Eric Zemmour : Tout est-il foutu ?

Après la mort de Thomas, vous êtes nombreux à vous demander, à me demander si tout n’est pas foutu. J’ai un message d’espoir pour vous.
Éric Zemmour
[Source : Éric Zemmour]
[Voir aussi :
]
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Après la mort de Thomas, vous êtes nombreux à vous demander, à me demander si tout n’est pas foutu. J’ai un message d’espoir pour vous.
Éric Zemmour
[Source : Éric Zemmour]
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]
Par Nicolas Bonnal
La puissance US a changé de forme — et c’est ancien : cela date des années soixante, quand « le capital devient image » (Debord) et quand le solide devient du liquide (revoyez les pages de Guénon sur l’élision de la solidification). Je pense aussi à Baudrillard répondant et humiliant presque Guillaume Faye sur les USA comme facteur de décadence (on croirait voir l’extraordinaire ayatollah imprécateur dans le premier Leslie Nielsen ou de déblatérations de Mao sur le tigre de papier vielles de huit décennies). Cette décadence, cette destruction créatrice, c’est leur fonds de commerce. Ils dévastent le monde (la maçonnerie comme éternel champ de ruines) depuis deux siècles et, comme dit Tocqueville, ils délaissent le corps et s’attaquent à l’âme. La culture et la technologie sont américaines, les « âmes » sont américaines, tout devient américain et jamais on n’a eu autant de milliardaires en dollars dans le showbiz US. 43 000 dollars le siège de concert de Taylor Swift, vous savez qui sait ? Lire et relire ce texte de Robert Stark sur la non-apocalypse et l’apocalypse durable, la dystopie de Dick avec des présidents octogénaires (Trump, Biden), clownesques, qui font rire tout le monde mais font surtout le boulot des maîtres-marionnettistes.
Triomphe US ? Lisez Charles Sannat qui rappelle ici :
« Aux États-Unis, les importations en provenance du Mexique dépassent celles de Chine ! C’est un chiffre très important qui devrait faire la “une” des JT et des informations économiques parce que cela matérialise un changement majeur dans l’organisation du monde. Les importations américaines en provenance de Chine s’effondrent et celles en provenance du Mexique viennent de dépasser celles en provenance de Chine ! La démondialisation ne veut pas dire que les États-Unis rapatrient toutes les productions sur le sol étatsunien, mais relocalisent les anciennes délocalisations chinoises, dans des pays nettement plus “amis”, comme le Mexique ou l’Inde. Les États-Unis sont en train de réorganiser le commerce mondial en supprimant la Chine de cette nouvelle carte des productions industrielles. »
Le pognon est américain, le business est américain, les fonds de pension sont américains (merci Mr Fink au roc noir qui affamez et allez dépeupler notre Europe plus vite que SON NOMBRE), la monnaie reste américaine, la dette américaine invraisemblable reste soutenable (le pauvre John T. Flynn la dénonçait il y a cent, alors…), et surtout les décisions sont américaines. Et pendant que les antisystèmes battent le tam-tam façon Bandoeng (qui aboutit à vingt ans de catastrophes économiques et politiques, en appliquant le socialisme et le fabianisme des britanniques…), le big business US isole la Russie (qui a parlé de lui faire la guerre ? Elle sert de repoussoir depuis 1815, voyez Custine) muée en station-service définitive de la Chine, soumet et affame l’Europe, et rameute le tiers-monde sur un ton évangélique : vous êtes contre moi ou pour moi. Biden le gâteux a fait élire Milei rabbin amateur et larbin libertarien (pour moi qui ai adoré le sujet avec Shaffer Butler, Murray Rothbard ou Ralph Raico, quelle dérision tout de même) ou le socialo Lula domestique des labos US (dix vaccins ou pas de sécu…), il a soumis la colonie Europe comme personne, et il contrôle son Inde comme un gourou. Badhrakumar a eu l’honnêteté de le reconnaître et on lui saura gré : Modhi homme de l’Inde cashless grâce à Amazon, homme qui paie en roupies de sansonnet le pétrole russe pour le refiler aux Européens ensuite…
Oublions les pauvres et les drogués US (il n’y en a jamais eu peut-être ?). Croissance économique au dernier trimestre ? 5 % — et toujours de la même bonne vieille façon Us qui date de Roosevelt et de Keynes : dépenses, dettes, dépenses. Le reste du monde marche à la baguette (magique) et les indices (sic) boursiers continuent de monter. Ils ont monté de 4000 % depuis 1980, pour les distraits que cela intéresse (l’or a triplé pendant ce laps de temps). Ils ont quintuplé depuis 2009…
Mais continuons. Sur Zerohedge.com on lit ceci :
« Ruchir Sharma, président de Rockefeller International : Il s’agit d’un tournant historique : la montée de la Chine en tant que superpuissance économique s’inverse. La plus grande histoire mondiale du dernier demi-siècle est peut-être terminée. Après avoir stagné sous Mao Zedong dans les années 1960 et 1970, la Chine s’est ouverte au monde dans les années 1980 — et a décollé au cours des décennies suivantes. Sa part dans l’économie mondiale a presque décuplé, passant de moins de 2 pour cent en 1990 à 18,4 pour cent en 2021. Aucun pays n’a jamais connu une croissance aussi rapide. Puis le renversement a commencé. En 2022, la part de la Chine dans l’économie mondiale a légèrement diminué. Cette année, il diminuera encore plus sensiblement, à 17 pour cent. Cette baisse de 1,4 pour cent sur deux ans est la plus importante depuis les années 1960. »
La suite est tout aussi peu onirique :
« Pour mettre cela en perspective, l’économie mondiale devrait croître de 8 000 milliards de dollars en 2022 et 2023 pour atteindre 105 000 milliards de dollars. La Chine ne représentera rien de ce gain, les États-Unis en représenteront 45 pour cent et les autres pays émergents, 50 pour cent. La moitié des gains pour les pays émergents proviendra de seulement cinq de ces pays : l’Inde, l’Indonésie, le Mexique, le Brésil et la Pologne. C’est un signe frappant d’éventuels changements de pouvoir à venir… Mais le taux de croissance potentiel réel à long terme de la Chine — la somme des nouveaux travailleurs entrant sur le marché du travail et de la production par travailleur — est désormais plutôt de l’ordre de 2,5 pour cent. »
La Chine va connaître un effondrement démographique :
« Le baby bust en cours en Chine a déjà réduit sa part de la population mondiale en âge de travailler d’un sommet de 24 pour cent à 19 pour cent, et elle devrait tomber à 10 pour cent au cours des 35 prochaines années. Avec une part décroissante de la main-d’œuvre mondiale, une part plus faible de la croissance est presque certaine. »
Dernier coup de poignard de cet hindou (vive les Brics tout de même — avec des amis comme ça…) :
« En termes nominaux en dollars, le PIB de la Chine est en passe de diminuer en 2023, pour la première fois depuis une forte dévaluation du renminbi en 1994. Compte tenu des contraintes qui pèsent sur la croissance du PIB réel, dans les années à venir, Pékin ne pourra regagner sa part mondiale qu’avec une hausse de l’inflation ou de la valeur du renminbi — mais ni l’une ni l’autre n’est probable. La Chine est l’une des rares économies à souffrir de déflation, et elle est également confrontée à un effondrement immobilier alimenté par la dette, qui conduit généralement à une dévaluation de la monnaie locale. Les investisseurs retirent de l’argent de Chine à un rythme record, augmentant ainsi la pression sur le renminbi. »
On a vu les Chinois très discrets à San Francisco. Et les massacres de Gaza (vive ce Hamas si utile) ont laissé de marbre la communauté internationale, rappelant qui était le patron. Sans les USA rien ne se fait, et avec les USA se fera sans doute le dépeuplement de la Palestine, qui finira en Europe, comme l’Afghanistan ou la Libye (avec les oppositions de papier w.c. d’extrême-droite, toutes sous contrôle israélo-américain on aurait en effet tort de se gêner en haut-lieu).
Mais vient l’algorithme sur le gâteau.
Le devenir-monde n’est sinon plus marchandise ; comme je l’ai montré dans mon livre sur Internet, il est digital. Le devenir-numérique (je pense souvent à NMR, le léopard, en hébreu, l’animal de Nemrod, qui est aussi lié à la ville, par excellence) ; ce devenir est américain aussi (ou amer Caïn). Johnny Depp l’incarne en le désincarnant dans le fascinant film de Wally Pfister Transcendance, où Elon Musk (qui a donné des noms codés à ses enfants, cela fera plaisir à LHK !), fait un caméo. Le capitalisme techno-gnostique (partie deux de mon livre, qui remonte as usual à la cabalistique « Renaissance anglaise » — Dee, Bacon, Marlowe) va achever ce monde et le reconvertit en alias digital.
En attendant, il en remet un certain nombre à sa place.
Ces propos polémiques ont un but au moins : cessons de rêver, on en face des ennemis qui ont pesé et soupesé ce monde. Et qui vont s’en débarrasser à leur guise quand la bise numérique sera (définitivement) venue. De ce point de vue le nombre de chars Abrams en Ukraine (trente ! les deniers de Judas !) importe beaucoup moins que les dernières inventions de Sam Altman ou de Noam Brown dont personne ne parle. Les super-cerveaux ashkénazes de notre Amérique « toujours ruinée et dégénérée » nous préparent en effet un grand remplacement dont les moins éclairés n’ont pas idée.
https://www.zerohedge.com/economics/chinas-share-global-economy-shrinking-fastest-pace-mao-era
https://echelledejacob.blogspot.com/2023/11/demondialisation-aux-etats-unis-les.html
https://www.unz.com/article/no-collapse-is-the-real-dystopia/
[Source : Campagnol tvl]
[Publication initiale : euro-synergies]
Par Tetyana Popova-Mozovska
Dans les années 1970, on évoquait au lycée un mage, un gourou, un écrivain qui sortait des catégories traditionnelles et scolaires mais n’entrait pas dans les nouvelles. Il faisait douter de la réalité du monde, de nos perceptions, et de notre humanité limitée à la consommation et à la perception de news. En outre il était perçu comme le prophète d’un futur effrayant et qui était déjà là. Bref, il était un oracle. Si Dostoïevski, Edgar Poe ou Balzac nous décrivaient un éternel présent qui venait du passé, cet écrivain mythique nous décrivait un éternel présent qui venait du futur. On le jugerait comme prophète et non comme styliste ou « réaliste ».
Cet écrivain bien sûr est Philip K. Dick — et mes amis des sections scientifiques le considéraient comme un génie réservé à une minorité choisie. On citait surtout « Ubik » dont le nom résonne comme celui d’un dieu de l’étrange. Après des essais de lecture infructueux, je finis par découvrir ce monstre littéraire en 1982 grâce au film « Blade runner ». Échec commercial à sa sortie, cet opus fasciné (et pas seulement fascinant) devint ensuite le film-culte par excellence. Les puristes reprochèrent plein de choses à une œuvre qui dessinait les grands traits de notre époque mondialiste, dystopique et travaillée par l’image. L’altération de la réalité par les simulacres était là, tout comme la technologie dangereuse, la difficulté de définir l’homme dans le monde capitaliste unifié et la fabrication artificielle par les images d’une mémoire collective planétaire effaçant l’expérience individuelle. Cependant la lecture de Dick me demeurait difficile. J’attendis d’autres films « Total recall », « Pay check », « Minority report » pour avoir une idée plus précise de cet univers « riche et étrange », digne des visions de Shakespeare et du baroque du Quichotte. Le futur dystopique, la dégradation d’un paysage planétaire déglingué et surtout la fabrication d’une mémoire artificielle me semblent être des axes essentiels des écrits de Dick. Et c’est là qu’est intervenue Tetyana, passionnée et sérieuse.
Sérieusement et systématiquement Tetyana a relu ou lu tous les ouvrages de Dick susceptibles d’expliquer l’étrange réalité dans laquelle nous sommes plongés. Depuis un an, nous avons en effet assisté à une accélération de cette réalité marquée par le totalitarisme technologique et l’effondrement énergétique/économique ; tout cela grâce au virus et aux mesures comme ce Reset qui l’accompagne, sorti de cerveaux planétaires et dangereux. Bref, nous sommes rentrés au moins dans les grandes villes dans l’univers de Dick — un univers souvent comique et menaçant, comme dit notre auteure.
Tetyana a compulsivement déniché les textes oubliés ou peu lus qui dessinent la réalité prévue par notre étrange prophète. Mais en bonne chrétienne elle a aussi insisté sur les contenus spirituels et « chrétiens-primitifs » de l’œuvre de Dick, dimension que beaucoup de critiques ont négligée ou oubliée. De ce point de vue ce grand auteur pourrait être aussi un écrivain du « 8ème jour » quand nous serons réveillés du long sommeil impérial et ferré. Ce livre s’adresse donc à une élite « éveillée », et qui s’ignore encore.
Éditions Tetyana, Amazon.fr. À paraître chez Avatar.
[Source : maximetandonnet]
Par Maxime Tandonnet
Les soirées de printemps, d’été ou d’automne, entre amis, se succèdent et se ressemblent. La plupart de mes amis sont des femmes et hommes de ma génération, un peu plus jeunes ou un peu plus vieux parfois, anciens électeurs de VGE en 1981 (les plus âgés), de Chirac, de Sarkozy et de Fillon en 2017 — malgré tout. Ils étaient pour le RPR/UDF, l’UMP et puis LR jusqu’à 2017. Aujourd’hui, d’une soirée à l’autre, c’est la colère qui prédomine, une colère dont les états-majors politiques ont sans doute du mal à sentir la virulence. Ils en veulent immensément à la « droite » d’avoir, quand elle était au pouvoir, disent-ils, laissé se dégrader la situation sécuritaire et migratoire et s’installer le chaos qui ne cesse, depuis, de s’aggraver. Ils sont interloqués des trahisons ou des ambiguïtés en faveur du macronisme depuis 2017, notamment la manière dont « la droite » a servi de roue de secours et sauvé la macronie pendant la réforme des retraites… pour des clopinettes — ils le savent mieux que quiconque. Ils n’ont aucune appétence pour le RN, jugeant MLP exagérément obtuse et « pas très intelligente » ni pour aucun courant aboyeur d’ailleurs. Ils haïssent plus que tout la mystification macroniste, un écran de fumée pour couvrir la faillite, le chaos et l’effondrement. Ils se sentent abandonnés, trahis. Donc, ils ne croient plus en rien et plus en personne. S’ils revotent un jour, me disent-ils tous, ce sera par colère et jamais plus pour « ces gens qui les ont trompés “. Je ne fais là que répercuter ce que j’entends. ‘Tu te souviens comme j’admirais NS ? Tu te rends compte…’ me dit l’une d’elles, dépitée… Voilà, c’est ce que j’entends tous les jours dans ce milieu et quand on me demande, en quête d’une étincelle d’espoir : comment tu vois les choses pour l’avenir ? Je n’ai pas vraiment de réponse à leur apporter. La France est comme un bateau fantôme dont les passagers sont abandonnés en pleine tempête planétaire. Je leur réponds dans le vague : l’expérience de l’histoire montre que l’espoir vient toujours quand on s’y attend le moins et de l’horizon le plus inattendu à la suite d’événements dramatiques, de nouvelles équipes finiront par émerger. Mais cela ne suffit à convaincre personne, même pas moi, ou alors si peu.
Dorine dit :
Je pense que les électeurs PS pensent la même chose et se sentent floués.
La faute au clientélisme politique. On raconte n’importe quoi, et surtout pas la Vérité, pourvu qu’on ait des électeurs et les sous qui vont avec, ainsi que les privilèges que ces messieurs et dames politiques s’octroient. Bien sûr, il y a dans le lot des politiques honnêtes, mais ils se font rares. Il y a aussi les idéologues comme Robespierre, qui ne voient que le but ultime de leur idéologie et sont prêts à décapiter toute opposition.
Le clientélisme dans la cité a précipité la chute de la République romaine. CQFD
La démocratie n’est plus qu’une illusion : on a utilisé l’immigration pour sa main-d’œuvre pas chère et corvéable. Et on pompe les Français en taxes et impôts pour alimenter la finance… Je ne suis pas loin de penser que les labos pharmaceutiques dictent maintenant la politique de la Santé !
[Source : entrefilets.com]
[Publication] 10/02/2017 [par le créateur anonyme du site entrefilets]
Bientôt les hommes cesseront de s’aimer, tomberont amoureux de machines, deviendront un temps des objets connectés parmi d’autres avant de disparaître, de se fondre dans une ultime étreinte technologique censée les « augmenter », mais qui aura surtout raison de leur humanité. C’est ce que les adeptes hallucinés du transhumanisme1 appellent la « Singularité », ce moment d’inflexion où les progrès exponentiels de la technologie infesteront l’homme pour en changer la nature et donner naissance au Surhomme tant attendu, enfin libéré de ses limites biologiques. Selon certains transhumanistes, cette « Singularité » pourrait même survenir d’ici à 2030 déjà, et les progrès stupéfiants que nous annoncent régulièrement les apprentis sorciers de l’intelligence artificielle rendent plausible ce calendrier. Il faut dire que la voie est toute tracée. On voit mal ce qui pourrait en effet contrarier cette échéance. Notre contre-civilisation ultralibérale est psychologiquement formatée pour accepter et même souhaiter la disparition de notre si imparfaite humanité, et son impératif libéral justement lui interdit tout simplement de questionner les (r)évolutions technologiques puisque ce serait contraire à l’un de ses dogmes qui veut que l’« on n’arrête pas le progrès ».
Dans la société ultralibérale, deux forces implacables sont ainsi à l’œuvre qui rendent inéluctable cette fuite en avant vers la Singularité et l’abolition de notre humanité.
D’un côté, il y a d’abord ce que nous appellerons le néo-progressisme sociétal, qui s’emploie à déstructurer les sociétés, à briser tous les tabous, à bouleverser en permanence les rapports sociaux, à imposer ce relativisme moral et culturel absolus qui désacralise tout, à commencer par la vie.
Jour après jour, on légifère ainsi à tour de bras pour satisfaire le moindre lobby, pour donner l’illusion d’une société vertueusement engagée dans la quête d’un équilibre parfait où chacun pourra, à terme, exercer son droit inaliénable à tout sur tout. Chaque groupe, puis chaque sous-groupe, puis chaque individu se voit ainsi invité à ne voir le monde qu’au travers du prisme déformant de ses intérêts particuliers. Or cette « innocente » tentative de donner satisfaction à tous les égoïsmes concurrents d’un peuple devenu alors « peuple de démons » ne sert, en réalité, qu’à alimenter une guerre de tous contre tous destinée à atomiser les individus.
[Voir aussi :
L’atomisation de l’Homme et de l’Humanité]
Et le vivre-ensemble dans cette société-là se réduit alors au vivre pour soi. Le Marché-Monde étant bien sûr là pour combler tous les désirs, toutes les aspirations, c’est-à-dire pour permettre aux individus de se remplir, de se gaver, de consommer donc. (Nous avons déjà analysé cette immense entreprise d’abolition de l’homme, notamment dans nos billets intitulés « Contre l’abolition de l’homme » justement2, « Intelligentsia et servitude globalisée »3, « Retour sur le fiasco libéral »4 ou encore « La frontière, le Système et le porno »)5.
Une telle société dont l’aspiration a finalement atteint un tel sommet de pauvreté ne peut dès lors qu’être totalement perméable à l’utopie du transhumanisme.
Et c’est là qu’interviennent les geeks hallucinés de la Silicon Valley pour nous conduire au Graal, nous donner enfin un horizon nouveau, la possibilité d’autre chose, de quelque chose de meilleur et même de merveilleux par la magie des algorithmes qui vont enfin faire de nous de vrais dieux.
La cohérence est donc totale entre cette entreprise de déstructuration de la société humaine d’un côté, et la course effrénée au progrès technologique de l’autre. Comme une grenouille plongée dans un bain froid que l’on réchauffe progressivement se laissera cuire sans broncher, l’Homme post-moderne est alors de plus en plus immergé dans de nouvelles technologies de plus en plus invasives, qui le détachent peu à peu du réel, du monde, des autres, de tout, sauf des pixels.
Aujourd’hui déjà, l’individu post-moderne passe en moyenne huit heures par jour le nez planté dans un écran6 (ordinateur, TV, tablette, smartphone, console, etc.). Huit heures par jour : c’est-à-dire le tiers de la vie, et même la moitié de la vie « éveillée ».
Si l’on extrapole, cela veut dire qu’un adulte du XXIe siècle va passer plusieurs dizaines d’années de sa vie à fixer les pixels d’un rectangle lumineux. Un écran où tout ce qui se passe est organisé, vu, compilé, répertorié et examiné par les algorithmes du Système bien sûr.
Premier constat : la rupture avec le monde réel, la mère Nature notamment, est absolument totale et la rando mensuelle n’y change rien. D’où sans doute cette indifférence à l’agonie de la paysannerie et à celle de l’écosystème en général, hormis les postures de façade bien sûr.
Deuxième constat : les rapports sociaux se virtualisent déjà largement aussi, devenant peu à peu un simulacre organisé par écrans interposés, et là encore grâce aux algorithmes du Système. Cette hyperconnexion censée rapprocher les hommes ne fait donc en réalité que les séparer. En ce sens les technologies de la communication sont moins là pour favoriser les relations humaines que pour s’y substituer.
[Voir aussi :
►Les réseaux sociaux sont un danger pour l’humanité, selon certains biologistes et écologistes
►Les relations humaines
►La révolution woke a des conséquences dramatiques
►Médias numériques — « Perte de la réalité »
►Les fondements de la communication]
Dans un futur proche, la robotique va encore permettre de franchir une étape décisive dans l’abolition de l’homme. D’abord sous une forme ludique en prenant en charge l’un des rapports sociaux les plus compliqués et essentiels qui soit : la sexualité.
Il semble en effet que le sexe avec les robots soit au menu des progrès de notre contre-civilisation pour cette année déjà7, une étape logique de l’évolution de sex-toys à circuits imprimés, dont le succès commercial est déjà phénoménal.
Mais pourra-t-on réellement amener l’homme à développer une véritable relation amoureuse avec une machine ? Eh bien oui. La chose est d’ores et déjà dans le pipeline comme on dit.
Des chercheurs ont démontré que les hommes sont parfaitement capables d’éprouver des sentiments pour des machines8. Avec cet avantage incroyable pour le Marché-Monde de pouvoir répondre de manière adaptée à toutes les névroses, à toutes les solitudes, à tous les désespoirs en proposant le compagnon idéal, sur mesure, flatteur, attentionné et enjoué auquel chacun devrait évidemment avoir droit (parce qu’il le vaut bien)9.
Et tôt ou tard, et plutôt tôt que tard au vu de l’accélération exponentielle des progrès en matière d’algorithmes, la fameuse « Vallée étrange » — théorie selon laquelle plus un robot ressemble à un Homme plus ses imperfections apparaissent monstrueuses et engendrent donc son rejet10 — sera comblée.
L’Homme pourra alors se passer de l’Homme et la Machine-Marché pourra enfin pourvoir à l’entier de ses besoins.
C’est que le robot dont on finira par tomber amoureux n’aura rien à voir avec cette sorte de grille-pain siliconé qui constituera la première génération des robots purement sexuels de notre décennie finissante. À terme, le robot dont on tombera amoureux sera subtil, cultivé et très intelligent, beaucoup plus intelligent que nous d’ailleurs.
Là non plus, l’horizon temporel n’est plus si lointain.
Récemment en effet, un nouveau progrès spectaculaire a sidéré les apprentis sorciers de l’intelligence artificielle (IA) eux-mêmes.
Un robot vient en effet de remporter un tournoi de… poker.
Anodin ?
Pas vraiment en fait.
Car le poker est un jeu de menteur, de bluffeur, pas un jeu basé sur des équations mathématiques.
Noam Brown, le créateur de Libratus11, l’intelligence artificielle qui a remporté le tournoi, explique ainsi que ses concepteurs lui ont « donné les règles de base » en lui disant : « Apprends par toi-même ». Et ils ont été les premiers surpris du résultat. « Quand j’ai vu l’IA se lancer dans le bluff en face d’humains », a déclaré Noam Brown, « je me suis dit : “Mais, je ne lui ai jamais appris à faire cela !” »
« Je ne lui ai jamais appris à faire cela ! »
La phrase devrait bien allumer quelques voyants dans le cerveau de nos chers Geeks hallucinés ou de nos politiques, mais il n’en sera bien évidemment rien. « L’expérience » ne connaîtra aucun frein, aucun contrôle, aucune limite.
Trop de débouchés prometteurs sans doute.
Et puis, « on n’arrête pas le progrès ».
Le transhumanisme, ce sera aussi et surtout la possibilité de l’immortalité. Car une fois absorbé par la machine, l’homme ne sera plus biodégradable.
Toutes les disciplines qui servent cette utopie délirante vont donc pouvoir compter sur un financement illimité, notamment des grabataires terrorisés de l’oligarchie globalisée. Qui veut mourir alors qu’il est milliardaire ?
Ce sera alors le grand moment de la Singularité, ou l’algorithme sera suffisamment élaboré pour pénétrer la chair humaine, l’esprit humain, pour venir « l’augmenter » et faire enfin de l’Homme un Dieu.
Et à la fin nos ultralibéraux de clamer : « Quelle Merveille ! », un pied négligemment posé sur le cadavre de notre Humanité.
« Il se peut que le progrès soit le développement d’une erreur », avait dit Jean Cocteau.
[Publication initiale : le CDS]
L’effondrement de l’occident de Biden-Leyen-Blinken est à la fois physique, matériel, psychique et moral. On n’est plus au stade de la décadence, mais à celui de la déchéance et de la dégénérescence. L’effondrement de la France devient patent pour des millions de Français, sauf que d’autres millions de Français acceptent cette situation et nagent dedans comme un poison dans l’eau.
Par Nicolas Bonnal
L’Occident paie des générations de déchéance accélérée, laquelle a commencé dans les années soixante, qui sonnèrent les débuts du « wokisme » ou de ce que Thomas Frank a appelé la conquête du cool. À la même époque, le penseur traditionaliste Julius Evola évoque l’émergence d’un homme fuyant (le « peuple nouveau » de l’autre) qu’il définit très bien en ces termes — dans son excellent et toujours actuel recueil l’Arc et la massue :
« L’avènement de la démocratie est quelque chose de bien plus profond et bien plus grave que ce qu’elle paraît être aujourd’hui du seul point de vue politique, c’est-à-dire l’erreur et la prétention infiniment stupide d’une société qui creuse sa propre tombe. En effet, on peut affirmer sans nul doute que l’atmosphère “démocratique” est telle qu’elle ne peut exercer, à la longue, qu’une influence régressive sur l’homme en tant que personnalité et jusque sous les aspects proprement “existentiels” : précisément parce qu’il y a, comme nous l’avons rappelé, des correspondances entre l’individu comme petit organisme et l’État comme grand organisme. »
L’obsession démocratique occidentale crée un taré qui se veut messianique (cf. le sommet de l’OTAN qui déclare la guerre woke au reste du monde pas assez occidentalisé). Evola :
« Le résultat, c’est un nombre toujours croissant d’individus instables et informes, c’est l’invasion de ce qu’on peut appeler la race de l’homme fuyant. C’est une race qui mériterait d’être définie plus précisément que nous ne saurions le faire ici, et sans hésiter à recourir à des méthodes scientifiques, expérimentales. »
L’absence de caractère marque cet homme cool, pour qui il est interdit d’interdire :
« Le type d’homme dont nous parlons n’est pas seulement rétif à toute discipline intérieure, n’a pas seulement horreur de se mettre en face de lui-même, il est également incapable de tout engagement sérieux, incapable de suivre une orientation précise, de faire preuve de caractère. »
Evola pressent ou constate déjà le déclin économique et professionnel de l’Occidental :
« Le déclin de tout “honneur professionnel” — honneur qui a été une manifestation précieuse, dans le domaine pratique, de la conscience morale et même d’une certaine noblesse — relève en effet du même processus de désagrégation. La joie de produire, selon son art propre, en donnant le meilleur de soi-même, avec enthousiasme et honnêteté, cède le pas à l’intérêt le plus immédiat, qui ne recule ni devant l’altération du produit ni devant la fraude. »
Ce foutage de gueule professionnel a gagné tous les domaines, pas que l’économique, qui se limite à imprimer des billets sans valeur (oh cet abandon de l’étalon-or…) : le militaire, l’éducatif, le religieux (de Vatican II à Bergoglio), l’informatif. Il est normal du reste que cela « ne choque plus personne ». La résistance ? Elle clique…
Evola constate la déchéance du politique qui est déjà — qui est depuis toujours — l’abomination de la désolation :
« Quant à l’univers des politiciens, avec ses combines et la corruption qui ont toujours caractérisé les démocraties parlementaires, mais qui sont encore plus évidentes aujourd’hui, ce n’est même pas la peine d’en parler, tant la race de l’homme fuyant, identique au-delà de toute la diversité des étiquettes et des partis, s’y meut à son aise. »
Les pires sont bien sûr ceux de droite (on ne va pas être déçus cette fois-ci non plus) :
« Il faut en effet observer que, très souvent, ne font pas exception ceux qui professent des idées “de droite”, parce que chez eux ces idées occupent une place à part, sans rapport direct et sans conséquence contraignante, avec leur réalité existentielle. »
Evola constate que tout le monde est déjà concerné par cette involution en occident, vous comme moi :
« Nous avons dit que ce phénomène ne concerne pas seulement le domaine moral. L’instabilité, le côté évasif, l’irresponsabilité satisfaite, l’incorrection désinvolte se manifestent jusque dans les banalités de tous les jours. On promet une chose — écrire, téléphoner, s’occuper de ceci ou de cela — et on ne le fait pas. On n’est pas ponctuel. Dans certains cas plus graves, la mémoire même n’est pas épargnée : on oublie, on est distrait, on a du mal à se concentrer. Des spécialistes ont d’ailleurs constaté un affaiblissement de la mémoire parmi les jeunes générations : phénomène qu’on a voulu expliquer par différentes raisons bizarres et secondaires, mais dont la vraie cause est la modification de l’atmosphère générale, laquelle semble provoquer une véritable altération de la structure psychique ».
Et c’était avant le smartphone. La déchéance de la mémoire a pour Evola des conséquences ontologiques. Ces observations peuvent permettre de comprendre l’attitude débile des leaders occidentaux maintenant (que l’on pense à l’époque même de Kohl, Mitterrand et Bush père) face à la Russie ou à la Chine qui sont en train de les manger tout crus. Les restes de civilisation ou d’éducation de temps antérieurs ont disparu et l’occident est nu, avec une population crétinisée à 90 %, face à sa désintégration psychologique, matérielle et morale, et donc incapable de réaliser ce qui lui arrive pour réagir.
Céline disait que toute débâcle est un coup de grâce. On verra.
Julius Evola – La race de l’homme fuyant, l’Arc et la massue (traduction Baillet)
Grand voyageur, peintre, grand mystique, orthodoxe pointu, mais aussi polémiste coupant, Louis nous réécrit enfin sur le cadavre froncé (pas français, ouf) :
Par Louis
Les aléas de la vie et la morosité désespérante, et je ne parle pas du climat (sic!), m’ont éloigné de la toile et de toute l’inanité contemporaine.
Rien de nouveau sous le sommeil…
Je poursuis le séminaire de Saint-Pétersbourg en ligne (resic) et reviens de Russie où j’étais deux semaines pour une expo et l’anniversaire d’un copain non loin de la frontière ukrainienne.
Il y a deux orthodoxes « schismatiques » (encore que leur position soit très compréhensible) qui ont un canal YouTube de très bonne qualité (Tradition orthodoxe) où ils répondent un peu à tout le monde pour exister… l’un des deux est vraiment très fort.
Ma foi du côté de l’orthodoxie il y a de l’espoir, ce n’est pas rien…
Comme d’habitude si je redoute ou appréhende dans quel état je vais retrouver la Russie, je ne suis jamais vraiment déçu, et au final je m’y sens comme dans un poisson dans l’eau. Il y a de l’espoir de ce côté-ci de l’Europe, c’est fragile, certes, mais ça tient.
De ce côté-ci du continent entropiéen(([1] NDLR Jeu de mots entre européen et entropie)), la fronce(([2] La France)) est invivable et les froncés(([3] Les Français)) sont lamentables. Plus que jamais, il faudrait laisser les morts enterrer leurs morts.
Le peu de froncés de souche que je puis côtoyer à l’insu de mon plein gré, comme disait un célèbre maillot à pois(([4] Propos attribués par les Gignols de l’info au coureur cycliste Richard Virenque.
https://www.lopinion.fr/international/richard-virenque-une-popularite-a-linsu-des-guignols)), ne m’est même plus un sujet d’ulcère tellement c’est pathétique, et cela ne me met donc plus en rage comme jadis. On se fait à tout, et ils l’ont bien compris, ceux qui ont le pognon. Je vis dans ce pays sans y vivre. Je ne partage plus rien avec mes concitoyens, même ceux que l’on pourrait qualifier comme étant dans nos rangs sont incorrigibles et sans avenir… Ils ne pensent qu’à se bourrer la gueule avec des vins et gnoles de « producteurs » dont ils font la réclame sur Instagram en parlant fronglet(([5] franglais)) et en jouant les rebelles de Netflix en costume cravate comme les « punky bledards » de la série. Pourquoi pas ? me direz-vous. En effet c’est un suicide sans doute plus agréable qu’un autre, mais cela demeure être un suicide. Dont acte.
Schwab est trop bon et il s’est trompé. Certes l’on ne possède plus rien, mais l’on n’est pas plus ou moins heureux pour autant. C’est même au-delà de ce type de sensation. Depuis longtemps, il n’est plus question de bonheur.
On ne danse pas sous le volcan, l’on ne vit pas le jour présent et l’on n’a même pas l’idée de partager une dernière tablée comme les habitants condamnés par la peste dans Nosferatu…
Ou comme sur les ronds-points de Gilles et John(([6] Jeu de mots sur les Gilets Jaunes.)).
Il y aurait de quoi dire.
Pas étonnant que le seul métier qui ait de l’avenir c’est d’avoir un blogue sur Instagram. Ça ne pèse [pourtant] pas lourd un instant-gramme.
Macron a achevé définitivement la France et les Français : plus d’envie de vivre, d’exister ; plus d’identité ni de culture ; plus de foi ni d’espérance.
J’écoute cependant régulièrement deux trois choses passables sur YouTube et Odyssée où je vous ai retrouvé avec Gilbert Dawed.
Merci cher Nicolas. Enfin ! on respire à pleins poumons et les deux parts du cerveau sont enfin stimulées. Ça change de Gave et de Rougeyron.
D’ailleurs, j’aimerais savoir ce que vous pensez de ce dernier. Comme vous comme pour moi, le gaullisme ne semble pas vous enthousiasmer plus que cela.
Vous avez l’art et la manière de prendre de la hauteur et de penser sans « réfléchir », sans refléter.
Le cinéma est effectivement un révélateur, comme le produit photographique qui permet de faire apparaître ce qui n’était jusqu’alors qu’en négatif.
