Électrohypersensibilité : un handicap souvent mépris pour un désordre psychiatrique

30/11/2022 (2022-11-30)

[Source : maisonsaine.ca]

Par André Fauteux

En bref

  • L’EHS est reconnue comme un handicap et une maladie professionnelle.
  • Un diagnostic médical officiel de l’EHS conduirait-il à davantage ou à moins de traitements psychiatriques ?
  • Le diagnostic psychiatrique résulte d’un manque de reconnaissance médicale.
  • La Suède n’est pas un paradis pour les électrohypersensibles.
  • Absence d’accommodements malgré la reconnaissance du handicap.
  • Contexte historique (de Tesla à Schliephake et Bevington).
  • Lignes directrices EUROPAEM 2016 pour prévenir, diagnostiquer et traiter les bioeffets des CEM.
  • L’avis de l’OMS sur l’EHS n’a pas été mis à jour depuis 2005.
  • Anxiété et dépression : cause ou conséquence de l’exposition aux CEM ?
  • Biomarqueurs de Belpomme et conclusion des Académies nationales des sciences américaines sur les symptômes des diplomates.
Jean Gagnon mesurant les harmoniques entre le câble neutre (de retour) et la mise à la terre.

[Voir aussi :
Dossier 5G et ondes pulsées]

C’est l’automne 2010 et le Québécois Jean Gagnon vient d’être interné contre son gré pendant neuf jours à l’hôpital de Montmagny. « Parlez-moi de vos ondes », demande un juge qui doit décider si Gagnon sera maintenu en observation 21 jours de plus, comme l’a demandé un psychiatre qui a conclu qu’il avait « des délires psychotiques concernant des ondes maléfiques ».

Gagnon s’était présenté volontairement au service des urgences de l’hôpital pour savoir pourquoi il souffrait de douleurs aiguës à la tête et aux jambes. « J’avais l’impression que ma tête était dans un étau. Cela a commencé lorsque je faisais cuire des tomates sur les quatre ronds de ma cuisinière », a expliqué le mécanicien à la retraite dans une interview. 

Lorsque ses symptômes ont commencé, il ne savait rien des champs électromagnétiques (CEM) produits par les technologies électriques filaires et sans fil. C’est après avoir découvert et parlé de leurs effets possibles sur la santé qu’il a été traité comme un malade mental.

« Ils m’ont donné de l’Haldol, de l’Ativan et du Seroquel lorsque je suis entré dans le service psychiatrique, se souvient-il. Heureusement, c’est la seule fois où j’ai accepté de cette médication. Je n’aurais jamais pu prononcer un discours cohérent au tribunal pour assurer ma défense. Après 15 minutes d’audience, le juge a conclu que je n’avais pas de discours délirant et a ordonné ma libération sur-le-champ. J’avais vraiment peur de retourner à l’hôpital. À partir de ce moment-là, j’ai concentré toute mon énergie à comprendre la situation. Aujourd’hui, 12 ans plus tard, j’ai compris que la plus grande source de ce poison est le réseau électrique. »

Gagnon remercie notamment un scientifique de Santé Canada qui lui a recommandé de lire un rapport de la Commission canadienne des droits de la personne intitulé Le point du vue médical sur les sensibilités environnementales, rédigé par Margaret E. Sears, Ph.D., en mai 2007.

Deux médecins spécialistes de l’environnement ont confirmé plus tard que ses années d’exposition aux gaz d’échappement et aux solvants l’avaient rendu d’abord hypersensible aux produits chimiques, puis aux CEM. Son asthme professionnel déclenché par des sensibilités chimiques l’avait amené à cesser de travailler comme mécanicien et à devenir directeur du service après-vente d’une concession d’équipements électriques.

Gagnon a fini par découvrir que sa maison, sa propriété et son quartier sont fortement pollués par les CEM. « Grâce à tous ceux qui s’impliquent dans ce dossier depuis des décennies, mes connaissances ont beaucoup évolué, me permettant de mettre en évidence des sources de CEM insoupçonnées par la majorité des gens. Ces sources sont malheureusement contestées publiquement et juridiquement par les pollueurs qui les génèrent, qu’il s’agisse des fournisseurs d’électricité « sale », notamment les hautes fréquences transitoires et les harmoniques, les courants telluriques parasites et le scintillement des appareils fluorescents et autres appareils numériques, ou des fournisseurs de télécommunications sans fil. Tous refusent d’admettre et de corriger la situation. » (Voici des vidéos qui en témoignent.)

