Guerre en Ukraine : Macron doit répondre du sang ukrainien et russe !

[Source : autochtonisme.com]

Par Antonin Campana

L’accord dit de Minsk II a été signé le 11 février 2015 par l’Ukraine, la France, l’Allemagne et la Russie sous l’égide de l’OSCE après l’échec du « protocole de Minsk » (05 septembre 2014). Les pourparlers Minsk II étaient destinés, comme le protocole de Minsk, à faire respecter un cessez-le-feu dans la région du Donbass.

Minsk II se décline en 13 points dont :

  • Un cessez-le-feu immédiat
  • Le retrait des armes lourdes
  • L’exercice d’une autonomie locale dans les régions de Donetsk et de Lougansk
  • Le soutien de l’Etat ukrainien au développement socio-économique des régions de Donetsk et de Lougansk
  • Le droit à l’autodétermination linguistique des régions de Donetsk et de Lougansk

Aspect important : la France et l’Allemagne ont un rôle particulier :

« Ce sont ces deux pays qui – au nom de l’Union européenne – sont les interlocuteurs, médiateurs, force de proposition, à l’égard de la Russie et de l’Ukraine sur la gestion de la crise et le suivi de l’application des accords. Ce sont ces deux pays qui, avec l’appui de la mission de l’OSCE sur place, évaluent et communiquent à leurs 27 partenaires les informations sur la situation à l’Est de l’Ukraine et les évolutions de l’application des accords de Minsk ».

(Sénat, Rapport d’information n° 572)

Le rôle de la France, et d’Emmanuel Macron depuis 2017, est donc de garantir avec l’Allemagne l’application des accords de Minsk. Macron, puisqu’il est question de lui dans cet article, a-t-il joué ce rôle de médiateur ou a-t-il laissé la situation pourrir et se dégrader ? Porte-t-il une responsabilité dans les évènements actuels ?

Tout d’abord, les accords de Minsk ont-ils été appliqués ?

À l’évidence non. Citons des sources incontestables : 

En mai 2018, le Conseil de sécurité de l’ONU relève plus de 100 000 violations des accords de Minsk depuis le début de l’année, avec utilisation d’armes lourdes interdites. La Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques relève, qu’en raison des pilonnages, des familles vivent toujours dans des caves et que plus de 100 000 enfants étudient dans des classes dont les fenêtres sont renforcées par des sacs de sable. Elle réclame le respect des accords de Minsk.

En février 2019, le Conseil de sécurité de l’ONU se réunit une nouvelle fois. L’OSCE enregistre déjà plus de 1000 violations du cessez-le-feu sur l’année, avec de nombreuses victimes. La Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires précise que 3.5 millions de personnes ont besoin de protection et que les infrastructures sont toujours détruites. Elle appelle le Gouvernement ukrainien à améliorer les passages aux points de contrôle et à adopter un cadre national pour le déminage. Le représentant russe pointe les responsabilités des « pseudo-garants », dit-il, des accords de Minsk.

En février 2020, le Conseil de sécurité de l’ONU se réunit de nouveau à propos de l’Ukraine. Le président en exercice de l’OSCE définit la situation comme « apocalyptique ».

Donc, on le voit, les accords de Minsk n’ont jamais été appliqués. A qui la faute ?

Concédons qu’il est difficile de savoir qui rompt le cessez-le-feu à un moment donné, d’autant qu’en huit ans le cessez-le-feu n’a jamais été vraiment respecté. Cela pourrait se discuter, mais admettons que les torts sont partagés sur les tirs et l’utilisation d’armes lourdes. Mais pour le reste ?

Par les accords de Minsk, l’Ukraine s’était engagée à accorder l’autonomie aux régions de Donetsk Lougansk et à dialoguer avec leurs autorités locales notamment pour conclure des accords en matière économique, sociale et culturelle. Or non seulement cela n’a pas été fait, mais l’Ukraine a ouvertement organisé le blocus économique du Donbass tout en refusant tout dialogue avec les représentants de cette région. Une loi du 18 janvier 2018, dit « loi sur la réintégration du Donbass », lève toutes les ambigüités et empêche toute contestation de ce qui précède.

Cette loi voté par Kiev rend caduc les accords de Minsk (qu’elle ne mentionne jamais) et aurait du faire réagir les « pseudo-garants » français et allemand de ces accords. La loi mentionne en effet que le Donbass est un « territoire temporairement occupé » et que ceux qui participent à son administration sont pénalement responsables des violations de la législation ukrainienne en vigueur. Autrement dit, l’Ukraine définit comme des traîtres les représentants du Donbass avec lesquelles elle s’était pourtant engagée à dialoguer. A partir de là, l’application des accords en question est impossible. Minsk II est unilatéralement brisé. On peut tergiverser, acceptons-le par principe, sur le responsable effectif d’un cessez-le-feu rompu, mais pas sur les responsabilités d’un accord brisé lorsque cette rupture est de facto inscrite dans une loi votée par un Parlement.