Il demeure les Écritures et les Saint-Pères. Il n’y a que l’éternité de solide, décidément. Une époque comme celle-ci devrait quand même suggérer quelques vocations, quelques saintetés, quelques sacrifices gratuits, mais au contraire jamais l’esprit (l’Esprit ?!) n’aura été si peu sollicité.
Dieu jadis était accusé de tous les mots et autres maux. Aujourd’hui il ne reste que les religions.
Dieu demeura pourtant après que Nietzsche eut déclaré sa mort. Aujourd’hui il a été totalement évacué en oxydant(([7] Jeu de mots sur Occident)). Le règne de Satan a déjà commencé. Celui-ci est en train de « ré-créer » l’humanité sans image et sans ressemblance divine. L’Homme était certes déchu, mais rien n’était perdu. Désormais, depuis qu’il a rejeté Dieu, l’Homme se recompose à l’image de son singe. Il change de genre, de sexe, pour devenir semblable aux anges déchus qui n’ont pas de genre, comme on devrait le savoir. Mais en oxydant, on préfère se moquer des Byzantins qui en discutaient encore quand les ottomans pénétraient la cité, la nouvelle Rome. Ils avaient pourtant tout compris. Jusqu’au bout ils auront été orthodoxes.
Les hommes ont tué Dieu, et non contents de cela, ils nient désormais sa paternité. Comme ces abrutis qui demandent à ce qu’on les raye des registres de baptême.
L’histoire de l’Humanité devient un palimpseste où l’Alliance de Dieu et des hommes est effacée et remplacée à vau-l’eau par des possédés cyniques qui délient ce qui avait été pourtant lié.
Car c’est bien la liberté plus que le bonheur qui est la clef de l’existence. Sans liberté, c’est de l’élevage tout au plus. Et la liberté ne doit pas être séparée du libre arbitre, cette faculté de retrouver sa propre polarité dans un environnement devenu hostile et brouillé, pour retrouver magnétiquement, telle une boussole spirituelle, le chemin vers le Créateur, Son Fils et le Paraclet.
Portez-vous bien, comme disaient les Latins, et les hommages à Tetyana !
Louis
Par Amal
Toute cette semaine, j’ai encore bien observé les personnes autour de moi.
Les zombis qui nous entourent sont effrayants.
Un nouveau membre s’est rajouté à leur corps : le smartphone.
Il est devenu une extension du bras. Il n’est plus dans les poches. Il est toujours dans la main.
Quelques-uns le portent autour du cou pendouillant comme la cloche d’une vache. Meuhhh !!
Les zombis ne peuvent pas passer une seconde, et non pas une minute sans ce petit diable.
Ils marchent avec, ils mangent avec, ils boivent avec, ils font leurs courses avec, ils payent avec, ils jouent avec, ils doivent même faire l’amour avec.
Le smartphone est une vraie drogue.
Le smartphone hypnotise.
Le smartphone débilite.
Nos zombis sont complètement accros de cette machine qui les transforme en machine aussi.
A l’arrêt du bus, dans le train, dans les rues, dans les magasins, en voiture ; tous, ont cette chose avec eux.
Tous, ont les têtes baissées, fixées à leur écran. Ils vont tous souffrir de text neck.
Connaissez-vous ces maladies : text neck, la zappite, la nomophobie ?
Qu’est-ce que c’est me diriez-vous ?
Je vous réponds, les nouvelles maladies liées à ce maudit diablotin qu’est le smartphone.
Je vous mets leurs définitions pour que vous ayez un aperçu de ces horreurs :
Le text neck est un syndrome qui compte toutes les maladies cervicales liées à l’utilisation intensive de diablotin.
La zappite est un terme qui désigne ces crises d’ennui provoquées par l’absence de sollicitation du diablotin.
La nomophobie se dit d’une personne qui ne peut pas se passer de son diablotin et éprouve une peur excessive à l’idée d’en être séparé ou de ne pouvoir s’en servir.
Vous avez vu les crises que font les zombis quand ils n’ont plus de batterie ? Ne sont-ils pas pathétiques ?
Je ne vous parle même pas des ondes électromagnétiques qu’émettent ces diablotins et qui perturbent notre organisme.
Au-delà de ces problèmes physiques, le diablotin aspire les cerveaux, il est un moyen redoutable de contrôle.
Les zombis sont abreuvés non-stop de conneries, d’idioties, de débilités, de contenus pornographiques, d’idées dangereuses et destructrices (le wokisme par exemple). Ils ont basculé dans un monde artificiel et ne redescendent plus sur terre.
Si je voulais, et je ne le veux pas, je ferais des séances de désintoxication du diablotin à coups de claques dans la gueule.
Voyez le temps que passent les enfants sur cette merde. Les parents irresponsables qui collent le diablotin aux mioches pour s’en débarrasser, pour ne pas les avoir dans les pattes, pour faire les courses dans le calme…
Je pense que les dés sont jetés. Tous les zombis sont cuits. Ils ne font plus partie de l’espèce humaine. Ils ont déjà basculé dans le monde des machines.
Le contrôle est en place, il est puissant et il est omniprésent.
Le jour où les forces malveillantes enverront l’ordre ultime, nous risquons d’assister à une scène chaotique comme au début du film « Cell Phone » réalisé par Tod Williams de 2016.
Voici le trailer en Français et en anglais (dans la même vidéo) :
À moins d’arrêter cette malédiction, ce qui faisable en soit, mais pas du tout dans les prérogatives des mondialistes, nous sommes damnés à assister à la fin de l’homme fait de chair et d’esprit, et nous assistons à l’apogée de l’homme machine.
Bonus : je vous mets un lien sur 40 illustrations du pouvoir du diablotin :
https://hitek.fr/42/40-illustrations-nouvelles-technologies-controle-vies_2916
Petits recueils avec Amal :
[Publication initiale : dedefensa.org]
Par Nicolas Bonnal
Les Gilets jaunes ont marqué une résurrection populaire et patriotique. Cette résurrection s’est faite au détriment d’un État autoritaire, dépensier et déconsidéré, et de ses hauts fonctionnaires, énarques alliés aux banquiers, ceux que Bernanos nommait les grands citoyens.
J’ai déjà évoqué La France contre les robots ou La Grande-peur des bien-pensants, si indispensable pour comprendre la disparition de la chrétienté puis du christianisme en France en particulier (et qu’on ne vienne pas contredire Bloy ou Bernanos…). Mais Bernanos perçoit la disparition de la France en tant que patrie, patrie dévorée par le monstre étatique. L’État moderne, « le plus froid des monstres froids », a tout bouffé en effet : patries, familles, races, peuples, culture, folklore, création, absolument tout, même les sexes. Tolstoï soulignait que l’enseignement de l’art à l’école était le moyen le meilleur d’en venir à bout. L’État crée le processus de dé-civilisation dont a parlé brillamment Hans Hoppe. Et il est inutile de parler d’État profond quand on voit ce qui se passe depuis des années ou même des siècles. De même il n’y a pas d’État-nation. L’État détruit la nation dans chaque pays européen par exemple et puis naturellement comme un monstrueux organisme il s’agrège au monstre totalitaire européen, puis au mondialiste.
Bernanos écrit ses Enfants humiliés au moment de 39-40, et lui qui a sagement jugé la guerre de quatorze, comprend cette fois que la France est victime d’un mal irréparable : l’étatisme, que voyaient surgir Poe, Tocqueville, Balzac ou bien Sorel, un autre chrétien nommé Chesterton (qui a vu aussi la verrue féministe apparaître). C’est ce que j’appelle la Fin de l’histoire, et c’est pourquoi nos gilets jaunes sont une énième resucée de vaine révolte contre l’étatisme ronflant et triomphant qui nous ruinera et nous remplacera dans sa chute retentissante (à moins qu’on ne préfère la guerre nucléaire contre la Russie pour faire plaisir aux militaires et aux hauts fonctionnaires).
Bernanos :
« Les Français n’ont plus de patrie depuis qu’ils s’en font une idée claire et distincte, tirée de “Histoire, c’est-à-dire de l’ensemble des conjectures d’un certain nombre d’archivistes ou d’illuminés que s’efforcent d’accorder entre eux les spécialistes des manuels. »
J’ai étudié Kleist il y a peu. Ce dernier écrit dans ses Marionnettes :
« Je dis que je savais fort bien quels désordres produit la conscience dans la grâce naturelle de l’homme. Un jeune homme de ma connaissance avait, par une simple remarque, perdu pour ainsi dire sous mes yeux son innocence et jamais, dans la suite, n’en avait retrouvé le paradis, malgré tous les efforts imaginables. »
L’innocence est remplacée par la science infuse du fonctionnaire étatique, et l’histoire devient récit officiel, pas aventure vécue.
Bernanos :
« Ils observent leurs trésors avec les yeux de l’État, ils les apprécient selon la morale particulière aux conservateurs des musées… »
Les Français n’ont plus de patrie… cela veut dire que les Français ne sont plus auteurs, ils sont spectateurs — sauf quand on les envoie se faire massacrer pour rien, en 1871 comme en 1914 et en 1940. La patrie n’est plus vécue (sauf par les gilets jaunes), mais récitée — et on change les récits : le Français devient raciste, antisémite, sexiste, fasciste à travers les âges.
Bernanos :
« On a substitué au sentiment de la patrie la notion juridique de l’État. Aucun homme de bon sens ne saurait traiter l’État en camarade. On a volé aux Français sinon la Patrie, du moins l’image qu’ils en avaient dans le cœur. »
Or le peuple a plus besoin que la bourgeoisie de la patrie. Bernanos écrit à ce sujet :
« On a volé leur patrie aux Français, on la leur a littéralement arrachée des mains, et si ce fait semble continuer à passer presque inaperçu des bourgeois, c’est qu’ils ont moins besoin que les bonnes gens d’une expérience concrète de la patrie, leur sensibilité est faite aux abstractions. »
Rappelons Taine sur ce bourgeois qui nous donne Pompidou, Chirac, Giscard, Hollande, le Macron (je reconnais en Mitterrand ou en de Gaulle un génie patriote, quelles que soient leurs bévues) :
« Le bourgeois est un être de formation récente, inconnu à l’antiquité, produit des grandes monarchies bien administrées, et, parmi toutes les espèces d’hommes que la société façonne, la moins capable d’exciter quelque intérêt. Car il est exclu de toutes les idées et de toutes les passions qui sont grandes, en France du moins où il a fleuri mieux qu’ailleurs. »
C’est dans son livre sur La Fontaine…
Bernanos persiste et signe dans son procès contre l’État moderne. C’est un voleur :
« On a volé leur patrie aux Français, je veux dire qu’on la leur a rendue méconnaissable. Elle n’évoque même plus pour eux l’idée d’honneur ou de justice — car l’État ne connaît ni honneur ni justice — elle a la face austère du Devoir, du Devoir absolu, de la Summa Lex, impitoyable aux pécheurs. »
Du coup :
« La France ne ressemble plus aux Français, elle n’a ni leurs vertus, ni leurs vices, ni aucun de ces défauts qui leur sont plus chers que leurs vices ou leurs vertus, elle ne parle même pas leur langage, elle ne dit rien, elle est l’idole muette d’un peuple bavard. L’État s’est substitué à la Patrie comme l’administration cléricale se serait substituée, depuis longtemps — si Dieu n’y mettait ordre — à la moribonde Chrétienté. »
Après il tape sur le maudit seizième siècle et sur les hellénistes et latinistes, un peu comme Guénon :
« Et les courtiers de ce troc, les légistes crasseux de la Renaissance, barbouillés de grec et de latin, ont mené l’opération avec toute la clairvoyance de la haine. Car ils haïssaient l’ancienne France, ils dédaignaient son idiome, ils méprisaient ses mœurs, ses arts, sa foi, ils l’eussent donnée tout entière pour la moindre des républiques transalpines — la France moderne a été faite par des gens qui tenaient l’ancienne en mépris ».
Il voyait bien le problème de notre classe dirigeante dont Macron n’est que le énième et superfétatoire avatar :
« Je dis que la classe dirigeante a perdu peu à peu le sens de l’orientation française, ce qui est tout de même bien fâcheux pour une classe qui se prétend dirigeante. »
Bernanos ne se faisait guère d’illusions :
« Je n’ai pas peur de la solitude dans l’espace, mais j’ai bien peur de l’exil dans le temps. »
Je suis bien d’accord, moi qui ne suis pas de mèche avec ces temps méprisables.
Par Nicolas Bonnal
Le bourgeois français était l’épicentre du système républicain. Il est maintenant la base du système woke, du système écologiste, mondialiste et même numérique. Le bourgeois progressiste a tourné avec son bien aimé pape François la page catho-chrétienne-bourgeoise (c’est Bernanos qui doit être content au paradis d’être ainsi confirmé sur sa conception du catholicisme entropique bourgeois) et il est le père du cauchemar mondialiste et numérique qui s’abat sur ce foutu pays ou ce qu’il en reste. Essayons de comprendre.
Il se peut que La Fontaine soit l’écrivain le plus important de notre histoire. Taine lui a rendu un hommage vivifiant et oublié dans sa monographie et il a insisté sur un point négligé : le bourgeois dans les Fables. Et notre splendide historien, le premier à avoir décrit la France telle qu’elle est et pas telle qu’elle se rêve (pour reprendre son expression sur le Saint-Julien de Flaubert) explique très bien de quel bois se chauffe la fille de l’Église, de l’État, de maître Patelin et de Renard :
« Derrière le clergé et la noblesse, loin, bien loin, le chapeau à la main, dans une attitude respectueuse, marche le tiers-état, “frère cadet des deux premiers ordres” si on l’en croit, “simple valet” selon la déclaration des gentilshommes. Les bonnes villes, bourgeoisies et corps de métiers, ont envoyé leur députation de ridicules, et La Fontaine, qui semble un bourgeois quand il raille les nobles, semble un noble quand il raille les bourgeois. Et ce n’est pas ici la matière qui manque. Parlons-en tout à notre aise ; nous sommes de cette bande, et nous avons le droit de la montrer telle qu’elle est. »
Je suis d’accord : bourgeois, on l’est tous plus ou moins. N’est-ce pas Nizan (voyez mon texte) qui disait déjà que le bourgeois c’est celui qui vit en pantoufles devant son écran ? C’était il y a presque cent ans !
Guénon a parlé (Autorité spirituelle…) de cette monarchie française bourgeoise ; de cette monarchie qui mit au pas la caste sacerdotale comme la classe guerrière aristocratique et qui a tout fonctionnarisé, récoltant en 1789 ce qu’elle avait semé : l’État bourgeois s’est passé d’elle. Devenu purement machine, il va se passer de tout l’État avec son inintelligence artificielle.
Taine écrit superbement (j’ai déjà cité cet extrait, un des plus importants de notre littérature — avec ceux de Balzac, Chateaubriand ou Tocqueville) :
« Le bourgeois est un être de formation récente, inconnu à l’antiquité, produit des grandes monarchies bien administrées, et, parmi toutes les espèces d’hommes que la société façonne, la moins capable d’exciter quelque intérêt. Car il est exclu de toutes les idées et de toutes les passions qui sont grandes, en France du moins où il a fleuri mieux qu’ailleurs. Le gouvernement l’a déchargé des affaires politiques, et le clergé des affaires religieuses. La ville capitale a pris pour elle la pensée, et les gens de cour l’élégance. L’administration, par sa régularité, lui épargne les aiguillons du danger et du besoin. Il vivote ainsi, rapetissé et tranquille. À côté de lui un cordonnier d’Athènes qui jugeait, votait, allait à la guerre, et pour tous meubles avait un lit et deux cruches de terre, était un noble. »
On se rapproche de cet État antiromantique qui en effet va nous ôter le trouble de penser et la peine de vivre. En attendant la télévision (voyez mon texte sur la méditation transfenestrale de d’Artagnan…).
L’homme rapetissé est déjà là, il n’a pas attendu Tati-Etaix-Godard, les congés payés, la télé et l’éternel parti de la majorité présidentielle :
« Ses pareils d’Allemagne trouvent aujourd’hui une issue dans la religion, la science ou la musique. Un petit rentier de la Calabre, en habit râpé, va danser, et sent les beaux-arts. Les opulentes bourgeoisies de Flandre avaient la poésie du bien-être et de l’abondance. Pour lui, aujourd’hui surtout, vide de curiosités et de désirs, incapable d’invention et d’entreprise, confiné dans un petit gain ou dans un étroit revenu, il économise, s’amuse platement, ramasse des idées de rebut et des meubles de pacotille, et pour toute ambition songe à passer de l’acajou au palissandre. Sa maison est l’image de son esprit et de sa vie, par ses disparates, sa mesquinerie et sa prétention. »
Taine le trouve plus médiocre que ses voisins européens ce bourgeois froncé :
« Il n’est point un Cincinnatus. C’est l’orgueil, d’ordinaire, qui fait le désintéressement. Un campagnard suisse ou romain qui à l’occasion devenait chef d’armée, arbitre de la vallée ou de la cité, pouvait avoir des sentiments grands, laisser le gain à d’autres, vivre de pain et d’oignons, et se contenter du plaisir de commander : sa condition le faisait noble. Comment voulez-vous que cette manière de penser naisse parmi nos habitudes bourgeoises ? Le bourgeois probe s’abstient du bien d’autrui ; rien de plus. Il serait niais de se dévouer pour sa bicoque. Les dignités municipales exercées sous la main de l’intendant ne valent pas la peine qu’on se sacrifie à elles ; échevin, maire, élu, il n’est qu’un fonctionnaire, fonctionnaire exploité et tenté d’exploiter les autres. »
Ce devenir-fonctionnaire du monde, bien plus fort que le devenir-marchandise du monde, explique très bien le totalitarisme européen façon Leyen-Macron-Breton et le Grand Reset de Schwab (banal bureaucrate boche). C’est le monde de maître-rat, comme dit La Fontaine. Et comme on en a produit industriellement dans les (grandes) écoles puis dans les fabiennes universités anglo-saxonnes, on n’a pas fini de reproduire ce modèle de bourgeois bureaucrate dont l’ONU ou l’UNESCO ou le FMI ont fourni les modèles terrifiants.
Mais le Français est AUSSI un bourgeois râleur, un prof gauchiste, un étudiant écolo-trotskiste, un je-ne-sais-quoi. La fable sur les grenouilles (symbole français) et leur roi (on pense au macaron), voici comment Taine l’explique :
« Ils sont inconstants, mécontents par état, frondeurs, faiseurs de remontrances, fatigants, obstinés, insupportables, et par-dessus tout impertinents et poltrons. Ils se lassent de “l’état démocratique ;” et, quand Jupin, fatigué de leurs clameurs, leur donne pour roi “un bon sire, tout pacifique,” la gent “sotte et peureuse” va se cacher dans tous les trous, jusqu’à ce qu’elle redevienne familière et insolente. Pourquoi sont-ils si déplaisants ? Quand le roi des dieux leur envoie une grue “qui les tue, qui les croque, qui les gobe à son plaisir,” on est presque du parti de la grue et de Jupiter. »
Oui, avec Jupiter on est servi ; et il y en a même encore plein qui n’ont pas encore compris.
Taine a compris bien avant les ingénieurs sociaux comme on fabrique du fonctionnaire, du militaire, du dernier homme :
« Nous naissons tous et nous croissons d’un mouvement spontané, libres, élancés, comme des plantes saines et vigoureuses. On nous transplante, on nous redresse, on nous émonde, on nous courbe. L’homme disparaît, la machine reste ; chacun prend les défauts de son état, et de ces travers combines naît la société humaine. »
Toujours rat, le bourgeois est attiré par le people aristo, écrit Taine :
« Le bourgeois sait qu’il est bourgeois et s’en chagrine. Sa seule ressource est de mépriser les nobles ou de les imiter. Il se met au-dessus d’eux ou parmi eux “et se croit un personnage.” Cet orgueil est raisonneur et esprit fort. Par exemple le rat s’étonne de voir tout le monde tourner la tête au passage de l’éléphant. Il réclame contre cet abus en théoricien spiritualiste : la grosseur et l’étalage ne font pas le mérite ; l’animal raisonnable ne vaut point “par la place qu’il occupe”, mais par l’esprit qu’il a. Il est clair que ce philosophe de grenier est un disciple anticipé de Jean-Jacques, et médite un traité sur les droits du rat et l’égalité animale. »
C’est le monde du moyen (c’est rigolo parce que le but de notre monde global-bourgeois-technocrate est de liquider la classe moyenne maintenant) :
« Là est la misère des conditions moyennes. Les extrêmes s’y assemblent et s’y heurtent ; les couleurs s’y effacent l’une l’autre, et l’on n’a qu’un tableau ennuyeux et choquant. De là vient la laideur du monde moderne. Autrefois à Rome, en Grèce, l’homme, à demi exempt des professions et des métiers, sobre, n’ayant besoin que d’un toit et d’un manteau, ayant pour meubles quelques vases de terre, vivait tout entier pour la politique, la pensée et la guerre. »
Magnifiquement Taine ajoute (je crois qu’il n’est pas populaire — bien que très connu — parce qu’il est trop dur, ce n’est pas pour rien qu’il fut un fidèle correspondant de Nietzsche qui compare dans Zarathoustra le charbon au diamant) :
« Aujourd’hui l’égalité partout répandue l’a chargé des arts serviles ; les progrès du luxe lui ont imposé la nécessité du gain ; l’établissement des grandes machines administratives l’a écarté de la politique et de la guerre. La civilisation, en instituant l’égalité, le bien-être et l’ordre, a diminué l’audace et la noblesse de l’âme. Le bonheur est plus grand dans le monde, mais la beauté est moindre. Le nivellement et la culture, parmi tous leurs mérites, ont leurs désavantages : d’un paysage nous avons fait un potager. »
Qui se doutait qu’avec Malleret, Hollande ou Macron la machinerie administrative française allait accoucher du monstre administratif mondialiste et numérique ? Mais poursuivons :
« Les occupations nobles s’altèrent en devenant marchandises. Le sentiment s’en va et fait place à la routine. »
Il va parler de Virgile notre Taine dont l’école m’avait dégoûté (la version latine ne servant qu’à sélectionner un ingénieur social, pas à découvrir le génie initiatique d’une littérature) :
« Une page de Virgile, que vous avez fait réciter à vingt écoliers pendant vingt ans vous touchera-t-elle encore ? Vous devez la lire tel jour, à telle heure ; l’émotion coulera-t-elle à point nommé comme quand on tourne un robinet ? Sous cette obligation, et sous cette régularité, l’esprit s’émousse et s’use, ou, si la vanité le soutient, il devient une mécanique de bavardage qui, à tout propos, hors de propos, part et ne s’arrête plus. Lorsque nous naissons, les forces de notre âme sont en équilibre. Qu’un métier soit un emploi utile de ces forces, un remède contre l’ennui, à la bonne heure. Mais, ainsi qu’une maladie, il rompt ce balancement exact. En développant un organe spirituel, il fait périr les autres. Le rôle accepté détruit l’homme naturel. C’est un acteur qui partout est acteur, et qui, une fois hors de son théâtre, est un sot. »
Ce devenir-acteur du monde Macluhan en parle très bien à propos du roi Lear. Taine a tout dit avant tout le monde, comme Dumas, Poe, Baudelaire et les autres (pourquoi croyez-vous que j’insiste ?).
Et le monde moderne a ainsi accouché non pas d’une souris, mais d’un rat bourgeois. Dans une admirable note sur son Anglaise, Taine écrit :
« En dehors des sectaires qui aimaient surtout leur système, beaucoup de Français aimaient passionnément la France, et l’ont prouvé par leurs sacrifices, leur zèle et leur courage. La vérité est que l’esprit public ne se montre pas chez nous sous la même forme qu’en Angleterre et aux États-Unis, par l’étude froide et sérieuse des affaires publiques, par l’action locale et journalière, par l’association multipliée, efficace et pratique. On bavarde en phrases générales et vagues, on laisse prendre son argent au percepteur, on marche à la frontière, et on se fait tuer (Note du traducteur). »
Aujourd’hui on n’ira pas se faire tuer pas les russes en Biélorussie (encore que, en insistant un peu à la télé…), mais on se fera piquer, stériliser, numériser et remplacer.
[Publication initiale (2017) : dedefensa.org]
Par Nicolas Bonnal
Le Français de souche (vivement son Grand Remplacement !) qui vient d’élire Macron et sa clique est impardonnable. Jusqu’à François Hollande même, on avait de bonnes raisons d’aller voter pour virer Sarkozy et son cirque hyper-présidentiel et belliciste par exemple. On était encore un peu de gauche ou de droite. Maintenant on a quoi ? Un banquier aux ordres qui va nous dépouiller pour le capital mondial et appliquer une dictature anarcho-totalitaire bonne à satisfaire le Qatar et les cathos zombies qui se disputent sa couche. Et ce n’est pas faute d’avoir tenté de le lui expliquer, moi, mille autres, sur ce site et ailleurs. Mais rien n’y fait, ce peuple reste prodigieusement imbécile (Léon Bloy, dont on fête le centenaire), il fait du bouche à putsch.
L’antisystème se montre inconsolable, je vais le consoler. Pas besoin en effet de neuro-piratage, le crétinisme du Français de souche est un fait avéré par l’histoire. Que la plupart des retraités comme on dit aient oublié pour se rassurer que Macron était ministre de Hollande — et une nullité de ministre de notre ex-économie — est un détail, vu ce que ce peuple a essuyé comme coups de pied au derrière durant des siècles. Relisez Rabelais et ses moutons de Panurge (nous on est des Mouton-Rothschild !) et, si vous avez le courage, lisez Jules César sur les Gaulois (VI, 13) et la manière druidique ou cavalière de traiter le populo. Pas besoin des Bilderbergs et du neuro-piratage.
Lisons Hippolyte Taine cette fois. Lui parle de notre révolution française, bien chaotique, bien sanguinaire et bien ratée, et qui donnait tant plaisir aux gouvernements prussiens et aux britanniques :
« Dans ces douze mois, le gouvernement de la France a été renversé, son commerce est détruit, les campagnes sont dépeuplées par la conscription, le peuple est privé du pain qui le faisait vivre. On a établi un despotisme plus absolu que celui de la Turquie, les mœurs de la nation sont corrompues, son caractère moral est flétri aux yeux de toute l’Europe. Une rage de barbares a dévasté les plus beaux monuments de l’art ; tout ce qui embellit la société ou contribue à adoucir l’existence a disparu sous le règne de ces Goths modernes. »
Vous voyez qu’on peut descendre encore plus bas que le Bataclan, le débat de Marine et la prochaine abolition du salaire brut ! Taine continue :
« Même les choses nécessaires à la vie deviennent rares et insuffisantes pour la consommation le riche est pillé et persécuté, et cependant le pauvre manque de tout. Le crédit national est arrivé au dernier degré d’abaissement, et cependant on crée une dette immense qui s’accroît tous les jours ; enfin l’appréhension, la méfiance et la misère sont presque universelles. »
La dame qui vit cette époque tragi-comique n’accuse pas la Trilatérale et les Illuminati. Et pour cause :
« Tout ceci est l’œuvre d’une bande d’aventuriers qui sont maintenant divisés contre eux-mêmes, qui s’accusent les uns les autres des crimes que le monde leur impute à tous, et qui, sentant qu’ils ne peuvent plus longtemps tromper la nation, gouvernent avec des craintes et des soupçons de tyrans. Tout est sacrifié à l’armée et à Paris ; on vole aux gens leur subsistance pour subvenir aux besoins d’une métropole inique et d’une force militaire qui les opprime et les terrorise… »
Le Français adore son percepteur et le troupeau de commissaires européens ?
Rien de nouveau sous le sommeil :
« Tous les points de la France sont infestés par des commissaires qui disposent sans appel de la liberté et de la propriété de tout le département où ils sont envoyés. Il arrive souvent que ces hommes sont délégués dans des villes où ils ont déjà résidé ; ils ont ainsi une opportunité de satisfaire leur haine personnelle contre tous ceux qui sont assez malheureux pour leur avoir déplu. »
Le nouvel ordre mondial, on a déjà donné — au nom de la Liberté comme toujours dans ce pays où « on est conifié par les mots, on croit que le monde est un mot » (Céline) !
La bonne dame britannique prend alors peur du peuple de France qui se laisse traiter comme ça :
« Je crains que vous ne doutiez de ma véracité lorsque je décris l’extrême ignorance et l’inattention des Français pour tout ce qui regarde les hommes publics et les mesures politiques. Ils ne tirent aucune conclusion du passé, ne forment aucune conjecture pour l’avenir. Ils s’écrient : “Cela ne peut pas durer comme cela” et ils laissent le reste à la conduite de la Providence avec une résignation qui n’est certainement ni pieuse, ni philosophique. »
Taine lui écrira ailleurs ces lignes presque à se tordre, comme dirait Allais. Ce n’est pas un hasard si depuis Tocqueville et Flaubert la France a dû se contenter des humoristes et des chansonniers.
« La vérité est que l’esprit public ne se montre pas chez nous sous la même forme qu’en Angleterre et aux États-Unis, par l’étude froide et sérieuse des affaires publiques, par l’action locale et journalière, par l’association multipliée, efficace et pratique. On bavarde en phrases générales et vagues, on laisse prendre son argent au percepteur, on marche à la frontière, et on se fait tuer. »
Compris ? Antisystème, ne perds plus ton sang-froid !
Encore un peu de Taine, qui ferait du bien aux vieux abonnés du Figaro ou de Libération :
« Tout dépend, dans un État, du degré et de l’espèce d’impression que la somme des individus reçoit d’un événement donné. Avec l’excitabilité, les inquiétudes soupçonneuses, les prévisions lointaines, la logique immédiate des Français, le gouvernement absorbant et compressif devient nécessaire. — Voyez la terreur produite par le socialisme en 1851 ; ils se sont jetés entre les bras du Président. »
Plus rien ne reste que la tourbe imbécile et canaille dont a parlé Flaubert ; malheureusement, que les abstentionnistes comprennent que « le candidat du marché » ne les épargnera pas.
Taine —Un séjour en France de 1792 à 1795. Lettres d’un témoin de la Révolution française (classiques.uqac.ca) ; carnets de voyages (wikisource)
Nicolas Bonnal — Comment les Français sont morts ; la culture comme arme de destruction massive (Amazon_Kindle) ; Céline, le pacifiste enragé
[Source :corbettreport.substack.com]
Par James Corbett
corbettreport.com
19 novembre 2023
Flash info : contrairement aux inquiétudes des conspirationnistes réalistes, le gouvernement mondial n’est PAS une menace lointaine qui nous attend dans un futur dystopique.
Non, il ne s’agit pas d’une menace future. La vérité, c’est que le gouvernement mondial est déjà en place et fonctionne, ici et maintenant.
En fait, il n’agit même pas en secret. Cela se passe de la manière la plus visible qui soit : une fête1.
Oups ! Ai-je dit « fête » ? Je voulais parler de la « Conférence des parties », bien sûr, c’est-à-dire du mécanisme par lequel les États-nations cèdent volontairement leur souveraineté aux technocrates mondialistes depuis des décennies.
Vous n’avez jamais entendu parler de la « Conférence des parties », protestez-vous ? Bien sûr que si. Je parle de la COP de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) pratiquement chaque année. En fait, je la couvre depuis au moins la COP 15 à Copenhague en 2009. N’oublions pas que 2009 a été l’année où le président de l’UE (et laquais du Bilderberg) Herman von Rompuy a déclaré que c’était « la première année d’un gouvernement mondial », citant spécifiquement la COP de Copenhague comme « une nouvelle étape vers la gestion mondiale de notre planète ».
Un pas de plus, en effet.
Avance rapide jusqu’en 2023. Les mondialistes font le plein de leurs jets privés et de leurs limousines avec chauffeur pour une nouvelle fête du vin et du dîner, cette fois-ci la COP 28 à Dubaï. Oui, ce n’est plus qu’une question de semaines avant que nous assistions au rituel annuel de ces prétendus dirigeants mondiaux qui viennent nous faire la leçon, à nous autres, sur le fait que nous n’en faisons pas assez pour sauver la planète.
Mais savez-vous ce qu’est vraiment une COP ? Saviez-vous que la COP de la CCNUCC n’est pas la seule à être dirigée par le gouvernement mondial de facto ? Et saviez-vous que le véritable objectif du soi-disant « traité sur les pandémies » de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) est d’établir une autre chambre de la COP au sein de ce gouvernement fantôme de plus en plus gonflé ?
Montez, attachez votre ceinture et accrochez-vous. Vous allez recevoir l’une des leçons les plus importantes de votre vie.
D’un certain point de vue, le concept de « Conférence des parties » — ou, en anglais, « COP » — est aussi simple et direct qu’inoffensif.
Il suffit de demander à nos <sarcasme>amis</sarcasme> de Climate.gov, qui donnent cette définition de la COP en relation avec le sommet annuel de la CCNUCC :
La COP est une réunion internationale sur le climat organisée chaque année par les Nations unies. COP est l’abréviation de « Conference of the Parties », c’est-à-dire les pays qui ont adhéré — sont des « parties », en termes juridiques — au traité international appelé Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Les parties à ce traité se sont engagées à prendre des mesures volontaires pour empêcher toute « perturbation anthropique dangereuse du système climatique ».
Notez que les sympathiques responsables de Climate.gov (qui vous sont présentés par la National Oceanic and Atmospheric Administration !) tiennent à souligner que, selon les termes de la CCNUCC, les « parties » se sont légalement engagées à prendre des mesures volontaires pour empêcher les dragons du ciel de mettre le feu à la planète.
Détendez-vous, les gars, c’est volontaire* !
*Vous êtes légalement obligés de le faire.
En fait, vous remarquerez que cette étrange tension obligatoire/volontaire est omniprésente dans l’article de Climate.gov sur la COP et dans un grand nombre d’explications similaires sur la COP.
Les parties conviennent d’objectifs spécifiques pour limiter les émissions humaines de gaz à effet de serre (y compris le dioxyde de carbone, le méthane, l’oxyde nitreux et les gaz halogénés comme les CFC) à une quantité spécifique pour une année donnée dans l’avenir. Les pays participants au traité élaborent leurs propres engagements volontaires — connus sous le nom de contributions déterminées au niveau national — afin d’atteindre les objectifs convenus. Les pays sont libres d’élaborer la combinaison de politiques la plus économique ou la plus avantageuse pour eux. Ils doivent rendre compte de leurs succès ou de leurs échecs dans la réalisation de leurs objectifs volontaires lors des réunions annuelles de la Conférence des Parties.
C’est dire si les pays sont libres de développer les politiques les plus économiques ou les plus avantageuses pour eux. Ils « s’accordent sur des objectifs spécifiques » mais « développent leurs propres engagements volontaires » pour atteindre ces objectifs et ils « doivent » rendre compte de leurs progrès dans la réalisation de ces objectifs « volontaires ».
Vous êtes confus ? C’est une bonne chose. Les mondialistes seront heureux d’apprendre qu’ils font bien leur travail.
Ces technocrates se rendent compte que personne ne se donnera la peine de chercher (et encore moins de lire) la Convention-cadre sur les changements climatiques elle-même.
