Nouvelle-Calédonie : et si les Kanaks avaient raison ?

[Source : breizh-info.com]

Par Mathurin Le Breton

La Droite française est désespérante. Face aux émeutes kanaks en Nouvelle-Calédonie elle se confond en indignation. Comme la Gauche woke mais à l’envers. « Comment ? Les Kanaks n’acceptent pas l’immigration-invasion qui fera d’eux d’excellents Français ? La Nouvelle-Calédonie c’est pareil que la Haute-Marne ! Une seule sorte de Français en France ! »

Éternel retour des vieux refrains jacobins. Éternel aveuglement face à la réalité ethnique. Et puis, on a bonne mine, à droite, de hurler sur ceux qui refusent de ne pas être minoritaires sur leur propre terre !

Au sein de la population kanak, le taux de natalité est traditionnellement beaucoup plus fort que chez les Blancs ; 17 pour mille dans la province Nord (majoritairement kanak — les statistiques ethniques sont interdites en France) et 19,8 pour mille dans les Îles (ultra-majoritairement kanaks) selon les statistiques de 2004. Mais ce taux baisse de façon exponentielle d’année en année.

En 1996, il était, respectivement, encore de 24 et 26,7 pour mille. Il n’y a pas besoin de travailler à l’INSEE pour comprendre que si les Kanaks acceptent le dégel du corps électoral, ceux-ci seront noyés par les arrivées massives de métropolitains à brève échéance. La population calédonienne représente 270 000 habitants. En gros, un peu plus que Rennes et un peu moins que Nantes intra-muros. Partant, comment voulez-vous qu’une population autochtone résiste démographiquement à un envahisseur si, à intervalle régulier, on lui « injecte » de nouveaux arrivants, aux mœurs totalement éloignées des siennes, envahisseurs venant d’un réservoir de 60 millions de personnes !

Sachant, de surcroît, que les Kanaks sont déjà minoritaires (41,1 %) après un siècle et demi de présence française ! La Nouvelle-Calédonie pour les Kanaks, c’est la Seine Saint-Denis pour les Blancs, tout simplement ! « Dégeler le corps électoral en Nouvelle-Calédonie serait une juste mesure démocratique parce que “certains « métros » sont là depuis 25 ans et n’ont toujours pas le droit de vote” » ? Voilà ce qu’on entend à droite et chez les Macronistes.

Eh bien, faisons la même chose partout en France : certains immigrés sont en France depuis 30 ans et n’ont toujours pas le droit de vote parce qu’ils sont de nationalité étrangère. Donnons-leur également ! Et la possibilité d’instaurer le califat en prime ! Là, la France peut dire adieu au 93 et à Marseille ! Et les femmes peuvent déjà commencer à consultation le catalogue « burka » de « Aujourd’hui la Mecque ».

Ah oui, mais la Droite argumente aussi sur le fait que la France, les « Blancs » donc, amène à la Nouvelle-Calédonie l’instruction, la richesse, le développement, les hôpitaux et le club Mickey. Et les droits LGBT ? Apparemment, la leçon des erreurs de la colonisation et de son boomerang actuel n’ont pas porté leurs fruits à droite. Les Kanaks ne demandent pas à être instruits ou soignés dans des hôpitaux aux normes européennes, ils demandent à qu’on leur foute la paix pour qu’ils puissent vivre selon leurs règles et accessoirement vendre leur nickel à l’Azerbaïdjan, la Chine, la Russie ou je ne sais qui encore si ça leur chante.

Parce qu’un droitard parisien, ça imagine qu’un Kanak ça vit comme dans le Loiret. Bah non ! La province Sud avec le grand Nouméa, c’est l’Europe certes (et encore juste les quartiers sud où vit la majorité des Blancs). Et certains kanaks ont renoncé à leur mode de vie pour adopter le mode de vie européen. Mais dans le reste de l’île et surtout dans les îles, on est dans un tout autre monde. Et les wokes de LFI ou des écolos français qui prennent fait et cause pour les Kanaks auraient parfois des cauchemars en découvrant certains aspects du mode de vie autochtone : le sort des femmes, par exemple, qui se font parfois dérouiller sévèrement par une société très très patriarcale. Sandrine Rousseau à Hienghène dans l’aire coutumière Hoot ma Waap, c’est le choc culturel garanti !