Reconnu comme un handicap et une maladie professionnelle

Et ce, malgré le fait que de plus en plus de personnes se rendent compte que leur bien-être dépend de leur exposition (ou absence d’exposition) aux CEM provenant des technologies avec et sans fil. La plupart se font dire que tout cela est dans leur tête par les professionnels de la santé et leurs connaissances. Et plusieurs ont été internés comme Gagnon par des médecins ignorant l’électrohypersensibilité (EHS) qui a été reconnue mondialement comme un handicap. En 2000, le Conseil nordique des ministres de pays comme la Norvège et la Suède a reconnu l’intolérance électromagnétique comme une maladie professionnelle. Tout en la classant dans la catégorie « Affections dont l’étiologie est attribuée à des facteurs environnementaux – mécanismes non encore compris », il a confirmé que ses « symptômes disparaissent dans des environnements non électriques ».

Jean Gagnon le confirme : « Il ne fait aucun doute qu’après avoir remplacé mon téléphone numérique (DECT) sans fil par un téléphone à fil ainsi que la lampe fluorescente compacte de ma lampe de bureau par des ampoules ordinaires, ma santé s’est améliorée. J’ai également réduit mon exposition aux téléphones portables et au Wi-Fi et j’évite les rayonnements des fours à micro-ondes. Avec quelques autres petites attentions à l’égard de l’électricité sale, ces changements bénéfiques ont réduit la fréquence et l’intensité de mes symptômes », qui comprennent également des acouphènes et des problèmes de concentration, a-t-il écrit dans un témoignage de 2013 devant le groupe d’experts de la Société royale du Canada chargé d’examiner le code de sécurité 6 de Santé Canada (recommandant des limites pour l’exposition humaine aux CEM de radiofréquence). 

En décembre 2005, un avis de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur l’hypersensibilité électromagnétique (HSEM) a conclu qu’il ne s’agissait pas d’un diagnostic médical officiel. Certains affirment que la reconnaissance du handicap est suffisante pour fournir des aménagements appropriés et éviter que les victimes soient internées en psychiatrie, tandis que d’autres disent que la classer comme une maladie médicale est préférable pour éviter de telles erreurs médicales. Ce débat fait particulièrement rage en Suède.

Un diagnostic médical officiel conduirait-il à davantage de traitements psychiatriques ?

Le neuroscientifique suédois Olle Johannson, qui, à la fin des années 1970, a inventé le terme « dermatite des écrans » pour expliquer les lésions cutanées dont souffrent les travailleurs électrosensibles assis quotidiennement devant des écrans d’ordinateur, a expliqué sa position dans un article de 2006 intitulé Electrohypersensitivity : State-of-the-Art of a Functional Impairment : « En Suède, les déficiences sont considérées du point de vue de l’environnement. Aucun être humain n’est en soi handicapé, ce sont plutôt des lacunes dans l’environnement qui causent la déficience (comme l’absence de rampes pour une personne en fauteuil roulant ou des pièces électrosanitisées pour une personne électrohypersensible). Cette vision de la déficience liée à l’environnement signifie en outre que, même si l’on ne dispose pas d’une explication scientifique complète de la déficience électrohypersensible, et contrairement aux désaccords au sein de la société scientifique, la personne électrohypersensible doit toujours être rencontrée de manière respectueuse et avec tout le soutien nécessaire dans le but d’éliminer la déficience. Cela implique que la personne électrohypersensible doit avoir la possibilité de vivre et de travailler dans un environnement électrosanitaire. Ce point de vue peut être pleinement motivé par rapport aux lois et règlements nationaux et internationaux actuels sur le handicap, y compris les 22 règles standard de l’ONU et le plan d’action suédois pour les personnes handicapées… »

