09/09/2024 (2024-09-09)
Plongée en eaux troubles dans les méandres de notre « démocratie républicaine »
Par Alain Tortosa
Nous français avons la chance de vivre dans un régime parlementaire démocratique.
Notre Cinquième République voulue par le général de Gaulle en 1958 réunit le tour de force de combiner démocratie et stabilité gouvernementale. Quand l’on sait que nous français ne sommes d’accord sur strictement rien, il est formidable de voir notre Président et nos députés élus à la majorité.
Un mode de scrutin favorisant la démocratie à n’en point douter
Quelle formidable légitimité pour notre chef d’État actuel d’avoir eu 27,8 % des voix au premier tour des présidentielles2 de 2022 et qui, grâce à la magie des deux tours, a été élu avec 58 % des suffrages exprimés, preuve du soutien indéfectible de la majorité des Français.
Imaginez que 48 747 876 Français sont inscrits sur les listes électorales. Parmi eux 9 783 058 personnes ont voté pour lui au premier tour, soit 20 % des inscrits. Comment oser douter de la légitimité de l’Élu. Notez que je ne suis pas tout à fait précis, car si l’on tient compte du nombre de français en âge de voter3 on chute sous la barre des 19 % qui ont choisi un Président « élu avec 58 % des voix ». Si j’étais taquin, je pourrais même écrire que 14 % des Français l’ont sélectionné pour devenir Président.
Là où cela devient tragi-comique, c’est si l’on observe l’abstention4 au premier tour (source gouvernement). Celle-ci représente 11892648 électeurs inscrits (soit 25,04 % des inscrits) qui ne sont pas allés voter versus 9783058 (20,7 % des inscrits) pour Macron.
Les abstentionnistes sont arrivés en tête de l’élection présidentielle de 2022.
Le premier parti de France a affirmé : « Aucun des candidats ne me représente ! »
Imaginez un régime, bien évidemment délirant, restons sérieux que diable, dans lequel le poste de Président serait laissé vacant selon le désir de la majorité relative des Français, ce serait à n’en pas douter le contraire de la démocratie.
À ce stade vous pouvez être rassuré devant la vigueur du pays de la révolution et des droits de l’homme.
Poursuivons :
Le système est encore plus « juste » pour l’élection de nos représentants du peuple, nos députés qui siègent à l’Assemblée nationale.
Ici encore, un scrutin à deux tours permettant à chaque membre d’être élu au 2d tour avec plus de voix qu’il n’en a eu au 1er, démocratie oblige. Ici encore le vainqueur rafle tout et devient député de sa circonscription tandis que les autres n’ont qu’à aller pleurer chez leur mère et obtenir un poste bien mérité dans l’administration.
Attention je crache sur le scrutin à deux tours sans proportionnelle qui nous met à l’abri d’une représentation réelle, mais la proportionnelle intégrale à un tour protège tout autant les puissants de ce monde. Ici point de nécessité de magouilles et d’alliance jusqu’à l’élection (sauf pour les petits partis qui risqueraient de n’avoir aucun député). Tout se joue après les élections pour faire des alliances permettant de constituer un gouvernement. Grâce à celles-ci le parti arrivé majoritaire avec le plus de députés peut purement et simplement être écarté du futur gouvernement « dans l’intérêt du peuple ».
Le découpage électoral
Il faut bien créer des circonscriptions pour représenter l’ensemble du territoire. Imaginons que l’électorat du Président Macron soit dans les grandes villes et les autres à la campagne. Imaginez qu’il y ait plus d’électeurs qui sont contre lui que l’inverse. Comment s’en sortir ? Dans un scrutin national, il obtiendrait moins de députés.
Qu’à cela ne tienne, il suffirait de diviser les zones où Macron est majoritaire en un maximum de circonscriptions (une circonscription = un député) et inversement.
Imaginez aussi un fief dans lequel une majorité de la population serait favorable à l’élection d’un candidat autorisé à se présenter, mais néanmoins « anti-démocrate ». Il suffirait alors de découper cette zone en trois parties puis d’affecter chaque morceau à une circonscription voisine dans lesquelles ce candidat est minoritaire, ainsi la démocratie en sortirait gagnante, car il ne pourrait pas devenir député.
Rassurez-vous tout ceci n’est que fiction, il ne saurait exister dans notre beau pays.
« On est bien loin du principe d’égalité devant le suffrage de “un homme, une voix” qui supposerait que chaque circonscription ait un nombre d’habitants équivalent », commente Thomas Ehrhard, professeur de science politique à l’université Paris‐Assas.5
Pour celles et ceux qui s’interrogeraient, ne vous inquiétez pas, un tel découpage est légal et conforme à la Constitution.
Les alliances « naturelles »
Imaginez maintenant que vous soyez des partis dits « de gauche » qui, pris séparément, ne représentent pas grand-chose. Si vous partiez seul au combat, vous seriez certain de perdre, ce qui serait un drame pour l’avenir de la nation à n’en point douter.
Mais alors que faire pour convertir une réalité minoritaire en une majorité absolue ?
C’est très simple, il suffit de faire semblant d’être du même avis. C’est ainsi que des partis pro-européens vont s’allier à des partis anti-européens ou des partis pro-libéralisme avec des partis anticapitalisme. Et si nous l’appelions le NFP, le Nouveau Front Populaire, afin de réveiller la nostalgie des vieux socialistes !
La démocratie va ainsi parler en contraignant les électeurs de chaque sensibilité, soit à s’abstenir en disant « je ne mange pas de ce pain-là » et donc être ignorés, soit en votant pour ce « truc » qui ne les représente pas uniquement dans l’espoir d’avoir des députés.
Grâce à ses alliances de façade plus ou moins contre nature, ce NFP va pouvoir franchir le seuil du premier tour et ainsi obtenir largement plus de députés que si il n’avait pas renié ses idéaux. C’est ainsi que celui-ci a obtenu le plus de députés aux dernières élections législatives au détriment de candidats qui seraient arrivés devant sans ces alliances.
Nombre de ces députés doivent leur poste à cette alliance NFP. Mais cela ne les empêche pas, une fois élus, de déchirer leur carte NFP et de reprendre leur indépendance en créant un groupe à l’Assemblée.
Un candidat PS qui n’aurait JAMAIS pu être élu député sans cette alliance contre nature va, non pas siéger dans le groupe NFP, mais dans celui du PS. Si l’on se réfère au premier tour des élections présidentielles, le PS a obtenu 1,75 % des voix au niveau national. Grâce à cette alliance, les socialistes ont obtenu 66 sièges sur 577 à l’Assemblée6, soit 11 % (alors qu’ils représentaient 1,75 %).
C’est un des points qui nous permet de noter à quel point notre démocratie est vivante, bien vivante et respectueuse des choix du peuple.