Ils savent que les gens ordinaires ont déjà assez à faire en travaillant de 9 h à 17 h pour joindre les deux bouts, et qu’ils ne sont donc pas susceptibles de découvrir les règles tyranniques que leur gouvernement leur a légalement imposées en vertu de l’article 4 de la convention sur le changement climatique.
Et ils se rendent compte que personne ne prendra la peine de suivre le fil et de découvrir que la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques n’est pas le seul traité supranational mondialiste et destructeur de souveraineté à faire adhérer des nations entières à l’ordre du jour des Nations unies. Il y a aussi la Convention sur les armes chimiques, la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, la Convention de Stockholm et toute une série d’accords internationaux similaires.
Et même si le citoyen moyen se familiarisait avec toutes ces conventions et avec tout ce que ces accords obligent leur pays à faire, il ne prendrait pas la peine de lire les règles de procédure qui dictent la manière dont ces « conférences des parties » se déroulent.
Ainsi, ils ne liront jamais l’article 30 du règlement intérieur de la CCNUCC :
Les réunions de la Conférence des Parties sont publiques, à moins que la Conférence des Parties n’en décide autrement.
Ou la règle 32 :
Nul ne peut prendre la parole au cours d’une réunion de la Conférence des Parties sans avoir obtenu au préalable l’autorisation du Président.
Ou Règle 42 :
Les décisions sur les questions de fond sont prises par consensus, à l’exception des décisions sur les questions financières qui sont prises par un vote à la majorité des deux tiers.
Et si, par un petit miracle, ils parvenaient à se familiariser avec le règlement intérieur de la COP de la CCNUCC, ils s’apercevraient alors qu’ils n’ont même pas effleuré le sujet.
Pourquoi ?
Parce qu’il n’y a pas seulement une COP pour la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, il y a aussi des COP individuelles pour les sous-groupes de la CCNUCC, comme le protocole de Kyoto et l’accord de Paris.
Il y a également une COP pour la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification.
Il y a également une COP pour la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée.
Et une COP pour la Convention sur les armes chimiques.
Et une COP pour la Convention de Stockholm, une COP pour la Convention de Rotterdam, une COP pour la Convention de Bâle et des COP pour la Convention de Vienne et le Protocole de Montréal.
Vous voyez donc que le gouvernement mondial est déjà là. Il fonctionne par le biais d’un réseau de conventions et d’accords, obligeant les gouvernements à agir d’une certaine manière et les engageant à atteindre divers objectifs dans une grande variété de domaines.
Et devinez quoi ? Aussi mauvais que cela puisse être, la situation est sur le point de s’aggraver.
Vous souvenez-vous de ce document de l’OMS, communément appelé « traité sur les pandémies », au sujet duquel j’ai tiré la sonnette d’alarme à maintes reprises au cours des deux dernières années ?
Eh bien, il ne s’appelle plus « traité sur la pandémie ». Il est passé de son ancien titre officiel de « convention, accord ou autre instrument international de l’OMS sur la prévention, la préparation et l’intervention en cas de pandémie » à l’« accord de l’OMS sur la pandémie », un peu moins lourd à manier. Le dernier projet de cet accord a été publié il y a trois semaines. L’avez-vous déjà lu ?
Si vous l’avez lu, vous aurez remarqué toutes sortes de choses horribles cachées au plus profond de cette forêt de jargon juridique — comme, par exemple, le langage inquiétant utilisé pour décrire le problème de l’« infodémie » et la solution de censure d’Internet qui l’accompagne, que Tedros et l’UNESCO convoitent maintenant ouvertement.
Vous aurez aussi sans doute remarqué un élément pertinent pour le sujet d’aujourd’hui, enfoui à la page 24 :
Bien sûr.
Oui, il s’agit d’une manœuvre tout droit sortie du manuel de jeu mondialiste : distraire tout le monde avec le mot « traité » pour leur faire croire qu’il s’agit d’un document qui nécessitera une ratification spéciale par leur parlement national ou leur congrès, puis leur présenter un « accord » qui, dans la plupart des cas, contournera complètement le processus politique. Puis, en guise de coup de grâce, on insère un article établissant une toute nouvelle bureaucratie, qui servira de facto de bras armé du gouvernement mondial — un bras armé qui pourra alors remanier et réécrire les règles de santé mondiale à sa guise, à n’importe quel moment dans l’avenir.
C’est malveillant. C’est une dictature. C’est une parodie. Mais il faut admettre que c’est brillant.
En supposant que cet accord (ou quelque chose de très similaire) soit approuvé par la 77e Assemblée mondiale de la santé à Genève en mai prochain, la plupart des gens ne comprendront pas ce qui vient de se passer, pas plus qu’ils n’ont compris ce qui s’est passé lorsque la CCNUCC a créé sa COP ou que toutes ces autres institutions mondialistes ont créé leurs COP respectives.
Alors, pour ceux qui ne peuvent pas se donner la peine de lire l’accord de l’OMS sur les pandémies (ou même simplement l’article 21 de cet accord), voici les points essentiels :
1. Il est institué une Conférence des Parties. La Conférence des Parties est composée de délégués représentant les Parties à l’Accord de l’OMS sur les pandémies. Seuls les délégués représentant les Parties participeront à la prise de décision de la Conférence des Parties. La Conférence des Parties établit les critères de participation des observateurs à ses travaux.
[. . .]
3. La première session de la Conférence des Parties sera convoquée par l’Organisation mondiale de la Santé au plus tard un an après l’entrée en vigueur de l’Accord de l’OMS sur les pandémies.
4. Après la première session de la Conférence des Parties : a) des sessions ordinaires ultérieures de la Conférence des Parties se tiendront chaque année.
[. . .]
5. La Conférence des Parties adopte par consensus son règlement intérieur à sa première session.
6. La Conférence des Parties adopte par consensus des règles financières pour elle-même et pour le financement de tout organe subsidiaire de la Conférence des Parties qui est ou pourra être créé, ainsi que des dispositions financières régissant le fonctionnement du Secrétariat. Elle adopte également un budget biennal.
7. La conférence des parties examine régulièrement la mise en œuvre de l’accord de l’OMS sur les pandémies et prend les décisions nécessaires pour promouvoir sa mise en œuvre effective ; elle peut adopter des amendements, des annexes et des protocoles à l’accord de l’OMS sur les pandémies.
[. . .]
9. La Conférence des Parties crée des organes subsidiaires pour mener à bien les travaux de la Conférence des Parties, si elle le juge nécessaire, selon des termes et des modalités à définir par la Conférence des Parties. Ces organes subsidiaires peuvent comprendre, sans s’y limiter, un comité de mise en œuvre et de respect des dispositions, un groupe d’experts chargé de donner des avis scientifiques et un groupe consultatif d’experts du système PABS de l’OMS.
Nous y voilà. Le gouvernement mondial est sur le point d’assumer la juridiction sur votre santé. Il est en train de mettre en place son organe directeur chargé de rédiger les règles qui régiront la réponse de votre gouvernement à la prochaine épidémie déclarée. Et presque personne dans le public n’est au courant de ce qui se passe.
Des questions ?
Je ne pense pas.
Bien sûr, certains pourraient objecter : « Ne vous inquiétez pas ! Il est écrit noir sur blanc que le règlement intérieur et le financement de cet organe doivent être adoptés par consensus ! On ne peut même pas mettre trois de ces technocrates d’accord sur ce qu’ils vont manger à midi, alors rien ne sera jamais décidé ! »
Mais si vous soulevez cette objection, il est clair que vous n’avez jamais vu à quoi ressemble ce type d’« accord consensuel » dans le processus de l’OMS. (SPOILER: il s’agit d’un vieil homme confus qui demande vaguement si le comité est prêt à approuver le projet, qui regarde la salle des bureaucrates à moitié endormis pendant dix secondes, qui déclare que le projet a été approuvé et qui doit ensuite répéter sa déclaration pour que les fonctionnaires et les gogos rassemblés sachent que c’est à eux d’applaudir).
C’est ainsi que votre futur organisme gouvernemental mondial verra le jour. C’est ainsi qu’il établira son règlement intérieur (qui peut être composé de n’importe quelle règle bidon). C’est ainsi qu’il établira son mécanisme de financement : dans un simulacre transparent de parodie de la « démocratie » que ces dirigeants prétendent chérir.
« Face à l’argument exposé dans cet éditorial, les professeurs, les hommes politiques et les laquais de l’establishment obéissant à la presse laxiste disent : “Tais-toi, théoricien de la conspiration !” Cette affaire de COP n’est pas un gouvernement mondial et n’a rien d’infâme. Après tout, vos gouvernements se sont volontairement engagés à respecter ces accords et donc à être liés par les décisions prises par les COP ! »
Difficile de contester cela, n’est-ce pas ?
À moins, bien sûr, que nous comprenions que l’adoption arbitraire par nos gouvernements de règles et de restrictions sans notre consentement est précisément le problème.
Tout d’abord, nos représentants élus nous font adhérer à des organismes internationaux globaux et non responsables tels que l’ONU et l’OMS. Ensuite, ils ont nommé des bureaucrates sans nom ni visage pour agir en tant que nos représentants non élus au sein de ces organismes qui nous font signer des conventions et des accords dont la plupart d’entre nous ignorent même l’existence. Ces conventions et accords « obligent » ensuite nos gouvernements nationaux à prendre certaines mesures ou à s’abstenir de certaines autres mesures. Enfin, ces mêmes gouvernements adoptent une législation qui fait de ces engagements, de ces objectifs et de ces restrictions la loi de notre pays.
Mais tout cela est « volontaire », voyez-vous ? Tout est transparent. Il n’y a pas de gouvernement mondial, mais seulement des conventions mondiales que les parties ont accepté de respecter.
Et pour remuer le couteau dans la plaie, les mêmes vérificateurs de faits qui nieraient que ce réseau de conventions et d’accords constitue en fait un gouvernement mondial de facto nous diront également que ces accords ne vont pas assez loin dans la suppression de toute prétention à la souveraineté nationale dans le système international.
Il suffit de demander à Mostafa El-Harazi et Noor Irshaidat. Ce sont les deux étudiants en doctorat en droit de la Carey School of Law qui ont rédigé un article d’opinion pour le Kleinman Center for Energy Policy l’année dernière, dans lequel ils se plaignent : Ce qui fait notablement défaut [à la CCNUCC], cependant, c’est un « mécanisme d’application », une disposition visant à dissuader explicitement les États parties à la CCNUCC de ne pas respecter les engagements pris en leur imposant des amendes ou en saisissant un tribunal international tel que la Cour internationale de justice.
Ou demandez aux experts de ScienceDirect qui, dans leur présentation de la CCNUCC, déplorent son manque de moyens : « La CCNUCC contient peu d’exigences spécifiques et, notamment, aucune obligation contraignante pour les signataires de réduire les émissions de gaz à effet de serre. »
Ou demandez à des spécialistes comme Robert Keohane et David Victor, dont l’article de 2016 dans Nature intitulé « Coopération et discorde dans la politique climatique mondiale » affirme que « l’atténuation efficace du changement climatique nécessitera une coopération internationale approfondie, qui est beaucoup plus difficile à organiser que la coordination superficielle observée jusqu’à présent. »
Mais, comme je l’ai dit, pas une personne sur mille ne connaît la Convention-cadre sur le changement climatique, la Convention de Bâle ou la proposition de COP de l’OMS, et pas une personne sur un million ne sait ce que l’un de ces organismes oblige « volontairement » les parties membres à faire.
Préférez-vous regarder un match de football ou lire un document de cent pages de jargon juridique compliqué ? Préférez-vous sortir en ville avec vos amis ou vous engager à étudier l’organigramme d’une obscure branche de la bureaucratie de l’ONU ?
Tout à fait. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner, La fin du monde vous fera pleurer.
Alors, si nous périssons par manque de connaissances, comment pouvons-nous prospérer ?
En en apprenant davantage sur ces instruments de contrôle, voilà comment.
Plus précisément, nous pouvons contrer l’agenda mondialiste en apprenant davantage sur les traités, les accords et les conventions qui régissent de plus en plus nos vies. Ensuite, nous pouvons transformer nos connaissances en un mouvement. Nous saurons que nous progressons lorsque la volonté de sortir de l’OMS (et de l’ONU par la même occasion) deviendra la seule question politique dont les gens voudront parler. Et nous saurons que nous avons vraiment réussi lorsque ces mêmes personnes commenceront à parler de la souveraineté individuelle et de notre droit naturel à nous retirer de tout système de contrôle gouvernemental.
Sisyphe, voici le rocher3. Fais-le bien rouler !
[Source : lesakerfrancophone.fr]
Par David C. Hendricksonmm — Le 8 novembre 2023 — Source Responsible Statecraft
Le système d’alliances des États-Unis est souvent qualifié d’empire, et pour cause. Mais il s’agit d’une forme particulière d’empire, dans lequel le centre métropolitain semble dirigé et gouverné par la périphérie. Dans l’idée classique de l’empire, la domination va du haut vers le bas. Ce n’est pas le cas ici.
Cette inversion n’est nulle part plus évidente que dans les relations entre les États-Unis et Israël. Biden a réagi aux attentats du 7 octobre en apportant un soutien total à Israël dans son objectif de destruction du Hamas. Le même schéma se retrouve dans la politique à l’égard de l’Ukraine. Pendant 18 mois, l’administration Biden n’a pas osé fixer de limites aux objectifs de guerre de l’Ukraine, sauf celui, absurde, d’une victoire totale sur la Russie, avec Vladimir Poutine sur le banc des accusés à la fin.
Ces certitudes ont toutefois commencé à s’ébranler. Au sein de l’administration, il semble que l’on ait pris conscience, ces dernières semaines, qu’aucun de ces deux objectifs n’était atteignable. L’essentiel des rapports récents est le suivant : les Ukrainiens sont en train de perdre la guerre et doivent reconnaître ce fait, mieux vaut maintenant que trop tard. Les Israéliens se comportent de manière barbare et doivent être maîtrisés, faute de quoi notre réputation dans le monde sera ruinée.
Sur le front de l’Ukraine, il y a eu deux bombes. La première fut le reportage de NBC brossant un tableau désastreux de la situation militaire et rapportant que des diplomates américains et européens essayaient d’expliquer à l’Ukraine la nécessité de restreindre ses objectifs. Il est trop tard pour espérer autre chose qu’une impasse, a déclaré un ancien fonctionnaire de l’administration : « il est temps de conclure un accord ».
D’autre part, un long essai paru dans le Time a dépeint Zelensky comme une figure messianique et fanatique, déconnectée des perspectives d’avenir de l’Ukraine qui se dégradent. La corruption est encore pire que ce que l’on prétend. L’Occident fait des pieds et des mains pour obtenir des équipements militaires essentiels. L’armée ukrainienne ne parvient pas à trouver de nouvelles recrues. Des crédits supplémentaires du Congrès, même les 61 milliards de dollars demandés par l’administration, ne peuvent résoudre aucun de ces problèmes.
Pendant 18 mois, l’administration Biden a insisté sur le fait que les objectifs de l’Ukraine lui appartenaient entièrement et que les États-Unis les soutiendraient quoi qu’il arrive. Avec l’échec presque total de l’offensive ukrainienne de l’été, l’administration semble se dégonfler. Tout cela est très secret, des discussions « discrètes » étant réputées se dérouler en coulisses. Il est probable, en effet, que les conseillers de Biden soient divisés. Bien que la politique officielle n’ait pas changé d’un iota, l’élan est clairement là.
Le problème d’Israël est encore plus aigu. Selon des informations largement répandues, Joe Biden et ses conseillers estiment qu’Israël s’est lancé dans un projet fou à Gaza. Ils considèrent que les États-Unis, qui ont donné à Israël un feu vert, un chèque en blanc et des tonnes de bombes, seront tenus directement responsables des terribles conséquences humanitaires. Ils ne pensent pas qu’Israël ait défini un objectif cohérent. Ils craignent de soutenir une énormité morale. Ils constatent que le soutien des autres s’effondre rapidement.
Au cours du mois dernier, Biden a mis en garde les Israéliens contre la colère et la vengeance en représailles du 7 octobre, leur a déconseillé une invasion terrestre de Gaza et a insisté pour qu’Israël cherche à éviter autant que possible la mort de civils. Les conseillers militaires de Biden recommandent d’utiliser des bombes plus petites. L’érosion du soutien, a déclaré son administration aux Israéliens, « aura des conséquences stratégiques désastreuses pour les opérations des Forces de défense israéliennes contre le Hamas ». Le week-end dernier, le secrétaire d’État Antony Blinken a présenté ces idées au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et lui a demandé une « pause humanitaire ». Réponse de Bibi : ça n’arrivera pas.
J’ai une idée. Les États-Unis pourraient menacer de suspendre les livraisons militaires à Israël s’il n’accepte pas un cessez-le-feu. Cela pourrait faire impression. Toutefois, depuis George H. W. Bush, aucun président n’a voulu défier Israël. L’approche des États-Unis au cours des 30 dernières années, comme aujourd’hui, a été celle d’un ami indéfectible : « C’est vraiment pour votre bien, mais nous n’oserions pas l’exiger de vous ».
Serrer les Israéliens dans ses bras et les rassurer sans cesse sur leur engagement indéfectible : voilà comment finir une discussion avec eux.
Certains dirigeants israéliens ont répondu à cette approche, mais Benjamin Netanyahu n’a jamais été l’un d’entre eux. Le commentaire de Bill Clinton après sa première rencontre avec Netanyahou en 1996 — « Qui est la putain de superpuissance ici ? » — reflète le jugement réfléchi de Bibi selon lequel il peut susciter une opposition intérieure aux États-Unis qui annulera toute menace de la part d’un président américain.
Aujourd’hui, 66 % des Américains souhaitent un cessez-le-feu, selon un sondage, mais moins de 5 % des membres de la Chambre des représentants sont de cet avis ; Bibi sait donc peut-être de quoi il parle. L’AIPAC est occupé à lancer des attaques contre les quelques membres courageux du Congrès qui ont critiqué Israël et appelé à un cessez-le-feu.
Mais Biden doit se préoccuper du rôle plus important de l’Amérique dans le monde et il est conscient que ce qui se prépare à Gaza va probablement ruiner la légitimité de l’Amérique. Qui, dans les pays non occidentaux, pourra supporter à nouveau une leçon de morale de la part des États-Unis sur leur engagement zélé en faveur des droits de l’homme ? Quel sera l’impact sur le dossier de l’Amérique contre la Russie ?
Si l’on s’en tient aux tendances actuelles — pas de sortie vers le Sinaï pour la masse de la population de Gaza, effondrement complet des systèmes de santé et d’assainissement, pression militaire et blocus économique israéliens incessants, 1,5 million de personnes déjà déplacées — il est difficile d’imaginer que le nombre total de victimes parmi les habitants de Gaza puisse être inférieur à plusieurs centaines de milliers. Il est probable que les maladies et les épidémies seront beaucoup plus nombreuses que les balles et les bombes. Comme l’a déclaré Netanyahu, cette expérience restera gravée dans les mémoires « pendant des décennies ». Et si elle s’inscrivait dans l’opinion publique mondiale comme un crime historique ?
Il est incroyable que les partisans de la guerre totale contre le Hamas invoquent Dresde, Hiroshima et d’autres atrocités pour justifier leur démarche, négligeant le fait que ni l’Allemagne ni le Japon n’avaient personne pour pleurer sur eux après la guerre, alors que les Palestiniens ont 1,8 milliard de musulmans pour pleurer sur eux aujourd’hui.
Il est évident qu’Israël ne peut pas poursuivre jusqu’au bout son objectif de destruction du Hamas sans provoquer des morts à une échelle biblique. Il n’y a aucune raison pour que les États-Unis adhèrent à ces objectifs.
Le choix de Biden est de soit se montrer ferme avec les Israéliens soit d’accepter ce qu’il craint d’être une gigantesque catastrophe.
Il existe des précédents de fermeté, mais ils sont certes lointains. Dwight Eisenhower l’a fait en 1956 à propos de l’aventure anglo-franco-israélienne de Suez. Bush I l’a fait en 1991 à propos des garanties de prêt accordées à Israël.
Mais l’exemple le plus marquant est celui de 1982, lorsque Ronald Reagan a demandé au Premier ministre israélien Menachem Begin de cesser les bombardements israéliens sur Beyrouth. « Menachem », a dit Reagan, « c’est un holocauste ». À la surprise de Reagan, sa menace d’une réévaluation angoissante a fonctionné. « Je ne savais pas que j’avais un tel pouvoir », a-t-il déclaré à son assistant Mike Deaver. Au moment de la menace de Reagan, le bilan de deux mois et demi de guerre avoisinait les 20 000 morts, dont près de la moitié étaient des civils.
Biden aura-t-il la volonté d’affronter Netanyahou ? Son administration forcera-t-elle l’Ukraine à s’asseoir à la table des négociations ?
Dans notre drôle d’empire, où ce sont les vassaux qui mènent la danse, des tendances profondément ancrées dictent une réponse négative à ces deux questions, alors qu’une politique avisée dicterait des réponses positives. Le moment est peut-être venu d’adopter une nouvelle politique dans laquelle l’Amérique favorise ses propres intérêts nationaux plutôt que les leurs.
David C. Hendrickson
Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.
[Source : lesakerfrancophone.fr]
[Illustration : des soldats israéliens assis sur des véhicules blindés alors qu’ils se déploient près de la frontière entre le sud d’Israël et la bande de Gaza, le 20 novembre 2023. (Crédit : Menahem Kahana/AFP). Source]
La réalité de la nécessité de la guerre pénètre largement la conscience du monde arabe et islamique.
Par Alastair Crooke — Le 26 octobre 2023 — Source Strategic Culture
Tom Friedman a lancé son terrible avertissement dans le New York Times jeudi dernier :
Je pense que si Israël se précipite maintenant [unilatéralement] à Gaza pour détruire le Hamas, il commettra une grave erreur qui sera dévastatrice pour les intérêts israéliens et américains.
Je parle du traité de paix de Camp David, des accords de paix d’Oslo, des accords d’Abraham et de l’éventuelle normalisation des relations entre Israël et l’Arabie saoudite. Tout cela pourrait partir en fumée.
Malheureusement, a déclaré le haut fonctionnaire américain [Friedman], les chefs militaires israéliens sont aujourd’hui plus faucons que le Premier ministre. Ils sont rouges de rage et déterminés à porter au Hamas un coup que l’ensemble du voisinage n’oubliera jamais.
Friedman parle ici, bien sûr, d’un système d’alliance américain, articulé autour de l’idée que les forces militaires d’Israël sont invincibles — le paradigme de la « petite OTAN » qui agit comme la structure essentielle à la propagation de l’ordre fondé sur des règles dirigé par les Américains au Moyen-Orient.
Ce paradigme est analogue aux structures de l’alliance de l’OTAN, dont la prétendue « invincibilité » a soutenu les intérêts américains en Europe (du moins jusqu’à la guerre en Ukraine).
Un membre du cabinet israélien a déclaré au correspondant israélien expérimenté en matière de défense, Ben Caspit, qu’Israël ne pouvait tout simplement pas permettre que sa dissuasion à long terme soit sapée :
C’est le point le plus important — « notre dissuasion », a déclaré la source principale du cabinet de guerre. « La région doit rapidement comprendre que quiconque porte atteinte à Israël comme l’a fait le Hamas paie un prix disproportionné. Il n’y a pas d’autre moyen de survivre dans notre voisinage que d’exiger ce prix maintenant, car de nombreux yeux sont fixés sur nous et la plupart d’entre eux n’ont pas nos intérêts à cœur. »
En d’autres termes, le « paradigme » israélien repose sur la manifestation d’une force écrasante, dirigée vers tout défi émergent. Ce paradigme trouve son origine dans l’insistance des États-Unis pour qu’Israël soit à la fois à la pointe du progrès politique (toutes les décisions stratégiques relèvent exclusivement d’Israël dans le cadre d’Oslo) et à la pointe du progrès militaire par rapport à tous ses voisins.
Bien qu’elle soit présentée comme telle, cette formule ne permet pas de parvenir à un accord durable et pacifique permettant de respecter la résolution 181 de l’Assemblée générale des Nations unies de 1947 (division de la Palestine de l’époque du Mandat) en deux États. Au contraire, Israël, sous le gouvernement Netanyahou, se rapproche de plus en plus d’une fondation eschatologique d’Israël sur la « Terre d’Israël » (biblique) — une démarche qui expurge totalement la Palestine.
Ce n’est pas une coïncidence si, lors de son discours à l’Assemblée générale le mois dernier, Netanyahou a présenté une carte d’Israël sur laquelle Israël dominait de la rivière à la mer et où la Palestine (en fait, tout le territoire palestinien) était inexistante.
Tom Friedman, dans ses réflexions au NYT, craint peut-être que, de même que la piètre performance de l’OTAN en Ukraine a brisé « le mythe de l’OTAN », l’effondrement de l’armée et des services de renseignement israéliens du 7 octobre et ce qui se passera dans son sillage à Gaza « pourraient [également] faire exploser toute la structure de l’alliance pro-américaine » au Moyen-Orient.
La confluence de deux humiliations de ce type pourrait briser la colonne vertébrale de la primauté occidentale. Tel semble être l’essentiel de l’analyse de Friedman. (Il a probablement raison).
Le Hamas a réussi à briser le paradigme de la dissuasion israélienne : il n’a pas eu peur, les Forces de défense israéliennes ont prouvé qu’elles étaient loin d’être invincibles et la rue arabe s’est mobilisée comme jamais auparavant (confondant les cyniques occidentaux qui se moquent de la notion même de « rue arabe »).
Voilà où nous en sommes, et la Maison-Blanche est ébranlée. Les PDG d’Axios, VandeHei et Mark Allen, ont pris la plume pour avertir :
Jamais nous n’avons parlé à autant de hauts responsables gouvernementaux qui, en privé, sont si inquiets… [qu’] une confluence de crises pose des problèmes épiques et fasse courir un danger historique. Nous n’aimons pas nous montrer catastrophistes. Mais nous voulons faire retentir la sirène d’un réalisme clinique et lucide : les responsables américains nous disent qu’à la Maison-Blanche, cette semaine a été la plus lourde et la plus effrayante depuis que Joe Biden a pris ses fonctions il y a un peu plus de 1 000 jours… L’ancien ministre de la Défense Bob Gates nous dit que l’Amérique est confrontée aux crises les plus graves depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, il y a 78 ans…
Aucune de ces crises ne peut être résolue ou éliminée : les cinq crises pourraient se transformer en quelque chose de beaucoup plus grave… Ce qui effraie les responsables, c’est la façon dont les cinq menaces pourraient se fondre en une seule. (Une guerre qui s’étend alors qu’Israël pénètre dans Gaza ; l’ » alliance antiaméricaine » Poutine-Xi ; un Iran « malveillant » ; un Kim Jong Un « déséquilibré » et des vidéos et informations truquées).
Toutefois, l’article de Friedman dans le NYT ne mentionne pas le revers de la médaille, car le paradigme israélien a deux faces : la sphère interne, qui est distincte de la nécessité externe d’imposer un prix disproportionné aux adversaires d’Israël.
Le « mythe » interne veut que l’État israélien « assure les arrières de ses citoyens », où que vivent les Juifs en Israël et dans les territoires occupés — des colonies les plus reculées aux ruelles de la vieille ville de Jérusalem. Plus qu’un contrat social, il s’agit d’une obligation spirituelle due à tous les Juifs vivant en Israël.
Ce « contrat social » de sécurité vient cependant de s’effondrer. Les Kibboutzim autour de Gaza ont été évacués ; vingt kibboutz ont été évacués du nord et un total de 43 villes frontalières ont été évacuées.
Ces familles déplacées feront-elles à nouveau confiance à l’État ? Retourneront-elles un jour dans les colonies ? La confiance a été rompue. Pourtant, ce ne sont pas les missiles du Hezbollah qui effraient les habitants, mais les images du 7 octobre dernier dans les communautés de la périphérie de Gaza — la clôture franchie à des dizaines d’endroits, les bases et postes militaires envahis, les villes occupées par les forces du Hamas, les morts qui en ont résulté et le fait qu’environ 200 Israéliens ont été enlevés à Gaza — qui n’ont rien laissé à l’imagination. Si le Hamas a réussi, qu’est-ce qui arrêtera le Hezbollah ?
Comme dans la vieille comptine : Humpty-Dumpty a fait une grosse chute, mais tous les chevaux du roi et tous les hommes du roi n’ont pas pu reconstituer Humpty.
C’est ce qui inquiète l’équipe de la Maison-Blanche. Elle n’est pas du tout convaincue qu’une invasion israélienne de Gaza remettra Humpty d’aplomb. Elle craint plutôt que les événements ne tournent mal pour les Forces de défense israéliennes et que les images, relayées à travers le Moyen-Orient, d’Israël utilisant une force écrasante dans un environnement urbain civil ne révoltent la sphère islamique.
Malgré le scepticisme occidental, certains signes indiquent que cette insurrection dans la sphère arabe est différente et ressemble davantage à la révolte arabe de 1916 qui a renversé l’Empire ottoman. Elle prend une tournure distincte puisque les autorités religieuses chiites et sunnites déclarent que les musulmans ont le devoir de se tenir aux côtés des Palestiniens. En d’autres termes, alors que la politique israélienne devient clairement « prophétique », l’humeur islamique devient à son tour eschatologique.
Le fait que la Maison-Blanche teste les dirigeants arabes « modérés », pressant les Palestiniens « modérés » de former un gouvernement favorable à Israël à Gaza, qui remplacerait le Hamas et imposerait la sécurité et l’ordre, montre à quel point l’Occident est coupé de la réalité. Rappelons que Mahmoud Abbas, le général Sissi et le roi de Jordanie (certains des dirigeants les plus souples de la région) ont refusé catégoriquement de rencontrer Biden après le voyage de ce dernier en Israël.
La colère dans la région est réelle et menace les dirigeants arabes « modérés », dont la marge de manœuvre est désormais limitée.
Les points chauds se multiplient donc, tout comme les attaques contre les déploiements américains dans la région. Certains à Washington prétendent percevoir une main iranienne et espèrent ouvrir la perspective d’une guerre avec l’Iran.
La Maison-Blanche, paniquée, réagit de manière excessive en envoyant d’énormes convois (des centaines) d’avions-cargos chargés de bombes, de missiles et de défenses aériennes (THAAD et Patriot) en Israël, mais aussi dans le Golfe, en Jordanie et à Chypre. Des forces spéciales et 2 000 marines sont également déployés. Plus deux porte-avions et les navires qui les accompagnent.
Les États-Unis envoient donc une véritable armada de guerre. Cela ne peut qu’aggraver les tensions et provoquer des contre-mesures : la Russie déploie actuellement des avions MiG-31 équipés de missiles hypersoniques Kinzhal (qui peuvent atteindre le porte-avions américain au large de Chypre) pour patrouiller en mer Noire, et la Chine aurait envoyé des navires de guerre dans la région. La Chine, la Russie, l’Iran et les États du Golfe sont engagés dans une frénésie diplomatique pour contenir le conflit, même si le Hezbollah s’engageait plus avant dans le conflit.
Pour l’instant, l’accent est mis sur les libérations d’otages, ce qui crée beaucoup de bruit et de confusion (délibérés). Certains espèrent peut-être que les libérations d’otages retarderont, et finalement arrêteront, l’invasion prévue de la bande de Gaza. Cependant, le commandement militaire israélien et l’opinion publique insistent sur la nécessité de détruire le Hamas (dès que les navires américains et les nouvelles défenses aériennes auront été mis en place).
Peu importent les résultats obtenus (par l’invasion), la réalité est que les Brigades Qassam du Hamas ont brisé les paradigmes internes et externes d’Israël. En fonction de l’issue de la guerre à Gaza/Israël, les Brigades peuvent encore provoquer une nouvelle contusion sur le corps politique qui « déclenche [ra] une conflagration mondiale — et [fera] exploser toute la structure de l’alliance pro-américaine que les États-Unis ont construite » (selon les termes de Tom Friedman).
Si Israël entre dans Gaza (et Israël pourrait décider qu’il n’apas d’autre choix que de lancer une opération terrestre, compte tenu de la dynamique politique intérieure et de l’opinion publique), il est probable que le Hezbollah ira de plus en plus loin, laissant les États-Unis devant l’option binaire de voir Israël vaincu ou de lancer une guerre majeure dans laquelle tous les points chauds se fondent « en un seul ».
Dans un sens, le conflit israélo-islamique ne peut être résolu que de cette manière cinétique. Tous les efforts déployés depuis 1947 n’ont fait que creuser le fossé. La réalité de la nécessité de la guerre pénètre largement la conscience du monde arabe et islamique.
Alastair Crooke
Traduit par Zineb, relu par Wayan, pour le Saker Francophone
Par Nicolas Bonnal
Les voyages (déjantés) de Horbiger (ils fêtent leurs vingt ans) : quelques années dans l’ailleurs absolu (introduction en 1187 mots en honneur de l’Ordre du Temple, aux matins des magiciens et aux déplieurs d’espace). Journal de voyage le plus déjanté (dixit Jean Raspail dès 2005 car le maître m’avait à l’œil du côté du salar de la peur) de l’histoire lettrée. En hommage à Horbiger, aux aviateurs allemands, au koala perdu, aux Indiens mats de peau et clairs d’idée, au calumet de l’épée et aux animaux transcendés par maréchal grommelle (renard du dessert)…
Je suis arrivé en Argentine le 9 novembre 2003, devant y passer l’hiver. J’y suis demeuré six ans, traversant toute l’Amérique du Sud, remontant l’Amazone, descendant (et remontant surtout) l’Amazone, zonant dans les Andes, me véhiculant à Ayacucho, séjournant assommé à La Paz, et devenant progressivement fou ; cent nuits de bus pour commencer, oh cette merveilleuse route de Mar del Plata à Bariloche avec un orage de nuit digne de Jules Verne. J’ai donc écrit des rêves nommés contes latinos, qui ont été publiés en 2009 par un de mes éditeurs parisiens, Michel de Maule, et chroniquant déjanté (dixit Raspail) pour le Libre Journal de Serge de Beketch. Les contes étaient espacés, liés à ma crise, à ma folie, à mon démon de midi (décrit déjà par Keyserling), à mes besoins d’écrire, à mes cybercafés, toujours trop rares au Brésil. Plusieurs amis sont venus me rejoindre et j’ai eu la joie de revoir le salar d’Uyuni (surnommé salar de la peur, ne riez pas) ou bien ce macho pêchu où Horbiger — mon double d’alors — prit alors le pouvoir six mille pieds au-dessus des hommes et du temps, faisant de moi fils du sommeil et du soleil, fils de l’inca et du K. de Buzzati cherchant des ombres comme au chant VI de l’Enéide. Ma rêverie païenne n’en finissait pas et je m’en rendis compte un jour où je vis dans un bus qui brinquebalait à 4000 mètres d’altitude une jeunesse péruvienne éprise d’amour (à la TV) pour l’Odyssée de Coppola avec une pléiade-sic de stars hollywoodiennes. Un peu de folie, un peu de tellurisme, et beaucoup de cinéma faisaient de vous un conquistador des terres d’or du rêve et de l’ivoire (comme dirait Nerval — ou bien Virgile).