Récemment, Johansson m’a envoyé un commentaire d’un vicaire suédois, Johann Bonander, qui a travaillé avec des associations de personnes handicapées en tant que chef de projet aux services sociaux de la Ville de Stockholm, de 1999 à 2006. M. Bonander partage l’avis de M. Johansson selon lequel le sort des personnes atteintes de l’HSEM pourrait être bien pire si cette maladie était un diagnostic médical officiel. Il a écrit : « Selon l’OMS et la conférence de Prague de 2004 (Atelier international sur l’hypersensibilité aux champs électromagnétiques), le résultat sera probablement que le diagnostic médical et la perspective de la maladie que l’on visait se retrouveront dans le catalogue des diagnostics psychiatriques, c’est-à-dire que l’on dira que la personne électrohypersensible imagine ses symptômes. Olle Johansson, alors à l’Institut Karolinska de Stockholm, en Suède, a assisté à cette conférence. Il m’a raconté qu’au cours de cette conférence, certains médecins présents ont exigé que les personnes atteintes d’électrohypersensibilité soient désignées comme des patients et que plusieurs de ces médecins voulaient également désigner l’électrohypersensibilité comme un trouble psychologique/psychiatrique. Selon Olle Johansson, seules deux personnes ont protesté contre cette décision : le Dr Bruce Hocking d’Australie, et lui-même. »

Le diagnostic psychiatrique résulte d’un manque de reconnaissance médicale

Mais l’ancienne journaliste suédoise Mona Nilsson, qui préside la Fondation suédoise pour la radioprotection, accuse l’approche de Bonander et Johansson d’avoir laissé tomber la communauté EHS. « Olle Johansson dessinait une image erronée de l’EHS en Suède et de la déficience fonctionnelle lorsqu’il écrivait (dans le document Electrohypersensitivity: a functional impairment due to an inaccessible environment, publié en 2015) : « Le point de vue suédois offre aux personnes atteintes de cette déficience une protection juridique maximale. » Les seuls à bénéficier de cet argument sont les industriels qui s’opposent systématiquement à toute reconnaissance des effets sanitaires de l’exposition aux CEM, qu’il s’agisse de cancer, d’EHS ou d’autres maladies. Les personnes souffrant d’HSEM, qui devraient être appelées « maladies dues aux CEM », ne reçoivent actuellement que peu ou pas d’aide de la part des autorités suédoises pour se protéger de la cause de leur maladie, tant qu’elles n’ont pas reçu de diagnostic d’un médecin indiquant que leurs symptômes/maladies sont causés par les rayonnements micro-ondes, les champs magnétiques ou électriques. Une personne qui tombe malade à cause d’une exposition aux CEM et qui cherche de l’aide auprès d’un médecin obtient généralement un diagnostic de maladie mentale. Une personne qui tombe malade à cause d’une antenne relais située près de son domicile ne peut espérer aucune aide de la part des autorités. Elles affirment qu’on ne peut pas tomber malade à cause des radiations des antennes relais. Elles disent que la communauté médicale ne reconnaît pas cette maladie et qu’il n’existe aucune preuve scientifique permettant d’établir un lien entre une maladie quelconque et l’exposition aux CEM.

En Suède, les personnes souffrant de HSEM se voient refuser des droits fondamentaux parce qu’elles ne disposent pas d’un diagnostic médical attestant que leur mauvaise santé est causée par les CEM. Il n’y a pas de contradiction entre le diagnostic médical et la déficience fonctionnelle – au contraire, la plupart des déficiences fonctionnelles sont fondées sur un diagnostic médical, tout comme l’EHS. »

Olle Johansson a décliné notre invitation à faire des commentaires. 