Les désistements de circonstance ou le renvoi d’ascenseur
Nous avons pu voir que sans alliance tel ou tel parti aurait des résultats lamentables, voire aucun député.
« Nous voulons bien nous rallier à vous au premier tour, mais au second vous vous désisterez à notre bénéfice dans certaines circonscriptions. »
Prenons l’exemple des écologistes ou plutôt de EELV, Europe écologie les verts. Ils représentent tellement « rien » qu’ils sont déjà une alliance7 entre quatre ou cinq partis.
Ce conglomérat de factions a obtenu 4,6 % des exprimés au premier tour des présidentielles. Par miracle, ils se retrouvent avec plus de vingt élus8. Si nous étions dans un scrutin à la proportionnelle, pourquoi pas, mais ce n’est pas le cas. Si les écologistes se présentaient honnêtement sans alliance plus ou moins contre nature au premier tour et surtout sans désistement malhonnête au 2d tour, la logique voudrait qu’avec un scrutin majoritaire il y ait zéro (0) député écolo. Mais heureusement, la démocratie a parlé et c’est légal. C’est ainsi que des grandes villes ont à leur tête un maire écologiste intégriste (pléonasme) alors même qu’ils sont ultra-minoritaires dans le paysage politique.
C’est encore plus drôle ou plus pitoyable avec Anne Hidalgo, PS qui s’est présentée aux élections présidentielles avec ses 1,75 % de voix au premier tour et qui par miracle se retrouve maire de Paris qui n’est même pas élu au suffrage universel.
La fraude ?
C’est un non-sujet. Il ne saurait y avoir fraude dans un pays démocratique occidental. Seules les républiques bananières trichent, mais pas les sociétés civilisées.
Élections présidentielles 2022.
« Au cours de la soirée, France 2 a présenté des chiffres erronés comme des résultats provisoires remontant directement du ministère de l’Intérieur »
« Sur le plateau de l’émission, un journaliste présente le décompte des voix obtenues par les deux candidats dans les bureaux de vote ayant achevé le décompte. Marine Le Pen est alors créditée, en valeur absolue, de 13 899 494 voix, contre 13 697 236 pour son adversaire soit plus de 200 000 voix d’écart en faveur de la première. À la fin de cette séquence (171e minute), les scores provisoires sont encore plus élevés : 14 432 396 voix pour Le Pen, et 14 214 825 pour Macron — toujours avec un avantage apparent pour la première. »
« En revanche, France 2 a clairement basculé dans l’incohérence une heure quarante-cinq après cette première présentation, quand Jean-Baptiste Moreau est revenu pour attribuer 11 558 051 voix à la candidate Rassemblement National… soit 2,9 millions de voix de moins qu’auparavant. Macron étant pour sa part crédité de 13 949 092 voix validées, soit 315 000 de moins qu’une heure et demie plus tôt9. »
Ah, ces ordinateurs, on ne pas leur faire confiance !
Évoquons aussi les dernières législatives.
Ceci est un extrait d’une vidéo de François Asselineau10
« Qu’est-ce que l’on voit et bien on s’aperçoit qu’à la sortie des urnes le candidat arrivé en tête c’était le candidat du Front populaire avec 34,08 %, suivi du candidat macroniste la candidate macroniste qui se trouvait être la candidate sortante avec 32 %, suivi du candidat du Rassemblement national avec 18,03 %… et à droite vous voyez les résultats après intégration des votes électroniques vous voyez que cette fois-ci c’est la candidate de renaissance qui passe de 32 à 39,94 % c’est-à-dire qu’elle gagne quasiment 8 points avec les votes par Internet elle devient numéro 1 en revanche le candidat du Front populaire passe de 3408 à 2978 c’est-à-dire qu’en fait il perd plus il perd plus de 4 points avec 2978 et il rétrograde à la 2e place… »
Il est bien connu que les électeurs de la majorité présidentielle n’aiment pas se déplacer pour voter tandis que les électeurs des autres partis détestent les ordinateurs, c’est un fait scientifique qui fait consensus. Phénomène bien connu aux USA lors des dernières présidentielles.
Toute personne autorisée a ses chances
J’avais oublié ce petit détail. Il n’est pas possible de se présenter à l’élection présidentielle sans la signature de grands électeurs. Notons qu’une réforme initiée par le Président Hollande rend les parrainages publics. N’espérez donc pas recueillir ceux-ci si vous n’êtes pas UE-compatible.
Après ce n’est pas le pire, n’importe qui peut se présenter aux législatives, mais vous n’avez aucune chance si vous n’avez ni fortune, ni soutien d’un parti politique ou de lobbies. D’autant que plus votre parti a eu de bons résultats aux précédentes élections, plus il est bien placé dans les sondages et plus il aura son financement assuré. Si l’on ajoute le fait que les législatives sont à scrutin majoritaire à deux tours, un illuminé (personne qui proposerait une autre politique) n’a strictement aucune chance de devenir député. Si par malheur il arrivait en tête du premier tour avec une majorité relative, le jeu des alliances, des désistements et du « barrage » le condamne au 2d tour. C’est ainsi que le système protège la démocratie de toute alternance réelle et se borne aux chaises musicales et à la posture.
Les médias mainstream garants du pluralisme
Il ne faut pas les oublier. Ceux-ci ne vivent que par les subventions sans compter la consanguinité existante entre les journalistes et les politiques. Vous verrez beaucoup de mari de, de nièce de, de beau-père de, de copain de promo de… et autres liens de famille.
Entre les sondages qui ne sont absolument pas truqués et le fait que les petits candidats n’ont pas la parole (ici encore c’est fonction de vos précédents résultats et des intentions de vote) les dés sont jetés d’avance.
Tout est bien verrouillé pour protéger notre démocratie dans laquelle vous avez le droit de dire au plus grand nombre absolument tout ce qui est autorisé par ceux qui sont déjà au pouvoir.
De grands débats sont organisés tous les jours entre celles et ceux qui sont du même avis, disons qui adhèrent au socle commun. N’espérez pas voir jour après jour pendant des heures, des joutes verbales entre des pro-euro et anti-euro. Un anti purement et simplement sera privé de vitrine médiatique.
C’est bien pourquoi les réseaux sociaux peuvent présenter une menace pour la démocratie en permettant la circulation de pensées déviantes. Les médias mainstream étant pour leur part les porte-parole du ministère de la vérité.
Le député-maire et le cumul des mandats
Autrefois un maire pouvait se présenter pour devenir député et rester maire. Une campagne a donc été lancée pour dire « c’est dégueulasse, il va palper deux fois et en plus il n’a pas le temps de faire les deux ».
Sur le papier ce n’est pas faux, mais quand on voit comment les bancs de l’Assemblée sont vides (sauf le jour où il y a les caméras et encore..) on peut se dire qu’ils ont du temps libre.
Le cumul des mandats est ainsi devenu interdit, pardon je précise, le cumul de CES mandats est impossible par contre pour les autres on peut se lâcher.