Les rencontres étaient faciles (elles reparaissent parfois dans le souvenir, pas dans ces textes) ; partout la même langue, partout une curiosité, partout une désinhibition et un pouvoir d’argent (le poder adquisitivo) qui me rendaient tour à tour conquérant et épuisé. La dernière année avant de recevoir Tetyana qui devait m’accompagner dans mes derniers et fastidieux élans. Je vieillissais, endolori, je phagocytai mon temps, et JJ Annaud me demanda ce que je faisais TOUT CE TEMPS là-bas, lui qui y avait tourné sept ans au Tibet tout de même ; Paul Bowles avait dit qu’un voyage on ne sait pas quand on revient — j’allais dire quand on en sort, comme d’un rêve, qui rend la vie vivable, malgré ses vices et ses vertus.
J’ai fini tout cela à Iguaçu par mes rencontres avec mes animaux, les sauvages bien entendu (les autres sont dans l’assiette ou sur le canapé) qui rattrapés par le tourisme et l’américanisation, la massification et l’industrialisation, se corrompaient. Mais j’écrivis et publiais sur place des contes qui traduits en british par Kevin Hin devaient conquérir le lectorat. Mais je renonçai et rentrai, comme j’aime faire. Heureusement il restait assez de force à Tatiana pour me rejoindre à Monaco et partir revivre en Andalousie. Je rentrai même en première classe Air France grâce au riche copain Patrick venu me rejoindre au Chili. Lisez ce livre et n’en attendez rien de rationnel.
La première année, passée essentiellement en Argentine, j’ai passé cent nuits dans les bus. Ils étaient grands et confortables, conditionnés et bichonnés, je me sentais comme Céline dans ses salles de cinéma à New York. Mais c’était mieux que la petite mort des salles de cinéma, c’était la découverte d’un continent avec ses ivresses carnées (porte d’entrée la Pampa mais aussi Mendoza), la dérive d’un incontinent (liberté, que de vins je bus en ton nom !), et cette belle sensation de vide dans un continent où comme en Australie ou au Canada tout le monde vit dans quelques villes-gigantomachies, d’ailleurs pas si laides et insupportables que cela. Mais j’ai vécu à une riche époque (les âges d’or durent peu, cinq ans et pas vingt-cinq mille), vie pas trop chère, autonomie latine, débuts pas trop marqués de la société de consommation, lieux de poésie pas encore profanés, tout cela est loin maintenant.
C’est paradoxalement le lieu où j’ai le plus vécu et bu, celui où j’ai le moins écrit. J’ai fait des vers pourtant, vers patagons écrits en Arequipa, ville-refuge des Andes, marquée par ses volcans, son ciel azur et sa sérénité, abandonnée par les tremblements des terres qui l’avaient tant ravagée. Mes vers au vin blanc alors venaient suivant les verres.
Un de mes textes sur le Chili avait bien plus à Jean Raspail, lecteur de Serge. En fait en quinze jours ou trois semaines j’avais vécu et connu la Patagonie australe, Ushuaia, la Terre de Feu, les glaciers Perito Moreno, et puis j’étais remonté vers les volcans chiliens, leurs neiges et leurs lacs, avant de traverser à la vitesse de l’éclair les lagunes et les déserts de San Pedro de Atacama (honneur à qui recèle des déserts !) et ses geysers. Après un flambant voyage par Uyuni, et un lac blanc et salé transcendant, j’allais m’échouer à Sucre, cité savante et coloniale alors oubliée dans le temps. Tout cela a dû être bien esquinté maintenant.
Horbiger est apparu, suite à un Suisse dingo et sympa (un autre suisse m’impressionna, bédéaste qui dessinait mes projets) et rencontré à Mendoza, dans des vignobles où je ne dessoulai pas. Il y avait des beautés cuivrées et beiges dans ces parages tibétains. Horbiger fut accompagné d’animaux plus dingues que lui encore et je me suis rendu compte depuis que pas mal d’animaux, d’oiseaux surtout sont dingues, parce qu’ils sont plus animés et plus vivants que nous. Leur personnalité est transcendante à côté de celle des touristes ; j’ai remarqué aussi une baisse de la qualité de ces derniers, surtout les froncés, après 2007, élection et Europe obligatoire obligent. La mondialisation commençait à passer facture, avec son inflation, un peu partout.
Le vin, les voyages, les amours, tout cela donnait à cet ensemble un aspect enchanteur. Et puis je repensais à Tintin, à son Tibet d’opérette (comme la Suisse d’opérette de Tartarin-Daudet), aux oreilles cassées (elles se multiplient comme la rose de Saint-Exupéry, c’est cela l’industrie, ruse bottée pour détruire le monde) et je demandai si ce n’était pas cela le Tibet, ces Indiens, cette Copacabana — celle du bord du lac Titicaca, ces merveilleux prêtres chrétiens, ces cérémonies, et cette fragilité qui allait être balayée, massacrée par la mâchoire mondialiste. Alors tout cela donnait envie de rentrer. Il ne faut pas rester dans ces lieux qu’on a connus parfaits.
Aujourd’hui c’est la mâchoire de fer numérique qui se referme sur tout. Mais on en parle ailleurs. Peut-être que l’Amazonie, seule avec ses eaux et ses bêtes, garantit quelque nature libre, encore.
[Illustration : source]
Amal en forme ; voici son petit compte-rendu sur nos froncés enthousiastes et leur quotidien mâtiné de dystopie : « Dans l’entourage d’une de mes connaissances, les personnes souffrent de l’inflation et ne mangent plus à leur faim. Ils ne prennent plus qu’un repas par jour. Il est désolant de voir que même à ce stade, il n’y ait aucune réaction de leur part… Cette même personne, m’a affirmé qu’une amie à lui, est décédée à 28 ans d’une crise cardiaque, une autre jeune femme qui à moins de la trentaine, a eu deux AVC et est toujours souffrante. Les effets secondaires de l’injection obligatoire font beaucoup de dégâts et personne ne se réveille… Le métier en vogue est porteur funéraire, on en recherche régulièrement depuis un an… La folie continue, les débiles continuent, encore, à aller chercher leur dose mortelle. » Sinon, l’État fait la pub pour le Grand Reset : notre extermination se rapproche…
Par Amal
Nous vivons depuis des semaines des jours pluvieux ininterrompus. Hier, nous avons eu la chance d’avoir du soleil et un peu de douceur (15°), cela fait du bien au moral et aux articulations.
Ma petite campagne est bien verte et la rivière est bien pleine, cela n’empêche pas notre presse locale de mettre cette pluie et ce temps sur le dos du réchauffement climatique :
« Ce qui différencie toutefois ces épisodes climatiques, c’est leur côté on-off. À une fin d’été très sèche a succédé un temps est très pluvieux. Réchauffement climatique oblige, nous devrions aller vers une météo de plus en plus nerveuse, avec des blocages de types de temps sur une certaine période. Il va falloir s’attendre à des contrastes. »
Je tiens à préciser que cet été, hormis le mois de juin, il avait plu régulièrement. Je rajouterai que toute cette année, nous avions eu de la pluie. Une année pluvieuse et humide. Voilà en ce qui concerne la météo dans la Marne.
Petite parenthèse : à chaque fois que le ciel est bleu, et c’est systématique, on aperçoit dans le ciel les traînés de chemtrails. Ils ne veulent pas que nous ayons un ciel clair.
Je vous suggère cette belle chanson sur ce phénomène d’Ian Brown intitulé : « Blue sky day ». Voici le lien de la chanson :
Quelques brèves :
Dans l’entourage d’une de mes connaissances, les personnes souffrent de l’inflation et ne mangent plus à leur faim. Ils ne prennent plus qu’un repas par jour. Il est désolant de voir que même à ce stade, il n’y ait aucune réaction de leur part.
Cette même personne, m’a affirmé qu’une amie à lui, est décédée à 28 ans d’une crise cardiaque, une autre jeune femme qui à moins de la trentaine, a eu deux AVC et est toujours souffrante. Les effets secondaires de l’injection obligatoire font beaucoup de dégâts et personne ne se réveille.
J’ai constaté que sur le site de Pôle Emploi, il y avait beaucoup plus d’offres qu’à l’habitué. Cette région est, en général, saturée dans certains secteurs comme le tertiaire. Aujourd’hui, les offres pleuvent, même la région et la préfecture recrutent. Je tiens à préciser que ces administrations font rarement appel à Pôle Emploi. Le métier en vogue est porteur funéraire, on en recherche régulièrement depuis un an.
Un médecin spécialiste qui se fait régler ses honoraires en espèces ou en chèques sur la question de la monnaie numérique : j’ai demandé, comment il envisageait l’avenir avec le CBDC ? Il ne savait pas de quoi je parlais, ni que nous assistions à la fin du cash. Il n’avait pas l’air convaincu ni préoccupé des informations que je lui dévoilais. On n’est pas sorti de l’auberge avec ce genre d’ignare.
Dans la ville des sacres, j’ai demandé à une personne croisée dans la rue de me renseigner sur le nom d’une basilique que j’apercevais au loin. Je l’aborde poliment et lui demande le nom du monument. La personne s’est figée, mais complètement, et a longtemps hésité avant de me répondre. Je n’ai pas compris sa réaction. Les gens ont peur de parler aux passants.
La région a mis en place, cette année, divers abonnements pour les usagers. Il est possible de se les procurer soit au service de la région, soit par l’intermédiaire du chauffeur de bus. Rien de spécial me diriez-vous. J’ai mis dix jours pour avoir mon abonnement. Dix jours ! Pourquoi ça a mis autant de temps ? Je vous explique : plusieurs chauffeurs avaient leurs nouveaux boîtiers HS, d’autres n’en étaient pas encore équipés. Et pour finir, je me suis déplacée à la région et, devinez quoi, c’était fermé (pour info, aucun message à l’entrée n’indiquait la fermeture de l’administration). Tout devient compliqué, c’est de plus en plus compliqué.
Dans le train, la contrôleuse se plaignait aux usagers détenant la carte d’abonnement TGV que son appareil boguait à chaque fois qu’elle passait leur carte et qu’elle était obligée de réinitialiser son boîtier. Elle prenait ça avec le sourire et se demandait si elle arriverait à contrôler tous les passagers.
Les prix dans les différents commerces ont encore prix une hausse, pour exemple le pot de miel de 500 g qui était, il y a un mois, à 3,19 € est passé à 3,39 €.
Dans mon petit bourg, une misérable fête foraine est en place depuis quelques jours. Malgré la pluie et le froid, les gens s’y précipitent. Pour s’amuser, il y a toujours du monde, mais pas pour se rebeller.
A la pharmacie de mon patelin, les gens continuent d’aller chercher leur injection expérimentale. Pendant que j’écris, j’ai reçu un mail de la CPAM :
« Grippe et Covid-19 : se faire vacciner pour être doublement protégé. Pour se protéger contre la grippe, toujours aussi imprévisible et dangereuse, la vaccination est une arme efficace. Elle est prise en charge à 100 % pour les personnes les plus fragiles, notamment celles de 65 ans et plus, les enfants et les adultes souffrant d’une maladie chronique ainsi que les femmes enceintes. Il leur est recommandé de se faire vacciner en même temps contre le Covid-19, maladie qui peut, elle aussi, les affecter sévèrement. ».
La folie continue, les débiles continuent à aller chercher leur dose mortelle.
Les consultations médicales ont augmenté de 1,50 € en France métropolitaine et de 1,80 € dans les régions d’outre-mer.
Tarifs des consultations médicales : ce qui a changé au 1er novembre 2023 |
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La consultation des médecins généralistes et spécialistes conventionnés avec l’Assurance Maladie a augmenté de 1,50 euro en métropole et de 1,80 euro dans les départements et régions d’outre-mer. En métropole, en secteur 1, la consultation d’un médecin généraliste est à 26,50 euros et, dans la plupart des cas, celle d’un médecin spécialiste est à 31,50 euros. Ces consultations sont remboursées à 70 % par l’Assurance Maladie et à 30 % par les complémentaires santé. |
Le froncé continue sa petite vie pourrie sans questionnement et sans réaction. Il va de lui-même à son extinction. Il ne restera plus grand-chose de cette humanité de décérébrés. Dans cette dystopie, mon être ne trouve plus sa vibration naturelle. Ils me fatiguent à un point, j’en peux plus les voir.
[Source : la-chronique-agora.com]
[Illustration : source]
Par Bill Bonner
La Chine s’impose dans la course à la technologie et les institutions défaillantes de l’Occident font des dégâts…
Est-ce vrai ? Les institutions les plus importantes de l’Occident sont-elles en train d’échouer ?
La démocratie ? L’État-nation ? La presse « libre » ? Les combustibles fossiles ? Le capitalisme manipulé par le gouvernement… et l’argent géré par le gouvernement fédéral ? La supériorité technologique ? La puissance de feu ?
Tout ce qui a permis à l’Occident de se hisser au sommet a-t-il été corrompu ? L’Occident a-t-il épuisé tous ses avantages ? Est-il en déclin, comme l’avait prédit Oswald Spengler il y a plus de 100 ans ?
Selon notre modèle d’allocation d’actifs, nous aurions dû vendre nos actions américaines il y a près de 30 ans. Le modèle est « bête », dans la mesure où il ne nous dit rien sur l’état du monde, l’avenir des taux d’intérêt ou quoi que ce soit d’autre. Il est conçu pour nous aider à éviter les « grandes pertes », en nous indiquant simplement quand les actions sont chères en termes d’or. Un investisseur évite les grandes pertes en achetant des actions lorsqu’il peut obtenir les 30 actions du Dow Jones pour moins de 5 onces d’or. Il les vend lorsqu’elles dépassent les 15 onces.
C’est ainsi que notre modèle nous a conseillé de privilégier l’or (aux actions) dès 1996. Nous ne le savions pas à l’époque, mais le modèle nous signalait peut-être quelque chose de beaucoup plus important. Les actions américaines ont atteint leur plus haut niveau historique en août 1999, les actions du Dow Jones se négociant à 42 onces d’or. Il semble aujourd’hui qu’il ne s’agissait pas seulement d’un sommet pour les actions américaines — mais de l’apogée de la puissance, de la richesse et du prestige de la civilisation occidentale. Le budget américain était plus ou moins équilibré. La dette américaine était encore gérable. À l’exception de leur engagement désastreux au Kosovo, les États-Unis étaient en paix. Depuis, les choses se sont dégradées.
Vendredi, nous nous sommes penchés sur le sujet de la démocratie. Comme nous l’avons vu, celle-ci n’est pas extensible. Les électeurs ordinaires ne peuvent pas prendre de décisions pour un empire lointain. Ils peuvent voter, mais leurs votes ne signifient presque rien. Les groupes issus de l’élite sont les véritables décideurs. Comme Nietzsche l’a dit, ils sont trop humains et prennent des décisions qui leur profitent, à eux… et non au « peuple ». Peu à peu, le gouvernement devient corrompu, égoïste et incompétent.
Aujourd’hui, nous allons nous tourner vers la technologie et la puissance de feu. Deux nouvelles annonces — toutes deux en provenance de la Chine — suggèrent que l’Occident a perdu son avance technologique. Voici ce qu’en dit defenseone.com :
« Les États-Unis perdent leur avantage en matière d’IA au profit de la Chine, selon des experts.
“Si vous comparez en pourcentage de leur investissement militaire global, l’APL [l’agence de défense chinoise] dépense entre un et deux pour cent de son budget global pour l’intelligence artificielle, alors que le DoD dépense entre 0,1 et 0,2 de son budget pour l’IA.”
Tara Murphy Dougherty, PDG de Govini, a déclaré aux journalistes lundi :
“La Chine dépasse les États-Unis en matière d’innovation.” »
C’est grâce à sa puissance de feu supérieure que l’Occident a pu conquérir la majeure partie de la planète — l’Amérique du Nord et du Sud, l’Australie, la majeure partie de l’Afrique et une grande partie de l’Asie.
Un exemple : la bataille d’Omdurman, en 1898. Les Britanniques et leurs alliés disposaient de 25 000 hommes. Les Soudanais en avaient 52 000. Mais les Britanniques disposaient également de fusils, de mitrailleuses et d’artillerie modernes. Les Soudanais n’en avaient pas. À la fin des combats, 47 Anglais (et leurs alliés égyptiens) avaient été tués, contre 12 000 soldats ennemis.
Mais les grosses dépenses en armement ne suffisent pas. Au contraire, elles sont même un obstacle. L’industrie de la puissance de feu gagne de l’argent en vendant les armes d’hier. Plus vous dépensez, plus votre matériel devient obsolète. C’est pourquoi une agence de défense plus jeune et plus dynamique est souvent bien plus efficace qu’une bureaucratie militaire plus riche et mieux établie.
La Chine, qui n’a pas à soutenir une industrie de la puissance de feu héritée du passé, peut consacrer une plus grande partie de son budget de défense aux nouvelles technologies, notamment à l’IA et aux drones. Lors de la prochaine guerre, ces innovations seront probablement décisives. Warontherocks.com rapporte :
« La technologie des drones de mer va transformer la guerre navale
Alors qu’en Ukraine, cette technologie est déployée pour résister à une nation d’envahisseurs, des États voyous pourraient en profiter ailleurs.
Les progrès des technologies autonomes sont en train de démocratiser l’accès aux capacités navales de base : les nations et les groupes qui ne disposent pas d’une marine importante pourront rapidement devenir des concurrents en mer.
Ils [les drones navals] sont également conçus pour fonctionner en essaims, ce qui permet des missions coordonnées avec plusieurs véhicules, comme celle de Sébastopol, où au moins sept navires de surface ukrainiens sans équipage ont franchi les défenses du port. En outre, les systèmes de propulsion hybrides combinent l’énergie électrique et l’énergie conventionnelle pour augmenter la portée opérationnelle et l’endurance des véhicules marins autonomes. »
N’ayant pas de marine de type « seconde guerre mondiale » à entretenir, la Chine est en mesure de se concentrer sur une puissance de feu maritime plus récente et plus moderne.
Et c’est un phénomène similaire qui est à l’origine du miracle chinois. En 1979, lorsque la Chine a emprunté la « route capitaliste », elle n’avait que peu d’industries héritées du passé et a dû en créer de nouvelles. La Chine, qui ne disposait plus que d’une infrastructure défectueuse après les débâcles du Grand Bond en avant et de la révolution culturelle, a dû construire de nouveaux trains, avions, automobiles, autoroutes, chemins de fer et ports de marchandises.
C’est pourquoi la Chine dispose d’un réseau complet de trains à grande vitesse — y compris un train maglev à Shanghai qui atteint 600 km/h. La Chine teste actuellement un autre train à grande vitesse qui peut atteindre plus de 800 km/h, ce qui est bien différent des trains Amtrak qui passent par Baltimore, qui sont lourds et traînants.
Mais attendez… Les États-Unis ont inventé Internet. Le pays est toujours le leader des technologies de communication, n’est-ce pas ?
Hier, le South China Morning Post a jeté un peu plus d’eau froide sur la toile :
« La Chine lance l’Internet le plus rapide du monde avec une liaison de 1,2 térabit par seconde, avec des années d’avance sur les prévisions
La Chine a devancé une échéance mondiale en lançant le premier service Internet de nouvelle génération au monde — de 10 fois plus rapide que les principaux axes existants — avec deux ans d’avance sur les prévisions du secteur.
Le réseau dorsal — ainsi appelé parce qu’il constitue la principale voie de transmission de données entre les villes — peut transmettre des données à une vitesse de 1,2 térabit (1 200 gigabits) par seconde entre Pékin, dans le nord, Wuhan, dans le centre de la Chine, et Guangzhou, dans la province méridionale du Guangdong.
La plupart des réseaux dorsaux de l’Internet dans le monde ne fonctionnent qu’à 100 gigabits par seconde. Même les États-Unis n’ont que récemment achevé la transition vers leur réseau Internet2 de cinquième génération à 400 gigabits par seconde. »
Ce qui ne veut pas dire que toute la technologie américaine est aussi décrépite qu’Amtrak.
Mais il y a toujours une suite à l’histoire… Rendez-vous demain.
[Source : dedefensa.org]
Par Philippe Grasset
• L’anecdote a subi l’épreuve du temps pour s’imposer comme l’allégorie de la tragédie grecque elle-même où les acteurs sont emportés par la force de leur destin, — l’allégorie de la grenouille acceptant de porter le scorpion sur son dos pour traverser la rivière bouillonnante et le scorpion piquant la grenouille pour un destin qui est celui de leur mort commune, — « Just Because ». • Dans la crise actuelle, la grenouille est américaniste, le scorpion est israélien et le poison est la stratégie du second imposée à leur destin commun.
• Il nous faut pourtant prendre garde, car il y a deux crises en une : la première est politique et légaliste, traitant des rapports d’Israël et des Palestiniens et courant depuis 1948 ; la seconde est stratégique depuis le début du siècle, sous la forme extraordinaire d’une stratégie quasiment métaphysique, héritée de la fureur du « fanatisme technologique » du général Curtiss LeMay et abritant les ambitions eschatologiques.
• Il s’agit de notre époque crisique, c’est-à-dire l’irrésistible tragédie de la fin de la modernité dans laquelle cette crise-guerre de Gaza s’inscrit en lettres de feu.
18 novembre 2023 (16 h 45) – Dans son dernier texte de « Conflict Forum », Alastair Crooke entend, pour décrire les relations léonines entre les USA et Israël, dans cette occurrence où Israël est emporté dans un déchaînement stratégique, nous rappeler la fameuse allégorie du scorpion et de la grenouille. Selon notre bienveillance et donc sans volonté d’influencer le jugement, le scorpion figure Israël et la grenouille, presque aussi grosse qu’un bœuf après tout, les USA ; et ce qui est en cause, somme toute, et qui pourrait aussi bien figurer le poison, est la stratégie israélienne que nous décrivons sous l’expression de « fanatisme technologique », et qui est largement inspirée des conceptions de la puissance aérienne développées aux USA depuis le passage en cour martiale du général Billy Mitchell il y a un siècle jusqu’au bombardement de Tokyo (mars 1945) qui fit 135 000 morts sous les coups des B-29 de la XXe Air Force du général LeMay.
« L’allégorie est celle dans laquelle un scorpion dépend de la grenouille pour traverser une rivière en crue, en attelant un ascenseur sur le dos de la grenouille. La grenouille se méfie du scorpion ; mais accepte à contrecœur. Lors de la traversée le scorpion pique mortellement la grenouille qui nageait dans la rivière, sous le scorpion. Ils meurent tous les deux.
Il s’agit d’un conte de l’Antiquité destiné à illustrer la nature de la tragédie. Une tragédie grecque est une tragédie dans laquelle la crise au cœur de toute “tragédie” ne survient pas par pur hasard. Le sens grec est que la tragédie est le moment où quelque chose se produit parce que cela doit arriver ; en raison de la nature des participants ; parce que ce sont les acteurs impliqués qui font que cela se réalise. Et ils n’ont pas d’autre choix que d’y parvenir, car telle est leur nature. […]
Ces craintes sont au cœur de la “tragédie” qui “doit se produire” : la grenouille a accepté, très prudemment, de transporter le scorpion pour traverser la rivière, mais veut avoir la garantie que, compte tenu de la nature du scorpion, elle réussira. On ne pique pas son bienfaiteur.
De même, l’équipe Biden ne fait pas confiance à Netanyahou. Elle ne souhaite pas être “piqué” en se laissant entraîner dans une guerre dans le bourbier de l’Iran. »
Vous comprendrez que tout le monde interroge le scorpion : « Mais pourquoi as-tu fait ça ? ». Il est temps d’offrir alors une autre pseudo-allégorie, qui serait plutôt une anecdote pas si anecdotique que cela. On sait peu que la première, — disons la première des « guerres folles » des USA après la fin de la Guerre Froide, date de décembre 1989 : une expédition sur le Panama du trafiquant de drogue et « asset » de la CIA, le colonel-président Noriega. On savait qu’il inquiétait, pour son savoir et ses connaissances intra-CIA, le nouveau président et ancien directeur de la CIA Georges Bush-le-Père.
L’opération contre Panama, qui est bien détaillé dans le Wiki à cet effet, prit finalement le nom de code de « Just Cause » sur intervention directe du président Bush, et après un débat bureaucratique et léonin au cours duquel nombre de noms de baptême, ou noms-codes, furent proposés. Ce débat théorique et rhétorique (voir ci-après sur Wiki, avec les deux « explications » amusantes du changement de nom impliquant des interventions différentes dans le texte, avec et sans Bush-père, sans et avec la CIA !) porte en soi des attitudes pré-conditionnées divulguant par avance la trajectoire des interventions extérieures US à partir de décembre 1989, — ce que l’on pourrait désigner comme on l’a vu, comme les « guerres folles US ». Cette expression, — notre « nom-code » à nous, — impliquant que l’impérialisme US post-1989 n’est pas une reprise de l’ancien impérialisme, mais bien un néo-impérialisme sacrificiel jusqu’au suicidaire. L’influence US sur Israël, via l’armée et les idées du Général LeMay, est déjà en marche… (L’on peut avoir une description implicite intéressante de « Just Cause » dans le roman « Le tailleur de Panama », de John le Carré.)
« Les plans de l’opération dirigée contre Panama ont été dérivés des plans visant à la défense du canal. Ils sont devenus plus agressifs avec la détérioration de la situation entre les deux pays. La série de plans de l’opération « Prayer Book » inclut les répétitions en vue d’un éventuel clash (opération « Purple Storm ») et des missions pour garantir les sites américains (opération « Bushmaster »). À terme, ces plans sont regroupés sous le terme opération « Blue Spoon » rebaptisée « Just Cause » par le président Bush.
Le nom « Just Cause » a été surtout utilisé par l’armée des États-Unis pour la planification et l’histoire et d’autres entités des États-Unis telles que le département d’État. Le nom panaméen pour l’opération est « l’Invasion » (la Invasión).
Au cours des dernières années, la désignation des opérations militaires des États-Unis a été à l’origine d’une controverse, tant sur le plan international que national (voir l’opération « Enduring Freedom »). Au moment où ont été conçues les opérations pour déposer Noriega, les opérations militaires des États-Unis avaient des noms dénués de sens. « Just Cause » était prévue sous le nom de « Blue Spoon », et l’invasion elle-même incorporait l’opération « Acid Gambit »(exfiltration d’un civil américain travaillant pour la CIA emprisonné à Panama. Le nom de « Blue Spoon » a plus tard été changé pour « Just Cause » pour des raisons esthétiques et de relations publiques. L’occupation et la reconstruction post-invasion ont été intitulées opération « Promote Liberty » (« Promouvoir la Liberté »). »
Quoi qu’il en soit, et c’est là que nous voulions arriver, la gentille querelle interne aboutit à un jeu de mots fameux au Pentagone, où « Just Cause » devint « Just Because ». Cette fois, il s’agissait de la part d’une fraction non-interventionniste du département de décrire sarcastiquement une volonté de l’usage de la force — et de quelle force !, — par les USA libérés par effraction de la menace de l’URSS.
Ainsi, et pour en terminer avec cette interminable introduction, aurions-nous la conclusion de notre allégorie-anecdotique, — en notant que, pour les USA comme pour le scorpion quoique sur un temps plus long, cela revient à entraîner sa propre mort :
–Scorpion, pourquoi as-tu fait cela, piquer à mort ton bienfaiteur qui aurait même pu te servir en une autre occasion, — et cela jusqu’à entraîner ta propre mort ?
–Just because… »
« Juste parce que je le peux », répond le scorpion, acteur central au visage impassible à la Curtiss LeMay, acteur insensible et inflexible de la tragédie grecque — « La mère de toutes les tragédies » avait si bien vu Nietzche dans sa « Naissance de la tragédie ».
Et ainsi (suite) rejoint-on notre « Ouverture Libre » d’hier sur le « fanatisme technologique », où le drame est résumé dans cette évidence des moyens précédant les causes, puis remplaçant les causes jusqu’à nous donner une parfaite illustration du concept métaphysique de « tragédie » : « Puisque je peux le faire, dit le scorpion, je le fais, et que m’importe si ma propre mort est elle-même le terme du chemin… ». Cela se traduit donc en termes effectivement d’une technologie spécifique, toute entière venue du Ciel (majuscule acceptable) comme Icare s’approchant trop près du soleil, et tout entière contenue dans le feu sacré ; c’est-à-dire, rien de moins après tout que la formule de la modernité fondée sur le choix du feu de la thermodynamique contre le choix de l’hydrodynamique, grâce à ce feu sacré que le Titan Prométhée déroba sur l’Olympe pour le donner aux humains en même temps que la promesse de la modernité du technologisme par conséquent :
«…au travers des mannes du général Curtiss E. LeMay,[la notion] de “fanatisme psychologique” :
Il s’agit d’une conception mécaniste et nullement idéologique et raciale (quelles que soient par ailleurs les intentions et les imprécations des tenants de cette conception, et les accusations de leurs adversaires). Elle a directement à voir avec les moyens employés : l’arme aérienne et le bombardement. On peut même dire que c’est le moyen mécanique employé (l’arme aérienne et le bombardement) qui dicte la conception. Le but de la chose se trouve enfermé dans le moyen de la faire et, bientôt, complètement justifié par ce moyen. C’est pourquoi on peut justement proposer l’expression de “conception mécaniste”.
D’où vient cette conception ? Si elle devait avoir un nom générique, nous lui donnerions celui-ci, que nous empruntons à l’historien Michael Sherry : le “fanatisme technologique”. Signe des temps et de notre modernité, le “fanatisme technologique” a la particularité redoutable, pour un “fanatisme”, d’être enrobé dans une gangue opaque et quasiment impénétrable de rationalité bureaucratique.” »
En effet, retour à la doctrine du « Nakba » dont il est entendu aujourd’hui qu’elle est le fondement de la stratégie générale de l’IDF (ex-« Tsahal ») après l’imposante raclée de 2006 du fait du Hezbollah, transformée deux ans plus tard en formule des victoires à venir par le général Eizenkot, qui dirigeait les forces israéliennes après avoir commandé les forces aériennes — première promotion de cette sorte dans l’armée israélienne. Eizenkot en acquit une gloire étrange — très postmoderne, à la manière des « neocon » qui dit d’une défaite qu’elle aurait été une victoire si elle n’avait pas été une défaite, — qu’on retrouve dans le texte ci-dessous et qu’Alastair Crooke signale dans son texte déjà cité, avec les mêmes termes d’une interview fameuse d’Eizenkot :
Lors de la guerre de 2006 contre le Hezbollah, toute la banlieue urbaine peuplée de Beyrouth — Dahiya — a été rasée. Le général Eizenkot (qui commandait les forces israéliennes pendant cette guerre et est maintenant membre du « Cabinet de guerre » de Netanyahou) a déclaré en 2008 : “Ce qui s’est passé dans le quartier de Dahiya à Beyrouth en 2006 se produira dans chaque village depuis lequel l’on tire sur Israël… De de notre point de vue, ce ne sont pas des villages civils, ce sont des bases militaires… Ce n’est pas une recommandation. C’est un plan. Et cela a été approuvé”.
Bien entendu, on a retrouvé la patte inratable et insatiable du général LeMay expliquant les conceptions humanitaires régulant ses raids de bombardement sur le Japon. On le remarquera dans le texte ci-dessous, qui est une simple reprise et compilation des évènements relatifs à l’invocation et à la mise en application de la « doctrine Dahiya »… Un détail révélateur pour notre chef se trouve dans le rappel qu’une vidéo du général Benny Gantz, candidat au poste de Premier ministre en 2014 et présentement dans le « cabinet de guerre », faisait explicitement mention des exploits des forces qu’il dirigeait, en 2014, de cette façon…
“…Benny Gantz (qui, bien que considéré comme modéré, a promu sa candidature au poste de premier ministre lors des élections de 2019 avec une vidéo dans laquelle il se vantait d’avoir ramené des zones entières de Gaza « à l’âge de pierre » pendant la guerre de 2014, au cours de laquelle il commandait l’IDF).”
… Car vous n’oubliez jamais que LeMay, dans ses derniers mois de président du comité des chefs d’état-major avant son départ à la retraite, conseillait à Lyndon B. Johnson devenu président en novembre 1963 de lui donner toute latitude de « ramener le Vietnam à l’âge de pierre » par le moyen de l’US Air Force, et particulièrement de son préféré, le Strategic Air Command.
L’héroïque Daniel Ellsberg, l’homme des « Pentagon Paper » récemment décédé, nous a laissé des tonnes d’impressions et d’images sur l’obsession de l’anéantissement régnant chez les « SAC people », et dont l’IDF est aujourd’hui complètement imprégnée. On trouve notamment ces extraits où les planificateurs du SAC spéculent avec zèle sur les 600 millions de morts que causerait une attaque en première frappe de l’URSS par les USA, dans une posture qui rappelle celle d’Eichmann à son procès, telle que le ressentit Hanna Arendt à propos de « La banalité du mal ». (Dans l’extrait du texte sur Ellsberg, on garde la citation de l’amiral Roy L. Johnson en langue originale, pour ne pas perdre le goût piquant et excitant de l’intraduisible (de façon satisfaisante) terme « overkill »…)
Du temps que nous rapporte Ellsberg, il s’agissait de la doctrine dite de l’« Overkill » — traduction difficile, mais état d’esprit évident. Il s’agissait d’une doctrine voulue en tant que telle, et particulièrement voulue par l’USAF sous l’influence de LeMay, comme l’ont révélé la publication, en 2007, de documents concernant les plans nucléaires (le 22 novembre 2007, par les National Archives History), sur les Single Integrated Operational Plan (SIOP). Les commentaires accompagnant cette publication sont parsemés d’observations de cette sorte :
Les objectifs de dommages élevés (« damage expectancy ») étaient intrinsèques au plan, ce qui explique pourquoi les historiens ont considéré l’« overkill », ou destruction excessive, comme l’une de ses caractéristiques les plus distinctives. Le débat interne au sein de l’armée sur le plan de guerre, en particulier les préoccupations de l’armée et de la marine concernant la destruction excessive et les risques d’irradiation pour les troupes américaines et les populations des pays alliés proches des pays ciblés, a été l’occasion d’une réflexion sur le plan de guerre…[…]
Les objectifs de niveaux élevés de dommages…[…] ont suscité des critiques de la part de certains membres de l’état-major interarmées et de commandants supérieurs concernant la destruction excessive (« overkill ») et les risques d’irradiation. Cela explique pourquoi certains historiens ont considéré la « surenchère » comme l’une des caractéristiques les plus marquantes du SIOP. »
Le document rappelle également une remarque, datant de décembre 1980, de l’amiral Roy L. Johnson, Deputy Director of Joint Strategic Target Planning Staff de 1961 à 1963, effectivement à cette époque de la toute-puissance de l’équipe LeMay-Poser sur la pensée stratégique US :
« The SAC people never seemed to be satisfied that to kill once was enough. They want to kill, overkill, overkill, because all of this has built up the prestige of SAC, it created the need for more forces, for a larger budget.[…T]hat’s the way their thinking went. »
Ainsi la crise et guerre de Gaza doivent-elles être prises sous deux angles et sur deux fronts :
• la question politique et légale d’Israël et des Palestiniens d’une part ;
• la question de la méthodologie de la guerre qu’applique l’Israel Defense Force, comme mandataire du Pentagone, dite « The House of War » selon James Carroll, l’IDF comme opérateur de la non-stratégie de masse issue des planifications du Strategic Air Command de Lemay — d’autre part…
Et, dans ce cas, le scorpion devient cette « House of War », prête à piquer mortellement cet artefact a-historique que constituent les États-Unis d’Amérique. Une remarque supplémentaire peut être faite qui ne présage rien de bon pour l’avenir, et qui apparaît dans l’article ci-dessous : l’extrême confusion des services de communication de l’IDF dans la gestion de la perception publique de la pseudo-stratégie de ces forces. À la fin de l’article, il est question d’une « doctrine lucide », mais il ne nous apparaît pas évident qu’elle soit présentée lucidement. Il est vrai que LeMay était d’abord un exterminateur et nullement un communicateur. À nous de nous en arranger, certes, mais si les observations sur la nécessité pour l’IDF de faire vite sont justifiées, — alors bien vite apparaîtront les problèmes et la confusion déjà constatée s’affirmera de plus en plus : nous serons en marche pour une perte totale de contrôle de la crise tandis que la Russie achèvera sa guerre en Ukraine hors de « the Magic Thinking »…
L’article « Washington Post : Gaza et la doctrine catastrophique de Dahiya », de « Piccolonote.it » est repris en français, le 14 novembre, par « euro-synergies.hautefort.com ».