Qu’a fait Macron, le pseudo-garant des accords de Minsk, le « médiateur », la « force de proposition » ?

Rien !

Mais il y a plus flagrant encore !

Minsk II prévoient l’autodétermination linguistique des régions de Donetsk et de Lougansk. Kiev, rappelons-le, a signé cette disposition. Cela était crucial car les problèmes linguistiques sont à l’origine de la sécession du Donbass à qui l’Ukraine, après le coup d’Etat de 2014, entendait imposer la langue ukrainienne.

La loi de 2012 sur la politique linguistique de l’Etat donnait à la langue russe un statut de « langue régionale », ce qui en faisait quasiment une langue officielle de l’Etat. En 2015, cette loi s’applique toujours.

La « loi sur la langue », entrée en vigueur en juillet 2019, interdit l’usage du russe dans les administrations nationales et locales (y compris donc au Donbass), dans les entreprises, la magistrature, les institutions, les forces armées, etc. L’enseignement de la « langue officielle » devient obligatoire dans les écoles. Quid de « l’autodétermination linguistique » ? Quid des accords de Minsk ? A l’évidence, ils sont à nouveau bafoués par l’Ukraine ! De facto, ils sont devenus inapplicables.

Qu’a fait alors Macron, le pseudo-garant des accords de Minsk, le « médiateur », la « force de proposition » ?

Rien !

Donc, en résumé : nous avons une situation « apocalyptique » dans le Donbass, nous avons des accords de paix, nous avons des dispositions législatives ukrainiennes qui empêchent l’application de ces accords, et nous avons un « médiateur » et une « force de proposition » qui ne voit rien et ne fait rien, si ce n’est accuser la Russie. Pourquoi ?

Pour le comprendre, il suffit de se reporter aux documents que nous avons cités.

Le rapport du Sénat, par exemple, nous apprend que, lors du Conseil des « Affaires étrangères » de l’UE du 16 mars 2016, il a été décidé que la levée des sanctions à l’égard de la Russie dépendrait de la « mise en œuvre de l’accord de Minsk » : « Toute levée des sanctions reste donc tributaire de l’application intégrale des accords de Minsk » (souligné par le rapport). Mais comment intégralement appliquer des accords contraires à la loi d’une des parties signataires ?  

Les Russes ne sont pas dupes. Lors de la réunion du Conseil de Sécurité de février 2019, le représentant russe demande :

« Après les Accords de Stockholm sur la situation au Yémen, le Conseil a appelé les belligérants à s’assoir à la table des négociations et à lancer un processus politique. Pourquoi ne lancez-vous pas le même appel à Kiev ? ».

 Et il répond :

« En fait vous êtes d’accord avec la position de Kiev. Ce n’est pas un conflit civil mais une guerre avec la Russie ».

Voilà en effet la seule explication plausible : pousser la Russie à la guerre !

Macron a donc, avec Merkel, une responsabilité écrasante dans la guerre actuelle. Il aurait pu, à plusieurs reprises, mettre l’Ukraine devant ses responsabilités, au besoin en alertant le Conseil de sécurité des Nations-unies. Il ne l’a pas fait, préférant laisser la situation se dégrader, à seule fin que l’UE et les Etats-Unis puissent continuer à sanctionner la Russie, jusqu’à la guerre. Macron savait que la politique d’une Ukraine inféodée à l’Etat profond états-unien était incompatible avec le respect des accords de Minsk. Il en avait les preuves objectives, indiscutables, inscrites dans les lois ukrainiennes. Il a laissé pourrir la situation, il a laissé mourir des gens ! A cause de lui, le conflit a perduré alors qu’il avait les moyens de l’arrêter. Des milliers de personnes sont mortes, des enfants ont été mutilés, des vieillards ont été obligés de traverser des champs de mines pour percevoir une pension qu’on allait leur refuser, des familles ont vécu dans la misère, terrées dans des caves, ainsi que le promettait d’ailleurs le président ukrainien Porochenko. Macron savait tout cela, mais le dénoncer ne faisait pas partie de ses intérêts. Ce n’était pas dans le « plan » !

Ne laissons pas cet homme, Macron, se poser en chevalier blanc de la paix. Il doit au contraire répondre du sang ukrainien et russe.

Et souhaitons aussi qu’il n’ait pas, demain, à répondre de celui des Français.