Le seul hic est que maire est la seule fonction politique pour laquelle l’élu est en contact direct avec ses électeurs. Un député-maire qui rentrait au village le week-end devait rendre des comptes au risque d’entendre « Mais crétin, pourquoi as-tu voté cette loi qui va détruire notre agriculture » sans compter que le maire est souvent enraciné dans le tissu local, issu du monde du travail ou de l’entreprise et non un professionnel de la politique.
Avec la loi sur le non-cumul c’est « open-bar », tu peux voter toutes les saloperies qui sont « bonnes pour le peuple » sans avoir à rendre de comptes.
Grâce à cela le député a « gagné en indépendance » et n’a plus à subir le « lobby du peuple qui est trop bête pour comprendre ».
Les castors ou l’art du barrage
N’oubliez pas la stupidité par nature du peuple (je ne serais pas forcément opposé à cette affirmation au regard de son comportement durant la plandémie, l’Ukraine et le réchauffement climatique).
Il faut le protéger comme on empêcherait un enfant de 6 ans de changer de sexe. Pardon, l’exemple n’est pas bon, autant un enfant n’est pas assez mature pour décider ce qu’il mange ou de l’heure de son coucher, autant il est en capacité de déterminer si le Tout-Puissant s’est planté en l’affublant d’un mauvais genre. Mais je m’égare une fois de plus.
Notez que cette procédure de barrage n’est viable que dans les pays comme notre lumineuse république qui ont eu l’intelligence d’instaurer des scrutins à deux tours sans proportionnelle.
La question se résume en :
« Comment faire en sorte que le français vote bien ? »
C’est assez simple, il suffit de lui mettre un épouvantail devant les yeux. En France celui-ci s’appelle le RN (Rassemblement National). Le jeu consiste à faire croire dans un premier temps que le parti est un parti de résistance, de lutte contre, etc. tout en laissant passer l’information que ce n’est pas vraiment un parti comme les autres, mais qu’il est comme les autres. Il est très important de faire en sorte que ce parti obtienne le meilleur ou second score au premier tour des élections tout en faisant en sorte que celui au pouvoir soit aussi qualifié en bonne place pour le deuxième tour.
Faire monter dans les esprits et les sondages le parti de la honte est un boulot à plein temps qui se prépare en amont en faisant volontairement des lois immondes afin de bien faire monter le RN.
La bascule à 180 degrés s’opère entre les deux tours.
Les médias ne vont cesser de vous expliquer le contraire de la semaine précédente. C’est là que les castors interviennent :
« Il faut faire barrage au RN au second tour. »
Les castors, les moutons suiveurs, les poissons rouges sans mémoire et autres autruches qui ne veulent pas voir vont alors renier leurs opinions politiques et voter pour le parti présidentiel afin de « faire barrage » aux forces du mal antidémocratiques qui sonneraient le glas de nos libertés si chères à nos dirigeants. Le maître mot est « front républicain » face à un parti qui a tout à fait le droit de se présenter et d’avoir des députés, mais pas trop.
Et c’est ainsi que la démocratie sort victorieuse, le parti au pouvoir voué à l’échec du fait du rejet massif de la population se retrouve légitimement vainqueur des élections avec une majorité confortable.
« Ah on l’a échappé belle, c’était moins deux avant le retour de la censure ou de la dictature, mais restons sur nos gardes, car le bruit des bottes n’est pas loin. »
Tout le travail jusqu’aux prochaines élections consistera à faire de nouvelles lois, de nouvelles destructions de l’économie, du tissu social, de nos traditions, de nos valeurs afin de faire remonter « le parti de la haine ». N’hésitez pas à saupoudrer le tout d’éducation sexuelle à la sodomie dès 6 ans si la sauce ne prend pas bien.
L’article 49.3 garant de la stabilité et donc de la démocratie
Ah que ferions-nous sans lui ? Dans notre belle République, le gouvernement propose les lois et les députés les votent (ou pas). Notez que les élections à deux tours sans proportionnelle permettent généralement au Président en exercice d’obtenir une majorité absolue. Ainsi le parlement est de fait une simple chambre d’enregistrement des lois proposées par le gouvernement, stabilité institutionnelle oblige.
Donc officiellement une loi ne peut pas passer sans l’aval de la majorité des Français via leurs représentants.
Notez qu’auparavant les législatives et les présidentielles étaient décalées dans le temps. C’était une très mauvaise idée, car le peuple qui avait eu l’intelligence de voter pour le « bon » Président pouvait se lasser et risquait d’engendrer une perte de la majorité à l’Assemblée. Bien heureusement nous avons remédié à cela en faisant coïncider les élections présidentielles suivies peu de temps après par les législatives.
Le Président pouvait ainsi raisonnablement se dire :
« Ils ont été assez cons pour voter pour moi comme Président, il est logique de penser qu’ils seront toujours aussi cons dans quelques jours lors des législatives. »
C’est bien d’être optimiste, mais il faut penser à tout. Malgré toutes ces précautions indispensables au bon fonctionnement des institutions, un accident peut se produire, et ainsi se retrouver avec un Président et un gouvernement qui n’ont pas la majorité à l’Assemblée.
D’aucuns, des ignorants de la réalité démocratique, pourraient prononcer des insanités du type « c’est très bien cela permet de faire des lois qui sont dans le compromis et qui reflètent la diversité des opinions politiques. »
C’est du grand n’importe quoi, comme si les représentants du peuple pouvaient savoir ce qui est bien pour les français.
Ainsi est né l’article 49.3 pour pallier les accidents de majorité. Pour résumer :
« Je suis le chef suprême, je fais ce que je veux et je vous emmerde. »
Pratiquement le gouvernement décide de faire passer sa loi « bonne pour le peuple » sans demander l’avis des députés, ce qui est la moindre des choses lorsque l’on désire protéger la démocratie.
Histoire que l’arnaque ne soit pas trop visible et que les députés ne commencent pas à dire des phrases ridicules du type « mais alors on sert à quoi », il a été ajouté « la motion de censure ».
Celle-ci dit que lorsque le gouvernement dégaine son « Uno, je vous emmerde », une majorité absolue de députés peut dire « Contre Uno, c’est moi qui gagne ». Dans cette hypothèse le gouvernement est démissionnaire et il y a de nouvelles élections législatives.
Cette motion de censure est peu réalisée dans les faits même si une écrasante majorité de députés est contre le Président. Ils ne se mettront jamais d’accord pour le renverser, car la soupe est trop bonne et « Rien ne me dit que je serai réélu d’autant plus que je n’ai fait que défendre mes intérêts au détriment des Français pendant ces années ». Et puis il y a les cadeaux pour convaincre de changer d’avis « si tu ne votes pas la motion, tu auras ton autoroute ou ta foire aux bestiaux que tu réclames depuis si longtemps ». De petits arrangements entre personnes de bonne volonté toujours là pour défendre l’intérêt commun.
