Coronavirus. Docteur Michel Pareti : « Si on compare aux victimes du tabac, aux morts sur la route, aux accidents domestiques, nous ne sommes pas dans une crise sanitaire énorme »

[Source : Breizh-Info]

Michel Pareti est médecin généraliste,
diplômé de la faculté de médecine de Paris. Médecin libéral, il a aussi
été pendant 22 ans attaché hospitalier dans un service de médecine
interne et d’infectiologie.

« J’ai connu l’arrivée de l’épidémie de SIDA, nous étions en première ligne. Et j’ai vu des erreurs faites à l’époque, à l’arrivée de cette épidémie, notamment celles des centres de transfusion, qui ont coûté la vie à beaucoup d’hémophiles ».

Le docteur Pareti porte particulière attention aux avis du Professeur François Bricaire, infectiologue et ancien chef du service Maladies infectieuses à la Pitié-Salpêtrière qui lui semblent les plus conformes à la réalité scientifique.

Des interventions qui visent à contrer
la vague de panique actuellement liée au coronavirus en France et dans
le monde, et à faire relativiser la situation, du point de vue du virus
uniquement (pas des conséquences économiques, sociales, et du désastre
au sein de l’hôpital, donc le virus n’est qu’un élément déclencheur,
mais qui couvait depuis des décennies).

Nous avons interrogé Michel Pareti, qui a bien voulu répondre à nos questions et proposer son analyse de la situation.

Breizh-info.com : Quel regard portez-vous sur la pandémie actuelle ?

Dr Michel Pareti : Je
suis à la retraite depuis 3 ans, je n’exerce plus sauf en suivi de
quelques proches, car il y a de moins en moins de médecins en exercice
en France et je suis donc bien sollicité.

J’ai connu de nombreuses épidémies
grippales (grippes, SRAS, H1N1…) avec à chaque fois des drames humains.
Des patients sont morts, parfois des enfants. D’autres ont été sauvés
avec des techniques poussées. J’ai vécu ce que mes confrères
réanimateurs décrivent aujourd’hui avec des services de réanimation déjà
saturés.

N’oublions pas que les grippes
saisonnières infectent entre 3 et 6 millions de personnes tous les ans
avec des milliers de morts (2000 à 8000 ces dernières années, 30 000 en
1968). Et ce dans une indifférence quasi générale de la population et
des médias.

Pourtant, si la majorité des décès porte
sur des patients âgés ou polypathologiques, d’autres sont parfois
constatés chez des jeunes enfants, des femmes enceintes ou des patients
obèses. Mais la grippe n’effraie pas et les Français se vaccinent peu
faute d’obligation.

C’est pourquoi, je pense que les mesures
prises actuellement paraissent disproportionnées. Prises dès
connaissance de l’apparition du Covid-19 en Chine, elles auraient été
plus cohérentes. Maintenant je crains qu’il soit un peu tard. Elles vont
faire perdurer l’épidémie en ralentissant le développement de
l’immunité collective, sans apporter de bénéfices importants sur le
nombre de décès global.

Par ailleurs, elles vont entrainer une crise économique et surtout sociale sans précédent.

Breizh-info.com : En tant que médecin, vous le connaissiez de longue date ce coronavirus ?

Dr Michel Pareti : Les
Coronavirus sont connus depuis longtemps. Certains sont responsables de
simples rhumes, d’autres comme le Covid-19 sont plus agressifs. La
contagiosité du Covid-19 est forte et les complications graves sont
surtout pulmonaires.

La crainte est de voir ce virus muter et
entrainer plus de complications graves. A priori ce n’est pas le cas
actuellement. Il parait stable. Son indice de mortalité, le plus fiable,
est probablement celui des pays, qui ont fait des dépistages
systématiques sur leur population et non uniquement sur les malades ou
personnes en contact avec des patients infectés.

Ainsi, en Corée du Sud, il est à 0,8%.
Certes, cela est supérieur à la Grippe (0,1 à 0,2%), mais cela est loin
d’être comparable à d’autres virus (60% pour l’Ebola par exemple). Même
si cela est difficile, il nous faut donc relativiser. Le tabac fait
c’est 70 000 morts par an, les accidents domestiques 20 000, la route
pas loin de 4000 morts par an.

Breizh-info.com : Alors
qu’est-ce qui explique cet emballement, dans le monde entier ? Quelle
est la raison ? On est donc dans l’irrationnel le plus total ? 

Dr Michel Pareti : Il y
a un manque de courage politique aujourd’hui, dans tous les pays. Dans
un premier temps, on n’ose pas prendre les mesures qui s’imposent. On a
peur de se voir reprocher ensuite que ce n’était pas si grave… Puis
quand un Etat commence à prendre des mesures coercitives, les autres,
par contagion, ont peur d’être à la traine. Il y a l’effet de panique,
et tout le monde veut commencer à confiner. Les Anglais avaient commencé
une tentative d’immunité collective, mais ils commencent à reculer, par
peur qu’on leur reproche après, si l’épidémie était plus grave que
prévu, de ne pas avoir pris les mesures nécessaires.

Breizh-info.com : Certains scientifiques et laboratoires évoquent un médicament à base de Chloroquine, qu’en dites-vous ?

Dr Michel Pareti : La
Chloroquine est efficace in vitro. Le professeur Raoult à Marseille a
entamé un essai de traitement in vivo. Mais, des doses 5 fois
supérieures à celles données dans la prévention du paludisme seraient
nécessaires (500mg par jour pendant 10 jours).