La Suède n’est pas un paradis pour les électrohypersensibles

Dans une lettre que Nilsson a envoyée à ses lecteurs le 31 juillet 2021, elle a encore critiqué l’approche de Johansson :  « Olle Johansson n’a cessé pendant de nombreuses années de s’opposer à un diagnostic médical pour les symptômes et les problèmes de santé causés par les CEM. Au lieu de cela, il a affirmé que le diagnostic de « déficience fonctionnelle » est un diagnostic miracle qui résoudra tous les problèmes pour tout le monde, en particulier pour les personnes qui sont gravement malades à cause de l’exposition aux CEM toujours plus nombreux dans notre environnement. À de nombreuses reprises, il a décrit la Suède comme un paradis pour les personnes souffrant d’électrohypersensibilité (EHS), où la déficience fonctionnelle est censée être pleinement reconnue comme un diagnostic pour l’EHS. Johansson met même en garde contre le danger de la reconnaissance médicale en écrivant : « Dans le cas où les dangers des rayonnements électromagnétiques et les effets sur la santé sont remis à l’establishment médical et à Big Pharma, cela peut s’avérer être une arme de plus à utiliser contre les malades, plutôt que de soutenir leurs demandes légitimes. » C’est un pur non-sens au regard de la réalité », estime Nilsson.

Elle est plutôt d’accord avec les médecins suédois Lena Hedendahl et Lennart Hardell qui ont écrit avec leur collègue Michael Carlberg : « Il est important de travailler à l’obtention de critères de diagnostic objectifs pour la HSEM et de la faire reconnaître et accepter officiellement comme une hypersensibilité, une maladie causée par l’exposition aux CEM. Il est donc nécessaire de donner une classification internationale des maladies à la HSEM. Si et quand l’EHS sera acceptée comme un diagnostic par la société et le corps médical, des mesures pourront être prises spécialement en considération pour ce groupe de personnes atteintes d’EHS en ce qui concerne les soins de santé, le logement, l’école et le travail. »

Absence d’accommodements malgré la reconnaissance du handicap

La rédactrice médicale américaine Susan Foster, experte de longue date des bioeffets des CEM, est d’accord avec Mona Nilsson : « En Suède, la déficience fonctionnelle ne permet pas d’accorder des avantages financiers aux personnes handicapées. Ces personnes restent donc dans des conditions médicales et de logement déplorables, avec peu d’options. Aux États-Unis, nous n’avons pas encore officiellement pris en charge les personnes souffrant d’EHS/EMS, même si l’U.S. Access Board – l’agence fédérale indépendante qui donne des instructions aux autres agences fédérales sur la manière d’accueillir les personnes handicapées – classe cette constellation de symptômes neurologiques et immunologiques comme des sensibilités électromagnétiques, ou EMS, depuis 20 ans. Nous savons qu’entre 0,5 et 30 % de notre population se situe quelque part dans le spectre de l’EMS/EHS. L’incapacité d’un pays à répondre aux besoins des personnes souffrant d’un handicap qui se trouve être gênant pour l’industrie des télécommunications définit les priorités de ce pays. Cela inclut les États-Unis. Les personnes souffrant de ce handicap sont une vérité qui dérange. »

Contexte historique 

Affectant les gens à des degrés divers, l’EHS a notamment été expérimentée au début des années 1900 par l’inventeur du courant alternatif, Nikola Tesla, qui souffrait d’une « sensibilité aiguë de tous les organes des sens ». L’EHS a été décrite médicalement pour la première fois sous un autre nom en 1932 par le médecin allemand Erwin Schliephake, qui utilisait la thérapie par ondes courtes dans sa pratique médicale. « Il a publié dans un hebdomadaire médical allemand des données scientifiques sur ses patients qui présentaient des symptômes inhabituels autour des tours de radio. Il a appelé cette affection « maladie des micro-ondes » ou « maladie des ondes radio », explique l’ingénieur californien Jeromy Johnson, consultant en solutions CEM qui se remet d’une EHS. Les symptômes qu’il a observés étaient les suivants : maux de tête au point d’être intolérables; fatigue importante pendant la journée; sommeil agité la nuit; forte susceptibilité aux infections. »

Michael Bevington, enseignant britannique, n’avait jamais entendu parler de l’HSEM avant de développer « des vertiges, des nausées, des maux de tête, des palpitations cardiaques, des douleurs dans tout le corps, etc. » après l’installation d’un système Wi-Fi sur son lieu de travail. Depuis fin 2008, il est président du conseil d’administration de l’association caritative britannique Electrosensitivity UK, qui aide les personnes atteintes d’EHS et informe le public sur les risques sanitaires de l’exposition aux CEM. Dans un article publié en 2019 dans le Journal of Environment and Health Science, Bevington écrit que la prévalence de l’EHS « se situe entre environ 5,0 et 30 % de la population générale pour les cas légers, entre 1,5 et 5,0 % pour les cas modérés et < 1,5 % pour les cas graves ».