La motion de censure
Voyons un peu son fonctionnement dans le détail. Elle est théoriquement l’arme absolue de contrôle du gouvernement par le Parlement.
Il en existe plusieurs types dont une à l’initiative de l’Assemblée.
« L’Assemblée nationale met en cause la responsabilité du Gouvernement par le vote d’une motion de censure. Une telle motion n’est recevable que si elle est signée par un dixième au moins des membres de l’Assemblée nationale. Le vote ne peut avoir lieu que quarante-huit heures après son dépôt. Seuls sont recensés les votes favorables à la motion de censure qui ne peut être adoptée qu’à la majorité des membres composant l’Assemblée11. »
Il existe un délai obligatoire entre le dépôt de la motion et le vote afin de laisser le temps au gouvernement de corrompre convaincre un maximum de députés afin qu’ils changent d’avis, plaisir d’offrir.
Si plus de 50 % des députés votent favorablement pour la censure (une abstention ou un « contre » valent « contre »), alors l’ensemble du gouvernement est censuré, y compris le Premier ministre.
Celui-ci a alors obligation de présenter sa démission au Président de la République, il n’a pas le choix. Il serait fou de douter encore du niveau démocratique de notre République.
En revanche le Président ne semble pas obligé de l’accepter. L’article 8 dit que le Président nomme et met fin aux fonctions du Premier ministre, pas qu’il est obligé. Quand bien même il serait contraint de l’accepter, rien ne lui interdit de le renommer dans les minutes qui suivent, elle est pas belle la vie !
C’est donc bien le Président qui aurait le dernier mot et qui pourrait dire « fuck » aux députés qui votent une motion de censure si tel est son bon plaisir.
L’article 16, les pleins pouvoirs12
« Lorsque les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité de son territoire ou l’exécution de ses engagements internationaux sont menacés (1) d’une manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu, le Président de la République prend les mesures exigées par ces circonstances, après consultation officielle du Premier ministre, des Présidents des Assemblées ainsi que du Conseil constitutionnel…
Ces mesures doivent être inspirées par la volonté d’assurer aux pouvoirs publics constitutionnels, dans les moindres délais, les moyens d’accomplir leur mission. »
Avec cet article le Président détient le pouvoir législatif ET exécutif en devenant un dictateur officiel, mais néanmoins légal.
C’est à lui d’apprécier la réalité des menaces et les mesures à prendre. Attention il a l’obligation de respecter la Constitution, il ne peut pas faire tout et n’importe quoi, hélas. Il lui est par exemple impossible de reporter les élections présidentielles, car la durée du mandat est inscrite dans la Constitution.
Pour quelle durée ?
Même si les présidents des chambres peuvent saisi le CC, même si le CC rendait un avis défavorable, celui-ci n’est pas contraignant.
Le parlement continue d’exister, mais ne dispose plus d’aucun pouvoir, il devient totalement consultatif (en même temps ça ne change pas grand-chose). Précisons que l’Assemblée ne peut être dissoute pour de nouvelles élections durant cette période.
Donc en théorie l’article 16 pourrait être légalement activé durant la durée totale du mandat présidentiel, au bon vouloir du roi.
C’est bien une sorte d’article 16 que nous avons vécu durant le Covid avec son « conseil de défense » et une mise au ban de l’Assemblée alors même qu’il n’avait pas été dégainé.
La destitution du Président
Il ne saurait y avoir de « vraie » démocratie sans possibilité de destitution du Président. C’est l’article 68 de la Constitution13 qui l’autorise.
Extrait :
« Le Président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. La destitution est prononcée par le Parlement constitué en Haute Cour… Sa décision est d’effet immédiat.
Les décisions prises en application du présent article le sont à la majorité des deux tiers des membres composant l’assemblée concernée ou la Haute Cour. »
Oui, mais, car il ne saurait y avoir de démocratie sans « oui, mais ».
Les modalités sont décrites par une loi14 qui détaille la procédure et ses conditions, dont les suivantes :
- À savoir que la décision doit être motivée. Et oui, il ne suffit pas d’écrire « c’est un pauvre type qui passe son temps à la plage et dans des boîtes échangistes » pour justifier la mise en branle de l’action. « Motivée » signifiant qu’il va falloir décrire les manquements graves, preuves à l’appui avec des bases juridiques. Sinon bye bye la destitution.
- Le bureau de l’Assemblée vérifie sa recevabilité. Sans son aval point de destitution.
- Puis examen par la commission permanente compétente en matière de lois constitutionnelles. Même punition si elle dit non. Notez que chaque Assemblée (députés, sénateurs) doit entériner par sa propre commission.
- Un bureau de Haute Cour censé être le reflet de toutes les opinions politiques est constitué.
- Une commission est constituée qui peut entendre le Président.
- Des débats sont organisés.
- La majorité des deux tiers de la Haute Cour (Assemblée+Sénat) doit voter la destitution pour qu’elle soit actée.
Tout ceci est bien joli, mais virtuellement impossible dans les faits. Comment voulez-vous qu’un Président ait gravement manqué à ses devoirs, qu’il fût coupable de haute trahison durant plusieurs mois ou années sans la complicité des députés et des sénateurs ?
Il serait à la fois courageux ou suicidaire d’oser voter la destitution d’autant plus si l’on rate son coup, c’est la fin d’une carrière.
Le Président peut-il refuser de quitter son poste ou reporter les élections15 ?
La réponse est non ou plutôt « pas impossible, mais compliqué ».
Pour aller plus loin, les deux options possibles semblent :
- Changer la Constitution. Si les députés et sénateurs réunis en congrès (à la majorité des 3/5) modifiaient la Constitution un Président en fin de mandat pourrait rester. Il semble y avoir peu de limites aux réformes16 constitutionnelles hormis vouloir rétablir la royauté absolue. Il semblerait donc que rien n’interdirait un changement de Constitution qui entérinerait le titre de Président à vie si elle était votée. Je ne suis pas certain que le Congrès se fut opposé à un prolongement du mandat présidentiel s’il était arrivé à échéance au plus fort de la « crise Covid » (au même titre qu’un Zelensky a supprimé les présidentielles jusqu’à nouvel ordre).
- Pourquoi ne pas évoquer le dérèglement climatique et introduire la possibilité dans l’article 16 de la Constitution ? « L’urgence climatique est grave, je reste Président jusqu’à son entière résolution ». L’hypothèse constitutionnelle pour proroger un mandant présidentiel n’a rien d’utopique.