Les effets secondaires sont fréquents
même à 100mg par jour et les interactions médicamenteuses sont
nombreuses. En mettant en balance les bénéfices et les risques, ce
traitement s’il s’avérait efficace serait plutôt à réserver aux cas les
plus graves.

D’autres médicaments sont en étude, en particulier des antiviraux. En particulier, le Favipiravir, médicament japonais, parait prometteur. Mais il est tératogène (anomalie chez le foetus) dans les essais sur les animaux. Des  antihypertenseurs (IRA2) utilisés dans le traitement de l’hypertension ou de l’insuffisance cardiaque seraient une possibilité thérapeutique.  Mais je crains que ces médicaments ne puissent être utilisés qu’en fin d’épidémie.

Breizh-info.com : On a parlé
d’une forme d’irrationalité collective en France. Mais pour le système
finalement, n’est-ce pas une aubaine que cette pandémie qui pourrait
faire sauter le système de santé, et donc permettre aux dirigeants de
s’abriter derrière le coronavirus pour se dédouaner d’un massacre débuté
il y a plusieurs décennies déjà ?

Dr Michel Pareti : Tout à fait.
Quand j’entends mes collègues réanimateurs dire qu’on est saturé, je
suis étonné. Car tous les ans, les services sont saturés. Quand j’étais à
l’hôpital, aux Urgences, nous étions toujours saturés. Je vais même
peut-être un peu plus loin : ce n’est même pas pour masquer quelque
chose, je pense que pour ceux qui dirigent, la Santé n’est pas un sujet
préoccupant. J’ai toujours entendu que soigner un malade coûtait cher,
que la Sécurité sociale représentait 35 % du PIB, que les patients
dépensaient trop pour des anti douleurs… J’ai toujours entendu ce
discours.

Il y a toujours eu plus une approche
comptable de la Santé. On a bricolé avec. Les hôpitaux se plaignent,
mais pour les généralistes c’est encore pire. Quand on voit les
honoraires des médecins généralistes aujourd’hui, c’est une honte. On
parlait des 35 h pour les salariés, mais les médecins en font 70, ils
n’ont pas le droit aux arrêts maladie, ils payent des cotisations
énormes, on leur donne des codifications d’actes compliquées, des
conditions d’accessibilité à leur cabinet improbables…

On a tout fait pour désertifier le tissu
médical français. J’ai toujours entendu les gens de la Sécurité
sociale, sortis de l’ENA ou d’écoles comptables, venir nous expliquer
que la Santé coûtait trop cher en France, que l’on consommait trop de
soin. En Économie générale, quand on veut diminuer la consommation, il
faut diminuer l’offre, et c’est ce qu’ils ont fait.

Aujourd’hui, ça se paye.

Quand j’étais attaché hospitalier, déjà à
l’époque, « je quémandais des lits » partout dans les services. Nous
étions à la fin des années 90.

J’ai démissionné de l’hôpital, car je
n’en pouvais plus de me battre, non pas contre la maladie, mais contre
les coupes sombres. On n’avait pas de quoi payer à des externes un
otoscope alors qu’on avait changé deux fois de suite la décoration de la
salle d’attente.

À l’hôpital, l’administration a pris le
pouvoir. C’est devenu un empire, avec des emplois administratifs pour
des tas de gens sortant des grandes écoles qui seraient au chômage
sinon….A l’APHP de Paris, le personnel compte une très grande majorité
d’administratifs, ou d’encadrants, et une minorité de soignants.
Le problème est là aussi.

Breizh-info.com : Quelles conséquences voyez-vous, une fois la pandémie dissipée ?

Dr Michel Pareti : Je ne connais
rien en économie. L’argent déboursé aujourd’hui, il faudra le récupérer
d’une façon ou d’une autre. Des entreprises vont fermer. La crise
sociale sera plus grave que la crise sanitaire. Il y aura des drames
sociaux, économiques, familiaux…

Madame Lagarde annonce un total de 1050 milliards débloqués par l’Union européenne…

Quand l’épidémie sera terminée, et que
les gens seront rassurés, ils ne comprendront pas qu’on ne puisse pas
leur accorder de l’argent quand ils en demandent (certaines corporations
comme les Agriculteurs notamment) alors qu’on en accorde aux États en
faillite… il va y avoir des Gilets jaunes puissance 1000.

Pour conclure sur ce virus, j’essaie
d’être plutôt rassurant même si l’épidémie est grave. Cette maladie
reste bénigne pour une immense majorité de patients qui en guérissent
sans séquelle.

Cette épidémie met en évidence les erreurs commises dans notre
système sanitaire. Depuis des décennies on nous a dit qu’il y avait trop
de lits dans les hôpitaux, trop de médecins en France, que les Français
se soignaient trop, que la Sécurité sociale représentait 35% du PIB
français. On a donc supprimer des lits dans les hôpitaux, établi un
Numérus clausus pour les études médicales, écrasé les médecins libéraux
sous des charges asphyxiantes, sous des formalités administratives
complexes, des contraintes d’accessibilité des locaux, le tout
constituant une véritable dissuasion à l’exercice médical.

J’écoutais récemment le Professeur
Maffesoli qui a parfaitement résumé la situation, en nous expliquant que
nous avions quitté la modernité, c’est à dire la raison et l’esprit de
synthèse scientifique, pour la post modernité. On fait dans l’affectif,
dans le mythe, on ne raisonne plus, il n y a plus de débat…

Propos recueillis par YV

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