« Nous exercerons une puissance disproportionnée contre chaque village d’où sont tirés des coups de feu sur Israël et nous causerons d’immenses dégâts et destructions ». C’est ainsi que Gadi Eizenkot a expliqué la « doctrine Dahiya » en 2008.
« L’armée israélienne a peu de temps pour achever ses opérations à Gaza avant que la colère des Arabes de la région et la frustration des États-Unis et d’autres pays face au nombre croissant de victimes civiles ne tirent un trait sur l’objectif d’Israël d’éradiquer le Hamas, ont déclaré des responsables américains cette semaine ».
Tel est l’article principal du New York Times du 9 novembre. L’article de Hamos Arel dans Haaretz intitulé : « Guerre Israël-Hamas : Tsahal [forces de défense israéliennes] dit qu’elle durera des mois, les signaux venant des États-Unis ne vont pas au-delà de quelques semaines » va dans le même sens.
L’un de ces signaux est la déclaration de Barbara Leaf, secrétaire d’État adjointe aux affaires du Proche-Orient, à la commission des affaires étrangères de la Chambre des représentants, selon laquelle le nombre de victimes à Gaza reste incertain et « pourrait même être plus élevé que ce qui a été rapporté publiquement ».
Jusqu’alors, les États-Unis avaient tenté d’atténuer le bilan tragique, aujourd’hui ils l’augmentent même (à juste titre : de nombreuses personnes se trouvent encore sous les décombres et parmi les blessés, plusieurs mourront, notamment parce que les installations médicales ont été dévastées).
Le nombre croissant de victimes civiles choque le monde entier et les dirigeants occidentaux ont de plus en plus de mal à légitimer ce qui se passe par le droit à la défense d’Israël. La réaction de Tel-Aviv est excessive, disproportionnée et même inintelligente, car elle a enterré sous les décombres de Gaza la vague de solidarité mondiale suscitée par l’attaque du Hamas et son image internationale.
La réaction excessive a été publiquement admise par le porte-parole des FDI, Daniel Hagari, qui parlant de la phase initiale de l’offensive, a révélé que « l’accent » de la riposte des FDI était « sur les dégâts plutôt que sur la précision ».
L’aveu de Hagari a été rapporté dans le Washington Post du 10 novembre par Ishaan Tharoor, dans un article où, rapportant ses commentaires sur ce qui se passe à Gaza, il explique que
« derrière tout cela — et implicitement dans la mention par Hagari de l’’accent’ mis sur les dommages plutôt que sur la précision — se trouve une doctrine militaire qu’Israël a adoptée depuis longtemps et semble avoir adoptée dans cette circonstance également ».
Il s’agit de la « doctrine Dahiya », écrit Tharoor, qui « a pris forme dans le sillage de la guerre de 2006 entre Israël et le Hezbollah au Liban » et qui porte le nom du quartier de Beyrouth réduit en ruines par les tirs israéliens en réponse à l’enlèvement de deux de ses soldats. Une réaction brutale qui a surpris le Hezbollah, qui s’attendait à quelques tirs de missiles.
La doctrine qui a émergé du conflit a été formulée sous sa forme la plus familière par le commandant de Tsahal, Gadi Eizenkot. « Nous exercerons une puissance disproportionnée contre chaque village à partir duquel des coups de feu sont tirés sur Israël et causent d’immenses dégâts et destructions. De notre point de vue, ce sont des bases militaires », a-t-il déclaré à un journal israélien en 2008. « Il ne s’agit pas d’une suggestion. Il s’agit d’un plan déjà autorisé ».
À peu près à la même époque, l’ancien colonel israélien Gabriel Siboni a rédigé un rapport pour l’Institut d’études de sécurité nationale de l’université de Tel-Aviv, dans lequel il affirme que les provocations militantes du Liban, de la Syrie ou de Gaza doivent être contrées par des attaques « disproportionnées », qui ne visent qu’en second lieu à éliminer la capacité de l’ennemi à lancer des roquettes ou d’autres attaques. L’objectif doit plutôt être d’infliger des dommages durables, sans tenir compte des conséquences civiles, afin de dissuader l’ennemi à l’avenir ».
Au début d’une phase d’hostilités, les FDI doivent agir immédiatement, de manière décisive et avec une force disproportionnée par rapport aux actions de l’ennemi et à la menace qu’il représente »,écrit-il. « Une telle réponse vise à infliger des dommages et des punitions dans une mesure qui nécessitera des processus de reconstruction longs et coûteux ».
« Une telle doctrine, écrit M. Tharoor, semble avoir été en place même pendant une série d’hostilités entre le Hamas, qui a attaqué à partir de Gaza, et Israël à la fin de 2008 et au début de 2009. Un rapport commandité par l’ONU sur ce conflit, au cours duquel plus de 1400 Palestiniens et Israéliens ont trouvé la mort (14 pour ces derniers, dont quatre tués par des tirs amis), a conclu que la campagne d’Israël était “délibérément disproportionnée, conçue pour punir, humilier et terroriser la population civile, diminuer radicalement la capacité économique locale à travailler et à subvenir à ses besoins, et imposer un sentiment imminent de dépendance et de vulnérabilité”.
« La doctrine est restée en vigueur dans les années qui ont suivi. Les correspondants militaires israéliens et les analystes de la sécurité ont signalé à plusieurs reprises que la doctrine Dahiya était la stratégie adoptée par Israël pendant la guerre de Gaza de l’été dernier »,
a observé l’universitaire palestinien-américain Rashid Khalidi à l’automne 2014, lorsqu’une nouvelle campagne militaire israélienne a entraîné la mort de plus de 1460 civils, dont près de 500 enfants. « Soyons francs : il ne s’agit pas tant d’une doctrine stratégique que d’un plan explicite de punition collective, un signe avant-coureur de crimes de guerre probables ».
Il n’est pas surprenant, ajoute Khalidi, que la doctrine Dahiya ait été peu mentionnée dans les déclarations des hommes politiques américains et dans les rapports de guerre de la plupart des grands médias américains, qui se sont contentés de décrire les actions d’Israël comme de l’’autodéfense ».
C’est également le cas de la guerre actuelle, au cours de laquelle, comme le note M. Tharoor, « de nombreux hommes politiques israéliens ont appelé à la destruction totale de Gaza, au dépeuplement du territoire et même à la réinstallation d’Israël » dans la bande de Gaza.
Personne en Israël, bien sûr, « n’a explicitement invoqué la “doctrine Dahiya” comme programme pour la destruction déchaînée de Gaza », note Tharoor, mais il note que le susmentionné « Eizenkot est un membre du “cabinet de guerre” d’Israël ».
En fait, ce n’est pas n’importe quel membre, il dirige le cabinet en question avec le belliqueux Benjamin Netanyahu et Benny Gantz (qui, bien que considéré comme modéré, a promu sa candidature au poste de Premier ministre lors des élections de 2019 avec une vidéo dans laquelle il se vantait d’avoir ramené des zones entières de Gaza « à l’âge de pierre » pendant la guerre de 2014, au cours de laquelle il commandait les FDI).
En bref, l’attaque officieuse contre Gaza n’est pas seulement dictée par une soif de vengeance, mais par une doctrine lucide ; ou, peut-être mieux, une combinaison de ces éléments, avec la « doctrine Dahiya » portée à un niveau exponentiel et catastrophique. »
Combien de fois me suis-je dit, en contemplant ces derniers temps l’agonie française : c’est « Que la fête commence » à l’ère de Pétain ? Et ces « élites » robotisées, ne semblent-elles pas sorties d’une pantalonnade posthume de Jacques Tati ? Avec son livre sur la disparition de la France au cinéma, Nicolas Bonnal met en images nos plus obscures intuitions.
« Ce qui ne nous tue pas nous rend plus mous. »
Nicolas Bonnal est un témoin frénétique pour un temps survolté. Il écrit sans ponctuation, sans majuscules, sans relecture, mais avec style. On l’avait repéré comme chroniqueur culturel dans le légendaire Idiot international de Jean-Edern Hallier, ce qui vaut bien — dans la musique moderne — un CV d’instrumentiste chez les Mothers of Invention de Frank Zappa. On l’a suivi sur des chemins que peu empruntent, et qu’il a fini par ouvrir pour les multitudes, notamment avec son livre sur Mitterrand le grand initié (Albin Michel, 2001). Avant cela, il avait levé un coin de rideau sur une gnose postmoderne avec Internet, la nouvelle voie initiatique (Les Belles Lettres, 2000), défriché un itinéraire dans le labyrinthe métaphysique de Tolkien avec Les univers d’un magicien (1998).
Cinéphile érudit et enragé, détecteur captivé-dégouté de toutes les odeurs de décomposition, conteur affermi par la foi orthodoxe de cette folle fin de civilisation, compilEUR de citations le plus raffiné de la blogosphère française, Bonnal a en plus ce talent rare de nous faire ressentir charnellement cette montée du chaos que d’autres essaient de prouver par de fastidieux raisonnements. De sa retraite espagnole, il publie des livres, comme il dit, à la vitesse du vent, et je ne suis même plus sûr que Destruction de la France au cinéma soit son tout dernier. N’importe, c’est un livre unique. En 74 étapes arbitraires, 74 titres du cinéma français d’après-guerre, Bonnal chronique et documente un processus historique et culturel d’une brutalité sans égale. Non pas le déclin, mais la pure et simple disparition, l’effacement ontologique d’une culture millénaire, d’un État-civilisation (comme diraient les Russes) qui fut l’axe du monde : la France. Ou comme l’écrit son talentueux préfacier, Pierre Le Vigan :
« Livre furieux, joyeux, caustique, exaspéré par le monde moderne, mais pas haineux. Bonnal en long et en large. On ne s’en lasse pas. L’idée de départ est de montrer comment une certaine France a disparu. Une France prémoderne ? Traditionnelle ? Celle des vieux métiers ? Celle des vieilles librairies, des bouquins papier et non des e-books ? Celle des bistrots ? Un peu tout cela. Une chose est sûre. C’était la France que nous aimions. »
Le florilège régalien qu’il propose va de Farrebique (1946) à Fantômas (1967). Son va-et-vient en apparence aléatoire dans le temps et les genres trace tout de même, pour finir, un entonnoir vers le néant au fond duquel miroite la lumière morte de Buffet froid, ce sinistre et génial tiré de rideau. La France des campagnes mystérieuses, des accents savoureux et des élans héroïques se dissout dans les cités dortoirs, les supérettes, la chansonnette cucul et le nivellement consommateur. Et le cynisme, autre nom du gel des âmes ! Cynisme roublard, cynisme queutard, cynisme soixante-huitard, cynisme boutiquard, cynisme politicard…
Dans le préambule théorique de son catalogue terminal dialoguent René Guénon et Jacques Tati, Bernanos et Pasolini, Günter Anders et Michel Serres, et les observations d’Alexis Carrel embraient avec un « clic » rassurant dans les imprécations de Guy Debord. Un chef militaire grand comme un menhir, raide comme une potence, semble catalyser toutes les illusions narcissiques de cette France enivrée de fausse gloire. Faut-il le nommer ? Le constat de décès est, ici déjà, incontestable, mais encore abstrait. Avec le choix de films qui l’illustre — et les commentaires acérés qui vont avec — Bonnal vous met le doigt sur la jugulaire du patient. Pour que vous n’alliez pas ensuite vous payer de mots en racontant que le cœur battait encore…
« Ne nous y trompons pas. Tous les films évoqués sont à voir, mais pas parce qu’ils sont des chefs-d’œuvre… L’essentiel : tous sont significatifs d’un tournant dans les mœurs. Des symptômes, et parfois des fantômes… Le temps a tourné comme il arrive au lait. »
Le Septième part, à la suite de la grande littérature, est un matériel de preuve implacable. Bonnal sait en extraire tout le jus. Même si le propos est sombre, l’argumentation nous invite à parcourir encore une fois, dix fois, cent fois, ce jardin enchanté qu’aura été — jusqu’il y a peu — le cinéma français. Il faut donc lire son livre, et le revisiter lui aussi, tant les références sont foisonnantes et déroutantes. J’ai tout de même demandé à Bonnal de nous éclairer une ou deux allées de son jardin crépusculaire.
La mort de la France est un lieu commun parmi les dissidents modernes — lesquels remontent à Bloy, Céline, Bernanos, Caraco, Debord ou Muray. Pourquoi avoir ajouté une couche avec ce livre ?
Je voyais une minute sur YouTube où le pauvre Michel Serres était mis en demeure par un présentateur de ne pas regretter le bon vieux temps. Moi aussi, souvent, je ne le regrette pas. L’histoire, c’est du bruit et de la fureur, mais aussi de la faim, pas de chauffage et pas de film du soir — le tout avec une mortalité fantastique ! Elle n’a rien de marrant, l’Histoire, sauf dans le cerveau de ses minotaures manipulateurs. Je relis la bio de Balzac par Troyat et quelle prison tortionnaire que ces collèges cathos ! Non, j’ai voulu compléter mes études sur la Fin de l’Histoire par une référence au visible, donc au cinéma. On peut dire qu’il était resté une France un peu française, traditionnelle, coloniale, guerrière, aventurière (voir Alerte au sud de Jean Devaivre) jusqu’à de Gaulle (désolé…). Ensuite tout a basculé dans le modèle cybernétique, consumériste et immobilier des années 60 : voir les Melville ou le Clan des Siciliens. Le pays n’a pas décliné, IL A DISPARU et le néo-français, le froncé s’impose : c’est Les Valseuses (1973). La disparition physique de la France est nette dans Play Time de Tati et dans Mélodie en sous-sol de Verneuil. On fabrique un homo global qui n’a pas fini DE NE PAS faire parler de lui. Tout est chez Guy Debord : le prolétaire est devenu consommateur. Sinon, la décadence est en effet un lieu commun depuis deux siècles en France (après les rois et Napoléon…).
Il y a la destruction de la France au cinéma et la destruction _par_ le cinéma. Il y a des films-témoins du désastre et des films qui accélèrent le mouvement. Parmi ces derniers — films ou cinéastes —, lesquels vous apparaissent les plus efficaces dans leur œuvre de corrosion ?
Les films de Godard montrent bien l’émergence d’un individu scolarisé-crétin-industrialisé façon Léaud, fils de Marx et de Coca-Cola. Le Nouvelle Vague rompt avec le passé et on voit le crétin qui veut rouler américain, fumer américain, et même coucher américain (Jean Seberg) ; puis les Trente Glorieuses présentent l’addition salée et on voit arriver des monstres comme le boucher ou la bête qui ne mourra jamais dans Que la bête meure, le film de Chabrol (génial Jean Yanne). On a aussi les Valseuses qui montrent que le grand remplacement n’est pas qu’ethnique : il est physique, moral, ontologique. A partir des années 80, je considère qu’on est morts ; Besson va montrer un hexagone devenu simple Bantoustan euro et lambda des USA. Le françoustan. On a le débile du Grand Bleu, puis Le Transporteur puis Taken. Un film qui montre bien l’écrabouillement fastfood du pays par le football, c’est Grégoire Moulin contre l’humanité d’Artus de Penguern.
Les mauvais films, les navets, les films ratés semblent en dire davantage sur l’époque que les « grands » films. Pourquoi, selon vous ?
Ce seraient plutôt des films déplaisants. Le cinéma de Pialat est déplaisant, mais il montre l’horreur d’une France totalement postchrétienne : voyez La Gueule ouverte ; le cinéma de Chabrol n’est pas marrant non plus. Il faut aussi voir que la critique (« elle garde toujours son pouvoir de nuisance », me disait mon ami Jean-Jacques Annaud sur qui j’ai publié un livre en 2000) a détruit le cinéma comme le reste des arts. C’est pourquoi j’ai remis mon texte sur Tolstoï dans la première partie théorique de mon livre (la deuxième, ce sont les films) : il a compris dans son extraordinaire essai sur l’art que la critique et l’enseignement et le snobisme bourgeois allaient ou avaient déjà détruit l’art. Sexe, ennui, dépression, existentialisme, tout était déjà là. La bourgeoisie (caste liée à un État moderne et fort, explique Taine) est une caste eschatologique. C’est le scorpion qui coule la grenouille. Mais c’est aussi une classe révolutionnaire au pire sens du terme. Parlant de navets, je me souviens de la critique qui conchiait Tonnerre de Dieu ou les Tontons flingueurs devenus films-cultes depuis : ce n’étaient que des films que l’élite festivalière trouvait mauvais.
Vous distinguez dans le lot le « prince » Guitry et le maintenez bien au-dessus de la mêlée. De quel esprit — souffle — Sacha Guitry est-il encore le porteur ?
C’est marrant, je pensais en avoir donné plus d’un : Pagnol, qui arrête brutalement en 1955 (fin de notre vieille France ? De la Provence ?), Renoir, et bien sûr Cocteau dont j’ai déjà parlé dans mon essai sur le paganisme au cinéma. Mais tous ces princes sont nés au dix-neuvième, quand la France a encore des racines paysannes et païennes (le christianisme moderne depuis un siècle s’est merveilleusement adapté, Bloy ou Bernanos plus catholiques que moi l’avaient bien vu). Oui, Guitry, c’est un parfum d’Ancien régime, de France élégante et marrante, de beau langage et de bonne soupe. C’est aussi un lieu où on sent l’Être. Le trésor de Cantenac est un de ses chants du cygne, comme En remontant les Champs-Élysées, film où l’on sent que la défaite de Sedan et la Fin de l’Empire — et la fin de toute Restauration possible, que lamente aussi Dostoïevski dans son Journal — sonnent le glas d’une certaine idée de la France. Après, elle n’est plus qu’un fantasme. Guitry, aussi, c’est la légèreté : on pouvait tout dire sans se prendre la tête. L’Esprit c’était la Lettre.
La France est une dormeuse qui s’est nourrie de son propre souvenir. Reste-t-il encore, malgré tout, un filon de la France éveillée ? Si oui, où le trouver ?
Non. Il ne reste rien. On peut toujours faire semblant. Comme je dis à ma femme, j’étais très nostalgique (nostalgie signifie avoir mal) dans les années 1990. Il restait des souvenirs des gens avec des talents, des villages, des petits vieux sympas, des dames bien élevées à l’ancienne, tout cela est mort. Il faut l’admettre. Euro, mondialisation et technologie nous ont donné le coup de race. On est chez les zombis. D’un coup on n’a plus eu de matériau pour nourrir cette nostalgie, et c’est ce qui rend cet abominable siècle plus supportable que le précédent. Le roi est mort, mort au roi. Le français de souche est mort il y a longtemps. Les films de Jarmusch le montrent très bien, que c’est partout pareil. Ceux qui voyagent encore ou vivent à l’étranger me le confirment. Bien entendu, les vautours entonneront un refrain hostile. Normal, ils vivent de charognes.
Le soir, chez vous, après une journée passée à contempler l’effondrement général, quels films aimez-vous regarder ?
Un bon western crépusculaire ou une comédie musicale de l’âge d’or. J’ai publié deux livres, sur les westerns dans une perspective guénonienne (ou plutôt schuonienne, référence proche de Tintin) et sur la comédie de l’âge d’or, de 1945 à 1960. J’adore Tea for Two ; La Belle de New York et Easter Parade qui sont des films Americana, qui illustrent une nostalgie devenue impossible depuis (le peuple a été trop remplacé ou trop avili) ; c’est un genre US qu’on appelle Americana, et où on regrette les années vingt ou même l’avant-guerre de 1914, ou l’avant Fed (car c’est la Fed de Warburg qui a mis fin aux USA). Comme Fred Astaire le dit dans les Ziegfield follies, il n’y avait pas de taxes, pas d’impôts, pas de factures. On était dans un monde libertarien. En France, tout était déjà beaucoup moins drôle.
Quelles délectations nous reste-t-il qui ne soient pas moroses ?
Bel oxymore, délectation morose… Moi, mes délectations sont moroses. J’ai tout lu et surtout relu. Il faut comprendre qu’il n’y a pas tant de musiques, de films ou de romans ou d’essais qui soient bons. On peut se forcer à voir de mauvais films mais on en a vite marre. Seuls les classiques (y compris au cinéma ou dans la chansonnette ou la série télé), a dit Nietzsche, ont fait leurs preuves. Le reste me fatigue. Donc si je revois un Kubrick ou Le cavalier électrique de Pollack, si je relis Racine ou Chateaubriand, il faut savoir que c’est la centième fois. Donc c’est morose. Mais cela reste une délectation. Ma femme aussi joue au piano du Grieg ou du Bach pour la centième fois : mais elle se délecte. Le plus dur, c’est les voyages devenus impossibles (voyez mon Voyageur éveillé) : tout est devenu plus laid, plus technologique, plus cher, plus banal et homogénéisé. Les voyages ne valent plus la peine. On est comme au début du Seigneur des Anneaux (voir mon livre encore — je me fais insulter pour en écrire tant, ça c’est aussi une délectation) quand Bilbon dit qu’il se sent comme du beurre étalé sur trop de pain.
Pour le reste il faut être actif comme mon épouse Tetyana : jardiner, cuisiner, aimer, jouer, prier. Et ne pas trop parler…
[Illustration : Pie IX est connu pour être le pape du Dogme de l’Immaculée Conception (1854), du Syllabus (1864) et du Concile Vatican I (1869-1870). Son pontificat est le plus long de l’histoire de l’Église (de 1846 à 1878). – Private collection / Leemage via AFP (source).]
[Source : benoit-et-moi.fr]
Dans cet article érudit écrit en mai 2013, Nicolas Bonnal nous apprend que les rangs des complotistes comptent au moins un Pape, un bienheureux, qui plus est, puisqu’il a été béatifié par Jean Paul II : Pie IX, le pape du Concile Vatican I, celui qui a défini l’infaillibilité pontificale; celui du Risorgimento, surtout, qui a assisté au démantèlement des États Pontificaux.
Il s’appuie sur un document peu connu, l »allocution Quibus Quantisque prononcée par le Bienheureux Pape le 20 avril 1849 lors d’un consistoire secret. J’ai trouvé sur Internet la version en italien, sur le site Totus Tuus, (et cette version en français…).
Il y a également une notice wikipedia en anglais.
Il est question de Pie IX dans ces pages:
benoit-et-moi.fr/2013-II/articles/la-lune-de-miel-mediatique-de-franois-2
par Nicolas Bonnal
« La licence effrénée et l’audace des passions perverses, élevaient de jour en jour une tête plus menaçante… » écrivait Pie IX pour dénoncer les agitateurs qui tentaient, en 1849, de démolir la stabilité des États pontificaux. Rien de nouveau sous le soleil, quand il s’agit de s’attaquer au bien commun : le conspirateur est d’abord contre la vertu.
Voici une théorie bien insultée alors qu’elle ne se veut souvent qu’une modeste ou maladroite théorie de l’explication, quand l’information officielle, toujours bâclée, devient obscène et ridicule, car il faut voir quel brouet peut gober l’opinion publique globalisée.
J’ai bien lu dans la presse anglophone, russe et espagnole que la vague homophobe est telle en France que les catholiques ont détruit Paris (lors des manifestations contre le mariage gay, ndlr) et qu’il a fallu… protéger les premiers mariés de l’an II de la Hollandie — et que cette vague homophobe, images à l’appui (images à l’appui !), ne rassemble que quelques extrémistes. L’OTAN va-t-il intervenir en France ? Ou les rebelles syriens, pour y rétablir l’ordre ? N’y-a-t-il pas conspiration ?
La théorie de la conspiration ne vient pas de n’importe qui. Elle vient du pape Pie IX victime au début de son pontificat libéral de conspirations mazziniennes, maçonniques et socialistes dans ses chers États et sa chère Italie, toujours soumise aux coups d’État comme dit Beppe Grillo [cf. son blog].
Ce que met le pape en évidence, et qui ne vieillit pas quand il s’agit de s’attaquer au bien commun : la diffusion du désordre et de la haine.
Mais je laisse la polémique : l’humeur du jour n’est plus aux débats, l’air du jour n’est plus à l’humour, mais aux arrestations. Pas de liberté pour les ennemis de la liberté et pas de liberté d’ailleurs pour les amis de la liberté.
Mais comme la vérité sort de la plume du Saint-Père plus que de la bouche d’un journaliste aux ordres, je vous le laisse lire dans Quibus Quantisque :
« Mais bien que cette noire conspiration ou plutôt cette série non interrompue de conspirations fût claire et manifeste, cependant, par la permission de Dieu, elle demeura inconnue à beaucoup de ceux à qui la tranquillité publique devait pour tant de causes être principalement chère. Et bien que les infatigables fauteurs d’anarchie donnassent lieu aux plus graves soupçons, il ne manqua pas de certains hommes de bonne volonté qui leur tendirent une main amie, espérant sans doute qu’ils pourraient les ramener dans le chemin de la modération et de la justice»
Fauteurs d’anarchie, c’est une bonne expression que reprendra Chesterton dans son roman à clé, Le nommé jeudi1. Chesterton y explique que le point commun entre l’idéaliste philanthrope, le milliardaire humanitaire (celui des ONG), le savant fou, le membre des services secrets et le bolchévik, c’est bien l’anarchie.
Le héros du bouquin, Syme, comprend que tous les anarchistes sont des policiers infiltrés comme tous les casseurs d’aujourd’hui sont des voyous tolérés ou des supplétifs de la police.
Comme s’il avait prévu ce qui allait se passer ensuite, les guerres aberrantes, le nazisme, le communisme, les guerres, l’immigration barbare, les attentats partout, la subversion morale et mondaine, la guerre rageuse contre la nature, l’humanité, la chrétienté et les idéaux, Pie IX écrit encore dans son style passionné et soutenu :
« Mais la licence effrénée et l’audace des passions perverses, élevaient de jour en jour une tête plus menaçante ; les ennemis de Dieu et des hommes enflammés du désir insatiable de tout dominer, de tout dévaster, de tout détruire, n’avaient plus d’autre pensée que de fouler aux pieds les lois divines et humaines pour satisfaire leurs passions. De là ces machinations ourdies d’abord dans l’ombre, puis bientôt éclatant en public, ensanglantant les rues, multipliant des sacrilèges à jamais déplorables, et se portant contre Nous, dans le palais du Quirinal, à une violence jusqu’alors inconnue. »
Le Saint-Père sait très bien que le gros du peuple reste tranquille, même s’il est indifférent (cela peut lui coûter cher, le sait-il seulement, ce bon peuple ?), dépassé et manipulé par des événements cruels mais pas très clairs, des manipulateurs, des experts, des agences . L’occupation au temps moderne consiste à être spectateur, avant de devenir téléspectateur :
« Cependant, au milieu de Notre immense douleur, il Nous est doux de pouvoir affirmer que l’immense majorité du peuple romain et des autres sujets pontificaux, Nous est restée fidèlement attachée, ainsi qu’au Siège Apostolique, ayant dans une profonde horreur ces noirs complots, quoiqu’elle soit restée spectatrice de ces tristes événements. »
Pie IX voit bien comment se termineront les révolutions bolchéviques, anarchistes, néolibérales (thérapie de choc, délocalisation, immigration et entropie universelle), socialistes, constructivistes, européennes, et tout leur infatigable (car il faut bien leur reconnaître cette qualité, ils sont infatigables) saint-frusquin à base de dette, de Goldman taxes et de politiquement correct :
« Le trésor public dissipé, épuisé, le commerce interrompu et presque anéanti, des impôts énormes levés sur les plus riches et bientôt sur tous les citoyens, les propriétés particulières pillées par ceux qui s’appellent les chefs du peuple et les conducteurs de bandes effrénées, la liberté de tous les gens de bien troublée, leur sécurité mise en question, leur vie exposée au poignard des sicaires, voilà les maux intolérables qui sont venus jeter l’épouvante et l’effroi au milieu de nos sujets. Telles sont les prémices sans doute de cette prospérité que les ennemis du Souverain Pontificat annoncent et promettent au peuple de notre État pontifical. »
L’utilisation des médias pour manipuler l’opinion — à l’époque du très Saint-Père, des journaux, de l’opéra et du théâtre (aujourd’hui ciné, télé, portails web, etc.) — est déjà entrée dans les mœurs. On est pourtant en 1849 :
« Ces doctrines perverses et empoisonnées, les hommes ennemis les sèment sans relâche parmi les multitudes, soit par la parole, soit par des écrits, soit par des spectacles publics, afin d’accroître de jour en jour et de propager une haine qui s’emporte sans frein à toute espèce d’impiété, de passions et de désordres. De là toutes les calamités, tous les renversements, toutes les douleurs qui ont ensanglanté et qui ensanglantent encore le genre humain, et presque toute la surface de la terre. »
N’en déplaise aux conciliaires modernistes et progressistes de tout poil, et aux déplaisants policiers de la pensée d’aujourd’hui, Pie IX en rajoute une couche comme on dit sur les sociétés secrètes et leurs agissements universels couverts par le caquetage des médias de « droite » et de « gauche » aux ordres (les journalistes sont juste des marchands de phrases et leur dieu est triangulaire, dit tel quel Balzac à l’époque) :
« Personne n’ignore combien de sociétés secrètes et pernicieuses, combien de sectes furent créées et établies, sous différents noms et à différentes époques, par ces artisans de mensonge, ces propagateurs de dogmes pervers, aspirant par là à glisser plus sûrement dans les esprits leurs extravagances, leurs systèmes et leurs désirs criminels, à corrompre les cœurs sans défiance, et à ouvrir à tous les crimes la large voie de l’impunité. Ces sectes abominables de la perdition, aussi fatales au salut des âmes qu’au bien et à la tranquillité de la société temporelle, ont été condamnées par les Pontifes Romains, Nos prédécesseurs. »
L’Angleterre impériale avait ses « missionnaires » protestants, aujourd’hui on a les ONG !
Relisez un peu ce qui s’est passé en Europe en 1848 et après. Et cette remarquable allocution Quibus Quantisque prononcée le 20 avril 1849 dans le consistoire secret. Elle est plus d’actualité que jamais, car on n’est pas sorti de leur auberge rouge ni de leur éternel désordre mondial basé sur les bombardements et les assouplissements quantitatifs.
1 Le nommé Jeudi: voir la notice wikipedia, et surtout le site des amis de Chesterton:
www.amisdechesterton.fr/2008/11/11/lenommejeudi-3etorsonwells
[Source : euro-synergies.hautetfort.com]
La droite espagnole a fait un virage à 180 degrés et descend dans la rue pour crier contre le roi, la Constitution, la monarchie, la laïcité à la française, la police et même l’Union européenne.
Par Norberto Lanzas
Source :
https://www.vozpopuli.com/altavoz/cultura/noviembre-nacional-cambio-cultural-derecha-espanola.html
Lors des journées de Ferraz, ainsi que sur les réseaux sociaux, un nouveau drapeau avec deux N couronnés par la croix chrétienne a attiré l’attention. Que symbolise ce logo, porté par tant de manifestants ?
Beaucoup ont comparé les dernières manifestations à Ferraz au 15-M ou à une simple réponse espagnole au processisme. En réalité, ils ne sont pas comparables et il convient de donner quelques indices pour mieux comprendre ce mouvement spontané.
Noviembre Nacional, expression inventée par l’ingénieux twitteur Españabola, a une sonorité à la hauteur des grands slogans de l’histoire des révolutions. Pensez au Printemps des peuples de 1848, à l’Octobre rouge de 1917 ou, dans notre pays, à la révolution des Asturies de 1934 et aux journées de mai 1937. Pourquoi ? Parce que pour qu’une insurrection réussisse, il faut non seulement qu’elle maintienne un niveau permanent de mobilisation ou qu’elle ait des effets politiques perceptibles, mais aussi qu’elle installe un nouveau langage démocratique, qu’elle remette en cause l’ordre des choses existant et qu’elle crée une mythologie révolutionnaire. Elle doit balayer toutes les logiques du passé. Elle doit « septembriser » — selon la terminologie bakouniniste — les institutions du régime contre lequel elle s’élève (en l’occurrence novembrizar). Car, comme le suggère Enzo Traverso dans son livre Melancolía de izquierda (2019), « tous les grands événements politiques modifient la perception du passé et génèrent un nouvel imaginaire historique ».
Mais en quoi consiste ce « nouvel imaginaire historique » ? Il consiste en ce que le sujet révolutionnaire ou rebelle soit composé de Cayetanos qui vont « puto-défendre l’Espagne », de dirigeants politiques qui finissent gazés par la police nationale, d’ouvriers, d’ex-militants du « parti de la trahison » (le PSOE), de jeunes et de vieux, d’hommes et de femmes, de personnes politisées et apolitiques, de lumpen-prolétaire et de dames poupées du quartier de Salamanca, entre autres groupes.
Quand, en Espagne, avons-nous été témoins d’une telle transversalité ? Chaque nuit, les villes en révolte rassemblent les groupes les plus divers, les twittos les plus « à droite » et les gens ordinaires. La confluence de Bastión Frontal, Democracia Nacional, Hacer Nación, Falange, Comunión Tradicionalista Carlista, Revuelta, Solidaridad, Frente Obrero et Vanguardia Española est la preuve vivante qu’au-delà des différences idéologiques et des batailles virtuelles, il existe une défense acharnée de la continuité historique de l’Espagne en tant que communauté politique.
De plus, en termes générationnels, les jeunes qui manifestent n’ont jamais couru devant la police, ils ne viennent pas du campus de Somosaguas, ni de l’activisme antifa (contrairement à leurs grands-parents et à leurs parents, qui ont dû courir devant les gris ou les bruns). La vérité est que, parmi la droite conservatrice, la défiance envers le système est morte avec Blas Piñar et Fuerza Nueva. Ce qui a suivi, ce sont les tribus urbaines… La fraîcheur des chants et des slogans est le souffle d’une vitalité débordante. Pour le dire avec Marx : si « l’État espagnol était mort, la société espagnole était pleine de vie et remplie, dans toutes ses parties, de la force de la résistance ».