- L’empêchement. C’est, semble-t-il, la seule raison prévue par les institutions pour reporter l’élection présidentielle. L’article 7 de la Constitution précise :
- « Si, dans les sept jours précédant la date limite du dépôt des présentations de candidatures, une des personnes ayant, moins de trente jours avant cette date, annoncé publiquement sa décision d’être candidate décède ou se trouve empêchée, le Conseil constitutionnel peut décider de reporter l’élection. »
Avant d’expliciter l’article, je voudrais préciser qu’il semblerait n’y avoir aucune précision quant à la durée du report. Est-elle en jours, en semaines, en mois, en années. Sinon le meilleur moyen de reporter une élection semble le coma d’un candidat. Quand on sait que les gouvernements n’hésitent pas à tuer, le coma est envisageable. Et un coma on sait quand il commence, mais pas quand il finit, il peut même durer 20 ans ce qui permet de voir venir.
Le Conseil constitutionnel17
Il est constitué de neuf membres nommés par le Président, l’Assemblée et le Sénat pour une durée de 9 ans et renouvelé par tiers.
C’est la plus haute juridiction et il n’est contrôlé par aucune juridiction garant de son « indépendance ».
Question posée à Google IA :
« Que se passerait-il si le Conseil constitutionnel était “hors la loi” qu’il ne respecte pas la Constitution ? »
Réponse :
« Si le Conseil constitutionnel, gardien de la Constitution, venait à la violer lui-même, cela créerait une crise institutionnelle sans précédent et remettrait en cause la légitimité de l’ensemble de l’ordre juridique français. »
Si d’aventure il y avait collusion entre celui-ci et le Président de la République, aucune institution n’aurait le pouvoir de l’arrêter.
Nous pouvons nous interroger une fois de plus sur la constitutionnalité du Conseil de défense lors de la crise Covid. Aucune transparence, secret défense, Parlement écarté des décisions.
« Jusqu’à présent, il n’y a pas eu de saisine ou de contestation spécifique visant à déterminer si le Conseil de défense utilisé pour gérer la crise de la COVID-19 était constitutionnel ou non18 »
Il serait légitime dans un État de droit de s’interroger sur le fait que collusion il y a eu entre le Président, le Conseil constitutionnel, mais aussi avec les parlementaires.
Dans cette hypothèse, si le forfait était révélé, il ne resterait que les instances européennes qui pourraient peut-être faire garde fou, dans l’hypothèse où elles ne seraient pas elles-mêmes complices et corrompues.
L’Union européenne
C’est sans doute un des plus beaux remparts pour protéger la démocratie. Le modèle français est formidable, mais nous n’étions pas à l’abri du dérapage, de la tuile qui grippe la machine. Je ne sais pas, imaginez que l’on mette des droits de douane pour ne pas être envahis par des produits alimentaires bourrés de produits chimiques mortels ou sur des biens de consommation fabriqués par des enfants esclaves qui meurent littéralement dans des mines.
C’est là que l’UE arrive pour sauver la liberté et la démocratie.
Notez que les Français ont majoritairement voté « non » à 55 % lors du référendum de 2005 sur la création d’une Constitution européenne. Mais comme ils avaient « mal » voté, il a été décidé de faire le Traité de Lisbonne en 2007 pour corriger le tir. Un simple ajustement technico-administratif et non un coup d’État antidémocratique comme le laisseraient entendre certains.
On laisse aux pays membres un Président, un gouvernement, des chambres basses et hautes, des élections et des votes de lois. On fait même encore semblant d’avoir une Banque de France alors même que l’on a perdu le privilège de battre monnaie. Sans compter la perte de souveraineté en termes de flux migratoires. Il n’y a qu’à voir la politique de Meloni en Italie, prétendue d’extrême droite qui a dû se coucher et rentrer dans les rangs face à la pression de l’UE. Certains se félicitent néanmoins de son succès en matière de diminution des immigrants illégaux tandis que d’autres remarquent une augmentation des immigrés légaux supérieure à la diminution des illégaux.
Si d’aventure la France ou tout autre pays de l’UE propose une loi, elle doit d’abord demander la permission à l’UE et inversement nous avons l’obligation d’adhérer à toutes les lois et directives européennes. Il est donc gouleyant de voir encore des Français férus de démocratie déposer un bulletin de vote pour une politique qui n’est absolument plus décidée dans l’hexagone.
Vous pourriez me dire « votons alors lors des élections européennes ». Ce serait oublier que le Parlement européen tel qu’il a été créé n’est qu’une façade, une nouvelle illusion de démocratie. Dans les faits il ne décide de rien. Tout le pouvoir est dans la Commission européenne qui, bien entendu, n’est pas constituée d’élus, mais de technocrates plus ou moins corrompus influencés par les lobbies.
Les lois liberticides ? Mais non, pour nous protéger !
Je ne reprendrai ici que quelques exemples, mais il y en a tellement.
La Constitution dévoyée par un Conseil constitutionnel a permis :
- Les mandats de masque obligatoire.
- Le confinement de toute une population en bonne santé, sans procès ni condamnation préalable.
- Les tests PCR.
- Le passe vaccinal pour faire du sport, aller au restaurant et j’en passe.
- La vaccination obligatoire pour les soignants, pompiers, gendarmes, etc.
- La vaccination obligatoire avec 11 « vaccins », des dizaines d’injections dès le plus jeune âge alors que tout être humain est libre d’accepter ou refuser un traitement.
- La reconnaissance faciale dans certains lieux et qui sera bientôt généralisée.
- L’obligation de jeter sa voiture en parfait état de fonctionnement dans certaines zones.
- L’obligation de faire des travaux d’isolation pour louer et bientôt vendre son bien immobilier.
- La censure sur les réseaux sociaux et la fermeture des médias alternatifs,
- La persécution pour pensée déviante et mise au ban de la société pour peu que vous ayez une certaine aura médiatique.
- etc.
Tout ceci et bien d’autres interdits toujours pour notre bien sont possibles et valorisés dans notre belle République garante des droits de l’homme. Elle va bien entendu autoriser le crédit social : N’aura accès à son argent que celui qui répond aux critères du bon citoyen qui mange bien, se déplace bien, vote bien, obéit bien et pense bien.
La preuve de la réalité démocratique par les urnes
Je vous invite à faire les vérifications si vous doutez.
Second tour19 des élections législatives 2024 :
- Nouveau Front Populaire 7 005 499 voix, 25,6 % des voix, 178 députés.
- Ensemble pour la république (Macron) 6 314 609 voix, 23,15 % des voix, 150 députés.
- Rassemblement national 10 110 088 voix, 37,05 % des voix, 142 députés.
Vous ne rêvez pas, le parti qui a fait le plus de voix a largement moins de députés, c’est donc bien la preuve d’une république bien huilée.
Petit point
Ne croyez pas que je sois à court d’arguments et d’éloges sur notre système. Nous sommes à l’abri de la dictature chinoise ou de Poutine et il serait bien que vous ne l’oubliiez pas en mettant votre bulletin de vote dans une urne ! Sans blague y’en a marre des Français qui se plaignent tout le temps.