Et les enfants ? La Droite française connaît-elle la coutume de « l’astiquage » ? Dans le monde kanak, l’éducation peut parfois se faire à coup de ceinturon version +++. Là, il n’y a pas de bouquins de Françoise Dolto dans la case. Pas de problème d’enfants rois qui commandent tout le monde dans la maisonnée. En Kanakie, le châtiment corporel à la sauce moyen-âge prend tout son sens si les gamins ne marchent pas droit. Là encore, les gauchistes qui défendent la Calédonie aux Kanaks en tomberaient d’épouvante. Eh oui !

Mais est-ce que c’est à nous, qui nous faisons commander par nos gosses à 17 000 km de la Nouvelle-Calédonie, de leur donner des leçons ? Non, franchement…

Et que dire de cette sympathique coutume qui existe encore, même si elle tend à disparaître, qui est de s’échanger les enfants nouveau-nés entre familles kanaks pour resserrer les liens ? L’aîné de la famille part, tout bébé, dans la famille d’à côté et on ne lui dira jamais qui sont ses parents biologiques. Adoption complète et entière et l’autre famille fera la même chose.

Là aussi, on est à 1000 lieux, ou plutôt à 17 000 km, des us et coutumes de la Saône-et-Loire. Parce que l’immense majorité des Kanaks ne seront jamais des Français, de la même façon que les Mahorais ne seront jamais vraiment des Français. Alors, pourquoi s’acharner à garder ces territoires dans le giron français ? Pour la ZEE maritime ? Pour ne pas chagriner les Blancs locaux ? Pour garder de l’influence dans la zone indopacifique ? Triste « amour » de la France…

Et concernant le « racisme anti-blanc » supposé des Kanaks ? Les Kanaks sont-ils racistes ? Oui carrément ! Et… non finalement. Pas plus que nous à l’égard des populations exotiques qui s’installent en France en gros ! Ce n’est pas la couleur de peau qui les dérange, c’est surtout le style de vie ! Comme nous, quand un immigré s’installe en France. S’il devient Jean Messiha et adopte intégralement notre culture, il n’y a aucun problème et nous l’assimilons comme l’un des nôtres, s’il veut garder sa culture, sa langue et sa femme voilée, eh bien, il devient un élément indésirable, car inassimilable. Les Kanaks, c’est pareil. Certains Blancs ont choisi de devenir des Kanaks, comme certains Kanaks ont choisi de devenir des Blancs, des Français. Vous allez en « brousse » (province Nord ou dans les Îles) vous voyez, c’est rare, mais ça existe, des Blancs qui vivent en tribu et qui ne sont pas des Caldoches. Ils pratiquent l’hommage au chef de clan, avec offrandes et compagnie, ils versent leur salaire au pot commun de la tribu, apprennent la langue locale (il y en a une trentaine en Calédonie), etc. je ne sais pas s’ils échangent également leurs enfants parce que ça risquerait un peu de se voir, mais cette assimilation existe, certes de façon marginale, mais elle existe. Et là, il n’y a aucun racisme à leur égard dans le clan, puisqu’ils sont devenus des membres du clan à part entière.

Je reviens sur la question du salaire et des biens : si vous appartenez à un clan kanak, votre salaire tombe dans le pot commun dans une forme de communisme primitif (même s’il existe un chef tout puissant et des anciens très influents). Vous n’avez pas de problème de subsistance, de retraite, de prise en charge en cas d’invalidité ou de solitude dans les vieux jours, le clan se charge de tout, par contre, le chef vous donne une case, vous mangez de l’igname et de la viande de brousse à tous les repas et vous n’avez plus aucun bien propre. Kanak way of life!