Comme je l’ai dit, c’est la première fois dans notre histoire récente que des forces vives osent remettre en cause le credo du « liberalismo ». La droite espagnole a fait volte-face et descend dans la rue pour crier contre le roi, la Constitution, la monarchie, la laïcité à la française, la police et même l’Union européenne. Et, bien sûr, tous ces éléments sont ceux qui ont été les verrous qui, pendant plus de 40 ans, ont protégé le cœur du système démolibéral.
Prenons quelques exemples : contre le roi, les manifestants disent : « Felipe, maçon, défends ta nation » ; contre la Constitution : « La Constitution détruit la nation » ; contre la monarchie : « Les Bourbons aux requins » ; contre la neutralité religieuse : « L’Espagne chrétienne et non musulmane » ; contre le système politique ; contre la police : « Ces laitières à la frontière » ; contre l’UE : nous avons vu des images où certains, dans le feu de l’action, brandissaient les drapeaux de l’Union européenne et où d’autres manifestants les leur arrachaient des mains.
Où est donc la « droite bipartisane et vendeuse de pays » ? Au vu des deux semaines de manifestations, il est difficile de croire qu’Elizabeth Duval avait vu juste dans son roman Madrid será la tumba (2021). Elle aurait aimé que la droite alternative, la droite sociale, se taise, reste muette face aux outrances de leurs camarades progressistes. Mais Madrid (en tant que point central du soulèvement) s’est avéré être le défibrillateur d’une Espagne comateuse.
Le Novembre national est un mouvement national-populaire né dans la rue et diffusé par les réseaux, de la base au sommet.
Il va sans dire que des drapeaux ad hoc se sont répandus, comme le drapeau officiel avec les armoiries de 81 découpées ou le drapeau de Novembre National (avec une esthétique de runes nordiques et la croix chrétienne présidant aux initiales NN). Cela ouvre-t-il la possibilité d’une droite républicaine dans notre pays ? Cela dépasse le cadre de notre article, mais je voudrais terminer par quelques réflexions.
Tout d’abord, je crois qu’il s’agit d’un véritable sursaut national. Le début de la réconciliation des deux Espagnes par les actes. Deux Espagnes qui ne sont pas, comme on le dit souvent, la gauche (rouge) et la droite (bleue), mais celle qui était endormie et celle qui, bien qu’éveillée, était narcotisée.
Deuxièmement, on a beau essayer de faire croire que le tumulte est contrôlé par les partis politiques, il s’agit d’un mouvement spontané qui échappe totalement au contrôle du politburo de l’époque. Novembre national est un mouvement national-populaire qui naît dans la rue et se propage à travers les réseaux, de bas en haut. En revanche, le mouvement 15-M et le processisme sont des stratégies élitistes. L’une de « fermeture » et l’autre de « remplacement ». Avec le recul, le 15-M s’est avéré être davantage une stratégie des élites européennes pour domestiquer le mécontentement provoqué par la crise financière de 2008. À tel point que l’un des architectes et idéologues de cette vague de protestations (dont le germe était Occupy Wall Street), Yanis Varoufakis, a cessé d’oser « défier » les « hommes en noir » de la Troïka pour promouvoir DiEM25, un mouvement politique paneuropéen et technocratique. Ce « moment populiste » s’est avéré être un bluff et, après l’éclatement des « révolutions de couleur » dans le monde entier, des partis similaires à Podemos sont apparus comme des champignons.
D’autre part, le processus catalan depuis Artur Mas est clairement une tentative de remplacer une élite centrale par une élite périphérique. Et le remplacement des élites ne remet pas en question le statu quo existant, mais préfère les noms de famille Cambó, Saramanch, Pujol et Grifols à García ou Rodríguez. Par conséquent, le but ultime de l’indépendance catalane est de « ressembler à l’Europe » et de devenir un État parfaitement comparable à ses voisins, avec sa constitution, son système judiciaire et son trésor. Le mandat du peuple catalan n’est autre que le plus « normatif ». Quoi qu’il en soit, le NN n’est ni le réveil facha du 15-M, ni un simple retour de bâton de l’indépendantisme, il va au-delà.
Enfin, on peut se demander si nous sommes face à un moment populiste qui, contrairement aux simulacres précédents, peut dépasser le paradigme libéral. Et, par conséquent, si nous sommes face au dernier grand événement (en termes de rupture) de la longue histoire de l’insurrection dans l’Espagne moderne. Pour l’instant, nous pouvons penser que les manifestations de novembre 2023 sont les prolégomènes d’un réveil patriotique.
[Publication initiale (2013) : les4verites.com]
Par Nicolas Bonnal
[NDLR Depuis 2013, Zemmour a aussi politiquement décliné.]
— Voici ! Je suis dégoûté de ma sagesse, comme l’abeille qui a amassé trop de miel. J’ai besoin de mains qui se tendent…
Ainsi commença le déclin de Zarathoustra.
Je vais être un peu long, mais j’ai mes raisons. On me pardonnera ou on ne me lira pas. Je ne m’excuserai donc pas. J’ai d’ailleurs titré le déclin de Marine Le Pen : tout peut très bien se passer par la suite. Il n’y a qu’à voir Zarathoustra.
J’aurais préféré me taire parce que j’adore le père et que je pensais que l’idéal, même faiblard, tiendrait… mais tant pis, je me lance. Les scores dont on a fait grand cas l’an dernier ne sont pas meilleurs en 2012 qu’en 2002 quand les deux candidats nationalistes caressaient les 20 % déjà au premier tour de la présidentielle la plus géniale de l’histoire. Depuis, on fait du surplace, depuis on régresse, quoiqu’en pensent les experts en dédiabolisation.
Dernièrement Éric Zemmour ironise : le FN devient un parti de gauche, voire d’extrême-gauche. Ce n’est pourtant pas un extrémiste, Zemmour, sauf pour les fous (il y en a).
Voyons voir : le Front National de Marine Le Pen est-il en perte de vitesse ? Le message de l’ex-parti le plus diabolisé du monde est-il encore bien reçu ? Y a-t-il encore un message, d’ailleurs ? Ou est-on en train de le brouiller, le beau parti débarbouillé, pardon, dédiabolisé ? Et a-t-on compris en pas très haut lieu que le 13 janvier fut une splendide occasion gâchée ? A-t-on compris que pour Chesterton la famille est le seul État qui crée et aime ses citoyens, et que pour cette raison il vaut tous les États et tous les partis du monde ? Ou s’est-on soumis platement aux commandements d’une camarilla et d’un lobby noyauteur par trop efficaces ? Car depuis quand le FN se doit-il d’être le parti islamophobe alors qu’il est le parti de la patrie française trahie par les gaullistes, depuis quand le FN est-il devenu le parti de l’ultra-laïcité, alors que cette laïcité a fait depuis 1870 le lit de l’hexagone moderne nihiliste et jouisseur, mais arrogant et harceleur ? Et depuis quand le FN sozial promeut-il un SMIC ridiculement élevé alors qu’il était le parti de la baisse des impôts ? Depuis quand et pourquoi, surtout, le FN ne veut-il plus être le parti de la pensée sauvage, comme l’avait superbement baptisé Jean Baudrillard ?
On ne peut pas être mieux dénoncé (je n’écris pas trahi) que par les gens qui vous voulaient du bien, ou attendaient beaucoup de vous. Surtout lorsque ces gens ont du talent. Je pense à un journaliste célèbre et courageux.
Il faut voir cette étonnante émission : Éric Zemmour tentait avec son culot et sa faconde de remonter les pendules du flageolant Front National et de rappeler Marine Le Pen non pas à l’ordre nouveau, mais ancien, celui de la famille par exemple (si j’ose dire il voulait la rappeler sous les drapeaux !). Comme elle a peu d’arguments pour justifier son absence remarquée le 13 janvier dernier au défilé du sauvetage de la famille française, Marine Le Pen se braque et s’en prend de sa grosse voix toujours enrouée à la personne de notre journaliste préféré ainsi qu’à celle de son compère. Elle s’embrouille et nous sort un brouet politique sur les raisons de ne pas y aller pour ne pas tomber dans le piège du gouvernement (alors que c’est en n’y allant pas qu’elle y est justement tombée), qui détourne l’attention de la situation sociale qui est si grave et patati patata.
Quel argument sot, tout de même. Car la situation sociale est grave, elle l’est d’ailleurs depuis mille ans, mais elle ne rassemble pas un million de personnes dans la rue. Elle ne rassemble plus, la situation sociale. La famille, oui, rassemble : et c’est pourquoi ils vont l’achever, les socialistes.
Les employés et les ouvriers se sont fait tous virer en se faisant insulter par la presse de gauche et les économistes libéraux (les Français sont trop payés, ils ne foutent rien, etc.)…, mais il leur restait au moins une famille ! Cela se termine aussi et Michel Houellebecq, avant qu’il ne bascule aussi dans le politiquement correct, écrivait que le libéralisme néo (néo c’est le cancer en jargon post-médical) liquiderait la famille, qui était le dernier obstacle entre le marché et l’individu. L’individu nu devant le marché, voyez les pubs autour de vous, c’est l’avènement du transhumain, du festif et du techno cloné. C’est l’individu des réseaux, le tatoué bien refait, le narcissique qui se met en scène lui-même sur face de bouc à toute heure de la journée et de la nuit, et qui s’empresse d’abolir six mille ans ou un million d’années d’histoire pour se shooter d’éternel présent. Nietzsche toujours, qu’on lit si mal à droite :
« Un peu de poison de-ci de-là, pour se procurer des rêves agréables. Et beaucoup de poisons enfin, pour mourir agréablement. »
Je viens de lire, un peu mal à l’aise tout de même, que l’on peut fabriquer des bébés qui ne tomberont pas malades, maintenant. Je lis cette intéressante publicité sur Atlantico.fr, journal néocon et transhumain qui comme Marine Le Pen a beaucoup promis et peu tenu, mais qui interrogeait le peu étincelant Louis Aliot sur la soudaine passion des homosexuels pour le Front national têtu. La réponse ne se fait pas attendre : les gays ont peur des musulmans ! Le FN c’est la laïcité garantie !
Nous y sommes : toute époque charnière se veut méphistophélique et androgyne ; ce n’est pas une nouveauté, lisez Pétrone, lisez les Italiens, voyez leurs meilleurs films sur le troisième Reich et ses coquins endimanchés (pensez à Galliano, ou à Bowie plus jeune, ou à Nick Knight, le filmeur de Lady Gaga ancien adorateur des skinheads, pensez, vous dis-je). Relisez Rebatet, aussi inspiré qu’à l’accoutumée :
« Si les gouines étaient gaullistes, la pédale était fort collaboratrice. ».
Fermez le ban ! Car que les homos soient de droite ou d’extrême-droite n’est bien sûr pas a priori gênant : c’est qu’ils soient l’extrême-droite qui l’est.
Aux époques charnières, on célèbre donc l’individu de la mutation, l’azimuté faustien et cela change bien sûr de la vieillotte vie familiale. De plus insistants que moi ont écrit sur ce sujet nauséeux, je n’y insiste pas. Eric Zemmour ne se démonte pas (on sait qu’il aurait aimé un FN pas extrémiste, mais plutôt fort et révolutionnaire), et demande en tout cas à Marine Le Pen si elle n’est pas trop entourée d’homosexuels, ce qui justifierait sa conduite en la matière (pour la manif du 13 janvier donc, mais pas seulement ! pas seulement !).
Et là, rebelote : elle monte sur ses grands cheveux, explique que cela n’a rien à voir, bégaie trois raisons loqueteuses que même ces journalistes (pourtant pas des hostiles a priori ! des compatissants plutôt) relèvent, et par contre s’accroche bien hargneuse à un énoncé : ce n’est pas parce que l’on est homosexuel qu’on serait…
Qu’on serait quoi ? Hostile au mariage gay ? Bien sûr que l’on ne serait pas hostile au mariage gay ! Et puis quoi encore ? Un sympathisant juif du FN serait bien sûr hostile à un affrontement avec Israël ! Un catholique du FN voudrait bien que l’on s’en prît moins au pape ! Un vieux harki en aurait marre de l’islamophobie ! 50 000 musulmans morts pour la France tout de même !
Il est donc évident qu’en agissant en tant que groupe social d’élite sûr de soi et dominateur, pour reprendre une formule qui fit scandale tant elle était juste, le lobby gay qui se fait si bien respecter au FN — tout en affirmant qu’il n’existe pas — a bien fait les choses. Ce noyautage est venu des grandes écoles, de la modernité et du baragouin néo-laïc, souverainiste et identitaire. Comme disait notre cher Jean-Pierre Cohen en 1995, le FN est un parti révolutionnaire. Et maintenant c’est du Chevènement pour madame Ouille ! Ah, mais c’est sûr on passe mieux dans les médias. Est-ce si sûr, d’ailleurs ? Est-ce si sûr d’ailleurs quand on la voit éclater tout le temps avec les journalistes soi-disant amadoués ?
La camarilla en place (mes diverses sources m’ont parlé de 22 conseillers, toujours planchant, frais et dispos — car pas de famille !), on a donc fait du Pim Fortuyn, on a revendiqué la laïcité face aux barbus, on a fait du postmoderne et on essayé de bien plaire aux médias et aux journaux dits sérieux ! Même sur le plan diplomatique, on a fait ce qui était le pire : chercher des satisfecit aux USA, satisfecit qui ont débouché sur une humiliation rondelette, au lieu de développer une diplomatie alternative et de rompre avec le répugnant alignement de la France sur l’atlantisme désuet et dangereux (une certaine Mrs Rubin écrit dans le Washington post que d’ailleurs la France en guéguerre partout fait plus pour la paix maintenant que le pauvre Obama !!!). Je rappelle l’admirable élan de l’interview de JMLP à Pravda.ru :
« Pour ma part je milite pour la réalisation d’un ensemble harmonieux et animé par la volonté d’un destin commun sur l’ensemble de l’espace boréal, allant de Brest à Vladivostok. »
J’avais bien l’impression que le président (le seul, le vrai, l’unique) militait pour sa part en la circonstance ! Cette stratégie de la vase communicante ne me paraît pourtant pas la bonne. Ce n’est pas en faisant des clins d’œil aux inquisiteurs qu’on les convertit. Il serait bon qu’un des crânes d’œuf qui entourent la benoîte présidente lui expliquât en trois mots McLuhan : le médium ce n’est pas un outil, le médium c’est de l’idéologie. Si on veut passer à la télé tout le temps, on s’y soumet totalement. Grillo a triomphé en Italie parce qu’il a refusé la télé : il n’a utilisé que son blog et la rue, il a vaincu l’idéologie mondialisée, ce saltimbanque dont le nom signifie Gemini Cricket en français ! Et en plus il est un expert en conspiration. Un ban pour Beppe Grillo.
Je n’aurais rien dit si Zemmour n’avait pas parlé et si le peuple n’avait pas voté, et mal, aussi, depuis quelques mois. Cette stratégie de la vase communicante ne plaît pas non plus, puisque les sondages sont en panne et même les indices d’écoute ! La petite flamme de 2012, qui ne vaudra jamais l’élan créateur des années 80, n’a pas tenu longtemps : on fait du sozial, on chaperonne trois minutes sur les télés, on fait la grosse voix avec Mélenchon ou son remplaçant et on espère surfer sur les vagues de mécontentement. Il va de soi que cela ne marche pas, et c’est pourquoi je salue le triomphe d’Éric Zemmour sur Marine Le Pen ; Zemmour, qui en a marre du mondialisme, de la maçonnerie universelle et de l’individu-marché : faites Zemmour, pas l’équerre !
Zemmour ferait bien de présenter sa liste, comme Beppe Grillo, qui n’est soumis ni enchaîné le foie ouvert au Caucase des médias… Et là peut-être que nous serons 25 % à aller voter pour lui, comme en Italie, et non 16 % à voter pour un FN plein d’amour et de tolérance, un score terrible après trente années de militantisme et de désastre républicain. Demandez le programme, mais pas celui de la télé et du lobby branché. Sinon, prenez la rue et chantez la révolte artiste, pas Narcisse.
On déplore continuellement chez nous le manque de gens pratiques ; on dit qu’il y a, par exemple, pléthore d’hommes politiques…
(L’Idiot, III, I)
[Publication initiale : strategika.fr]
Par Nicolas Bonnal
« Le serpent du magicien de la fable a mangé tous les autres serpents ; et gagner de l’argent est le serpent de notre magicien, restant aujourd’hui seul maître du champ. »
Le satanisme ploutocratique des USA a arraisonné l’Europe et menace toute la vie sur terre. La Chine après la Russie…
En relisant Christopher Lasch (spécialiste de cette époque fondamentale : les sixties) je tombe sur une citation du prestigieux poète Walt Whitman, dont je n’avais jusque-là qu’une approche universitaire donc nulle. Il se trouve qu’après la Guerre de Sécession, Whitman se rend compte comme Melville que son pays est devenu fou et dangereux. Il sent aussi qu’il est déjà un empire — presque au sens du KKK.
Cette citation est extraite d’un essai bref, étrange et rebelle : Democratic vistas (bravo pour cet hommage au passé hispanique de ce pays volé à tout le monde). Je pense le traduire et le préfacer : il fera un bon pendant à mon Dostoïevski traduit en roumain.
On commence :
« Je dis que nous ferions mieux de regarder notre époque et nos terres en face, comme un médecin diagnostiquant une maladie profonde. Il n’y a jamais eu, peut-être, plus de vide au cœur qu’à présent, et ici aux États-Unis. La croyance authentique semble nous avoir quittés. »
C’est la citation de Lasch. La suite :
« Les principes sous-jacents des États ne sont pas honnêtement crus (malgré toute cette lueur trépidante et ces cris mélodramatiques), ni l’humanité elle-même. Quel œil pénétrant ne voit pas partout à travers le masque ? Le spectacle est épouvantable. »
Guerre des sexes et fin de la religion :
« Nous vivons dans une atmosphère d’hypocrisie partout. Les hommes ne croient pas aux femmes, ni les femmes aux hommes. Une hauteur méprisante règne en littérature. Le but de tous les littérateurs est de trouver de quoi se moquer. Beaucoup d’églises, de sectes, etc., les fantasmes les plus lugubres que je connaisse, usurpent le nom de religion. La conversation est une masse de badinage. »
Sur ce déclin de la conversation Drumont écrit la même chose à l’époque.
Corruption et dépravation recouvrent le pays (c’est le début du Gilded Age dont Davos via ses milliardaires veut nous faire sortir) :
« De la tromperie dans l’esprit, la mère de toutes les fausses actions, la progéniture est déjà incalculable. Une personne perspicace et franche, du département des revenus de Washington, qui est amenée par le cours de son emploi à visiter régulièrement les villes du nord, du sud et de l’ouest, pour enquêter sur les fraudes, m’a beaucoup parlé de ses découvertes. La dépravation des classes patronales de notre pays n’est pas moindre qu’on ne l’a supposé, mais infiniment plus grande. »
Mystères de l’ouest… Whitman dénonce la corruption générale au pays de l’extermination des Indiens (jadis respectés par un génie comme Fenimore Cooper) :
« Les services officiels de l’Amérique, nationaux, étatiques et municipaux, dans toutes leurs branches et départements, à l’exception de la justice, sont saturés de corruption, de pots-de-vin, de mensonges, de mauvaise administration ; et le système judiciaire est entaché. Les grandes villes puent le vol et la crapule respectables autant que non respectables. Dans la vie à la mode, la désinvolture, les amours tièdes, l’infidélité faible, les petits objectifs, ou pas d’objectifs du tout, uniquement pour tuer le temps. »
Règne de l’argent-roi (ici le grand Walt se rapproche de Maurice Joly et des Protocoles) :
« Le serpent du magicien de la fable a mangé tous les autres serpents ; et gagner de l’argent est le serpent de notre magicien, restant aujourd’hui seul maître du champ. »
Règne de l’argent-roi qui annonce le nôtre, règne dépourvu bien sûr de justice sociale (notre condition sociale ne s’est améliorée que durant l’existence de l’URSS ; avant et après c’était une monstruosité) :
« La meilleure classe que nous montrons n’est qu’une foule de spéculateurs et de vulgaires habillés à la mode. Il est vrai, en effet, derrière cette farce fantastique, jouée sur la scène visible de la société, des choses solides et des travaux prodigieux doivent être découverts, existant grossièrement et se déroulant à l’arrière-plan, pour avancer et se dire dans le temps. Pourtant les vérités n’en sont pas moins terribles. Je dis que notre démocratie du Nouveau Monde, quel que soit son succès dans la sortie des masses de leurs bourbiers, dans le développement matérialiste, les produits, et dans une certaine intellectualité populaire superficielle hautement trompeuse, est, jusqu’à présent, un échec presque complet dans son développement social. »
Enfin le grand poète pressent la destinée impériale de cette grosse puissance riche et tarée qui va précipiter le monde en enfer :
« En vain marchons-nous d’un pas sans précédent vers un empire si colossal, surpassant l’antique, au-delà d’Alexandre, au-delà de l’emprise la plus fière de Rome. En vain avons-nous annexé le Texas, la Californie, l’Alaska, et atteint le nord pour le Canada et le sud pour Cuba. C’est comme si nous étions d’une manière ou d’une autre dotés d’un corps vaste et de plus en plus bien équipé, et que nous nous retrouvions ensuite avec peu ou pas d’âme. »
Dix-neuvième siècle ? Non seulement on ne découvre rien depuis ce temps des génies, mais on laisse courir. Et il se fait tard tout d’un coup : le résultat c’est une guerre nucléaire totale pour satisfaire Davos et ses milliardaires.
https://xroads.virginia.edu/~Hyper/Whitman/vistas/vistas.html
https://en.wikipedia.org/wiki/Democratic_Vistas
https://carturesti.ro/carte/dostoievski-si-modernitatea-occidentala-2058367727
Par Nicolas Bonnal
Stefan Zweig et la résistance à la matrice américaine : « La plus haute réalisation de l’homme spirituel reste la liberté, la liberté par rapport à autrui, aux opinions, aux choses, la liberté pour soi-même. Et c’est notre tâche : devenir toujours plus libre, à mesure que les autres s’assujettissent volontairement ! »
Zweig comme je l’ai dit essaie de nous guider (vaguement, comme tous les esprits solides) contre le monde moderne et sa frénésie (le mot est du génial Preston Sturges qui vint tourner en France au cours de nos chères années cinquante les Carnets du Major Thompson) ; et il comprend, comme je ne cesse de le répéter que la masse est désespérante. Il le comprend avant même que Hitler n’arrive au pouvoir et n’interdise à sa vieille mère non vaccinée (pardon, juive) de s’asseoir sur un banc viennois. Le monde moderne c’est avant tout des outils qui transforment des paresseux (péché capital lié d’ailleurs à la dépression) en imbéciles (en latin, celui qui n’a pas de bâton de pèlerin — baculus) :
« Toutes ces choses, que j’ai seulement évoquées, le cinéma, la radio, la danse, tous ces nouveaux moyens de mécanisation de l’Humanité, exercent un pouvoir énorme qui ne peut être dépassé. Toutes répondent en effet à l’idéal le plus élevé de la moyenne : offrir du plaisir sans exiger d’effort. Et leur force imbattable réside en cela : elles sont incroyablement confortables. »
La fin de l’effort donc (on montre son passe vaccinal ou sa rétine et tout le monde est content) :
« La nouvelle danse peut être apprise en trois heures par la femme de ménage la plus maladroite, le cinéma ravit les analphabètes, desquels on n’exige pas une grande éducation pour profiter de la radio ; il suffit de mettre les écouteurs sur la tête, pour déjà l’entendre rouler dans l’oreille même les dieux luttent en vain contre un tel confort. Ce qui n’exige que le minimum d’effort, mental et physique, et le minimum de force morale doit nécessairement l’emporter auprès des masses dans la mesure où cela suscite la passion de la majorité. »
Comme Sénèque dans son empire urbain qui empirait, Zweig voit que tout cela est lié à l’ennui (le mot noise a donné ce que l’on sait en anglais) :
« Et ce qui aujourd’hui encore réclame l’indépendance, l’autodétermination ou la personnalité dans le plaisir paraît dérisoire face à un pouvoir aussi surdimensionné. À vrai dire, au moment où l’humanité s’ennuie toujours davantage et devient de plus en plus monotone, il ne lui arrive rien d’autre que ce qu’elle désire au plus profond d’elle-même. L’indépendance dans le mode de vie et même dans la jouissance de la vie ne constitue plus, désormais, un objectif, tant la plupart des gens ne s’aperçoivent pas à quel point ils sont devenus des particules, des atomes d’une violence gigantesque. »
Oui c’est cela la clé : on ne veut plus rien être, dans un stade, dans un meeting, dans une discothèque, ou devant sa télé ou son smartphone. Pouchkine en a parlé dans Eugène Onéguine (voyez la traduction scandée de ma femme). Pearson a parlé de se débarrasser du fardeau de la personnalité.
Pouchkine (Eugène donc, Livre II, strophe XIV) :
« Mais nous n’avons même pas d’amitié.
Nous avons détruit tous les préjugés ;
On prend pour les zéros les autres gens
En se prenant pour le “un” sérieusement.
Tous — nous tendons vers Napoléon,
Et les bipèdes créatures, en millions,
Ne sont pour nous que des outils ;
Le sentiment pour nous est une étrange bêtise. »
Zweig cite lui Tacite :
« Ils se laissent ainsi entraîner par le courant qui les happe vers le vide ; comme le disait Tacite : “ruere in servitium, ils se jettent dans l’esclavage ; cette passion pour l’autodissolution a détruit toutes les nations. Maintenant, c’est au tour de l’Europe : la guerre mondiale a été la première phase, l’américanisation est la seconde. »
La troisième phase c’est celle du spectaculaire intégré de Debord ou celle de la tyrannie informatique planétaire, celle qui transforme les Palestiniens en cobayes, comme dit Hariri. Et gageons que Gaza est le modèle de ce qui va suivre. Le tout par la grâce de la « silly conne » Valley et avec la bénédiction du pape et de Davos.
Zweig se rapproche ensuite de Fahrenheit 451 : « nos livres ont cessé de les intéresser » (ils n’ont pas besoin de les brûler d’ailleurs).
« Ainsi, aucune résistance ! Ce serait une présomption scandaleuse que d’essayer d’éloigner les gens de ces petits plaisirs (intérieurement vides). Parce que nous — pour être honnêtes — qu’avons-nous d’autre à leur donner ? Nos livres ne les touchent plus, car ils ont cessé depuis longtemps de procurer les sueurs froides ou les excitations fébriles, que le sport et le cinéma prodiguent à foison. Ils ont même l’impudence d’exiger au préalable de nos livres, de notre effort mental et de notre éducation, une coopération des sentiments et une tension de l’âme. Nous sommes devenus étrangers à tous ces plaisirs et passions de masse et donc à l’esprit de l’époque, nous, dont la culture spirituelle est une passion pour la vie, nous, qui ne nous ennuyons jamais, pour qui chaque jour est trop court de six heures, nous, qui n’avons besoin ni de dispositifs pour tuer le temps ni de machines d’arcade, ni de danse, ni de cinéma, ni de radio, ni de bridge, ni de défilés de mode. »
Les minoritaires (aucune raison de faire de nous des hommes d’élite, nous sommes de simples ludions minoritaires dans un monde de monstres, de Barbie et de Rhinocéros) :
« Il nous suffit de passer devant un panneau d’affichage dans une grande ville ou de lire un journal qui décrit en détail les batailles homériques des matchs de football pour sentir que nous sommes déjà devenus des outsiders, tels les derniers encyclopédistes pendant la Révolution française, une espèce aussi rare et menacée d’extinction aujourd’hui en Europe que les chamois et les edelweiss. »
L’homme libre aussi rare qu’un chamois…
Il faut créer des parcs alors (cf. les oasis catholiques dont a parlé Benoit XVI avant de se faire expédier par Obama et par Visa sous les vivats de la masse) :
« Peut-être qu’un jour un parc naturel sera créé pour nous, derniers spécimens d’une espèce rare, pour nous préserver et nous conserver respectueusement en tant que curiosités de l’époque, mais nous devons avoir conscience que nous manquons depuis longtemps d’un quelconque pouvoir pour tenter la moindre chose contre cette uniformité croissante du monde. »
Juif humaniste décidément exemplaire, Zweig se compare aux moines (il en restait alors) :
« Devant cette lumière éblouissante de fête foraine, nous ne pouvons que demeurer dans l’ombre et, tels les moines des monastères pendant les grandes guerres et les grands bouleversements, consigner dans des chroniques et des descriptions un état de choses que, Comme eux, nous tenons pour une déroute de l’esprit. Mais il n’y a rien que nous puissions faire, rien que nous puissions empêcher et rien que nous puissions changer : tout appel à l’individualisme auprès des masses, auprès de l’humanité serait de l’arrogance et de la prétention. »
La solution c’est la fuite. On pense à la Fuga mundi médiévale mais aussi à l’excellent Laborit et à son éloge de la fuite : tout le temps et tous les esclaves se croient libres) :
« Le dernier recours ; il ne nous en reste qu’un seul, puisque nous considérons la lutte vaine : la fuite, la fuite en nous-mêmes. On ne peut pas sauver l’individu dans le monde, on ne peut que défendre l’individu en soi. »
Il faut aller vers la liberté (problème : le système use et abuse de ce mot) :
« La plus haute réalisation de l’homme spirituel reste la liberté, la liberté par rapport à autrui, aux opinions, aux choses, la liberté pour soi-même. Et c’est notre tâche : devenir toujours plus libre, à mesure que les autres s’assujettissent volontairement ! Plus les intérêts se diversifient et s’étendent dans tous les cieux de l’esprit, plus l’inclination d’autrui devient monotone, à sens unique, mécanique ! Et tout cela sans ostentation ! Ne vous en vantez pas : nous sommes différents ! N’affichez pas votre mépris pour toutes ces choses, qui ont peut-être un sens supérieur que nous ne comprenons pas. »
Zweig veut éviter le plan survivaliste (on en a parlé dix fois avec Piero…) :
« Séparons-nous à l’intérieur, mais pas à l’extérieur : portons les mêmes vêtements, adoptons tout le confort de la technologie, ne nous consumons pas dans une distanciation méprisante, dans une résistance stupide et impuissante au monde. Vivons tranquillement mais librement, intégrons nous silencieusement et discrètement dans le mécanisme extérieur de la société, mais vivons en suivant notre seule inclination, celle qui nous est la plus personnelle, gardons notre propre rythme de vie ! Ne détournons pas le regard par orgueil, ne nous éloignons pas effrontément, mais regardons, cherchons à reconnaître puis à rejeter sciemment ce qui ne nous appartient pas, et maintenons sciemment ce qui nous semble nécessaire. Car si nous refusons en notre âme l’uniformité croissante de ce monde, nous restons reconnaissants et dévoués à ce que celui-ci a d’indestructible, à ce qui demeure au-delà de tout changement. »
Même s’il s’est suicidé à Petrópolis (ville admirable, d’ailleurs non baroque, une des plus belles du Brésil avec Olinda et Ouro Preto), Zweig se veut optimiste :
« Des forces sont encore à l’œuvre, qui ignorent toute fragmentation et tout nivellement. La nature est toujours changeante dans ses formes et, au fil des saisons, façonne de façon éternellement nouvelle la montagne et la mer. Éros joue encore son jeu perpétuellement varié, I’art survit dans I’invention d’êtres continuellement pluriels, la musique jaillit de sources sonores de plus en plus hétéroclites, provenant de personnes ouvertes d’esprit, et d’innombrables phénomènes et chocs émanent encore des livres et des images. Si tout ce que l’on appelle notre culture, avec un mot regrettable et artificiel, devient de plus en plus morcelé et désillusionné, le “bien premier de l’humanité”, comme Emil Lucka désigne les éléments de l’esprit et de la nature dans son merveilleux livre, ne peut être monnayable auprès des masses, tant il gît au plus profond des puits de l’esprit, dans les galeries souterraines des sentiments, il se tient trop loin des rues, trop loin du confort. Ici, dans l’élément éternellement transformé et toujours prompt au renouvellement, une infinie variété attend les volontaires : voici notre atelier, notre monde à nous, qui ne sera jamais monotone. »
On répète sans commenter — tant c’est admirable :
« Ici, dans l’élément éternellement transformé et toujours prompt au renouvellement, une infinie variété attend les volontaires : voici notre atelier, notre monde à nous, qui ne sera jamais monotone. »
Qui survivra verra.
[Source : nouveaupresent.fr]
Par Eric Delcroix
Le Rassemblement National (RN), à l’initiative de sa présidente, Marine Le Pen, a participé à la grande manifestation d’exorcisme républicain organisée le 12 novembre par les présidents de l’Assemblée et du Sénat, au soutien de la seule communauté juive. Les responsables musulmans, eux, ont logiquement boudé cette marche en faveur des israélo-israélites (les Arméniens, chrétiens pas même sémites, étant tombés dans la « boîte à oubli » orwellienne).
Ce genre de manifestation, organisée par les pouvoirs publics et non pour faire pression sur ceux-ci, a quelque chose d’incongru et de malsain. Il s’agit toujours de rechercher l’unanimité, autour de la République, comprise non pas comme le régime du temps, mais comme l’adhésion à une conception révolutionnaire et abstraite de la Nation.
En la rejoignant inconsidérément, le RN a rompu définitivement avec ce qu’était le Front National, savoir une sorte de syndicat informel des Français de souche européenne ou assimilés. Il s’agissait alors de défendre une conception charnelle et affective de la Nation, dont même De Gaulle avait reconnu la nature avec sa « race blanche » et sa « religion chrétienne » (1959)…
À un moment, les troupes de Marine Le Pen se sont retrouvées entre le groupe de la sulfureuse Ligue de défense juive, qui a largement applaudi la chef [sic] de file frontiste, et une délégation du Crif1, largement hostile au RN. »
(le Figaro, 13 novembre, page 3).
Le RN ne pourra plus s’en sortir et, le judaïsme ne connaissant pas la Rédemption, il n’y aura pas de pardon pour le parti de Mme Le Pen. Après ce choix déterminant et historique de sa cheftaine, adoubée par Serge Klarsfeld, il y aura désormais une exigence permanente d’humiliation justificatrice de conformité. Il faudra toujours et encore en faire plus, au regard de ces institutions juives agréées, sous le regard vétilleux du CRIF.
D’ailleurs, Pierre Moscovici, Premier président de la Cour des comptes que l’on découvre arbitre des élégances hébraïques, l’a annoncé urbi et orbi :
[Marine], personnellement, n’est pas antisémite [lire anti-juive]. Mais est-ce que que le RN a purgé tous les éléments de l’antisémitisme ? Je ne le crois pas. »
(le Figaro, 13 novembre, page 4).
Appel explicite à une purge au sein du RN de la vieille garde frontiste, supposée éventuellement non pro-sioniste ou simplement rétive à ce que Renan appelait le sémitisme. La dissolution du syndicat des Français est donc acquise, la survie du peuple français historique contre son Grand remplacement n’a plus guère pour défenseurs que nous autres, souvent anciens membres ou sympathisants historiques du Front National, dispersés façon puzzle…
Si le reniement vis-à-vis de son père, par opportunisme, absence de culture politique, demeurait pour Marine une question de famille, le ralliement au conformisme dit républicain et de tradition maçonnique, sonne le glas du syndicat des français.