Pour résumer la démocratie à la française :
- Un scrutin qui donne une majorité de façade à une minorité.
- Un scrutin qui invisibilise les mauvais Français abstentionnistes qui votent blanc.
- Un découpage électoral aux petits oignons pour respecter « one man, one vote ».
- Des alliances pour éviter que les électeurs ne se trompent en élisant les mauvaises personnes.
- Des désistements pour ne pas fausser la représentation et récompenser les plus méritants
- Absolument aucune fraude.
- Tout citoyen « comme il faut » a ses chances pour représenter le pays.
- Les médias mainstream garants d’un pluralisme circonscrit aux seuls partis existants autorisés par le ministère de la vérité.
- La suppression du cumul des mandats qui était irrespectueux du peuple et lui donnait beaucoup trop de pouvoir.
- L’art du barrage contre les « extrémistes » qui ont parfois le droit de se présenter, démocratie oblige, mais pas d’être élus (en nombre) pour faire contre-pouvoir.
- L’article 49.3 qui permet d’imposer des lois « bonnes pour le peuple » dont le parlement peut ne pas vouloir.
- La motion de censure très risquée pour les députés (la soupe est bonne) et au bon vouloir du Président.
- L’article 16, les pleins pouvoirs du roi.
- La destitution du Président, une mission quasi impossible.
- Le report des élections présidentielles, pas utopique.
- Le Conseil constitutionnel garant de la démocratie ou complice de la dictature ?
- L’Union européenne et les traités supranationaux qui interdisent toute initiative nationale en nous protégeant malgré nous. 100 % des décisions politiques sont externes à l’hexagone et même à l’UE.
- Et bien entendu toutes les lois liberticides qui n’ont pour seul objectif que de nous « protéger ».
Avez-vous compris que le Président n’est pas choisi par le peuple, qu’il détient le pouvoir absolu (mais finalement sur rien) et que les députés sont là uniquement pour le décorum.
Ressaisissons-nous et cessons de douter de la vigueur de notre démocratie et de nos institutions qui garantissent son expression grâce au jeu des chaises musicales appelées « alternance ».
La nouvelle France de 2024
Vous pourriez souligner ici ma « brillante » démonstration me permettant ainsi de conclure mon texte. Ce serait oublier les derniers événements extraordinaires que nous venons de vivre.
Petit rappel. Les élections européennes20 se sont déroulées en France le 8 et 9 juin 2024. Cette élection étant à la proportionnelle et à un tour, a permis de constater la déculottée subie par le parti du Président.
Avant les dernières législatives, le gouvernement avait une majorité relative de députés lui permettant de gouverner le plus « démocratiquement » grâce au 49.3. Et ce d’autant plus que lorsque la gauche disait « je vais déposer une motion de censure », la droite rétorquait « jamais je ne vais m’allier avec eux », et inversement, ceci garantissant l’impossibilité de le renverser.
C’est alors que notre grand Président, fervent défenseur de l’esprit de la démocratie républicaine française, a pris la décision de dissoudre l’Assemblée, car tel est son droit et que rien ne l’y obligeait.
Il a déclaré le 9 juin 2024 :
« Confiance en notre démocratie. Que la parole soit donnée au peuple souverain, rien n’est plus républicain. Cela vaut mieux que tous les arrangements, toutes les solutions précaires21. »
Il ne fallait pas être un grand devin pour savoir qu’il aurait encore moins de députés qu’avant. Il ne pouvait ignorer qu’aucune majorité ne pourrait se dégager au regard du résultat des européennes. La gauche NFP et la droite RN ne pouvant pas rafler plus de la moitié des députés.
C’est ainsi que le 16 juillet, le gouvernement présenta sa démission. Il fallait donc un nouveau Premier ministre.
La nomination d’un Premier ministre
Contrairement à ce qu’un extra-terrestre pourrait imaginer, ce n’est pas au camp arrivé en tête de nommer le Premier ministre, cela n’aurait aucun sens dans une démocratie digne de ce nom.
Non, non, c’est au chef de l’État, au Président de le nommer.
Donc après de multiples tractations cette gauche de bric et de broc ayant obtenu le plus de députés grâce au système électoral a réussi à se mettre d’accord et proposer un nom. Une personne de qualité et de talent qui, pour ajouter de l’eau au moulin de sa légitimité, a annoncé les jours suivants son coming-out en indiquant qu’elle était homosexuelle.
Cela aurait dû fonctionner étant donné que quelques mois plus tôt le Premier ministre avait déclaré à l’Assemblée que sa propre homosexualité était la preuve de la vigueur de la démocratie française.
Hélas, il n’en fut rien. Le Président a très mal vécu qu’on lui suggère, voire lui impose, le nom du 1er ministre, mettez-vous un peu à sa place. Il est alors devenu tout rouge comme Soupalognon y Crouton22, et a hurlé :
« C’est moi le chef, c’est moi qui décide. Alors ce sera pas elle, na ! »
Et de rajouter :
« Puisque c’est comme ça, je vais d’abord aller voir les JO avec mes copains-ines et la cérémonie la plus belle de l’univers puis après les vacances je déciderai quand je voudrai, double na ! »
Il est vrai que la Constitution23 le lui permet.
Article 8 :
« Le Président de la République nomme le Premier ministre. Il met fin à ses fonctions sur la présentation par celui-ci de la démission du Gouvernement. Sur la proposition du Premier ministre, il nomme les autres membres du Gouvernement et met fin à leurs fonctions.
L’article 8 alinéa 1 lui permet de choisir le Premier ministre. »
Strictement rien ne l’oblige à choisir un Premier ministre issu du camp du parti arrivé en tête des élections législatives et rien ne le contraint à un délai. Elle est pas belle la vie ?!
Le 9 juin celui-ci avait précisé qu’il allait donner la parole au peuple, non pas qu’il allait la respecter !
Le Président de l’Assemblée nationale
« Quatrième personnage de l’État, le Président de l’Assemblée nationale joue un rôle essentiel en matière d’organisation de travail parlementaire et de direction des débats en séance publique. Sa place au sein des institutions républicaines lui confère par ailleurs des fonctions de représentations et de diplomatie importantes.
Le Président de l’Assemblée nationale est une figure majeure de la vie politique française, du fait de sa place au sein des institutions de la République, de sa contribution essentielle au bon fonctionnement de l’Assemblée, mais aussi du fait de la responsabilité qui lui échoit de moderniser l’Assemblée, de l’ouvrir aux citoyens et d’assurer son rayonnement dans le monde24. »
Le mode de nomination :
« La première séance est présidée par le doyen d’âge, qui organise l’élection du président parmi les députés. L’élection se fait à bulletin secret, à la tribune de l’hémicycle. Pour être élu, un député doit avoir la majorité absolue des suffrages exprimés aux deux premiers tours, ou la majorité relative au troisième25. »
Je pourrais dire que nous avons alors vécu une apothéose, mais il y en a une par semaine. Pourtant cette élection représente un cas d’école.