Il faut vraiment bien comprendre que le mode de vie du kanak de brousse ce n’est pas celui de l’indien d’Amérique qui met un masque et des plumes à l’arrivée des touristes et reprend ensuite son feuilleton sur Netflix en sirotant une bière : les Kanaks vivent une réalité sociale et culturelle, un rapport à la terre, à l’autorité, aux anciens, aux enfants, aux mœurs, à des années-lumière des standards européens ! Pour s’y retrouver, voici, par exemple, un vade-mecum édité par un organisme officiel français en Nouvelle-Calédonie.

La question kanake rejoint, quelque part, la question de l’Afrique du Sud abordé souvent dans les colonnes de Breizh-Info. Le fossé est tellement grand entre certaines populations amenées, par les soubresauts de l’Histoire, à vivre sur la même terre qu’il faut un « développement séparé » (définition originelle du mot « Apartheid ») pour éviter le choc des cultures. Et en Nouvelle-Calédonie, c’est ce « développement séparé » qui est la règle : les « Européens » au sud, autour de Nouméa, les Kanaks majoritairement au Nord, en brousse, dans leurs aires coutumières, avec leurs chefs locaux et leurs propres lois. Quant aux jeunes Kanaks du Grand Nouméa et des zones urbaines, ils cumulent malheureusement une certaine acculturation et une « tentation racailliste » de pillage, de trafics, d’addictions diverses et de délinquance et également une bonne aversion pour les « métros », les « Blancs » sur fond de radicalisation vaguement politique. Eux sont racistes ! Ah ça oui ! Là ils veulent tuer du Blanc ! Du « Métro » ! Et surtout lui piquer sa bagnole, son smartphone, son shit et son alcool, parce que les émeutes en ce moment, c’est ça. Le politique, le « dégel du corps électoral » n’est qu’un prétexte. Ce sont des voyous bien schnouffés qui pillent et attaquent et ce ne sont pas les militants politiques du FLNKS. Il y a deux populations sur l’île (même plusieurs, si on compte les Wallisiens et les Asiatiques, mais bon, simplifions) et ces deux populations ont des us et coutumes, de temporalités, des façons de voir le monde, complètement différents. Encore une fois, à part ceux qui acceptent de changer totalement de culture, je parle ici majoritairement des kanaks qui ont choisi de devenir des Français.

Là encore, la Droite s’offusque de ce qu’elle appelle des « dérives » de voyous. Croit-elle que la révolte des jeunes Irlandais, il y a quelques semaines, contre l’immigration-invasion avec mise à sac des installations publiques et incendie des trams était foncièrement différente ? À peine…

La vérité est que la France croyait avoir réglé la question calédonienne avec les trois référendums perdus pour les indépendantistes kanaks. Et qu’elle découvre que ce n’est absolument pas le cas. Et que la politique n’en est pas toute la cause, loin s’en faut ! La Nouvelle-Calédonie ne va pas être « normalisée » et « assimilée » aux Deux-Sèvres uniquement parce que le Conseil d’État a donné son avis n° 565456 sur les résultats des référendums et collé un coup de tampon dessus. Ça, c’est ce qu’on croit à Paris. À Nouméa et surtout en brousse, on n’accepte pas le résultat, on n’accepte pas la présence des Blancs et de leur mode de vie : la Nouvelle-Calédonie appartient aux Kanaks, ils n’ont pas de territoire de repli et la lutte ne fait que continuer, référendums ou pas, coups de tampon ou pas. Il n’y a bien que les gens de Droite et la petite camarilla dirigeante parisienne pour penser le contraire…