Tout le monde n’a pas droit à une protection communautaire. Pour avoir tenté néanmoins d’être le tribun des Français, Jean-Marie Le Pen l’a payé très cher devant les tribunaux de l’iniquité de la République. Et l’ingratitude de sa fille.
Mais c’était hier…
Si elle accède un jour au pouvoir, Marine sera au mieux une pâle Georgia Meloni française, incapable de trouver le ressort héroïque pour juguler le Grand remplacement. On lui concédera peut-être quelques victoires symboliques, car c’est aussi ça la politique politicienne à laquelle elle aspire. Et si elle n’accède jamais au pouvoir, elle recevra sûrement la Légion d’honneur en lot de consolation.
Mais le Grand remplacement continuera, au milieu des manifestations contre le racisme et les discriminations…
Et si elle accédait à la Présidence et… que lui succédait à l’Élysée un président musulman ?
Voire… Mais lit-elle seulement Michel Houellebecq ?
[Source : RI]
Par Pepe Escobar
Washington doit gagner sa guerre de Gaza contre l’Iran parce qu’il n’a pas réussi à gagner sa guerre d’Ukraine contre la Russie.
Le Sud global s’attendait à l’aube d’une nouvelle réalité arabe.
Après tout, la rue arabe — même si elle est réprimée dans ses pays d’origine — a vibré de manifestations exprimant une rage féroce contre le massacre en masse des Palestiniens de la bande de Gaza par Israël.
Les dirigeants arabes ont été contraints de prendre des mesures, au-delà de la suspension de quelques ambassadeurs auprès d’Israël, et ont appelé à un sommet spécial de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) pour discuter de la guerre israélienne en cours contre les enfants palestiniens.
Les représentants de 57 États musulmans se sont réunis à Riyad le 11 novembre pour porter un coup sérieux et concret aux génocidaires et à ceux qui les soutiennent. Mais en fin de compte, rien n’a été offert, pas même un réconfort.
La déclaration finale de l’OCI restera à jamais gravée dans le palais doré de la lâcheté. Les points forts du spectacle rhétorique sordide : nous nous opposons à la « légitime défense » d’Israël ; nous condamnons l’attaque contre Gaza ; nous demandons (à qui ?) de ne pas vendre d’armes à Israël ; nous demandons à la CPI kangourou d’« enquêter » sur les crimes de guerre ; nous demandons une résolution de l’ONU condamnant Israël.
Pour mémoire, c’est ce que les 57 pays à majorité musulmane ont pu faire de mieux en réponse à ce génocide du XXIe siècle.
L’histoire, même si elle est écrite par les vainqueurs, a tendance à ne pas pardonner aux lâches.
Les quatre plus grands lâches, en l’occurrence, sont l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Bahreïn et le Maroc — ces trois derniers ayant normalisé leurs relations avec Israël sous la lourde main des États-Unis en 2020. Ce sont eux qui ont constamment empêché l’adoption de mesures sérieuses lors du sommet de l’OCI, comme le projet de proposition algérienne visant à interdire le pétrole à Israël et l’utilisation de l’espace aérien arabe pour livrer des armes à l’État occupant.
L’Égypte et la Jordanie — vassaux arabes de longue date — n’ont pas non plus fait preuve d’engagement, de même que le Soudan, qui est en pleine guerre civile. La Turquie, sous la direction du sultan Recep Tayyip Erdogan, a une fois de plus montré qu’elle ne faisait que parler sans agir ; une parodie néo-ottomane du « all hat, no cattle » texan [des paroles en l’air, mais pas d’action, NDLR].
Les quatre plus grands lâches méritent d’être examinés de près. Bahreïn est un vassal de bas étage qui héberge une branche clé de l’empire des bases américaines. Le Maroc entretient des relations étroites avec Tel-Aviv — il s’est rapidement vendu après la promesse israélienne de reconnaître la revendication de Rabat sur le Sahara occidental. En outre, le Maroc dépend fortement du tourisme, principalement de l’Occident collectif.
Viennent ensuite les gros bonnets, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Ces deux pays sont truffés d’armes américaines et, comme Bahreïn, accueillent également des bases militaires américaines. Le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane (MbS) et son vieux mentor, le souverain émirati Mohammed ben Zayed (MbZ), tiennent compte de la menace de révolutions de couleur qui déchirent leurs domaines régaliens s’ils s’écartent trop du scénario impérial accepté.
Mais dans quelques semaines, à partir du 1er janvier 2024, sous la présidence russe, Riyad et Abou Dhabi élargiront considérablement leurs horizons en devenant officiellement membres des BRICS 11.
L’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis n’ont été admis dans le groupe élargi des BRICS qu’en raison de calculs géopolitiques et géoéconomiques minutieux effectués par le partenariat stratégique Russie-Chine.
Avec l’Iran — qui a son propre partenariat stratégique avec la Russie et la Chine — Riyad et Abou Dhabi sont censés renforcer le poids énergétique de la sphère des BRICS et être des acteurs clés, plus tard, dans la campagne de dédollarisation dont le but ultime est de contourner le pétrodollar.
Pourtant, dans le même temps, Riyad et Abou Dhabi devraient également tirer d’immenses bénéfices du plan pas si secret de 1963 visant à construire le canal Ben Gourion, du golfe d’Aqaba à la Méditerranée orientale, arrivant — quelle coïncidence — tout près du nord de la bande de Gaza, aujourd’hui dévastée.
Le canal permettrait à Israël de devenir un centre de transit énergétique clé, délogeant le canal de Suez de l’Égypte, et cela s’accorde parfaitement avec le rôle d’Israël en tant que nœud clé de facto dans le dernier chapitre de la guerre des corridors économiques : le corridor Inde–Moyen-Orient (IMEC) concocté par les États-Unis.
IMEC est un acronyme assez pervers, comme l’est toute la logique de ce corridor fantastique, qui consiste à positionner Israël, qui viole le droit international, comme une plaque tournante commerciale essentielle et même comme un fournisseur d’énergie entre l’Europe, une partie du monde arabe et l’Inde.
C’est également la logique qui sous-tend la mascarade du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou à l’ONU en septembre, lorsqu’il a montré à l’ensemble de la « communauté internationale » une carte du « nouveau Moyen-Orient » dans laquelle la Palestine avait été totalement effacée.
Tout ce qui précède suppose que l’IMEC et le canal Ben Gourion seront construits — ce qui n’est pas acquis, quel que soit le degré de réalisme.
Pour en revenir au vote de l’OCI, l’Égypte et la Jordanie, deux pays situés aux frontières occidentale et orientale d’Israël, se trouvaient dans la position la plus délicate. L’État occupant souhaitait repousser définitivement quelque 4,5 millions de Palestiniens à l’intérieur de leurs frontières. Mais Le Caire et Amman, également inondés d’armes américaines et financièrement en faillite, ne survivraient jamais aux sanctions américaines s’ils s’inclinaient de manière trop inacceptable vers la Palestine.
Ainsi, en fin de compte, trop d’États musulmans qui ont préféré l’humiliation à la droiture ont raisonné en termes d’intérêts nationaux très étroits et pragmatiques. La géopolitique est impitoyable. Tout est question de ressources naturelles et de marchés. Si vous n’avez pas l’un, vous avez besoin de l’autre, et si vous n’avez aucun des deux, un hégémon vous dicte ce que vous avez le droit d’avoir.
La rue arabe et musulmane et la majorité mondiale peuvent à juste titre se sentir découragées lorsqu’elles constatent que ces « dirigeants » ne sont pas prêts à faire du monde islamique un véritable pôle de puissance au sein de la multipolarité émergente.
Il ne saurait en être autrement. De nombreux États arabes clés ne sont pas des entités souveraines. Ils sont tous enfermés, victimes d’une mentalité de vassal. Ils ne sont pas prêts — pour l’instant — à affronter l’Histoire. Et malheureusement, ils restent encore otages de leur propre « siècle d’humiliation ».
Le coup de grâce humiliant a été donné par nul autre que le maniaque génocidaire de Tel-Aviv lui-même : il a menacé tous les pays arabes s’ils ne se taisaient pas — ce qu’ils ont déjà fait.
Bien sûr, il y a des cœurs courageux arabes et musulmans très importants en Iran, en Syrie, en Palestine, en Irak, au Liban et au Yémen. Bien qu’ils ne constituent en aucun cas une majorité, ces acteurs de la Résistance reflètent le sentiment de la rue comme aucun autre. Et avec la guerre d’Israël qui s’étend chaque jour, leur poids régional et mondial est destiné à augmenter de façon incommensurable, tout comme dans toutes les autres guerres régionales de l’Hégémon.
La débâcle catastrophique du projet Ukraine et la relance d’une guerre irréductible en Asie occidentale sont profondément liées.
Au-delà du brouillard de l’« inquiétude » de Washington concernant le déchaînement génocidaire de Tel-Aviv, le fait crucial est que nous sommes en plein cœur d’une guerre contre les BRICS 11.
L’Empire ne fait pas de stratégie ; au mieux, il élabore des plans d’affaires tactiques à la volée. Il y a deux tactiques immédiates en jeu : une armada américaine déployée en Méditerranée orientale — dans un effort raté pour intimider les mastodontes de l’Axe de la Résistance que sont l’Iran et le Hezbollah — et une possible élection de Milei en Argentine liée à sa promesse avouée de rompre les relations entre le Brésil et l’Argentine.
Il s’agit donc d’une attaque simultanée contre les BRICS 11 sur deux fronts : L’Asie de l’Ouest et l’Amérique du Sud. Les États-Unis ne ménageront pas leurs efforts pour empêcher les BRICS 11 de se rapprocher de l’OPEP+. L’un des principaux objectifs est d’inspirer la crainte à Riyad et à Abou Dhabi, comme l’ont confirmé des sources commerciales du golfe Persique.
Même les dirigeants vassaux présents à l’exposition de l’OCI auraient été conscients que nous sommes maintenant au cœur de l’Empire contre-attaque. Cela explique en grande partie leur lâcheté.
Ils savent que pour l’hégémon, multipolarité égale « chaos », unipolarité égale « ordre » et que les acteurs malveillants sont des « autocrates » — tels que le nouvel « axe du mal » russo-chinois-iranien et tous ceux, en particulier les vassaux, qui s’opposent à l’« ordre international fondé sur des règles ».
Ce qui nous amène à l’histoire de deux cessez-le-feu. Des dizaines de millions de personnes au sein de la majorité mondiale se demandent pourquoi l’hégémon cherche désespérément à obtenir un cessez-le-feu en Ukraine tout en refusant catégoriquement un cessez-le-feu en Palestine.
Le gel du projet Ukraine préserve le fantôme de l’hégémonie juste un peu plus longtemps. Supposons que Moscou morde à l’hameçon (elle ne le fera pas). Mais pour geler l’Ukraine en Europe, l’hégémon aura besoin d’une victoire israélienne à Gaza — peut-être à n’importe quel prix — pour conserver ne serait-ce qu’un vestige de son ancienne gloire.
Mais Israël peut-il remporter la victoire plus que l’Ukraine ? Tel-Aviv a peut-être déjà perdu la guerre le 7 octobre, car il ne pourra jamais retrouver sa façade d’invincibilité. Et si cela se transforme en une guerre régionale qu’Israël perd, les États-Unis perdront du jour au lendemain leurs vassaux arabes, qui ont aujourd’hui une option chinoise et russe qui les attend dans les coulisses.
Le grondement de la rue s’amplifie, exigeant que l’administration Biden, désormais considérée comme complice de Tel-Aviv, mette un terme au génocide israélien qui pourrait déboucher sur une guerre mondiale. Mais Washington n’obtempère pas. Les guerres en Europe et en Asie occidentale sont peut-être sa dernière chance (qu’il perdra) d’empêcher l’émergence d’un siècle eurasien prospère, connecté et pacifique.
Source : The Cradle
Traduction Réseau International
Par Nicolas Bonnal
par Pierre-Alain Depauw
Source : medias-presse.info — 13 novembre 2023 — Pierre-Alain Depauw
Tous les médias du système ont abondamment diffusé cette image ce dimanche 12 novembre 2023 : Marine Le Pen, Jordan Bardella et de nombreux élus du Rassemblement National venus à la Marche contre l’antisémitisme. Avec un service d’ordre fourni par la Ligue de Défense Juive, tout simplement.
Rappelons que Marine Le Pen a pris la présidence du Front National en 2011, puis en a fait le Rassemblement National. Durant toutes ces années Marine Le Pen n’a jamais appelé à manifester pour la Famille, pour la Vie, pour la sécurité des Français, contre le mondialisme, contre l’immigration, contre la politique d’appauvrissement des Français, contre la tyrannie sanitaire, contre le licenciement des soignants et pompiers « non-vaccinés ». Elle n’a pas manifesté pour Lola et toutes les autres victimes de la barbarie. Elle n’a pas manifesté pour les chrétiens d’Orient. Elle n’a pas manifesté contre la pédocriminalité. Elle n’a pas manifesté contre toutes les dissolutions et interdictions frappant le camp national. Elle n’a pas manifesté contre l’antichristianisme qui se traduit pourtant par un nombre de faits de profanations, de sacrilèges, de discriminations et de menaces bien supérieur à tout ce que subissent les autres croyances en France.
Non, la première manifestation de Marine Le Pen depuis qu’elle brigue la présidence de la république aura été cette Marche contre l’antisémitisme. Avec le drapeau israélien à un mètre d’elle.
Tout est dit.
La priorité de Marine Le Pen est de gagner les élections européennes en 2024. La politique consiste à aller de scrutin en scrutin, pour essayer de les gagner, sinon on monte un fan-club et on est content de plafonner à 15 %, comme Jean-Marie Le Pen. Et pour gagner les scrutins, on essaye de s’adapter à l’état de l’opinion publique à un moment M. Or, l’opinion publique a encore majoritairement une image du RN comme étant un parti raciste et antisémite. C’est un héritage qu’il faut liquider pour arriver à faire 51 %. Tous les partis sont soumis aux mêmes contraintes. Le reste est littérature.
Vous vous foutez bien du monde et publiquement encore : vous dites qu’en faisant comme les partis mondialistes au pouvoir elle fera une bonne candidate d’opposition ? Ce sera du Meloni en pire. Espérons qu’elle organise une manif contre la Russie — avec qui vous collaborez — et pour l’interdiction de Rivarol — où vous vous faites interviewer — ou pour l’arrestation de Soral, chez qui vous publiez — pour se faire bien voir par la Communauté qui n’existe pas. Elle fera pire que Macron si elle est élue (à moins qu’elle n’appelle à voter contre elle, son parti n’étant jamais assez épuré à ses yeux), on le sait maintenant, et c’est cela que vous applaudissez. Le reniement national et votre logique Harari (devenez leurs cobayes) n’ont pas fini de me CONFONDRE.
Par Nicolas Bonnal
On dit Hollywood en liquidation à cause du LGBTQ, on dit l’Empire US en voie de disparition, on dit Trump en voie de réélection, on dit le dollar en voie de disparition, on dit tant de choses…
La réalité c’est que le triomphe US sur les esprits (la démocratie s’attaque aux esprits, pas aux corps, combien de fois me faudra-t-il te répéter, Tocqueville ?) est total et universel. 1.5 milliard de dollars pour le lamentable navet LGBTQ Barbie, un milliard ou plus pour le triquard Top Gun. La surpuissance de la machine américaine sur le monde est totale — et immatérielle. Oublions les productions Marvel — qui sont d’ailleurs israéliennes.
La marche à l’homogénéisation est devenue un galop ?
Relisons alors Stefan Zweig qui finit au Brésil avant de se suicider aux barbituriques à Petrópolis (très bel et noble endroit hoirs du temps et des tropiques). Il écrit vingt ans auparavant dans son opuscule sur l’uniformisation du monde (traduit aux éditions Allia).
Il note cette surpuissance US dont tout le monde antisystème se targue d’assister à la fin aujourd’hui (rappelez-vous de Mao et de son tigre de papier qui est toujours là) :
« D’où provient cette terrible vague qui menace d’emporter tout ce qui est particulier dans nos vies ? Quiconque y est allé le sait : d’Amérique. Sur la page qui suit la Grande Guerre, les historiens du futur inscriront notre époque, qui marque le début de la conquête de l’Europe par l’Amérique. Ou pis encore, cette conquête bat déjà Son plein, et on ne le remarque même pas. Chaque pays, avec tous ses journaux et ses hommes d’État, jubile lorsqu’il obtient un prêt en dollars américains. Nous nous berçons encore d’illusions quant aux objectifs philanthropiques et économiques de l’Amérique : en réalité, nous devenons les colonies de sa vie, de son mode de vie, les esclaves d’une idée qui nous est, à nous Européens, profondément étrangère : la mécanisation de l’existence. Mais cet asservissement économique me semble encore peu de chose en comparaison du danger qu’encourt l’esprit. »
Voici comment commence le texte, comme un diagnostic triste : on est dans les années vingt et triomphe déjà la culture mondiale qui désole Duhamel et Hermann Hesse (le Loup des steppes est un pamphlet antiaméricain) :
« Malgré tout le bonheur que m’a procuré, titre personnel, chaque voyage entre pris ces dernières années, une impression tenace s’est une imprimée dans mon esprit : horreur silencieuse devant la monotonie du monde. Les modes de vie finissent par se ressembler, à tous se conformer à un schéma culturel homogène. Les coutumes propres à chaque peuple les disparaissent, costumes s’uniformisent, les mœurs prennent un caractère de plus en plus international. Les pays semblent, pour ainsi dire, ne plus se distinguer les uns des autres, les hommes s’activent et vivent selon un modèle unique, tandis que les villes paraissent toutes identiques. Paris est aux trois quarts américanisée, Vienne est budapestisée : l’arôme délicat de ce que les cultures ont de singulier se volatilise de plus en plus, les couleurs s’estompent avec une rapidité sans précédent et, sous la couche de vernis craquelé, affleure le piston couleur acier de l’activité mécanique, la machine du monde moderne. »
Mais Zweig ajoute comme s’il avait lu Théophile Gautier qui en parle déjà très bien de cette unification mondiale dans son Journal de voyage en Espagne :
« Ce processus est en marche depuis fort longtemps déjà : avant la guerre, Rathenau avait annoncé de manière prophétique cette mécanisation de l’existence, la prépondérance de la technique, comme étant le phénomène le plus important de notre époque. Or, jamais cette déchéance dans l’uniformité des modes de vie n’a été aussi précipitée, aussi versatile, que ces dernières années. »
C’est comme une religion ce monde moderne (cf. le Covid) avec les mêmes rituels imposés partout en même temps :
« Ils commencent à la même heure : tels les muezzins dans les pays orientaux, appelant chaque jour, au coucher du soleil, des dizaines de milliers de fidèles à la prière, toujours identique, comme s’il n’existait là-bas que vingt mots, vingt mesures invitent désormais quotidiennement, à cinq heures de l’après-midi, tous les Occidentaux à poursuivre le même rituel. Jamais, sauf dans certaines formules et formes musicales pratiquées au sein de l’Église, deux cents millions de personnes n’ont connu une telle simultanéité et une telle uniformité d’expression comme la race blanche d’Amérique, d’Europe et de toutes les colonies dans la danse moderne. Un deuxième exemple : la mode. Il n’y a jamais eu dans tous les pays une similitude aussi flagrante qu’à notre époque. Jadis, on comptait en années le temps nécessaire pour qu’une mode parisienne gagne les autres grandes villes, et plusieurs années encore pour qu’elle se propage dans les campagnes. Mais les peuples respectaient certaines limites et leurs coutumes, Ce qui leur permettait de résister aux exigences tyranniques de la mode. »
Les caprices de la mode ? Zweig qui malgré son érudition a oublié Montesquieu écrit :
« Aujourd’hui, sa dictature devient universelle le temps d’un battement de cil. New York dicte les cheveux courts aux femmes : en un mois, 5O ou IOO millions de crinières féminines tombent, comme fauchées par une seule faux. Aucun empereur, aucun khan dans l’histoire du monde n’avait connu une telle puissance, aucune doctrine morale ne s’était répandue à une telle vitesse. »
Dans mon livre sur la comédie musicale j’ai noté l’importance de Potter la grande farandole (1941). Dans ce film Ginger Rogers impose sa coupe de cheveux à des millions de femmes en un claquement de doigts (Story of Vernon and Irène Castel en anglais).
Mgr Gaume redoutait l’ubiquité et la simultanéité, marque de la Bête selon lui. Zweig écrit :
« II a fallu des siècles et des décennies au christianisme et au socialisme pour convertir des adeptes et rendre leurs commandements efficaces Sur autant de personnes qu’un tailleur parisien ne les soumet à son influence en huit jours aujourd’hui. Le troisième exemple est le cinéma, où là encore sévit cette simultanéité sans commune mesure, dans tous les pays et toutes les langues, à travers lequel les mêmes représentations façonnent des centaines de millions de personnes et où les mêmes goûts (ou mauvais goûts) se forment. On célèbre l’abolition complète de toute touche personnelle, même si les producteurs vantent triomphalement leurs films comme étant nationaux : L’Italie acclame les Nibelungen tandis que les districts les plus allemands et populaires ovationnent Max Linder de Paris. »
Zweig voit cette culture de la masse qui va triompher avec le nazisme, le fascisme ou le communisme (mais pas seulement bien sûr, le libéralisme américain ayant balayé tout cela sans forcer) :
« Ici aussi, l’instinct de masse est plus fort et plus souverain que la libre pensée. La venue triomphale de Jackie Coogan a été une expérience plus forte pour notre époque que la mort de Tolstoï il y a vingt ans. Un quatrième exemple : la radio. Toutes ces inventions n’ont qu’un seul but : la simultanéité. Le Londonien, le Parisien et le Viennois entendent la même chose dans la même seconde, et cette simultanéité, cette uniformité enivre par son gigantisme. C’est une ivresse, un stimulant, mais toutes ces merveilles techniques nouvelles entretiennent en même temps une énorme désillusion pour l’âme et flattent dangereusement la passivité de l’individu. Ici aussi, comme dans la danse, la mode et le cinéma, l’individu se soumet aux mêmes goûts moutonniers ; il ne choisit plus à partir de son être intérieur, mais en se rangeant à l’opinion de tous. »
Tout cela est lié à la jouissance et à l’illusion individualiste (il est dommage que Zweig n’ait pas débattu avec Bernays — pour tout un tas de raisons du reste) qui liquide les individus par cela même qu’elle les invite à être « nature » ou « eux-mêmes » ; c’est l’époque du Flapper, de la Jeune Fille :
« On pourrait énumérer ces symptômes à l’infini, tant ils prolifèrent de jour en jour. Le sentiment de liberté individuelle dans la jouissance submerge l’époque. Citer les particularités des nations et des cultures est désormais plus difficile qu’égrener leurs similitudes. Conséquences : la disparition de toute individualité, jusque dans l’apparence extérieure. Le fait que les gens portent tous les mêmes vêtements, que les femmes revêtent toutes la même robe et le même maquillage n’est pas sans danger : la monotonie doit nécessairement pénétrer à l’intérieur. Les visages finissent par tous se ressembler, parce que soumis aux mêmes désirs, de même que les corps, qui s’exercent aux mêmes pratiques sportives, et les esprits, qui partagent les mêmes centres d’intérêt. »
On crée l’homme-masse dont a parlé Bernanos, mais aussi un autre grand esprit juif (toujours cette Autriche-Hongrie dont le dépeçage fut la vraie fin de la civilisation européenne) de l’époque, Elias Canetti (voyez Masse et puissance) :
« Inconsciemment, une âme unique se crée, une âme de nasse, mue par le désir accru d’uniformité, qui célèbre la dégénérescence des nerfs en faveur des muscles et la mort de l’individu en faveur d’un type générique. La conversation, cet art de la parole, s’use dans la danse et s’y disperse, le théâtre se galvaude au profit du cinéma, les usages de la mode, marquée par la rapidité, le “succès saisonnier”, imprègnent la littérature. Déjà, comme en Angleterre, la littérature populaire disparaît devant le phénomène qui va s’amplifiant du “livre de la saison”, de même que la forme éclair du succès se propage à la radio, diffusée simultanément sur toutes les stations européennes avant de s’évaporer dans la seconde qui suit. Et comme tout est orienté vers le court terme, la consommation augmente : ainsi, l’éducation, qui se pour suivait de manière patiente et rationnelle, et prédominait tout au long d’une vie, devient un phénomène très rare à notre époque, comme tout ce qui s’acquiert grâce à un effort personnel. »
Mais Zweig qui aurait pu faire fortune à Hollywood comme l’élite culturelle juive autrichienne préfère accuser ou plutôt désigner l’Amérique :
« Source : d’où provient cette terrible vague qui menace d’emporter avec elle tout ce qui est coloré, tout ce qui est particulier dans nos vies ? Quiconque y est allé le sait : d’Amérique. Sur la page qui suit la Grande Guerre, les historiens du futur inscriront notre époque, qui marque le début de la conquête de l’Europe par l’Amérique. Ou pis encore, cette conquête bat déjà Son plein, et on ne le remarque même pas (tous les vaincus sont toujours trop lents d’esprit). Chaque pays, avec tous ses journaux et ses hommes d’État, jubile lorsqu’il obtient un prêt en dollars américains. Nous nous berçons encore d’illusions quant aux objectifs philanthropiques et économiques de l’Amérique : en réalité, nous devenons les colonies de sa vie, de son mode de vie, les esclaves d’une idée qui nous est, à nous Européens, profondément étrangère : la mécanisation de l’existence. »
La colonisation de l’esprit arrive — on pense à ces personnages friqués et ennuyés d’Agatha Christie, qui entre deux croisières, deux bridges ou deux saouleries, écoutent le Poirot :
« Mais cet asservissement économique me semble encore peu de chose en comparaison du danger qu’encourt l’esprit. Une colonisation de l’Europe ne serait pas le plus à craindre sur le plan politique ; pour les âmes serviles, tout asservissement paraît doux, et l’homme libre sait préserver sa liberté en tous lieux. Le vrai danger pour l’Europe me semble résider dans le spirituel, dans la pénétration de l’ennui américain, cet ennui horrible, très spécifique, qui se dégage là-bas de chaque pierre et de chaque maison des rues numérotées, cet ennui qui n’est pas, comme jadis l’ennui européen, celui du repos, celui qui consiste à s’asseoir sur un banc de taverne, à jouer aux dominos et à fumer la pipe, soit une perte de temps paresseuse, mais inoffensive : l’ennui américain, lui, est instable, nerveux et agressif, on s’y surmène dans une excitation fiévreuse et on cherche à s’étourdir dans le sport et les sensations. »
Ennui et fuite (on croirait lire la France contre les robots ou bien Terre des hommes) :
« L’ennui n’a plus rien de ludique, mais court avec une obsession enragée, dans une fuite perpétuelle du temps : il invente des médiums artistiques toujours nouveaux, comme le cinéma et la radio, nourriture de masse dont il appâte les sens affamés et transforme ce faisant la communauté des amateurs de plaisirs en corporations gigantesques, à l’image de ses banques et de ses trusts. De l’Amérique vient cette terrible vague d’uniformité qui donne à tous les hommes la même chose, qui leur met le même costume sur le dos, le même livre entre les mains, le même stylo plume entre les doigts, la même conversation sur les lèvres et la même automobile en place des pieds. Fatalement, de l’autre côté de notre monde, en Russie, sévit la même volonté de monotonie, mais sous une forme différente : la volonté de morceler l’homme et d’uniformiser la vision du monde, elle-même terrible volonté de monotonie. »
L’Europe resterait un rempart, mais elle est condamnée :
« L’Europe est encore le dernier rempart de l’individualisme, et peut-être que les soubresauts survoltés des peuples, ce nationalisme exacerbé, malgré toute sa violence, est une sorte de rébellion inconsciente et fiévreuse, une dernière tentative désespérée de résister à l’égalitarisme. Mais c’est de précisément cette forme défense convulsive qui trahit notre faiblesse. Déjà le génie de la sobriété est à l’œuvre pour effacer l’Europe des livres d’histoire, la dernière Grèce de l’histoire. Résistance : que faire désormais ? Prenant d’assaut le Capitole, le peuple s’écrie : En haut des redoutes, les barbares sont là, ils détruisent notre monde “Il profère encore une fois les paroles de César, mais, dorénavant, dans un sens plus sérieux : Peuples d’Europe, préservez vos biens les plus sacrés !” Non, nous ne sommes plus aussi crédules et aveugles au point de croire qu’on puisse encore inventer des associations, des livres et des proclamations contre ce monstrueux mouvement mondial et mettre fin à cet appétit pour la monotonie. Tout ce que l’on écrivait restait un bout de papier, lancé contre un ouragan. »
Vers la fin du texte Zweig pousse à la résistance individuelle contre ce « monstrueux mouvement mondial ». J’y reviendrai. Échapper à la technologie, à la radio, au cinéma (Albert Speer en a parlé à Nuremberg puis dans ses Mémoires), au web et aux réseaux aujourd’hui, est chose bien compliquée. C’est Daniel Estulin qui évoquait dans son livre sur la culture (Tavistock Institute) ces chansons de Gaga, Beyonce, Rihanna qui rassemblent et envoûtent des milliards de fans…
Par Nicolas Bonnal
Cet essai se veut un rappel pour certains, une piste pour d’autres. À l’heure où l’électeur-téléspectateur est conditionné comme jamais, il nous semble important de rappeler comment nous en sommes arrivés là.
Sun Tsé écrit :
« Un habile général ne se trouve jamais réduit à de telles extrémités : sans donner de batailles, il sait soumettre l’ennemi ; sans répandre une goutte de sang, sans tirer l’épée, il fait tomber les villes ; sans franchir la frontière, il conquiert les royaumes… »
Soljenitsyne avait fini par reconnaître qu’en Union Soviétique « on donnait une culture classique au peuple ». Et en occident ? Ne lui donne-t-on pas au contraire une inculture classique, au peuple ou à la plèbe qui l’a remplacé ?
La culture de masse est née dans les années 1920 aux USA : voyez l’essai de Stefan Zweig sur l’homogénéisation du monde. Il commence par évoquer la disparition universelle des danses traditionnelles. Cette homogénéisation toujours plus vulgaire et crétinisante se fait maintenant à coups de cinéma puéril en 3D, de développement personnel débile, de jeux vidéo sadiques, de soap-opéras pour retardés, de drugstores bourrés de sucreries et de best-sellers sélectionnés par le NYT et ses relais. Comme disait Adorno, souvent attaqué par ceux qui ne le lisent pas :
« La répétitivité, la redondance et l’ubiquité qui caractérisent la culture de masse moderne tendent à automatiser les réactions et à affaiblir les forces de résistance de l’individu. »
La culture contemporaine postérieure à la Première Guerre Mondiale a toujours répugné à une élite intellectuelle sous sa forme élitiste ou massifiée. Voyez Céline ou Hermann Hesse dont le Loup de steppes critique la massification et la culture moderne (les Dix commandements en superproduction)… La culture dans laquelle nous vivons, et qui a définitivement et sans douleur tourné le dos à notre patrimoine spirituel et culturel (le pape veut du vaccin obligatoire, mais de messe traditionnelle), qu’il s’agisse de Lady Gaga, du bouquin Millenium, du jazz, du rap, de la peinture contemporaine ou du film Avatar, n’est pas fortuite, elle n’est pas le fruit des goûts du public et du génie naïf de ses initiateurs. Cette culture, remarquait le comte Tolstoï vers 1900, n’est plus chrétienne, n’est plus enracinée dans l’histoire d’un peuple ou dans un sol ; elle est liée au conditionnement de masse, elle est abstraite et massifiée, elle a des buts abscons et des objectifs précis, psychotechniques (Bernays, toujours) et mondialisés, qu’on peut aussi retracer à travers l’histoire de « l’alittérature contemporaine » ou du cinéma postclassique. La musique moderne doit rendre fou, disait justement Adorno (il aurait pu ajouter cool et crétin). La pollution sonore sert à détruire la personnalité humaine. Cela s’est du reste toujours su : Plutarque évoque le terrorisme sonore des Parthes avant la bataille de Carrhes, dans sa vie de Crassus. Les bruits désarment les troupes romaines (voyez mon livre sur Kubrick, qui a beaucoup insisté dans son œuvre sur l’importance de la musique).
On sait que le jazz a été fabriqué à l’époque de Gershwin et il a sciemment remplacé les negro spirituals traduits par Marguerite Yourcenar. Il a contribué à la déchristianisation des noirs américains, chose visible aussi dans le biopic de Taylor Hackford sur Ray Charles. Ces noirs indépendants qui constituaient une noble caste ont été rendus amers et dépendants par le système dans les années 60, et je me souviens qu’Alain Daniélou, musicologue de l’UNESCO, l’observait dans ses mémoires. Quant aux rappeurs, ils ont accompagné le million de jeunes noirs américains tués en trente ans pour quelques trottoirs de drogue… À chacun ses vices : le cinéma classique hollywoodien lui-même devient pénible pour qui observe que tout le temps on voit des personnages boire du Gin ou fumer des Marlboro (dans chaque scène parfois, pour John Wayne ou Errol Flynn) ou absorber le whisky Seagram des Bronfman.
On sait que l’inculture du rebelle a été lancée pour contrôler les activités de la jeunesse politisée. Le marxisme-léninisme a été court-circuité de cette manière par la CIA qui promotionnait des agents d’influence, des artistes comme Pollock et Kooning. Le film Daddy Long-Legs (1957) décrit le conditionnement psychique d’une jeune orpheline française et sa possession physique et psychique par son mécène amateur d’art moderne Fred Astaire, clone ici des Rockefeller (tout le cinéma de Fred Astaire fut lié au soft power US). Dans un texte passionnant Manfred Holler rappelle que la CIA est dirigée par les familles Illuminati et richissimes de Wall Street qui orientent l’humanité vers leurs goûts modernes ou déjantés (Tolstoï fait ce même reproche aux élites de son temps). Pensez à Pinault reprochant au grand public de n’être jamais assez éduqué pour comprendre le génie de sa collection de Rothko.
On sait depuis eux aussi que l’intronisation des drogues et de la contre-culture correspondait à un projet policier et politique : on peut citer les projets MK-Ultra, Cointelpro, Artichoke dont Hollywood s’inspira peu et mal à une époque plus rebelle. Ken Kesey, l’auteur du Vol au-dessus d’un nid de coucous, essayait les drogues pour les programmes de contrôle mental. Le message libertaire de ce film antisystème dissimulait comme d’habitude un agenda plus sinistre et perturbant que prévu. Les univers parallèles ont été aussi faciles à contrôler que les partis politiques à noyauter. Tu veux fuir ce monde ? On va t’aider et même te guider… c’est l’arc-en-ciel du magicien d’Oz (pauvre destin de Judy Garland) que l’on retrouve après dans le testament de Kubrick Eyes Wide Shut.