En premier lieu rien n’oblige de confier la présidence de l’Assemblée au groupe qui compte le plus de députés non, mais ! La parole est donnée au peuple dans un premier temps puis l’on peut démocratiquement s’asseoir sur les résultats.
Voici comment s’est déroulé le scrutin26 :
- Au premier tour la présidente sortante, Mme Yaël Braun-Pivet était en troisième position : 124 voix. Une élection à la proportionnelle (comme au 3e tour) aurait scellé son destin.
- Au deuxième tour elle passe en tête avec une majorité relative grâce à des désistements et probablement des accords entre amis.
- Et au troisième tour, elle l’emporte avec une majorité relative et 13 voix d’avance.
Elle est donc « réélue » au poste de Présidente de l’Assemblée nationale alors même que les Français ont réaffirmé avec force le refus de la politique de son camp.
Pour celles et ceux qui l’ignorent, c’est la même qui avait déclaré à l’Assemblée le 10 octobre 2023 :
« Madame la Première Ministre, Mesdames et messieurs les membres du gouvernement, Mesdames et messieurs les députés, chers collègues,
Horreur, sidération, angoisse, le monde est aujourd’hui en état de choc devant la violence de l’attaque terroriste qui a frappé Israël.
Devant cette barbarie, je veux redire ici qu’Israël est un pays ami à qui je veux réaffirmer, au nom de la représentation nationale, notre totale solidarité et notre soutien inconditionnel27. »
Puis lors de la deuxième séance du mardi 28 mai 2024 à l’Assemblée nationale28, suite à plusieurs interventions pro-israéliennes, M. Sébastien Delogu député se lève et brandit un drapeau palestinien.
Mme Braun-Pivet déclare alors :
« Monsieur Delogu, je prononce un rappel à l’ordre avec inscription au procès-verbal. Je saisirai le bureau. C’est inadmissible ».
Puis lors de la reprise de séance :
« le bureau de l’Assemblée nationale s’est réuni. Il a décidé de proposer à l’Assemblée de prononcer à l’encontre de M. Sébastien Delogu la censure avec exclusion temporaire… »
« la censure avec exclusion temporaire emporte de droit la privation, pendant deux mois, de la moitié de l’indemnité parlementaire allouée au député. Elle entraîne l’interdiction de prendre part aux travaux de l’Assemblée et de reparaître dans le Palais de l’Assemblée jusqu’à l’expiration du quinzième jour de séance qui suit celui où la peine a été prononcée. »
L’histoire de sa réélection ne s’arrête pas là. En effet, 17 ministres devenus députés ont participé au vote. Or elle a remporté le suffrage avec seulement 13 voix d’avance. Sans la participation des 17 ministres, elle aurait perdu.
Le problème est que la constitution interdit d’être à la fois député ET ministre.
D’aucuns ont crié au loup arguant que leur participation était illégale. Mais que nenni, je vous rappelle que bien qu’occupant toujours des postes de ministres, bien que continuant à travailler au ministère et signant des ordonnances, ils étaient ministres « démissionnaires », et n’étaient donc pas à la fois ministres et députés. CQFD. L’histoire ne dit pas si certains avaient la double paye. En revanche des politiques ont la double nationalité.
La réélection de Mme Braun au perchoir est donc totalement légale quand bien même les Français venaient de rejeter la politique du gouvernement de M. Macron coup sur coup, aux européennes et aux législatives.
Nomination du nouveau Premier ministre, mais pas trop vite, avec la complicité des médias
Le Président a donc mis 51 jours après la démission de l’ancien Premier ministre pour en nommer un nouveau29. Ne vous en offusquez pas, notre Constitution le lui permet.
Pendant cette période inédite, les médias ont affublé les ministres encore en exercice du terme « ministres démissionnaires », nullement prévu par les textes.
Encore plus abracadabrantesque, nous avons eu droit à 51 jours de discussions médiatiques pour essayer de déterminer quel Premier ministre serait préférable. Il devenait naturel et même logique d’envisager de nommer un ministre qui ne serait pas issu du groupe parlementaire ayant le plus de députés. Garder l’ancien 1er ministre pouvait même s’envisager, après tout pourquoi pas, la Constitution l’autorise.
L’usage veut que lorsque le parti présidentiel perd les élections on rentre alors en période dite de cohabitation. La cohabitation c’est quand le Président est d’un camp et le Premier ministre issu de l’opposition arrivée en tête.
Ici M. Macron en a décidé autrement comme la Constitution lui en donne le droit. Ce qui devait être une cohabitation ne sera qu’un simple remaniement entre amis.
Le Premier ministre Michel Barnier ainsi nommé par le Président est issu de la droite LR, parti qui a obtenu 5,41 % des suffrages et 39 sièges, versus 142 sièges pour le RN ou 178 pour le NFP.
Ceci est totalement légal,
Voyez-vous ce qu’est devenue la « parole souveraine » des Français ?
Le Premier ministre qui va diriger la France est issu d’un parti choisi par 3 % des inscrits.
« La nomination d’un ministre issu du parti arrivé en tête des élections eût provoqué une instabilité », peut-être, mais une instabilité crée par qui ?
Ceci confirme que les Français ont le droit de voter, mais uniquement s’ils votent « bien ». Comme durant le Covid où quelques fois les députés ont « mal » voté, par exemple en censurant de la dictature. Qu’à cela ne tienne un nouveau vote était organisé à deux heures du matin pour voter « bien ».
Parlons un peu du petit Michel « nouveau venu » dans la politique avec ses 73 ans et élu député pour la première fois30 il y a 46 ans.
C’est un ancien Commissaire européen qui a plaidé pour la Constitution européenne, le traité de Lisbonne, négocié (contre) le Brexit, favorable à l’Armée européenne et à la vaccination obligatoire pour tous contre le Covid. Un grand démocrate et patriote s’il en est.
Synthèse de sa carrière politique et de ses liens avec l’industrie pharmaceutique aux laboratoires Mérieux :
« Voici une synthèse globale des liens entre Michel Barnier et le groupe Mérieux, ainsi que ses responsabilités politiques entre 2006 et 2020 :
2006 : Nommé vice-président de Mérieux Alliance31.
2007-2009 : Ministre de l’Agriculture et de la Pêche en France.
2010-2014 : Commissaire européen au Marché intérieur et aux Services.
2015 : Rejoint le conseil d’administration de Mérieux NutriSciences.
2016-2020 : Négociateur en chef pour le Brexit.
Janvier 2020 : Intègre le conseil de la Fondation Mérieux.
Août 2020 : Démissionne de la Fondation pour éviter un conflit d’intérêts.
