Loire-Atlantique : un propriétaire héberge gratuitement des familles modestes dans des yourtes ; il est convoqué en justice

[Source : epochtimes.fr]

[Photo : ERIC CABANIS/AFP via Getty Images)

Par EMMANUELLE BOURDY

Un habitant de Nort-sur-Erdre (Loire-Atlantique) a décidé de venir en aide aux plus modestes en proposant deux yourtes installées sur son propre terrain. Il fait néanmoins l’objet d’une action en justice.

Jean-Marc Perrigot, un intermittent du spectacle, a voulu proposer des logements solidaires à des personnes aux revenus modestes, ne supportant pas que « des gens qui travaillent ne puissent pas vivre correctement de leur salaire », ainsi qu’il l’a expliqué à L’Éclaireur. Mais la justice s’en est mêlée, le propriétaire n’ayant pas respecté les règles du code de l’urbanisme.

Les occupants des yourtes avaient d’énormes difficultés pour se loger

Cet habitant du hameau de la Belletière, âgé de 60 ans, réside dans un ancien corps de ferme de cette commune depuis 28 ans. Possédant un terrain de 5 800 m², il a eu l’idée d’installer une yourte, il y a une dizaine d’années, et de la proposer à des personnes aux faibles revenus.

Anne, une professeure de musique et cheffe de chœur, a donc élu domicile dans la yourte en juin 2015. Une solution idéale pour elle, en raison des prix élevés du logement et de l’offre très faible. Cette yourte avait été reliée au système autonome de traitement des eaux usées de l’habitation de Jean-Marc et possédait également l’eau et l’électricité.

Le propriétaire du terrain décide d’installer une seconde yourte et en juillet 2018, Cécile et Louis, un jeune couple de trentenaires, s’y établissent et fondent même une famille. L’avantage est de taille pour eux puisque Jean-Marc ne leur fait payer aucun loyer, préférant fonctionner avec un système d’échange de services. Eux aussi avaient eu du mal à se loger, « soit parce qu’on nous demandait d’avancer trois ou quatre mois de loyers d’un coup, soit parce que notre dossier, parmi tous ceux qui étaient déposés, n’était pas celui retenu », précise Cécile.

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La mairie donne 18 mois au propriétaire pour démonter ses yourtes

Mais malgré le fait que les occupants des deux yourtes s’entendent parfaitement avec leur propriétaire, ce dernier a reçu un courrier de la mairie le mettant en demeure de stopper les travaux, alors que Cécile et Louis venaient juste de s’installer dans la seconde yourte. Le propriétaire des lieux aurait dû faire la demande d’un permis d’aménager étant donné que la surface de plancher totale de ces deux yourtes était supérieure à 40 m² et constituait l’habitat permanent de leurs utilisateurs. Seule l’implantation de yourtes pour une durée de moins de trois mois est « dispensée de toute formalité administrative » selon la loi. Mais Jean-Marc Perrigot ignorait ces détails.

Convoqué en mairie en octobre 2018 avec ses locataires, il a donc ordre de démonter les yourtes dans un « délais de 18 mois environ ». La municipalité propose à Cécile et Louis un logement social, mais ces derniers le refusent, préférant l’achat à la location.

Convoqué en justice, le propriétaire se dit « totalement prêt à assumer »

Jean-Marc Perrigot fait actuellement l’objet d’une convocation devant la justice. Il indique qu’« il s’agit d’une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) », celle-ci étant prévue en juin 2022. Une seconde convocation « devant le tribunal correctionnel, avec débat contradictoire », aura lieu en juillet 2022, précise-t-il encore, se disant « totalement prêt à assumer ». Lui et les occupants des yourtes sont par ailleurs soutenus par l’association nortaise Malice (Mouvement d’Actions Locales et d’Initiatives Citoyennes Erdre). De plus, une pétition est en ligne sur change.org. Elle a déjà recueilli plus de 22 200 signatures à ce jour.

Quant à la mairie de Nort-sur-Erdre, elle s’est expliquée sur cette affaire le 26 avril dernier, par la bouche de Guy David, le premier adjoint. L’élu a notamment révélé à L’Éclaireur que le terrain de Jean-Marc Perrigot est « devenu terrain agricole » à la suite de l’élaboration du Plan local d’urbanisme intercommunal (entré en vigueur début 2020). « Et même auparavant, il n’était constructible que dans un cadre restreint. Or, aucune demande n’a été faite en mairie pour ces yourtes », ajoute-t-il, stipulant : « On est arrivé à un point de non-retour, avec une infraction au code de l’urbanisme. La mairie a finalement porté plainte. » Guy David a encore plaidé que « ce type d’habitat ne pourra voir le jour que dans des secteurs bien définis et pas de façon anarchique ».