Quant à la révolution sexuelle (cf. Woodstock qui fut aussi une orgie de drogue), elle était perçue comme un remède à l’esprit contestataire par les tyrans antiques. La Boétie parle des tavernes et des bordels pour renforcer le contrôle de la population de Lydie, qui a donné le mot de ludique. À notre époque ce contrôle social a débouché sur une pornographie de masse accessible à tous sur le réseau, mais aussi sur les meutes hargneuses du politiquement correct. Mais le sexe n’est pas la seule arme de destruction massive du monde actuel. L’œil du voyeur fusionne avec celui du délateur. Le corps du petit monstre des télétubbies, émission emblématique chargé de conditionner les… bébés (mondialisme, héliotropisme, sociabilité de bonobo, animalisation, consumérisme) est déjà orné d’un énorme écran blanc. L’enfant est un hardware qui marche et qu’on programme jusqu’à l’âge adulte. Si vous lui demandez plus tard un dessin, il vous dessinera tous les canons laser du monde destructeur de ses jeux vidéo.
Dans le même esprit, la culture sexe drogue et rock’n’roll de la génération du Baby-Boom a eu un seul but : abrutir la jeunesse et pour plusieurs générations, répandre le consumérisme, l’hédonisme et le nihilisme, canaliser ses énergies : il faut se transformer en canal, en iPod (cosse de l’oignon, en anglais), en tube (you… tube ?). Cette possession — ou connexion — induit bien sûr la référence au satanisme, qui a été évidente dans la musique heavy métal puis dans la littérature pour enfants (Harry Potter, War Craft, et tout le reste) et la culture pop contemporaine via des bourriques comme Rihanna, Gaga ou Beyonce qu’un œil expert comme celui de Daniel Estulin invite à voir d’un autre œil avec leur symbolisme méphitique.
Dans son discours de Harvard, Soljenitsyne parle des « musiques insupportables » qui nous envahissent et nous abêtissent de tous côtés. L’auteur du Petit Prince Antoine de Saint-Exupéry s’était fait insulter pour avoir écrit que l’on pouvait écouter du Mozart à l’usine… mais en Union Soviétique. Ce n’est pas un hasard d’ailleurs si dans les films hollywoodiens ou franchouillards les nazis et les tortionnaires sont présentés comme des hommes cultivés (cf. Hannibal, Shutter Island, Opération corned-beef). Pour être bien intégré, il faut être crétin. Le cinéma intelligent et artistique était d’ailleurs depuis longtemps réservé aux maîtres russes comme Tarkovski, Paradjanov ou Sokurov ! Et la critique a fait après la guerre, d’Humphrey Bogart et son chapeau, notre Cyrano.
Le désarmement moral par la culture de masse américaine est allé de pair avec les délocalisations et la désindustrialisation forcée. On a ainsi liquidé avec les syndicats les risques de mobilisation populaire et on a dispersé tout le monde avec l’automobile (Mumford). Mais le grand outil de l’arme silencieuse est resté la télévision, avec sa propagande et ses pseudo-événements décrits par Boorstyn. Comme le cinéma, mais en permanence, la télévision fournit un modèle mimétique. Il faut créer le troupeau d’animaux bien dociles, comme disait Céline. L’offensive fut menée par la publicité, issue de la propagande de guerre du maître Edouard Bernays, puis par l’école de Francfort et par exemple sa chasse systématique à la figure autoritaire. On a ainsi promu comme l’écrit Adorno la figure de l’homosexuel, on a crétinisé le père de famille, on a transformé la femme en modèle Bovary de série, éternellement endettée, enamourée et divorcée, on a créé l’ado rebelle (conforme) insatisfait et demeuré avec sa casquette retournée ; revoyez l’équipée sauvage de Brando qui remplace dès 1953, avec le suicidaire James Dean, les héros traditionnels comme John Wayne et James Stewart. On a détruit la famille puis l’idée de nation, jugée fascisante par les banquiers, et enfin celle de civilisation. On ne parlera pas de la race ou du sexe puisqu’ils n’ont (heureusement) jamais existé…
Pour liquider la contestation de type communiste, il fallait inciter à une perte de temps et à un désordre mental. Lucien Cerise rappelle que l’on a créé le modèle du jeune voyageur qui veut découvrir le monde, ses plages, ses drogues, ses bières et surtout toutes ses excursions sexuelles. Pensez à l’inepte Kerouac, à la génération du routard, la mienne, qui gesticule pour rien (revoir dans cet esprit la balade des deux motards junkies d’Easy rider). Cette bougeotte sans but (Di Caprio toujours, dans The Beach) ne vaut pas mieux que la geste clownesque du touriste massifié qui clique tout le temps sur son appareil numérique dans un paysage réifié et recyclé.
La culture comme arme de destruction massive est plus redoutable que les bombardements. Elle est le bombardement psychique ultime. Elle nous sépare de notre histoire, de notre espace, de notre prochain, de nos compatriotes. Elle crée un avatar d’individu en marge de ce monde et prêt à être capté par la matrice technologique du commerce américain qui peut ainsi imposer partout ses projets, ses guerres et ses jouets transformés. L’usine à rêve prépare la prisonplanet.com et le camp de concentration indolore dont parlait Aldous Huxley vingt ans après son Meilleur des mondes. Et la matrice virale américaine, qui succède à l’empire, est difficile à substituer, car elle a envahi tous les cerveaux. Ce n’est qu’en étant armé spirituellement contre elle que l’on peut s’en défendre — avec son âme, sa famille, sa classe et sa nation.
Par Nicolas Bonnal
Dernière écrivaine néo-classique nourrie de lait ancien, Yourcenar méprise le monde moderne occidental alors qu’elle avait tout pour plaire pourtant : homosexuelle, païenne, écrivaine, écologiste, végétarienne, rebelle ayant fui le monde, etc. Pourtant son Hadrien qui tapait si bien sur le judaïsme n’allait pas dans le bon sens (d’ailleurs je la trouve bien oubliée), montrait déjà que quelque chose se tramait dans sa tête contre le monde moderne, comme le Coup de grâce ou les splendides contes orientaux, recueil de jeunesse ou presque. Mise à la mode un temps par Giscard et d’Ormesson pour de méprisables motifs politiques, cette grande figure discrète allait tirer à boulets rouges contre notre moderne occident dans ses Entretiens avec Mathieu Galey intitulé les Yeux ouverts. Le journaliste froncé y fait preuve d’une inintelligence à toute épreuve : on dirait qu’il y a des siècles que le froncé est bête et intolérant comme ça, les yeux grand fermés. La faute à Molière et à ses Trissotin, à Montesquieu et à ses Persans ?
J’ai glané les citations qui suivent sur plusieurs sites ; voilà ce que ça donne :
« Je condamne l’ignorance qui règne en ce moment dans les démocraties aussi bien que dans les régimes totalitaires. Cette ignorance est si forte, souvent si totale, qu’on la dirait voulue par le système, sinon par le régime. »
Le régime comme elle dit a fortement progressé depuis, et son troupeau de victimes aussi. Elle ajoute comme si elle était un dissident soviétique, un Soljenitsyne à Harvard ou un Zinoviev :
« Chaque fois que je vais dans un super-market, ce qui du reste m’arrive rarement, je me crois en Russie. C’est la même nourriture imposée d’en haut, pareille où qu’on aille, imposée par des trusts au lieu de l’être par des organismes d’État. Les États-Unis, en un sens, sont aussi totalitaires que l’URSS, et dans l’un comme dans l’autre pays, et comme partout d’ailleurs, le progrès (c’est-à-dire l’accroissement de l’immédiat bien-être humain) ou même le maintien du présent état de choses dépend de structures de plus en plus complexes et de plus en plus fragiles. »
On est entrés dans un système de frénésie global lié au culte du progrès :
« Comme l’humanisme un peu béat du bourgeois de 1900, le progrès à jet continu est un rêve d’hier. Il faut réapprendre à aimer la condition humaine telle qu’elle est, accepter ses limitations et ses dangers, se remettre de plain-pied avec les choses, renoncer à nos dogmes de partis, de pays, de classes, de religions, tous intransigeants et donc tous mortels. Quand je pétris la pâte, je pense aux gens qui ont fait pousser le blé, je pense aux profiteurs qui en font monter artificiellement le prix, aux technocrates qui en ont ruiné la qualité – non que les techniques récentes soient nécessairement un mal, mais parce qu’elles se sont mises au service de l’avidité qui en est un, et parce que la plupart ne peuvent s’exercer qu’à l’aide de grandes concentrations de forces, toujours pleines de potentiels périls. »
Elle ajoute très justement :
« Je pense aux gens qui n’ont pas de pain, et à ceux qui en ont trop, je pense à la terre et au soleil qui font pousser les plantes. Je me sens à la fois idéaliste et matérialiste. Le prétendu idéaliste ne voit pas le pain, ni le prix du pain, et le matérialiste, par un curieux paradoxe, ignore ce que signifie cette chose immense et divine que nous appelons “la matière” ». (p. 242)
Yourcenar n’aime pas le monde occidental, mais elle refuse encore plus ses solutions de sortie (celles qu’on applique aujourd’hui). Très antiféministe, Yourcenar offre aux unes et aux autres de bonnes raisons de se faire oublier (il vaut mieux d’ailleurs, car si c’est pour se faire insulter…) :
« Enfin, les femmes qui disent “les hommes” et les hommes qui disent “les femmes”, généralement pour s’en plaindre dans un groupe comme dans l’autre, m’inspirent un immense ennui, comme tous ceux qui ânonnent toutes les formules conventionnelles. »
Et de rappeler cette évidence machiste ou autre :
« Il y a des vertus spécifiquement “féminines” que les féministes font mine de dédaigner, ce qui ne signifie pas qu’elles aient été jamais l’apanage de toutes les femmes : la douceur, la bonté, la finesse, la délicatesse, vertus si importantes qu’un homme qui n’en possèderait pas au moins une petite part serait une brute et non un homme.
Il y a des vertus dites masculines, ce qui ne signifie pas plus que tous les hommes les possèdent : le courage, l’endurance, l’énergie physique, la maîtrise de soi, et la femme qui n’en détient pas au moins une partie n’est qu’un chiffon, pour ne pas dire une chiffe. »
La société hyperféministe ne produit plus d’écrivaines, tout au plus des bécasses fanatiques à l’image des « crétins mâles » dont parle déjà Nietzche dans Par-delà le bien et le mal. De la même manière, Yourcenar aime et traduit les poètes noirs américains, mais elle se méfie déjà de ceux qui veulent aimer les noirs parce qu’ils sont noirs. Mais on dirait que depuis les Lumières toute la culture occidentale est orientée vers le totalitarisme idéologique, totalitarisme qui éclate aujourd’hui sur n’importe quel sujet !
L’idéal selon Yourcenar :
« J’aimerais que ces vertus complémentaires servent également au bien de tous. Mais supprimer les différences qui existent entre les sexes, si variables et si fluides que ces différences sociales et psychologiques puissent être, me paraît déplorable, comme tout ce qui pousse le genre humain, de notre temps, vers une morne uniformité. »
Sur l’animal elle dit joliment (passons du coq à l’âne) — et noblement :
« Et puis il y a toujours pour moi cet aspect bouleversantde l’animal qui ne possède rien, sauf sa vie, que si souventnous lui prenons.Il y a cette immense liberté de l’animal, vivant sans plus,sa réalité d’être,sans tout le faux que nous ajoutons à la sensationd’exister.C’est pourquoi la souffrance des animaux me toucheà ce point, tout comme la souffrance des enfants (p 318). »
La souffrance animale obsédait Savitri Devi (qui ressemble un peu à Yourcenar, fanatisme idéologique dérisoire en plus) ; ici :
« Je me dis souvent que si nous n’avions pas accepté,depuis des générations, de voir étouffer les animauxdans des wagons à bestiaux, ou s’y briser les pattescomme il arrive à tant de vaches et de chevaux,envoyés à l’abattoir dans des conditions absolumentinhumaines, personne, pas même les soldats chargés deles convoyer, n’aurait supporté les wagons plombés de 39/45. »
Cette insensibilité (Novalis en parle très bien et je l’ai repris dans mon livre sur Tolkien) est caractéristique des hommes modernes eux-mêmes élevés en batterie :
« Si nous étions capables d’entendre le hurlement des bêtes prises à la trappe (pour leur fourrure), nous ferions sans doute plus attention à l’immense détresse de certains prisonniers, dérisoire parce qu’elle va à l’encontre du but : les améliorer, les rééduquer, faire d’eux des êtres humains (p. 313). »
Sur l’éducation, elle propose ce modèle solidaire et païen (Céline fait de même dans ses Beaux draps où il propose un modèle radicalement nouveau de société, artiste et païen aussi) :
« Je condamne l’ignorance qui règne en ce moment dans les démocraties aussi bien que dans les régimes totalitaires. Cette ignorance est si forte, souvent si totale, qu’on la dirait voulue par le système, sinon par le régime. J’ai souvent réfléchi à ce que pourrait être l’éducation de l’enfant. Je pense qu’il faudrait des études de base, très simples, où l’enfant apprendrait qu’il existe au sein de l’univers, sur une planète dont il devra plus tard ménager les ressources, qu’il dépend de l’air, de l’eau, de tous les êtres vivants, et que la moindre erreur ou la moindre violence risque de tout détruire. »
Yourcenar remet comme Valéry l’enseignement de l’histoire à sa place, et elle propose un enseignement nouveau, pratique et non théorique (tous l’ont dit et fait pour rien, de Rousseau à Gustave Le Bon en passant par Illich) :
« Il apprendrait que les hommes se sont entretués dans des guerres qui n’ont jamais fait que produire d’autres guerres, et que chaque pays arrange son histoire, mensongèrement, de façon à flatter son orgueil. On lui apprendrait assez du passé pour qu’il se sente relié aux hommes qui l’ont précédé, pour qu’il les admire là où ils méritent de l’être, sans s’en faire des idoles, non plus que du présent ou d’un hypothétique avenir. On essaierait de le familiariser à la fois avec les livres et les choses ; il saurait le nom des plantes, il connaîtrait les animaux sans se livrer aux hideuses vivisections imposées aux enfants et aux très jeunes adolescents sous prétexte de biologie. ; il apprendrait à donner les premiers soins aux blessés ; son éducation sexuelle comprendrait la présence à un accouchement, son éducation mentale la vue des grands malades et des morts. »
Elle propose la construction d’un homme libre et tolérant (c’est le contraire de ce que veut Greta, même si Greta adore la planète et les animaux, cherchez l’erreur) :
« On lui donnerait aussi les simples notions de morale sans laquelle la vie en société est impossible, instruction que les écoles élémentaires et moyennes n’osent plus donner dans ce pays.
En matière de religion, on ne lui imposerait aucune pratique ou aucun dogme, mais on lui dirait quelque chose de toutes les grandes religions du monde, et surtout de celle du pays où il se trouve, pour éveiller en lui le respect et détruire d’avance certains odieux préjugés. »
Il faut aussi éviter la publicité marchande (Yourcenar vit aux USA, je suppose qu’elle avait une télé…) :
« On lui apprendrait à aimer le travail quand le travail est utile, et à ne pas se laisser prendre à l’imposture publicitaire, en commençant par celle qui lui vante des friandises plus ou moins frelatées, en lui préparant des caries et des diabètes futurs. »
Et, alors qu’on masque les enfants et qu’on les fanatise/formate sur le plan écologique ou sexuel :
« Il y a certainement un moyen de parler aux enfants de choses véritablement importantes plus tôt qu’on ne le fait. »
Tout cela est fini, maintenant on les masque, on les vaccine et on les encadre comme jamais. C’est Julius Evola qui compare constamment l’homme capitaliste à l’homme socialiste ; et notre dissident Zinoviev qui dit que le premier est pire que le second : comme il a raison !
Comme tout esprit censé, elle refuse les actus alitées (le premier moderne à en avoir bien parlé fut Thoreau, voyez mon texte sur Platon et Cnn…) :
« Je me suis toujours beaucoup méfiée de l’actualité, en littérature, en art, dans la vie. Du moins, de ce que l’on considère comme l’actualité, et qui n’est souvent que la couche la plus superficielle des choses. »
Elle ajoute sur ce merveilleux instrument (que plus personne ne critique, que tout le monde commente) nommé télévision :
«… l’homme manque de loisirs ?
Le fermier assis l’hiver près de son feu, se fabriquant au couteau une cuiller de bois en crachant de temps en temps dans les cendres, lui en avait. Il était plus libre que l’homme d’aujourd’hui, incapable de résister aux slogans de la télévision p 305 ».
Heidegger en parle quelque part de ce paysan, de sa pipe, du modèle de Van Gogh… Tout cela est loin maintenant, c’est pourquoi je dis et répète qu’il ne faut plus entretenir aucune nostalgie.
Suddenly it’s too late.
Après à l’heure où les religions abrahamiques continuent de faire parler d’elles si intelligemment, au Moyen-Orient et ailleurs, Yourcenar déclare :
« En matière de religion, on ne lui imposerait (toujours au pauvre enfant) aucune pratique ou aucun dogme, mais on lui dirait quelque chose de toutes les grandes religions du monde, et surtout de celle du pays où il se trouve, pour éveiller en lui le respect et détruire d’avance certains odieux préjugés. »
« On lui apprendrait à aimer le travail quand le travail est utile, et à ne pas se laisser prendre à l’imposture publicitaire, en commençant par celle qui lui vante des friandises plus ou moins frelatées, en lui préparant des caries et des diabètes futurs. »
Ici elle se rapproche de Jünger (voyez mes textes sur Jünger et la santé) et de sa vision solaire et anti-médicale du corps physique.
Végétarienne (enfin, pas tout à fait), Yourcenar évoque son menu (ici elle fait penser à un des autres esprits libres de cette époque, l’indianiste Daniélou) :
« En ce qui me concerne, je suis végétarienne à quatre-vingt-quinze pour cent. L’exception principale serait le poisson, que je mange peut-être deux fois par semaine pour varier un peu mon régime et en n’ignorant pas, d’ailleurs, que dans la mer telle que nous l’avons faite le poisson est lui aussi contaminé. »
Elle évoque l’agonie des bêtes (qui ne frappe personne dans les Évangiles pourtant) :
« Mais je n’oublie surtout pas l’agonie du poisson tiré par la ligne ou tressautant sur le pont d’une barque. Tout comme Zénon, il me déplaît de “digérer des agonies”. En tout cas, le moins de volaille possible, et presque uniquement les jours où l’on offre un repas à quelqu’un ; pas de veau, pas d’agneau, pas de porc, sauf en de rares occasions un sandwich au jambon mangé au bord d’une route ; et naturellement pas de gibier, ni de bœuf, bien entendu.
— Pourquoi, bien entendu ?
— Parce que j’ai un profond sentiment d’attachement et de respect pour l’animal dont la femelle nous donne le lait et représente la fertilité de la terre. Curieusement, dès ma petite enfance, j’ai refusé de manger de la viande et on a eu la grande sagesse de ne pas m’obliger à le faire. Plus tard, vers la quinzième année, à l’âge où l’on veut “être comme tout le monde”, j’ai changé d’avis ; puis, vers quarante ans, je suis revenue à mon point de vue de la sixième année (p. 288). »
Repensons à la manière dont Tony Blair traita un jour les vaches en Angleterre, pays de John Bull pourtant. Aujourd’hui de Davos il veut appliquer sa marotte et ses méthodes aux humains.
Yourcenar termine avec une citation bouddhiste :
« les QUATRE VŒUX bouddhiques que je me suis souvent récités au cours de ma vie :
lutter contre ses mauvais penchants ;
s’adonner jusqu’au bout à l’étude ;
se perfectionner dans la mesure du possible ;
si nombreuses soient les créatures errantes dans l’étendue
des trois mondes, travailler à les sauver.Tout est là, dans ce texte vieux de quelquesvingt-six siècles… »
Esprit libre et original, dernière aristocrate élevée par un père dilettante et artiste, Yourcenar ne faisait déjà pas partie de ce monde. Et maintenant…
[Source : h16free.com]
Par Hashtable
Ah, l’Union Européenne, c’est une chose subtile qui a bien du mal à gérer des afflux d’immigrants clandestins, mais qui prétend, sans sourciller, réglementer les boîtes de camembert et qui, pour faire bonne mesure, entend construire la prochaine prison numérique à ciel ouvert sur tout le territoire européen.
Une prison numérique à ciel ouvert ? Diable, n’est-ce pas un peu exagéré ?
Il suffit en réalité de constater le niveau de frétillance élevé du Commissaire Breton pour comprendre que non : ce dernier a tout récemment annoncé, un sourire extatique vissé aux lèvres, que le Parlement et le Conseil européens étaient parvenus à un accord sur l’identité numérique européenne, la fameuse « #eID ». Avec elle, bientôt, toute personne vivant dans l’UE disposera bientôt d’un portefeuille numérique.
La joie de ceux qui nous dirigent doit toujours alerter et lorsqu’elle concerne des factotums non élus, elle doit même déclencher une saine répulsion.
Bien sûr, si l’on s’en tient aux petits textes acidulés de présentation du projet par les institutions européennes, tout est pour le mieux : la mise en place de ce portefeuille numérique ouvre les portes à de grandes et belles réalisations, facilitant la vie de tous dans des dizaines d’aspects différents. Exactement comme le « pass vaccinal » qui devait grandement faciliter la vie de ceux qui s’étaient fait injecter un produit mystère, ce nouveau « wallet » autorisera son porteur à réaliser toute une série d’opérations qui, sans lui, seraient un peu plus compliquées ou bureaucratiques.
Ah oui, vraiment, ce « portefeuille numérique », ça va être commode, et ce sera plus sécurisé. Que c’est pratique !
Mais voilà : comme une lecture attentive des textes de loi le laisse comprendre, ce « portefeuille numérique » contiendra effectivement tout ce que le gouvernement veut savoir sur vous, vos informations personnelles, vos données biométriques et médicales et, bien sûr, l’intégralité de votre patrimoine financier sous forme d’euros numériques, c’est-à-dire cette monnaie numérique de Banque Centrale (CBDC) dont les gouvernants ont la volonté qu’elle remplace complètement l’argent liquide à moyen terme.
Or, ceci donnera aux administrations et surtout à ceux qui les dirigent, élus ou non, le pouvoir énorme de suivre vos moindres faits et gestes, de savoir exactement ce que vous faites avec l’argent qu’ils vous autoriseront (ou non) à avoir, voire flécher vos dépenses (ceci, vous y avez doit, cela, non), jusqu’à l’interdiction pure et simple dans les cas les plus graves (qui ne manqueront pas, c’est garanti sur facture).
Avec ce « wallet », chaque gouvernement européen sera en mesure d’espionner à la fois ses propres citoyens et les résidents de l’Union Européenne sur leur sol en leur fournissant même les moyens techniques d’intercepter le trafic web crypté (oui, oui, il y a bien des dispositions en ce sens). Ceci ne signifie rien de moins que la fin de notre vie privée, et, en pratique, le début d’une prison à ciel ouvert pour les Européens.
Il ne faut en effet pas être trop malin ni particulièrement doué pour comprendre les dérives possibles de ce genre de procédés. Après tout, un autre pays a devancé les frétillantes idées européennes, c’est la Chine : par l’utilisation quasi universelle de différents procédés — à commencer par l’application WeChat — la dictature communiste a très concrètement mis en place un contrôle social numérique, complet et efficace pour garantir la bonne soumission du peuple aux desiderata des dirigeants.
Pour une Union européenne qui, ces dernières années, a donné tous les signes de virer vers l’autocratie collectiviste (le passage pandémique ayant largement accéléré ses velléités), la mise en place de ce « portefeuille numérique » est l’étape indispensable pour aboutir exactement au même résultat que la Chine communiste.
Dans un premier temps, il s’agira de récompenser le bon citoyen, bien conforme, voire conformiste, en lui donnant accès à des procédures facilitées, à des aides ou des bonus alléchants. Petit à petit, les citoyens réfractaires ou simplement largués par les technologies afférentes se retrouveront dans la zone grise des demi-mesures, des arrangements bureaucratiques en attendant qu’ils s’adaptent ou qu’ils périssent. Enfin, l’étape ultime sera atteinte lorsqu’à la place de bonus, ce seront des sanctions et des punitions qui apparaîtront lorsqu’on refusera d’utiliser les passerelles technologiques alors officiellement imposées partout, pour tous.
Présentées comme commodes et permettant de vous protéger (« c’est important, la sécurité, voyez m’ame Michu »), ces technologies seront largement incitées puis, rapidement, imposées et enfin sanctionnées en cas de non-utilisation ou de contournement.
Bien sûr, quelques citoyens, des experts en sécurité informatique et même des parlementaires européens, conscients de l’énorme piège qui se met en place, ont déjà tenté d’alerter l’opinion publique. Les médias de grand chemin, fidèles à leur habitude d’aplatissement supersonique, de veulerie survitaminée et d’inutilité en or massif, se sont empressés de ne pas en parler, ou ont essentiellement classé les dérives potentielles dans la catégorie des « théories du complot », même si on les a pourtant observées avec le pass vaccinal…
À en juger par les mines un peu trop réjouies des dirigeants européens à l’annonce d’un prochain vote favorable du Parlement européen, on comprend que les loups se pourlèchent déjà les babines du dîner de moutons qu’ils vont s’enfiler dans les prochaines années.
Cependant, pour les ovins, l’affaire est certes mal enquillée, mais il n’est pas encore trop tard pour bien faire comprendre son désaccord.
On pourra ainsi contacter son député européen (en retrouvant son e-mail ici) pour lui expliquer que ce genre d’abominations liberticides lui fera perdre son siège. Cela peut être étendu aux représentants locaux au niveau national. Après tout, ça changera les députés, les maires ou les sénateurs des demandes incessantes pour des subventions, des places en crèche ou des logements sociaux…
L’expérience du pass vaccinal, tant national qu’européen, fut douloureuse et doit servir : quoi qu’il arrive, ne vous conformez pas. N’utilisez pas ce passeport numérique, véritable usine de pavés pour l’enfer à l’échelle continentale. Arrêtez le conformisme, ne suivez pas le troupeau, car sa funeste destination ne fait plus aucun doute.
Pour ceux qui le peuvent, contournez-en l’usage : prétendez n’avoir aucun smartphone, refusez d’utiliser Internet pour vos interactions avec les administrations et à plus forte raison les entreprises privées (quitte à boycotter celles qui s’afficheront un peu trop volontaires dans le déploiement et l’usage de cette future prison numérique).
De la même façon, rabattez-vous dès que possible sur l’argent liquide pour retarder l’avènement du système d’« argent numérique » et, si vous le pouvez, familiarisez-vous avec les cryptomonnaies et leur usage. Des collectifs existent pour vous y aider, contactez-les, entraînez-vous.
L’identité numérique européenne arrive et le pire n’est pas à craindre : il est certain. Préparez-vous en conséquence.
[Publication initiale (janvier 2021) : RI]
Par Nicolas Bonnal
On entend ici et là qu’on va réagir, qu’on est le pays des rebelles, des droits de l’homme, de la liberté, des tranchées et qu’on va voir ce qu’on va voir à propos du vaccin, du masque, du confinement.
Je répète : jouez aux rebelles quinze secondes, vous qui me jetez la pierre, dans le métro, à l’école, au boulot. Il n’y a pas 30 % de mécontents ou d’insoumis dans ce pays, mais 1 %. Et ça dépend des jours et du sujet.
Une amie m’a écrit hier :
« J’entendais hier un général de gendarmerie, étonné de la “docilité” des Français (à propos du couvre-feu), qui disait qu’en réalité on n’aurait pas le choix. Carnet vaccinal obligatoire pour voyager ; pour se soigner et aller à l’hosto idem ; pour travailler encore, les administrations demanderont à leurs employés de se faire vacciner (et je doute que le privé soit en reste) ; bref ce que tu dis depuis des mois ».
C’est ce que je dis depuis des mois parce que c’est ce qui se passe depuis des siècles.
Tout pays de la liberté se croit plus libre au fur et à mesure qu’il s’enferme dans les réseaux inextricables des lois. Maistre rappelait en 1789 qu’on avait eu plus de lois en un an qu’en mille.
Quelques rappels céliniens alors. C’est ma monographie la plus lue — avec celle de Tolkien — et elle est lue par des gens qui ont compris que Céline ne parle pas des juifs (sujet éculé tout de même) mais des Français :
« Il règne sur tout ce pays, au tréfonds de toute cette viande muselée, un sentiment de gentillesse sacrificielle, de soumission, aux pires boucheries, de fatalisme aux abattoirs, extraordinairement dégueulasse. Qui mijote, sème, propage, fricote, je vous le demande, magnifie, pontifie, virulise, sacremente cette saloperie suicidaire ? Ne cherchez pas ! Nos farceurs gueulards imposteurs Patriotes, notre racket nationaliste, nos chacals provocateurs, nos larrons maçons, internationalistes, salonneux, communistes, patriotes à tout vendre, tout mentir, tout provoquer, tout fourguer, transitaires en toutes viandes, maquereaux pour toutes catastrophes. Patriotes pour cimetières fructueux. Des vrais petits scorpions apocalyptiques qui ne reluisent qu’à nous faire crever, à nous fricoter toujours de nouveaux Déluges ».
Céline a compris que le Français n’est pas une victime de Macron, Hollande ou Sarkozy, du comité des forges ou du mondialisme ou de Bruxelles : le Français est un enthousiaste. On le laisse cracher le morceau (à Céline) :
« Plus de Loges que jamais en coulisse, et plus actives que jamais. Tout ça plus décidé que jamais à ne jamais céder un pouce de ses Fermes, de ses Privilèges de traite des blancs par guerre et paix jusqu’au dernier soubresaut du dernier paumé d’indigène. Et les Français sont bien contents, parfaitement d’accord, enthousiastes ».
Cela c’était avant 39. Pour aujourd’hui aussi ces lignes résonnent furieusement (pensez à ces queues d’andouilles voulant être testées cet été…) :
« Une telle connerie dépasse l’homme. Une hébétude si fantastique démasque un instinct de mort, une pesanteur au charnier, une perversion mutilante que rien ne saurait expliquer sinon que les temps sont venus, que le Diable nous appréhende, que le Destin s’accomplit ».
Certains nous font le coup à la mode Maurras du grand recours, de la divine surprise (Trump…). On a vu la lâcheté incisive des femmes Le Pen. Céline savait ce qu’il en coûtait de se fier aux patriotes, aux nationalistes et autres, toujours les premiers à offrir leur poitrine aux démocraties, comme disait Bernanos. Et de rentrer dedans :
« Dans nos démocraties larbines, ça n’existe plus les chefs patriotes. En lieu et place, c’est des effrontés imposteurs, tambourineurs prometteurs “d’avantages”, de petites et grandes jouissances, des maquereaux “d’avantages”. Ils hypnotisent la horde des “désirants”, aspirants effrénés, bulleux “d’avantages”. Pour l’adoption d’un parti, d’un programme, c’est comme pour le choix d’un article au moment des “réclames”, on se décide pour le magasin qui vous promet le plus “d’avantages”. Je connais moi des personnes, des véritables affranchis qui sont en même temps marxistes, croix-de-feu, francs-maçons, syndiqués très unitaires et puis malgré tout, quand même, encore partisans du curé, qui font communier leurs enfants. C’est des camarades raisonnables, pas des fous, qui ne veulent perdre dans aucun tableau, qui se défendent à la martingale, des Idéologues de Loterie, très spécifiquement français. Quand ça devient des racailles pareilles, y a plus besoin de se gêner ».
Cela s’applique aussi au Bayrou, catho, bourgeois, six enfants, qui nous prépare le passeport vaccinal et la grande confiscation dans un bâillement/acquiescement général.
Céline remet notre occident démocrate — qui retombe dans son terrorisme/bolchévisme initial, ici ou en Amérique — à sa place :
« La conjuration mondiale seule véritable réussite de notre civilisation. Nous n’avons plus de patriotes. C’est un regret de bétail, on en a presque jamais eu de patriotes. On nous a jamais laissé le temps. D’une trahison dans une autre, on a jamais eu le temps de souffler… D’une guerre dans une autre… »
Après on est vendus aux étrangers mais c’est depuis des siècles (pensez à Concini dans le Capitan…) :
« On nous a toujours trafiqués, vendus comme des porcs, comme des chiens, à quelque pouvoir hostile pour les besoins d’une politique absolument étrangère, toujours désastreuse. Nos maîtres ont toujours été, à part très rares exceptions, à la merci des étrangers. Jamais vraiment des chefs nationaux, toujours plus ou moins maçons, jésuites, papistes, juifs… »
Parti de l’ordre, parti catholique, parti social-démocrate, parti européen, parti pro-américain, parti prosoviétique, on n’en finirait pas… Comme on sait dans le dernier pamphlet Céline a compris que le problème français est insoluble, plus fort que prévu, et que « bouffer du juif ne suffit plus » ! Il était temps Ferdinand !
Qui a envie de bouffer du Zemmour, du Toubiana, du Kunstler, du Greenwald ? En pourcentage il y a plus de juifs que de goys antisystèmes. 10 % dans un cas, un pour dix mille dans l’autre.
Un autre antisémite qui a enfin compris les Français c’est Drumont. Et dans son Testament, très supérieur à la France juive, il écrivait le vieil Édouard :
« Quand les conquérants germains et francs qui, unis aux purs Gaulois et aux Celtes, constituèrent véritablement la France eurent perdu leur vigueur, l’élément gallo-romain l’emporta, la race latine reprit le dessus ; or, cette race est faite pour la tyrannie, puisqu’elle n’a aucun ressort de conscience ; elle adore une idole imbécile, une idole de marbre ou de plâtre qu’on appelle la Loi, et au nom de cette Loi, elle subit tout ».
Ensuite Drumont l’explique cette ludique loi gallo-romaine :
« La Loi, c’est le licteur qui vient de la part de César annoncer au citoyen romain qu’il est condamné à mourir, mais qu’on lui laisse le choix du supplice ; c’est le gendarme de la Révolution qui vient parfois tout seul arrêter cinq ou six personnes et qui les conduit au Luxembourg ou à la Conciergerie, où un autre gendarme vient les chercher pour les conduire à la guillotine. Jamais il n’est entré dans la cervelle de ceux qu’on arrêtait ainsi, l’idée de commencer par tuer le gendarme. C’est là un spectacle extraordinaire et il n’y a jamais qu’en France qu’un gouvernement ait pu s’appeler, comme par une désignation constitutionnelle : la Terreur ».
Revenons à Céline et à la docilité du colonel de gendarmerie cité plus haut :
« Les Français subiront leur sort, ils seront mis, un jour, à la sauce vinasse… Ils le sont déjà. Pas d’erreur !… Le conquérant doit être sûr de ses esclaves en tous lieux, toujours en mains, sordidement soumis, il doit être certain de pouvoir les lancer, au jour choisi, parfaitement hébétés… dociles… jusqu’aux os… gâteux de servitude, dans les plus ronflants, rugissants fours à viande… sans que jamais ils regimbent, sans qu’un seul poil de ce troupeau ne se dresse d’hésitation, sans qu’il s’échappe de cette horde le plus furtif soupçon de plainte… »
C’est lui qui qualifie nos monuments aux morts de lourds dolmens de la docilité…
Nicolas Bonnal — Céline, Le pacifiste enragé