Cela montre ses rôles mêlant sphères politique et privée durant cette période32. »
« Biomérieux33 : parmi les plus fortes hausses du SBF 120 à la mi-séance du jeudi 5 septembre 2024 », jour de nomination du 1er ministre. L’action est passée de 101,10 € le 4 septembre à 107,90 € le 5 à 11 h puis 109 € le 9 septembre34.
Notons aussi le discours de passation de pouvoir de Attal qui ne raconte pas ce qu’il a fait de merveilleux pour la France et les Français comme 1er ministre, mais qui donne à Barnier la liste des travaux à mener. Le « voici ce que j’ai fait » est ainsi devenu « voici ce que vous avez à faire » ce qui en dit long sur la fonction de Premier ministre dans notre ripoublique.
La suite encore plus jouissive ?
N’étant pas dans le secret des dieux (des démons, devrais-je écrire), ne sachant pas, qui, décide, je ne peux qu’écouter les bruits de couloir et faire de la prospective.
Pour autant certaines affirmations sont étayées.
Le Président Macron :
- Se sait supérieur.
- Pense avoir un destin (pour l’instant c’est celui de destructeur).
- Aime le pouvoir et ne veut pas le lâcher.
Trois mandats, dictateur démocrate à vie ?
C’est un secret de polichinelle que d’affirmer qu’il voudrait un troisième mandat, mais la Constitution semble le lui interdire.
Il y aurait bien la solution de placer une potiche pendant cinq ans, s’arranger pour qu’il foire tout s’il est dans le camp adverse ou réussir s’il est dans son camp puis revenir ensuite, mais cela ne ressemble pas au personnage qui désire rester le porteur de lumière.
Que dit l’article 6 de la constitution35 ?
« Le Président de la République est élu pour cinq ans au suffrage universel direct.
Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs. »
Fin de la discussion ? Bien sûr que non, il nous faut lire ce qui est écrit et peser chaque mot.
Ici nous devons nous pencher sur :
- Le mot « mandats ». Un mandat correspond à 5 ans. Si le Président ne va pas au bout de son deuxième mandat (par exemple en démissionnant) c’est qu’il n’en a effectué qu’un seul. Il pourrait donc se présenter non pas pour un troisième mandat, mais pour un deuxième, car il n’en aurait réalisé qu’un seul. Il serait possible de s’appuyer sur la décision du Conseil d’État36 du 25 octobre 2022.
« Avis relatif aux conditions de cumul dans le temps du mandat de président de la Polynésie française ». M Fritch voulait briguer un troisième mandat. Ayant repris en cours de route le mandat de Gaston Flosse, son premier mandat n’avait duré que 4 ans. Le Conseil d’État a rendu un avis favorable à l’exécution d’un troisième mandat du président Édouard Fritch.
- « consécutifs » Le sens de l’adjectif est limpide : « Qui se suit dans le temps37 » c’est-à-dire sans interruption. Si le Président ne va pas au bout de son deuxième mandat, cela signifie qu’il ne sera plus Président. Durant cette période la Constitution veut que le Président du Sénat prenne le relais. L’article 7 de la constitution38 précise :
- « En cas de vacance de la Présidence de la République pour quelque cause que ce soit, ou d’empêchement constaté par le Conseil Constitutionnel saisi par le Gouvernement et statuant à la majorité absolue de ses membres, les fonctions du Président de la République, à l’exception de celles prévues aux articles 11 et 12 ci-dessous, sont provisoirement exercées par le Président du Sénat. »
De fait, quand bien même on nommerait « mandat », un mandat incomplet de moins de 5 ans (ce qui semble contraire aux textes), il n’y aurait pas continuité entre les deux premiers mandats et le troisième, ce qui est autorisé par la Constitution.
Ces deux mots « mandats » et « consécutifs » autorisent le Président de la République à démissionner puis se représenter pour un deuxième mandat complet ou un troisième mandat non consécutif en toute légalité. Un Président qui démissionnerait tous les 4 ans 11 mois et 30 jours pourrait se représenter à vie et garder son poste « démocratiquement » en cas de réélection.
N’ayez crainte, dans sa grande indépendance le Conseil constitutionnel ainsi que les constitutionnalistes de plateau ne manqueraient pas de souligner la légalité de l’opération si elle était voulue par M. Macron. D’autant plus que la personnalité politique qui s’y opposerait serait accusée de lâcheté et d’être un mauvais joueur.
« Tenez-vous ce discours parce que vous êtes un fervent défenseur de la Constitution ou avez-vous peur que je ne vous batte une fois de plus ? »
Le peuple suivra, parce qu’il suit toujours, ne vous en déplaise.
Machiavel ?
À moins de faire de Macron le dernier des crétins, ce qui serait une erreur tactique, c’est la seule hypothèse qui tienne la route.
- Avec son impopularité il eût été débile de dissoudre l’Assemblée en espérant récupérer sa majorité.
- Il eût été débile de choisir un 1er ministre qui va être détesté des vrais députés macronistes (naïfs), du Nouveau Front Populaire et du Rassemblement National. D’autant plus que ces derniers sont dans l’obligation de faire foirer ce gouvernement pour se présenter en sauveurs aux prochaines présidentielles. Inversement Macron avait intérêt à nommer un Premier ministre NFP ou RN pour lui mettre des bâtons dans les roues et le griller pour l’avenir.
- Au lieu de cela il a choisi un Premier ministre « ami » qui en toute logique ne pourra pas gouverner, car sans majorité.
Le fait est qu’il aurait pu terminer son mandat tranquillement en faisant un minimum de réformes. En provoquant la dissolution et en choisissant un Premier ministre qui n’aura pas de majorité, il fait le choix du chaos. Et devant le chaos, que fait un « grand » chef d’État ?
Il démissionne !
Ou il choisit de basculer dans la dictature franche et massive avec des lois martiales !
Dans les deux cas, il ouvre la porte à sa présence pour les prochaines années. Comme à son habitude il sera le pompier pyromane, le destructeur sauveur de la situation.
Conclusion ?
Tout ceci s’apparente aux jeux du cirque. Une pièce de théâtre, un jeu de chaises musicales qui fait croire que « le peuple est souverain ».
La Cinquième République est une dictature recouverte d’un vernis démocratique. Tout n’est qu’illusion, tel le Canada Dry, ça a la couleur de la démocratie, le goût de la démocratie, mais cela n’en est pas. N’importe quel pays non ami qui oserait avoir de telles institutions serait qualifié de dictature par les mêmes moutons qui s’offusquent lorsque l’on ose affubler la France du terme.
J’imagine que celles et ceux qui ne savent pas lire, qui croient vivre en démocratie doivent avoir un peu de mal à déglutir ou à s’asseoir tant leur fondement doit être douloureux ces jours-ci.
Mais non, je plaisante, pour les prochaines élections n’oubliez pas : « voter est un geste civique ! »
Merci
Alain Tortosa39
8 septembre 2024
https://7milliards.fr/tortosa20240908-france-institutions-democratie.pdf
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