à l’Assemblée nationale « le dernier mot » en lui demandant de statuer définitivement en cas de désaccord avec le Sénat. C’est dire que chaque assemblée dispose donc d’une sorte de droit de veto, toute révision étant bloquée si l’Assemblée ou le Sénat s’y oppose. »

https://www.conseil-constitutionnel.fr/la-constitution/peut-on-modifier-la-constitution

Il reste le référendum, mais je ne vois pas Macron demander son avis au peuple qu’il déteste souverainement, ce que le peuple lui rend bien, il faut l’admettre !

Autre écueil, si par aventure le RN gagne les prochaines législatives : le Président de la République demeure le chef des Armées, même si la force armée est alors de la compétence du gouvernement dans le cas d’une cohabitation. Cependant, la force de dissuasion nucléaire demeure aux mains du Président, qui conserve par ailleurs la mainmise sur les Affaires internationales, ce qui signifiera que la politique très dangereuse à l’égard de la Russie ne changera pas beaucoup. Sans parler du fait que la France, en bonne élève de l’Europe inféodée à Washington, suivra la voix de son maître. Et ce n’est pas Bardella, avec ses petits bras musclés, qui tiendrait tête aux États-Unis ! Au passage, Zemmour ferait pareil…

De plus, s’il était mécontent du résultat, Macron n’aurait qu’une année à attendre pour dissoudre à nouveau l’Assemblée, ce qui nous ramènerait aux heures instables de la IVe République, auxquelles le général de Gaulle avait voulu mettre un terme avec la Ve.

Maintenant, il ne faut pas se mentir : sans un coup de force militaire et la loi martiale, il n’y a aucune chance pour que notre pays se relève des enfers où il a été plongé. Dit plus poétiquement : la France est Eurydice et nous, les patriotes, ne sommes que des Orphée malheureux.

Il faut hélas le reconnaître, les seules police et gendarmerie ne sont plus de taille à lutter contre les arsenaux des cités diversitaires. Des cités qui ne demandent qu’une toute petite étincelle pour s’enflammer et ce, en bien pire qu’à l’automne 2005 ou l’été 2023. L’arrivée du RN au pouvoir pourrait être cette étincelle. Ensuite, Macron viendrait en sauveur et, pourquoi pas, s’arrangerait pour garder le pouvoir, en rétablissant par exemple le septennat, après avoir, oh cynisme, modifié la Constitution !  Tout est possible avec ce sournois.

Donc, en lieu et place d’une dissolution de l’Assemblée, c’est tout le système qu’il faut dissoudre. Mais là, je m’égare dans des divagations qui, sauf miracle, ont peu de chances d’advenir.

Enfin, cela pourrait peut-être nous procurer une illusion de bonheur patriotique pendant quelques jours, mais la victoire du RN n’apporterait rien en profondeur, sinon un chaos dont Macron se satisferait avec une gourmandise psychopathique.

Comme je l’écris souvent, le seul bulletin valable pour sauver la France est en métal et prêt à sortir d’un canon…

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