Et que pouvons-nous reprocher aux Kanaks ? De vouloir rester eux-mêmes ? De vouloir être maîtres chez eux ? De préférer se faire coloniser par les Chinois ou les Azerbaïdjanais plutôt que par les Français ? Et si c’est leur choix ! Si c’est leur choix d’avoir une médecine traditionnelle qui marche à la crotte de Cagou plutôt que d’avoir un hôpital de brousse équipé dernier cri made in France, c’est ainsi. Point ! Le mode de vie des Européens aux Européens ! Moi je préfère avoir des équipements sanitaires à Guingamp plutôt qu’à Koumac (province Nord) ! Il faut se désempoisonner l’esprit avec cette vision jacobine qui pense que si on installe une antenne France Service et une école publique quelque part, les personnes autour vont devenir automatiquement Français des Yvelines, bouffer du Bœuf mironton, écouter Johnny et lire du Victor Hugo. La différence ethnique ça existe et, paradoxalement, avec la mondialisation, ces différences s’élargissent de plus en plus. Plus on est pareils, plus on est différents même si tout le monde porte des jeans et a un smartphone. Car plus on vit ensemble, plus les micro-différences sautent aux yeux. Les différences entre un Européen et un Congolais, un Afghan ou un Kanak ne se résument pas à l’os dans le nez. Aujourd’hui ces populations sont de plus en plus semblables à nous, en façade. En façade seulement. Car les différences fondamentales, elles, ne se sont pas résorbées et ne se résorberont jamais. Différence de rapport au travail, à la religion, à la femme, à la famille, à l’argent, à la vie, à la mort, au pouvoir, à la sexualité. En Nouvelle-Calédonie comme en Afrique du Sud, certains segments des populations autochtones ne comprennent pas que chacun n’a pas une Ferrari par exemple. Que l’obtention d’un diplôme n’amène pas automatiquement un salaire mirobolant. Que l’élection d’un proche n’amène pas un enrichissement pour tout le clan autour. Ce sont des rapports totalement différents à l’argent, au pouvoir, à l’éducation que nous pouvons connaître en Bretagne.

Et puis regardez-vous, vous qui jugez les Kanaks : a quoi peut bien servir de garder la Nouvelle-Calédonie et d’y renforcer la colonisation de peuplement si la Seine Saint-Denis, mais aussi Villejean ou Pontanézen sont abandonnés au Grand Remplacement ? Occupons-nous de geler le corps électoral chez nous au lieu de le dégeler en Nouvelle-Calédonie ! Regardez-vous avec vos enfants transgenres et vos convertis ! Ça chez les Kanaks c’est inimaginable par exemple. Regardez-vous, vous qui ne parlez plus la langue « régionale » de vos ancêtres pour parler un français parisien avant d’adopter le charabia d’Aya Nakamura. Regardez ce que vous avez perdu avant de regarder ce que vous pouvez gagner en colonisant la Nouvelle-Calédonie ! En Europe, avant de penser à la Conquista à 17 000 km de là, pensons d’abord à la Reconquista dans le « quartier populaire » d’à côté, nom de nom !

Les Kanaks veulent vivre libres, chez eux, selon leurs propres coutumes, avec leurs propres langues et leur propre nickel. Prenons exemple au lieu de leur imposer un mode de vie et de gouvernance dont ils ne veulent pas. Prenons exemple sur leur résistance à la colonisation au lieu de nous faire envahir chez nous par d’autres colonisateurs. Quant aux jeunes émeutiers qui se schnouffent la gueule et sont au chômage, car inemployables du fait de leur inaptitude à un travail régulier, le meilleur pour eux serait peut-être de retourner en brousse, dans le Clan, et de retrouver une vie sociale bien encadrée. Avec le chef coutumier qui dirige, le Conseil des Anciens, etc. au lieu d’être livrés à eux-mêmes en ville avec les tentations « européennes » qui vont avec.

Ceci est une vision ethno-différencialiste et c’est la voie de la sagesse. Bien au-delà des coups de mention habituelle de la Droite qui veut « rétablir l’ordre » et « envoyer l’armée », mais qui n’a pas compris que si le monde entier veut s’installer en France, il n’a pas pour volonté de devenir obligatoirement français. Toute la Kanakie, les Caraïbes et l’Afrique ne vont pas devenir des nouvelles Christine Kelly !

Et puis, au nom de Dieu, larguons les confettis de l’Empire, ce sont, avant tout, des boulets pour la métropole et des aspirateurs à immigration !

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