Lignes directrices EUROPAEM 2016 pour prévenir, diagnostiquer et traiter les bioeffets des CEM

En effet, dans le monde sans fil d’aujourd’hui, des millions de personnes se plaignent de l’HSEM, mais peu de médecins savent qu’en 2106, l’Académie européenne de médecine environnementale a publié les Lignes directrices pour la prévention, le diagnostic et le traitement des problèmes de santé et des maladies liés aux CEM. Ses 15 auteurs ont déclaré : « Nous recommandons de traiter cliniquement l’EHS comme faisant partie du groupe des maladies chroniques multisystèmes, tout en reconnaissant que la cause sous-jacente reste l’environnement… La principale méthode de traitement devrait principalement se concentrer sur la prévention ou la réduction de l’exposition aux CEM, c’est-à-dire la réduction ou l’élimination de toutes les sources d’exposition élevée aux CEM à la maison et sur le lieu de travail (ainsi que) dans les écoles, les hôpitaux, les transports publics et les bibliothèques afin de permettre aux personnes souffrant d’HSEM de les utiliser sans entrave (mesure d’accessibilité). Si une exposition nuisible aux CEM est suffisamment réduite, l’organisme a une chance de se rétablir et les symptômes de l’HSEM seront réduits, voire disparaîtront. De nombreux exemples ont montré que de telles mesures peuvent s’avérer efficaces. Pour accroître l’efficacité du traitement, il convient également de s’attaquer au large éventail d’autres facteurs environnementaux qui contribuent à la charge corporelle totale. Tout ce qui favorise l’homéostasie augmentera la résilience d’une personne contre la maladie et donc contre les effets néfastes de l’exposition aux CEM. »

Ils citent notamment la revue de la littérature de Martin Pall parue en 2015 dans le Journal of Chemical Neuroanatomy et intitulée Microwave frequency electromagnetic fields (EMFs) produce widespread neuropsychiatric effects including depression. Professeur émérite de biochimie à l’Université d’État de Washington, Pall écrit : « La littérature soviétique et occidentale montre qu’une grande partie de l’impact des expositions aux micro-ondes non thermiques chez les animaux de laboratoire se produit dans le cerveau et le système nerveux périphérique, de sorte que l’histologie et la fonction du système nerveux présentent des changements divers et substantiels. Ceux-ci peuvent être générés par des rôles d’activation du canal calcique voltage-gated (VGCC), produisant une libération excessive de neurotransmetteurs/neuroendocrines ainsi qu’un stress oxydatif/nitrosatif et d’autres réponses. Des études sur le polymorphisme génétique ont montré que l’activité excessive du VGCC joue un rôle dans la production de changements neuropsychiatriques chez l’homme. »

L’avis de l’OMS sur l’EHS n’a pas été mis à jour depuis 2005

Plusieurs experts indépendants des effets biologiques de l’exposition chronique aux CEM souhaitent que l’OMS mette à jour son document d’information de 2005 et reconnaisse ce qu’elle appelle l’hypersensibilité électromagnétique (HSEM) comme une maladie médicale sur la base des données scientifiques les plus récentes. L’OMS a écrit dans cet avis vieux de 17 ans : « La majorité des études indiquent que les personnes souffrant d’HSEM ne peuvent pas détecter l’exposition aux CEM de manière plus précise que les personnes ne souffrant pas d’HSEM, indique le document d’information. Des études en double aveugle bien contrôlées et menées ont montré que les symptômes n’étaient pas corrélés à l’exposition aux CEM. »

