PHILIP K. Dick et le Grand Reset en Occident

27/11/2023 (2023-11-27)

[Publication initiale : euro-synergies]

Par Tetyana Popova-Mozovska

Préface de Nicolas Bonnal

Dans les années 1970, on évoquait au lycée un mage, un gourou, un écrivain qui sortait des catégories traditionnelles et scolaires mais n’entrait pas dans les nouvelles. Il faisait douter de la réalité du monde, de nos perceptions, et de notre humanité limitée à la consommation et à la perception de news. En outre il était perçu comme le prophète d’un futur effrayant et qui était déjà là. Bref, il était un oracle. Si Dostoïevski, Edgar Poe ou Balzac nous décrivaient un éternel présent qui venait du passé, cet écrivain mythique nous décrivait un éternel présent qui venait du futur. On le jugerait comme prophète et non comme styliste ou « réaliste ».

Cet écrivain bien sûr est Philip K. Dick — et mes amis des sections scientifiques le considéraient comme un génie réservé à une minorité choisie. On citait surtout « Ubik » dont le nom résonne comme celui d’un dieu de l’étrange. Après des essais de lecture infructueux, je finis par découvrir ce monstre littéraire en 1982 grâce au film « Blade runner ». Échec commercial à sa sortie, cet opus fasciné (et pas seulement fascinant) devint ensuite le film-culte par excellence. Les puristes reprochèrent plein de choses à une œuvre qui dessinait les grands traits de notre époque mondialiste, dystopique et travaillée par l’image. L’altération de la réalité par les simulacres était là, tout comme la technologie dangereuse, la difficulté de définir l’homme dans le monde capitaliste unifié et la fabrication artificielle par les images d’une mémoire collective planétaire effaçant l’expérience individuelle. Cependant la lecture de Dick me demeurait difficile. J’attendis d’autres films « Total recall », « Pay check », « Minority report » pour avoir une idée plus précise de cet univers « riche et étrange », digne des visions de Shakespeare et du baroque du Quichotte. Le futur dystopique, la dégradation d’un paysage planétaire déglingué et surtout la fabrication d’une mémoire artificielle me semblent être des axes essentiels des écrits de Dick. Et c’est là qu’est intervenue Tetyana, passionnée et sérieuse.

Sérieusement et systématiquement Tetyana a relu ou lu tous les ouvrages de Dick susceptibles d’expliquer l’étrange réalité dans laquelle nous sommes plongés. Depuis un an, nous avons en effet assisté à une accélération de cette réalité marquée par le totalitarisme technologique et l’effondrement énergétique/économique ; tout cela grâce au virus et aux mesures comme ce Reset qui l’accompagne, sorti de cerveaux planétaires et dangereux. Bref, nous sommes rentrés au moins dans les grandes villes dans l’univers de Dick — un univers souvent comique et menaçant, comme dit notre auteure.

Tetyana a compulsivement déniché les textes oubliés ou peu lus qui dessinent la réalité prévue par notre étrange prophète. Mais en bonne chrétienne elle a aussi insisté sur les contenus spirituels et « chrétiens-primitifs » de l’œuvre de Dick, dimension que beaucoup de critiques ont négligée ou oubliée. De ce point de vue ce grand auteur pourrait être aussi un écrivain du « 8ème jour » quand nous serons réveillés du long sommeil impérial et ferré. Ce livre s’adresse donc à une élite « éveillée », et qui s’ignore encore.

Éditions Tetyana, Amazon.fr. À paraître chez Avatar.

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