L’OMS poursuit : « Il a été suggéré que les symptômes ressentis par certaines personnes souffrant d’HSEM pouvaient provenir de facteurs environnementaux sans rapport avec les CEM. Il peut s’agir, par exemple, du scintillement des lampes fluorescentes, de l’éblouissement et d’autres problèmes visuels avec les écrans plats, et d’une mauvaise conception ergonomique des postes de travail informatiques. Parmi les autres facteurs qui peuvent jouer un rôle, citons la mauvaise qualité de l’air intérieur ou le stress sur le lieu de travail ou dans l’environnement de vie. Certains éléments indiquent également que ces symptômes pourraient être dus à des troubles psychiatriques préexistants ainsi qu’à des réactions de stress dues à l’inquiétude concernant les effets des CEM sur la santé, plutôt qu’à l’exposition aux CEM elle-même. »

Anxiété et dépression : cause ou conséquence de l’exposition aux CEM ?

Cependant, un avis du gouvernement français sur l’EHS publié en 2018 était plus nuancé : « les troubles psychiatriques ne sont pas plus fréquents chez ces personnes que dans la population générale. En conclusion, le niveau de preuve est suffisant pour dire que – dans l’EHS, comme dans de nombreux autres troubles – il existe une composante psychologique importante. Celle-ci se caractérise par l’anxiété et/ou la dépression, qui sont plus fréquentes et plus intenses que dans les populations témoins, sans qu’il soit possible de dire actuellement si ces états sont la cause ou la conséquence de l’EHS. » 

Résultats de Belpomme et des Académies nationales des sciences

Plus récemment, en 2021, l’oncologue français Dominique Belpomme a pris la tête d’un groupe de 32 experts internationaux demandant à l’OMS de reconnaître l’EHS comme un trouble neuropathologique distinct et de l’inclure dans sa classification internationale des maladies sur la base de biomarqueurs moléculaires et de l’imagerie médicale. En 2017, le Dr Gunnar Heuser a publié ses résultats d’examens d’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) chez des personnes se déclarant EHS. Des anomalies cérébrales ont été constatées chez les 10 sujets qui ont subi le scanner. « Aussi utile que ce résultat puisse être pour prouver l’existence de l’électrosensibilité, a expliqué Susan Foster, l’IRM fonctionnelle est un test qui peut accélérer les symptômes et les sensibilités EHS/EMS chez les patients, il faut donc faire preuve d’une extrême prudence si l’on envisage d’utiliser l’IRMf à des fins de diagnostic. » Des scans similaires ont contribué à convaincre les auteurs d’un rapport publié en 2020 par les Académies nationales des sciences américaines que les symptômes ressentis par les diplomates américains à Cuba étaient « très probablement causés » par des armes à micro-ondes dirigées.

En 2004, les docteurs Gunnar Heuser et Susan Foster ont mené une étude pilote de scanner cérébral SPECT sur six pompiers qui avaient été exposés à une tour cellulaire 2G devant leur poste pendant cinq ans. Des lésions cérébrales ont été constatées chez les six hommes. Quelque 23 des 25 pompiers qui se relayaient dans la caserne ont présenté des symptômes neurologiques indésirables après l’activation de la tour.

Gagnon espère que la précaution prévaudra

Jean Gagnon espère que les autorités sanitaires étudieront de plus près les dernières avancées scientifiques, comme les résumés de recherche publiés par Henry Lai, professeur émérite de bio-ingénierie à l’Université de Washington

« Personnellement, conclut Jean Gagnon, je maintiens qu’il faut informer, éduquer, refuser et dénoncer ces poisons, et éviter autant que possible de s’exposer. Il ne faut pas hésiter à demander de l’aide et à partager ses expériences. Il ne s’agit pas d’une maladie mentale, mais plutôt d’une maladie environnementale si tant est que ce soit une maladie. Pour moi, c’est avant tout une intolérance à un produit toxique. La seule solution est de s’en éloigner ou de se battre pour arrêter l’exposition et faire reconnaître le handicap ET la maladie EHS. »

Pour en savoir plus, lisez l’article de Michael Bevington intitulé Proof of EHS beyond all reasonable doubt, commentaire publié dans Rev Environ Health 2021; https://doi.org/10.1515/rev

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